retournerait 4 la conception moniste du monde que l'on trouve dans toutes les autres
cultures du monde, comme les cultures asiatiques. « Les 2500 ans qui viennent de
Sécouler ont produit en occident des convictions et des modes de vie jamais vus
ailleurs ~ pensons aux socigtés individualistes, au temps fléché, aux gouvernements
partagés, aux droits de homme etc »... « Le moment présent se dessaisit de la vérité,
de la certitude, du progrés et de Tespoir, de la royauté de l'homme, et de tant d'autres
conceptions ou higrarchies ». Ce qui se passe actuellement serait en fait un retour a
lune conception naturelle de homme qui se pergoit comme un élément d'un grand
tout, avec ses déclinaisons panthéistes, sa vision eyclique du monde avec I'idée de
réincarnation, la négation de la royauté de I'homme sur le monde et les animaux. Ce
retour au paganisme est le cosmos culture! dans lequel nous évoluons aujourd'hui,
Le probléme aujourd'hui n'est plus « Qu'est-ce qui est vrai ? » (pourquoi), mais
« Comment bien vivre ? » (comment). La vérité de la foi qui s'est transformée au
XVII ¢ siécle en vérité des sciences a produit de terribles fanatismes, d'abord
religieux puis séculiers (nazisme et marxisme) dont nos contemporains ne veulent
plus. Les horreurs du dernier sigcle ont fini d'anéantir la passion pour la vérité qui
animait notre culture. Ce bouleversement de perspective peut étre analysé comme le
Passage de la foi (adhésion a une vérité révélée ou 4 une certitude scientifique) a la
sagesse (art de vivre une vie bonne ici et maintenant). Les sagesses sont nées sur tous
es continents et dans toutes les cultures. Elles développent des morales qui cherchent
a répondre A la question fondamentale de la recherche du bonheur (le comment et non.
le pourquoi de existence). Il s'agit donc alors de découvrir ce qui est utile pour la
vie, en particulier a I'égard des désirs qui, bien souvent, nous rendent malheureux.
Vabsence de Dieu ne provoque pas I'écroulement du monde, mais change notre
Perception de la réalité. On passe du vrai au vraisemblable parce que c'est utile au
groupe social (Machiavel) ou a individu ( Hobbes, Descartes). La religion, souvent
assimilée au fanatisme, n'a de sens que si elle est utile a la vie en société et s'efface
devant la morale. Notre culture se tapproche ainsi, selon Chantal Delsol, de la culture
chinoise, qui s'est surtout intéressée au comment et jamais au pourquoi de l'existence.
Dans un livre intitulé « A bout de souffle »", le philosophe Thibault Isabel
décrit ce nouveau paganisme de la fagon suivante, Contrairement aux religions
révélées qui sont « articulées autour de la foi, c’est-a-dire d’une croyance un dre
sumnaturel, par définition distinct du monde, qui aurait créé Punivers ex nihilo »,
«dans Je paganisme, au contraire, c'est émerveillement rituel qui est primordial,
dans la mesure of la foi est absente ». Le probléme est que « lorsqu’on cesse dé
croire a une métaphysique, on cesse aussi inévitablement de eroite & a morale qui en
Stait dérivée, et qui reposait sur elle ; il ne reste alors plus rien, sinon le nihilisme, au
sens d'une absence de valeurs », Mais, selon C. Delsol, le nihilisme n'est qu'une étape
intermédiaire qui ne peut durer. Trés vite la vie en société et le désir d'un bonheur
Personnel supposent Je retour d'une morale, comme nous avons constaté depuis
quelques années aprés le choc de 1968. Mais cette morale est différente. La morale
“* Isabel, A bout de souffle, études et entretins sur Népuisement du monde civilisé, La Méduse 2012
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