Dominique Bussillet, Octave Mirbeau, Un Enfant Du Bessin

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, We coco" Up epniamnt Ep ‘Bessin Le Bessin, c'est ce « pays» herbager entre mer et terre, qui entoure la belle cité de Bayeux, donne le beurre et la créme d’signy, dorlote ses pommiers, préserve la tapisserie de la reine Mathilde... et a vu naitre un des grands écrivains du xa siecle : Octave Mirbeau. Des premiers mois tréviérois Blottie au milien des prairies et des marais, a quinze kilomiétres de Bayeux, proche de a mer, au centre ddu Bessin, Tréviéres fut la premiére étape de la ve d'Octave Mirheau. Cesten effet dans cete ville ‘quOctave Marie Henri Mirheau voit le jour un 16 févrie 1848. Une preuve iréfutable : la plague qui commémore cette naissance, apposée sur sa maison natal le 11 septembre 1992, le jour du comice agricole. Et sila presse parisienne est présente ee jour-l.& Trévies, est, un peu, pour saluer la miémoire de Mirbeau, et beaucoup pour écouter et applaudir Sacha Guitry, commanditaire de la dite plague ; Sacha Guiry connaissait et apprécait Octave Mirbeau, que Ton peut dailleurs voir figurer dans un film de Guitry de 1915: « Ceux de chez nous ‘e beau film, muet dans sa premigre version, 1 auquel Sacha Guitryaajouté des commentaires dans une version de 1939, avait pour but de mon trer comment travallaient les grands artistes francais de cette époque tristement en guerre. On peut voir évoluer Auguste Renoir, Edgar Degas, Anatole France, Claude Monet, Auguste Rodin, Camille | Saint Sans, Octave sirbeau...Sacha Guitrypeaufnera encore son film, pour une version finale, en 1952, dans laquelle il commente depuis son bureau les seénestournées trente-sept ans auparavant Mais revenons & Octave Mirbeau, dont le pére, Ladislas-Francois Mirbeau, est offcier de santé et habite industrieuse petite ile de Trévires, en cette année 1848, Trois vies (aneiennement les routes de Paris, Cherbourg et Sait-Lé) et trois riviéres (la Tortonne, !Aure, et YEsque) justfient amplement Te nom de cette bourgade prospire, ot foires et marchésattient toute une population ru rale, Octave ne nat pas li par hasard : son grand-pére maternel, Mare-Antoine Dubosq, a son étude notarial dans la commune, dont ila ailleurs été le La Normandie des artistes rmaire pendant es années 1826 a 1831. C'est dans la vaste maison &fagade blanche de son grand-pare qu’ Oe- tave voit lejour, et va vivre les dix-huit premiers mois desajeune existence, avant que es parents ne décident de partir pour Rémalard, dans Orne, en septembre 1849, Cest Ii que réside son grand-pére paternel, qui cest.-notaire. On passe ainsi d'une étude notarial une autre Une jeunesse, tourmentée, d’une révolution, celle de 1848, a une guerre, celle de 1870 Pendant ses premiéresannées, sans douteles plusinsouciantes, sinon les plus heureuses, i arrive qu'Octave aecompagne son pire dans ses tournées médicales, qui devaientressembler & celles que déerit Gustave Flaubert dans Madame Bovary ; le personnage de Charles Bovary est, lui aussi, oficier de sant tun grade institué par une loi de 'An XI, et qui sera supprim ‘en 1892, En attendant la disparition de cette profession hono- rable et rurale, puisgu'on ne peut l'exercer que dans le dépar- tement oi Ton a obtent Tautorisation, c'est aux e6tés de son pére Ladislas-Frangois, dans une cartiole tirée par un cheval ‘debonnaire, qu'Octave parcourt Ia eampagne normande, et pend Ihabitude d'observer ses contemporains. Puis viennent les années cole, qui ne luilaisseront que des souvenirs de peur, d'angoisse, de soutrances le petit gargon avide d'espace et de liberté est sans défense par rapport a Tenfermement, aux frustrations, ‘aux interdiction. Iva d’abord chez les soeurs de Education chrétienne ; puis, la rentrée de 1859, Ortave devient pensionnaire chev les Jésuites, au collége Saint-Frangois-Xavier de Vannes. Iy passe quatre années enter, ql ne pourra oublier et quil décrta, mais bien plus tard, en 1890, dans Sébastien Roch En 1864, continue ses études dans une pension de Rennes, et en 1865 il prépare son bacealauréat& Caen, {la pension Delangl. I! Tui faut trois tentatives pour obtenir son baccalauréat... Sans doute lest pas ts pressé de rentrer dans la vie qui lai est proposée : il est insert la faculté de droit de Paris, et travail, ou putt stennuie, dans Tétude de Maitre Robbe, notaie Rémalard. Cest done de 1867 a 1870 qu'il se mor- fond dans ses études de droit, entre Paris et Rémalard. Le droit n'aura pas plus de sucets avec Ini qu'avec Flaubert. 1870 voit a mort de sa mére, mais aussi la guerre. 1 est mo bilisé dans Ia garde mobile de TOrne, (i est lieutenant au 49° régiment de mobiles) et cette guerre lui inspira, plus tard, dans Le Calvaire, des phrases terrible, dont cette vocation s« Ramassis de soldatserrants, de détachements sans chefs, de volontaires vagabonds, mal équipés, mal nourris, - ef, le plus souvent, pas nourris du tout, - sans cohésion, sans discipline, ‘’chacun nesongeant qu’ soi, et poussésparun sentiment unique implacable, de féroce égoisme, celui-i coi d'un bonnet de police, celuil,la tte entorillée dun foulard, dautresvétus de antalons artlleurs et de vestes de tringlots, nous allions par Tes chemins, déguenillés, harassés, farouches.» Octave Mirbeau n'a que vingt-deux ans, et i est déja dure rent marqué par Ia violence et la cupidité de a socité dans laquelle il vit, sans pouvoir, t sans vouloir, sy adapter. Un écrivain infatigable Apris la guerre de 1870, il fra un peu tous les métiers:seeré taire dun députe, journalist chroniqueur, chef de cabinet du piréfet de TAriége... la liste est longue ! Mais en fait, vee une patience acharnée il se prépare & son métier déerivain ; tout Tui est bon: il publie sous des pseudonymes, et travaille méme comme « négre», produisant nouvelles, contes et romans, so vent dinspiration pluto... frivole; tout en gagnant sa ve, i affine sa plume, simtéresse& divers sujets et mileux. Surtout, i Gerit pour plusieurs joumaux : Le Gaulois, Le Figaro, as 1879 spl L'événement en 1885, oil publie Les Chroniques du diable ; pus encore la Revue des deux Mondes en 1895 4 2) Le dossie En 1887, il épouse Alice Régnault, avee laquelle il eonnaitra une union chaotique, mais somme toute du- rable, I découvre, dans et par ses lectures, Kropotkine, le socialisme, se rallie tVanarchisme en 1890, devient dreyfusard en 1897, soutient Emile Zola en 1898, ainsi ailleurs qui Oscar Wilde et Rodin. ‘Cest qu'avec le temps, Mirbeau est devenuiun homme de conviction, qui pone se défi ainsi: «Je ous, mai, aveualément, et toujours, avec le pauvre meee s contrelerice, ave ssommé contre assommeut ave le malade conte Eales In maladie, avec lave contre la mor.» Tl et de tus les combats, d- fendant inlassablement coux qui lui semblent accablés injustement, que ‘ce soit Ravachol, Maxime Gorki, Oscar Wilde, Félix Fénéon, Rémy de Gourmont, Camille Clandel, Dreyfus, Zola, et bien d'autres, n’hésitant pas aller jusque au duel, s'il Testime nécessaire. 1 Tutte aussi bien en paroles ‘qu'en éerits, aussi bien sur le plan politique que sur le plan artistique et culture, et il devient un critique autant redouté que reconm ; il prendra par exemple la défense de Van Gogh, de Monet, ou encore de Debussy. Romaneier, conteur, journaliste, pamphlétaire, au- teur dramatique, critique d'art, Mirbeau est tout cela, ‘et bien plus encore il est aussi un ami Gclairé et juste, ainsi qu'en témoigne sa correspondance avec Barbey aAurevilly, Monet, Rodin, Pissarro, Maeterlinek, Zola, Tolsto, et tant d'autres qui le croisérent en ce dixcneuviéme siécle finissant et en ce vingtiéme sitele commencant, Das 1913, Mirbeau snquidte de la montée des périls; ‘lest un pacifiste onvaincu, et la guerre de 1914 le bou- leverse et le désespére. Il ne eesse de plader pour une réconciliation franco-allemande. Il ne verra pas de cette triste guerre, puisqu'il meurt le 16 février 1917. Ihondaton hivernole, 6 Tries. Une ceuvre puissante Son eure est multiple elctique; elle va deTarticle au roman, en passant par le odie a nouvelle, ou la ite de tite. ‘Un rcucl de cones imitulé Letres de ma chaumiére, est sa premie publication, en 1885. 1y dei a mnistr,Finseniblité ou la ruse du paysan normand face la dificalté et la dureé des lations humaine. Ses autres cones, pabliés dans divers journa, ot été repris en 1990 sous lettre de Contes Cruel Suivront trois mans, en grande partie atobiographiqes = Le Caloire, en 1886, qu eat la vie douloareuse de Jean Mint, face sa passion sans limite et sans expoirpourJiliette Rous. Abbé Jules, en 1888, qui met en scene, dans un petit village da Perehe, un prétre brisé par et Foppresson, tant de tise que del soviet Sébastien Roch, en 1890, qul déri « e meurtred'uneme denfant » par un suite sueteur et vole. ces trois romans, i éert des ceuvres que on pourrait qualifier de« déstructurées» en equ'elles ne touffement el, en 1893, non publié du vivant de Mirbeau, récit en abyme sur la tragédie de artiste. des supplices, en 1899, mélange Wartices et de récits, qui dénonce le colonialisme, démysttie une sorte de caricature grossissante de la condition humaine. rune femme de chambre, en 1900, écrit sous la forme d'un journal, pour dénoncer les turp endela bourgeoisie. dun neurasthénique, en 1901, qui reprend et aecole une cinquantaine de contes. 11907, récit d'un voyage en automobile en Belgique, Hollande et Allemagne. 3, sorte de faree qui met en seéne un chien justicier. 3s oublier les pidees de théétre que Mirbeau. se décide tardivement & Gerire, ear il pensait jt fait son temps, et n'état pas le meilleur veetcur pour « éveiller es consciences ». La plus, inement Les affaires sont les affaires, qui met en seéne un parvenu sans serupules, Isidore Pour ce qui désirent en savor plus sur Octave Mirbea il exist tne excllente biograpie,co-crite par Pierre Michelet Jean-Frangois Nive: Octave Afirbeau, ITmprécateur cu cour fle. ‘Asuivre également, es « Cahiers Octave Mirbens», dont le miméro 16 vient de paraite. ‘A noter, ax éitions ce Arbre Vengeur, la publication d'un texte de 1899: Les mémoires de mon arnt 8 parsitreen 2010 Les vngt-et-an jours un neurasthénique,

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