Karol Cytrowski, L'Abbé Jules D'octave Mirbeau en Tant Qu'exemple de L'influence de Fiodor Dostoïevski Sur Le Roman Français de La 2e Moitié Du XIXe Siècle
Lucía Campanella, "Le Journal D'une Femme de Chambre" Et "Puertas Adentro" de Florencio Sánchez: Rencontre Interocéanique de Deux Écrivains Anarchisants
Quelqu'un me racontait, hier, cect
Apres la représentation, av Thédtre-Libre, du
Canard sauvage, Je Aéfuut Mector Pessard —
Jui pardonne! — se trovvant dans un état de
gereuse prostration. Se sentent du vide dans
fe cerveau, du vide sovs les pieds, du vide partout,
dut s‘aflaler sur une chaise, dans un couloir
x88 d'une hospitalidre ouvreuse. Les mains eroi-
sées sur Je bec de sa canne, appuyé sur ses mains,
et la téte roulant sur le menton, il regarda s'éco
ler Je public comme un mauvais réve. Il n’avait
meme plus Ia force de penser que le spectacle
Stait fini et qu’il fallait s'en aller. I ne reconnais-
sait plusses amis, il nereconnaissait plus Sarcey,
il ne se reconnaissait plus soi-méme, et il ne
savait plus oi il était, ni s'il était récllement
quelque part; et dans quel affreux symbole,
ironistes génies, de ricanants fantémes hyper
pauérisés avaient précipité son intellect, si solide-
ment éduqué pourtant par Mossieu Thiers et par
as mistapes | 447
Mossicu Scribe. Il ne disait rien, ne protestait
pas contre la mauvaise plaisanterie dont il était
|}, victime, ne se plaignait de rien, mais ses yous
plus ronds que de coutume, plus distendus, expri-
maient 1a stupear douloureuse qu'on voit aux
prenpent riea, Un ami, asses informé en physic
jogie ye oir qu'vae si violente ineompré
heusion peat amener unc congestion eérébral
mortelle, cui pitié de M. Hector Pessard et
Yemmena, en fiaere, @abord, puis souper.
Hans le fiaere, Vinfortune eritique ne egssait de
chemar de
oi ulule-t-il comme un
canard!... Et pourg
hibov?... Et de quelles mers extravagantes vient~
il donc?... De quels marais inconnus?... De quels
fiords préhistoriques?... Pourquoi aussi faut-il
que ce canard ait des pattes de salamandre et des
ailes de chauve-souris?.
Durant le souper, un peu remis, il faisait des
plaisanteries moins fantastiques et plus pari-
siennes :
—Voyons!... Ce n'est pas tout ga!... Ce canard
est-il aux petits pois?.... aux navets?... ux
oranges’... Estil a trois becs?... Ah! sidu moins,
il était a trois becs, avec de la musique, rigolote
et sautillante
Lami tenta de lui expliquer ce que c'était que148 GENS De TuEAree
le Canard sauvage, commenta Yeuvre acte par
acte, personaage par personnage. Ce fut en vain,
Du moment que ce canard n’était ni aux petits
pois, nia trois heos, M. Hector Pessard ne « you
lait sien savoir s, A six} fe vid
in, lorsqu'l
estavrant, I
gue encore
pls éminenis eontreres de ron 1, il
tique de N. Dennery, génie clair, sy Henrick
Ibsen, ténébrenx symboliete et incom préheasible
Lapon
qve n'esiteil pas dit mort prématurée
eausée sans doute par las in
hal
ssantes crises eéré~
4 cardicques que lui valurent si souvent
ss mprres de Shakespeare, dIsben et de Meter.
nek, ne lui avait épargné Ja douleur profe
nelle dassister, Vantre soir, au théitre de PEuvre,
4 Ja seprésentation, si glorieuse, de Peer Gynt!
Helas! il eot dit de Peer Gynt ce qu’ont dit la
plupart de ses confréres survivants : brouillards
du Nord, ours polaire, génie lativ, obscurité
scandinave... Car il ne faut pas croire que
M. Hector Pessard soit aussi mort qu'on le pense.
I vit, revit et sévit dans ame de presque tous
nos grands et admirables critiques. Mais s'ils
demeurent aussi incompréhensifs que l'était
M. Hector Pessard, ils lui sont supéricurs en
ceci qu'ils s'affirment plus intolérants. M. Hector
Pessard avait de Phonnéteté dans l'incompr:
sion, et de Ia conscience dans Vignorance;
1s pistapes | 449)
tends qu'il admettait parfaitement que d'autres
comprissent [i oit il ne comprenait rien, et qu’ils
fussent émus par des beautés qui le laissaient
froid vt sceptique. En quoi ses confréres different
de leur compréhension une exi
nec universelle, un dogme dinfaiibitite
code Peethétique rigoureuy quill ne faut
1, sous peine d’éxve un snob, va imh
les eyiliqnes ne vienent pas av
théitre pour comprendre et étre émus: ils. y
viennent pour voir des décors, des petites femmes
nus sur la seéne, des fommes drdlement enc
peautées dans ly salle, des-petites femmes dont
on pince, sacerdotalement, Ie derrire, dans les
couloirs encombrés et Ja pénombre des baignoires.
Et ils y viennent aussi pour-entendre des calem
ours, des couplets polissons, des psychologic
la Dumas, des émotions en simili et des bi
nités en toc, et de VAugier, et du Sardou, et du
Dennery, ot du Gondinet toujours — ah! le Gon-
dinct si loste, si pimpant, sisatiriste! —etles anec-
dotes de Sarcey, et les éruditions de Feguets, et
les mots de tout le ravade ot le talent de personne.
Cela ne demande pas une grande dépense intellee-
tuelle et favorise les digestions d’un honnéte
homme. Tout ce quiles dérange de leurs petites
affaires, tout ce qui les distrait d’une belle cuisse,
d'une belle croupe et d'un beau téton, tout co
quiles force a penser, voila Vennemi. Entre Peer
Gynt, par exemple, et une baliverne quelconqueFSS
450 onxs og muting
aux Nouveautés, leur choix n’hésite pas : ils vont
aux Nonveantés. C'est ce qu’ils appellent fair Jes
brumes da Nord
pour se tremper Tame ans
claire ot chands rayons du genie latin, Jeny genie
Hs ses seuls, si petits, si
evant co quills volent et entendent
jour ks premiere fois! Alors, ils erient, ils er
comme ils peuvent, comme les
crient 4
neille, Bormer, Dumas, le génie de le rare, et la
race du génie, pour rester dans Je grand, dans
Yart, sur les hauteurs.
Ave2-v
vs vu des pintedes sur une pelouse?
Elles vont cn troupeau, légeres, gracieuses, un
pen folles, le col mince, infléchi, comme celui
des cy les basques de leurs plumes étalées
et bouffantes, elles vont picorant les insectes et
Jes menues vermines, parmi Therbe mouillée
Soudain, dans une touffe, voici un bracelet d’or,
un collier de perles vives que la belle chitelaine,
‘encourant, égara. Bt les pintades s'arrétent, s’ef-
farent, Tout a'heure, elles ont salué les bouses
de vaches, les erottes de lapins, les petits cadavres
des mulots, comme des amis, comme des choses
de leur connaissance et de leur intimité, Mais
que signifie ce bracelet dont Vor reluit dans
Therbe; qu'est ce collier qui, sous Ia Iumiére, se
auance de tous les tons du rose? Les pintades
Yignorent. Et comme elles l'ignorent, elles ven
urs poxrapes 1 151
concluen quo ce bracelet et ee collier ne peuvent
Bire que des choses terrihles, dangereuses, abo-
minables, auxquelles on ne doit rien comprendre.
Alors, elles
et dont i} faut avoir de V'efiro
Tier, et le col teudu comme une Hee
hérissées, les caroneules rouges de colbre et de
nt, crient
at qui rampe dans Phesbe, ov un épervier qu!
plane dans le ciel, vienne les disperser.
Je n’si jamais assist
pear, elles erfent, ¢
F & un pareil spectacle
sans penser aussitOt aux critiques et a leurs atti-
tudes de houffonne colére, chaque fois qu’ils se
trouvent en présence d'une chose qu'ils ne con
naissent pas et sur laquelle il n'existe point dopi-
nions établies et de jugements tout faits.
Mais cela n’empéche pas les coliiers d'étre de
perles, Jes bracelets d'or ciselé, et les ehefs-
deuvre, pas plus que cela n'empéche les bouses
de rester bouses, les erottes de rester crottes, et
les cadavres de mulots de rester charognes. Ce
quily ad'admirable, dans la critique, c'est qu'elle
est impuissante a rien changer de ce qui est, eta
transformer les colliers en bouses, et en crottes
les bracelets d'or.
Parce qu'il y aura toujours, mon cher Mendes,
des voix comme a votre, pour dominer, meme
unique, les eris des pintades en troupeau, et pour
proclamer, vous, podte et eréateur, Ie triomphe
dc Véternelle Beauté,
Karol Cytrowski, L'Abbé Jules D'octave Mirbeau en Tant Qu'exemple de L'influence de Fiodor Dostoïevski Sur Le Roman Français de La 2e Moitié Du XIXe Siècle
Lucía Campanella, "Le Journal D'une Femme de Chambre" Et "Puertas Adentro" de Florencio Sánchez: Rencontre Interocéanique de Deux Écrivains Anarchisants