Download as pdf
Download as pdf
You are on page 1of 4
3 faire partie an clth of on admet des gens comme Gnovco Manx. LA FOIRE AUX VIRTUOSES Invest arsivé plusiours fois au cour de ces deritzes années Paccompagner des jeunes. yirtuoses (pianistes, vilonistes Gt autre) lauraats des diferente, concours intornationaux. Chacun deux mia semble possider de nombreuses qualité, fauls aucun dour ne mest appara commo un artiste digne Tum itérde particulier, Da edte post y avait toujours un niveau techaique exeuilen; & mainte points de vue et une Certaine assurance précoce dans To. jou et dans Pattitude Shuleale en gens, Pourtant, de telles qualités nfont pas uss mo Clsimuler un ceftain expect négaif commun et approfondiseement rel da texte musical, ce ql se soldat focal modo, par une gertaine uniformite tout d'abord dans 13 Krone doo convresinterprtées et) co qui est plus grave encore — dans Finterprétation méme ‘expos, iy a quelque temps, ces grief & un ami, en diane quiaviant les grands virtuosos des genérations précé dentes ‘yun nous adiairons possedent (00. possédaiet) des fPersonnaltés diverss, autant les jeunes virtuoses dont i et hestion mo arisent en majeure partie dépourrus d'indi- Sifaaltés née, do sorte qu'il es A pono exageré do diro {ion ne saurat quo dificilement les distinguer les uns des Hitres Mon interlocuteur m'accusa do trop de sévéeits en aio Tusant valor quil ext injuste de comparer ces artistes Pam certain dge, arivés&la maturté, & de jeunes musicions dont fa personnel ne peut guere, par défation, tomoigner dune formation de cs genre Diacoord : mon ami eurait tout de méme dd me faire confianco et so rendre compte quun tel argument avait, SGjaotfours esprit. Je puis bien mimaginer que des artistes 458 Le compositeur et son double tels que Cortot, Schnabel, Backhaus, Rubinstein, Ysayo, Keesler, Thibaud, Heifetz, Casals et autres no jousient pas Tage de vingt ans avec la mime maturté que ce fut le cas Gui aurat-eu Poccasion de travallor avec eux au début de « débutents » aujourd'hui) en aurait retiré cette impression dominante d'uniformité et de manque do personnalité veri table. ‘D'allours, To souvenit que Jo garde des debuts de certains artistes plus jeunes que cei que jal nommés plus Haut (par exemple Rudolf Serkin, Dinu Lipatti ou Benedetti Michelangei) me confirme dans’ mes opinions. L& encore, on pourrait me reprocher dene citer que les noms do quelques frtistes particulitrement. éclatants etme faire. remarquer ue de tals talents ene courent pas les rues» & aucun moment fo Vhistoire. Encore une fois, d'accord. Je resto néanmoins onvaineu de co quo les défauts et fiblesses qui mo frappett chez tant de jeunes musiciens d'avjourd’hui ne refletent ftucunement un'manquo de talent. Le probl8me, malheureuse: ment, mo paralt plus grave : il transoende Ta question dos dons personnels et touche & un domaine plus vaste et plus géntral D’ai parlé des lauréats des différents concours internationaux. et c'est fet quo réside Pune des clés de notre probleme. En effet, il est pour ainsi dire impossible, de nos jours, de com mencer une carriére un tant soit peu remarquée sans avoir remporté le promier prix d’un de ces innombrables concours gus tionnent tous les ans un peu partout de par le monde, Concours « Marguerite Long-Jacques Thibaud » & Paris, concours « Wieniawski » et concours « Chopin » & Varsovie, oncours de la « Reine Elisabeth de Belgique », concours «Tehatkovski » en Russie, concours international de Genéve, concours des jeunes chefs d’orchestre de Besancon, de Rome et de Florence, et divers autres concours encore, voila les buts suprémes, les objectifs n° 1 de tout jeune virtuose qui chercho a ¢ peroer ». La plupart de ces concours sont d'une grande difficulté et constituent une épreuve des plus ardues fant am point de vue psychologique que physiologique. En ee sens, deja, ils sont nocifs, car s'il est vrai que le lauréat doit témoigner d'une endurance physique et morale peu commune, lelfort exigé est trop grand; il laisse celui qui @ su le fournir, jusqu’au bout, dans un état d’épuisement, La foire aux virtuoses état dont il so ressent trés pou do tomps aprés lorsqu'l se trouve absorbs parla carvtre qui sofire Alu. est A co moment que commencent les véritables diff cultés, A peine Je concours gagné, le jeune musicien se trouve immédiatement comme aspire par Jes organismes musicanx internationaux (organisations de concerts, associations sym- phoniques et musicales de toutes sortes, tournées, radios, télévisions, compagnies de disques, etc.) et projets aussitdt dana un tourbilln dengagements et de concerts qui dépassent de loin ce & quot un tel musicion s'est trouvé préparé. En autres termes, notre musicien, qui n'a pas encore —- par la force des choses — eu la possibilité de se preparer véritable- ment — tant surle plan artistique que sur eelut de experience urement physique — & une vie de ce genre, so voit obligé, du jour auilendemain, de faire honneur & sa eélébrité soudaine en Se produisan; presque journellement dans des villes diffé- rentes et des eontres musicaux différents du monde entier, TI n'est pas etonnant dés lors de voir s’crouler, parfois trés rapidement, certaines do ces fréles et éphéméres idole, Dépressions nerreuses, aflaissement physique ou moral dont se reldve plus ou moins dfleilement, voila les consSquences frequentes de oxs départs foudroyants. Si méme on réussit, A éviter des catastrophes de ce genre, le résultat n'est pas toujours des plus houreux. ‘out. d’abord, il est impossible de donner Je meilleur de soi-méme a une cadence aussi frénétique; en second. liew (ot cela est presque plus grave encore), est maténellemont impossible de réléchir et de méditer sur son art lorsque 'on méne une vie paraille, sans parler du fit que Yon manque nécessairement de temps pour élargir son ripertoire et, par conséquent, pour enrichit son champ de connaissances et @expérionces' musicales profondes. Il est normal et fatal en quelque sort2 que l'on devienne alors un simple ronage au sein d'une immense machinerio et rien de plus. On so soumet aux exigenoos dune vaste exploitation commercile en se bornant livrer au consommateur ce que atte exploi- tation ainsi que le consommateur exigent et attendent. de Vous, & savoir un certain nombre fort limité d’couvres dites «du répertoire » que V’on n’a jamais ou le temps ni la volonté @approfondir résllement. et que, par conséquent, on joue de Ja maniére Ja plus conventionnello possible, talle qu'on T'a apprise sur « les banes de l'école » (genéralement fort récents encore), en imitant passivement un certain nombre de « trucs » ot de «'tics » dont Pinterprétation courante du « répertoire » 19 trouve bo Le compositeur et son double Un imprésario célabre & qui jo palais récemment dun pianjste qui mravalt produit uno forte impression me demands fornia Fign de Tatte, Quand jl de qui avait environ Seva ¢« Meta, lor, jo-n0 puis tien fae pour lt oar il qqvil nous faut co sont de jeunes phenoménes de vingt ana Gh meinst » Cela peut paratze comme une boutade, et i ot intelligente et sensible) Teatendait un peu comme. celag aéanmoing, une pareile attitude de la part de. quelqu'an decaite machinerio quveat la vie musicale actuelle, comporte nécestairement une bonne part de sincénit. Cette consta tation nous fournit une autre clé du destin do la plupart das Jeunes virtuoses @aujound hut Test évident que Jans un mondo assoi{é q’événemeats sentationnels de toutes sorte, soul Ie « jeune phénomene » peut faire sensation au sein du monde des concerts. ly & Bien entend, quclques exeeptions ¢ tout wabord le puis genérationsprécédenteslorsquil les connalt depuis de longa plus un jeune homme n'est pas une tiche asée méme forsquil Fagit de quelquvun de Ia’ plus grande ‘valeur. Cest ainsh fue le prestigieux pianiste ‘Rudolf Serkin narrivait gue, Paris, til lia fallu'y rovenir plusieurs fois encore avant dy eonquérie Ia place qutl occupait deja en d'autres parties notre globe, La seule exception & la rgle nous a ete fourmie par lo as de Richter qui ft demblés salle comble partout ‘hil ge produist pour la promitre fis, mais faut dite quo wenuo en Occident était précédée d'une publicité elle que atte venuo prit effecivement Vellure de Tévénementsene fationnel par excellence, snusical actuelle i on la compare celle des époques passbes Sans vouloir évoquer In notion du « bon views temps » i est on fait qu'un ertiste autefole avait la possbilite de oe développer et de mirie parce que personne nattendait des miracles de iui Sa reputation se format tout d'abord a Féchelle locale pour eetendre peu a peu seulement et tr La foire auz virtuoses De manitre générale, un artiste, quel que ft son Age, se produisait moins epuvent en pubic que ce nest Ie cas aujour Thu ne ft-ce qu’d cause de la lentour relative des déplace Uno cantatsice célébre a, ily a quelques années, réussi co tour de fore de répéter un opéra lo matin & Paris et de gistror dos dsquos "a Londres ‘dans T'apnis-midi, ot cela Pondant plusiours jours do suite. Un jeune pianiste, fort do laquelle i'a donné des réctals, pour ainsi dire tous Ina jours, dans des villes différentes, souvent fort dstantes entre dlles’Son horaire fut tel quil 6 voyaitobigé certains soi do rester dans Ia salle de toncorts apres le depart du public afin de disposer d'un pitno pour preparer, tant bien que mal fon récital ‘da lendemain quelque pen exceptionncls, ils tendent dp jour en jour A le Aevenir moingt i nest gubre besoin dinsster sus tout ce q de telles activités comportent de risqué et de pernicioux Mais ily @ autre chose encore: un aruste, autrefoi avait la possbilité des former un public. De la sorta in tat pas une ESploe do conmis voyagour musical en train de chereher tt du londemain, mais il remplisait dignement xa fonetion de médiateur entre le compositeur et le publio. Un. dos tris grands chefs Porehestre denotretemps, Hans Knappertshusch, fou ot dirgl pendant de Tongues années presque exclu- vement. dant wna senlo villa, Munich, oi assumait To posto de « Generalmusikdirektor » Ila pt, sins, fairo un Extraordinaire travail en profondour, tant au point do-vuo de aa propre formation qu’au poiat de vue de celle de bon public Un eas do ce genre est & pou prés ineoncevablo do nosjours. (ainsi quo ferent. -Knappertsbusch et autres) doviendrait Public. « Puisqu'l nest pas invité & New York, Tokyo et Dieu sait ot encore, c'est quil y a quelque choss qui ae va pas.» Vola conment ralsonneraient Ia plupart des directeurs Irnprésavios et auditenrs et on aura vite fait do Ini préféret qquelgu'un de plus « glamor sta-dire, tout bonne thont, quelquun qui fait Le compositeur et son double De tout cela il ressort encore une fois que le jeune inter- préte d'aujourd’hui est réduit & une sorte d'esclavage nocif Q'son développement personnel ainsi qu’a celui de la vie musicale. Au public qui lui assure son pain quotidien, le jeune interpréte ne peut que rendre un mauvais service puisquil ui livre, pour la plupart du temps, une marchandise sans qualité réelle, une sorte @ersatz ou de mimique du grand art de Vinterprétation dont il n’arrive, précisément, qua mimer Tes gestes alors qu’il n’est que rarement capable d’en faire vivre esprit. Doit-on, peut-on condamner sans rémission ces jeunes gens, souvent fort doués, presque toujours trés compétents et méme jarfois extrémement intelligents et sonsibles, qui parcourent je monde en y perpétuant cos gestes vides, pour la plopart du temps, de sens musical réel? Ce serait aller un peu vite fen besogne car les contingences actuelles sont telles qu'il n'y ‘a souvent pas d’autro issue que celle que nous avons décrite ici. C'est ainsi que le fait de gagner un concours et de pouvoir Sembarquer, aussitde aprés, dans la voie de la carritre inter- nationale, tout cela constitue, pour la plupart des jeunes virtuoses, une sorte do planche de salut (car nombreux sont ceux qui, n’ayant pas eu la méme chance, vivotent, plus ow moins’ misérablement), une promesse d’avenir tell qu'il faudrait étve un saint ou un étre supérieurement lucide pour avoir le courage de s'y refuse Existe-t-l des remédes? Je n’en sais vraiment rien ot j'ignore aussi s'il est des gens que ce problimo intéresse et préoccupe de nos jours. Tout co que l'on peut dire, c'est que notre vie musicale n’est plus une vie pour la musique. LE SECRET DE LA CALLAS Réflerions sur Vart du chant L'extraotdinaire succts de Maria Menoghini Callas peut apparaitre, & premiére vue, comme un des phénoménes av plon diranges au vein du « mondo des spectacles » de notre temps. Unique en son genre, la réputation de cette prestigieuse cantattice a su franchir completement les limites qui 8 trouvent généralement assignées aux renommées méme les plus prostigiouses des grands artistes de Vart lyrique. Il y en a, bien sOx, qui arrivent provoquer des réactions eithousiastes et méme & déchainer des passions, mais cela se passe toujours & V'intérieur d’un groupe social relativement "rest composé uniquement. d’amateurs @opéra ot de ce que l'on nomme habituellement le bel canto. Le cas de aotre dica est tout & fait différont. Son nom est aujourd'hui familier méme & coux qui n'ont aucun contact réel avec Fopéra ni avee l'art du chant en général. Il suflit de lire la « grande presse » ou les «illustrés » pour Otre compl’- tement au courant du moindre déplacement do la Callas, de ses scandales, de ses habitudes et méme des fluctuations de son poids. Privildge réservé jusqu’a présent aux seules vedettes de cinéma, la vie privée, Vexistence méme de la Callas appar- tient en quolque sorte & tout le monde, & tous ceux, en tout cas, qui savent lire et parmi lesquels — il est curieux de le constater —une petite minorité soulement a vraiment entendu cette voix qui est & lorigine de oe succés exceptionnel. Dans Te méme ordre d'idées, les disques de la Callas sont les seuls disques de musique dite sériouse dont les chiffres de vente puissent rivaliser avee ceux des grandes vodottes de varisté alors que, quelle que soit la valour (ou la réputation) des plus grands artistes de concert ou d’opéra, leurs enregistre- ments sont fort loin d’atteindre des résultats semblables.

You might also like