Réussir Son Business Plan

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FONCTIONS ae | \d3Y1N3.1 gestion/finance comptabilité 4 Reussir son Business plan Méthodes, outils et astuces Michel SION Avec la collaboration de David BRAULT © 4° édition DUNOD Maquette intérieure : Catherine Combier et Alain Paccoud Couverture : Didier Thirion / Graphir design Photos couverture : Didier Thirion / Graphir design ‘Mise en pages : Nord Compo Ue, picrarne gol Gyo. toons emctperart apis, ne née ue emicion. Son bid ef boise be ds cho de bres ce Sele Sear mee inom o} 0 gen nr o tepetzente pour Fovene de er, escola cb ere (Braker daledonciss (BANGER) ‘wove eae nhc os Fadaon theo re Iedonct ja ol mee tee dblppames mold Nous opplon done qe ute thobcelloge Tepredien, pote cv foe, 12 Code de roi rele AP ie presente poblccton sh tole doT® ule 1992 nec .EROMDPLE| inlet son cusaion ce en eet epresémen' la phooco- [TUELELWRE) oveur de son écr cv do fied vioge calc ons onto Cente foncis expleion do Sotin des ojos dit Or cate proique dct de-copie (CFC, 20, we des ast gine done ee Gblsements Grands Auguis, 75006 Por © Dunod, Paris, 2016 8 © Dunod, Paris, 2007, 2010, 2013 pour les éditions précédentes ISBN 978-2-10-074844.0 le Code de la propriété intellectuelle n'outorisant, aux termes de laricle L. 122.5, 2° et 3° oJ, d'une part, que les « copies ov reproductions srctement téservées & usage privé du copiste et non destinées & une uiilistion collective » «1, dave part, que les analyses et las courescitaions dens un but c’exemple et dilution, « toute représentation ov repreduction intégrale ov portelle Fite sons le consentement de Vauieur ov de ses oyants droit ov ayants couse est illite » or. L. 1224). Cotte représentalion ou reproduction, por quelque procédé que ce soil, consive ‘ait done une conttefacon sanctionnée por les articles L 3352 et suivants do Code de la propriét intellecvele. ae Table des matiéres Introduction ___Chapitre 1 = Définir le business plan Dans quelles circonstances réalise-t-on un business plan ? Quels en sont les destinataires ? Le business plan projet portant sur un projet interne a l'entreprise Le business plan financier portant sur la totalité de lentreprise A quoi sert le business plan ? Que contient le business plan ? Pourquoi est-il important de présenter différents scénarios ? Qui réalise le business plan ? Les termes proches Le plan stratégique 4 moyen terme Le modale économique (ou business model) L’étude d’opportunité (ou business case) Le budget __Chapitre 2 = Mener une analyse stratégique L’analyse externe identification de grands facteurs d’évolution auxquels rattacher le projet U’analyse de la dynamique du secteur d’activité La menace de nouveaux entrants Le pouvoir de négociation des clients et des fournisseurs La menace de produits ou de procédés de substitution v 10 W 1 12 12 13 13 15 16 16 19 25 26 27 = U’analyse interne La segmentation Le cycle de vie du produit ou du secteur La courbe d’expérience La matrice Attraits/Atouts Table des matieres La matrice Emoff ___ Chapitre 3 » Réaliser une analyse financiére Vanalyse financiére, une démarche structurée Analyser l'activité Analyser la profitabi Les deux présentations du compte de résultat La capacité d’autofinancement (CAF) Identifier les causes de variation du résultat Analyser les capitaux employés et la structure financiére La présentation du bilan fonctionnel Anticiper les crises de trésorerie Chapitre 4 = Présenter son projet a Définir la mission de l'entreprise Les objectifs stratégiques et opérationnels sur la durée du plan Décrire le modéle économique La chaine de valeur Les activités principales Les activités de soutien Utilité de la notion de chaine de valeur Présenter ses plans d'action __ Chapitre 5 m= Batir des prévisions d’activité Les études marketing permettant d’évaluer la taille du marché Les études de marché Les panels Les études quantitatives et qualitatives wl 2 2 31 35 36 41 45 46 47 47 a7 50 51 54 54 58 63 64 65 66 68 68 69 70 72 75 76 76 78 78 all yt 2 Les sources d'informations permettant d’évaluer la taille du marché 78 Les méthodes pour batir des prévisions de ventes Premiére méthode : partir du marché d’ensemble et extrapoler Deuxitme méthode : partir de l’entreprise et extrapoler Troisitme méthode : partir du coat de l'investissement et de l’exigence de rentabilité Les prévisions de charges et de taux de marge ____ Chapitre 6 m= Les paramétres financiers du projet Qu'est-ce qu’investir ? Les paramétres financiers du projet La rentabilité s'évalue a partir de flux de trésorerie Le flux de trésorerie d’investissement (FTI) Les revenus de I’activité : le flux de trésorerie d’exploitation (FTE) La durée de vie de linvestissement La valeur résiduelle du projet Evaluer le besoin en fonds de roulement normatif La courbe de trésorerie du projet La notion de valeur temps de ‘argent Chapitre 7 m Les critéres financiers de sélection d'investissement Le délai de récupération de l'investissement initial (ou pay-back period) Le délai de récupération a partir des flux actualisés Le creux de trésorerie maximum La valeur actualisée nette (VAN) Le taux de rendement interne (TRI) Utilisation du critére 81 81 83 84 84 89 90 92 92 95 97 99 100 100 104 105 aan 112 15 116 116 122 123 Les critéres de la VAN et du TRI peuvent-ils donner des résultats contradictoires ? vil 124 vag a indice de profitabilité Table des matieres Situer le projet dans le contexte de entreprise Le ratio de rentabilité économique Synthese des critéres de sélection d’investissement Calcul de rentabilité d’investissement d'un projet marchand Calcul de rentabilité d’investissement d'un projet non marchand (productivité) _ Chapitre 8 m Choisir le bon taux d’actualisation Le coat moyen pondéré des capitaux (CMPC) Le rendement attendu par les actionnaires La notion de taux équivalent certain Des taux d’actualisation normatif et différenciés Un taux normatif Des taux différenciés Quel taux dactualisation retenir dans un environnement a hyperinflation ? ___— Chapitre 9 m Elaborer la prévision financiére Elaborer le cadre de la prévision financigre a MLT Uenchainement incontournable des états financiers prévisionnels Le plan de financement prévisionnel : le tableau des flux Construire la prévision financiére L’échéancier de remboursement des emprunts aMLT Les ratios clés pour évaluer le projet et son financement La rotation de I'actif immobilisé Les ratios de structure Le degré de couverture du BER par le FR Le ratio de couverture des frais financiers vill 125 128 129 130 133 135 141 142 143, 146 146 146 146 147 153 154 154 155 158 158 162 162 162 165 165 oy Choisir les financements Ueffet de levier financier Déterminer I’effet de levier maximal Sélectionner les financements ___Chapitre 10 m= Evaluer l’entreprise par les flux de trésorerie prévisionnels La rentabilité d’un projet & durée indéfinie Horizon de prévision explicite et implicite Détermination du flux normatif et de la valeur finale Le schéma de la rente décroissante Lévaluation d'entreprise par la méthode des discounted cash flows (DCF) Présentation de la méthode La valeur d’entreprise La valeur des capitaux propres Evaluer la rentabilité financiére ou le TRI actionnaire __Chapitre 11 = Evaluer les risques Identifier les principaux risques Perspectives du marché Risque technologique Risques liés aux approvisionnements Dépendance commerciale Risque client Risque de change Risque réglementaire Créer un modéle sur tableur La fonction Excel « recherchev » L/analyse absorption des charges fixes Lanalyse de sensibilité La méthode des scénarios 167 167 170 171 175 177 177 178 184 185 185 186 187 190 193 194 194 194 194 194 195 195 195 196 198 199 203 204 = Lanalyse de réversibilité Utilisation de la méthode Table des matieres Les options réelles La définition d’une option réelle Les différentes catégories d’options réelles La valorisation des options réelles Chapitre 12 m Présenter son business plan Une proposition de plan Présentation du projet Pourquoi disent ils non ? Analyse stratégique Prévisions d’activité Plans d’action résumés Prévision financiére Analyse des risques Equipe de management Erreur dans le choix de 'investisseur Rédaction et présentation a oral Les cing raisons qui influencent le plus la décision d'investir Un exemple de business plan rédigé : le projet de restauration rapide bio de Catherine, « Midi Bio » Chapitre 13 m Trucs et astuces pour réussir son business plan Cing questions fondamentales a se poser en tant que débutants Combien de temps consacrer a votre BP ? Quelle approche choisir : top down ou bottom up ? Quel outil utiliser 7 Doit-on aborder les sujets qui fachent ? 205 206 210 211 211 213 215 218 222 223 223 223 223 223 224 224 224 224 225 225 233 234 235 236 238 240 oe Comment faire lorsque l’équipe projet ne parvient pas a se mettre d’accord sur les chiffres ? ‘Comment gagner la confiance des destinataires du business plan ? Synthse pour les directeurs financiers et contrdleurs de gestion Les principaux défauts rencontrés dans les business plans Trois conseils avant la présentation Trois questions a se poser en tant qu’investisseurs Qui a réalisé le business plan ? Les frais généraux et de structure sont-ils appropriés ? 244 245 251 251 253 254 254 254 Les nouvelles embauches sont-elles documentées ? 255 __ Annexe 1 = Calcul de rentabilité et prévision financiére d'un projet de création d'une entreprise Evaluation de la rentabilité économique Hypothéses d’activité et d’investissement Détermination du flux normatif et de la valeur finale Détermination de la rentabi (VAN et TRI projet) Prévision financiére Hypotheses relatives au financement Compte de résultat et analyse des marges Emprunts a LT Plan de financement Bilans Ratios Détermination de la rentabilité financiére (TRI actionnaire) économique xl 257 258 258 259 260 261 261 262 263 264 265 266 266 \ NN — Table des matiéres Annexe 2 m Analyse d’un projet d’investissement 4 l'international avec risque de change 269 Mener une analyse de sensibilité avec la table de données deux variables 269 Xi jon non autorisée est un délit, © Dunod - Toute reprodu Introduction es entreprises recourent de plus en plus a la technique du business plan pour concevoir un projet, évaluer sa rentabilité et ses risques et finalement le « vendre ». Les business plans s'utilisent dans des contextes variés. Ils servent présenter et faire adopter par un comité d'investissement des projets au sein de I’entreprise ou a négocier un contrat commercial particuligrement important. Les business plans portant sur Vensemble d’une entreprise sont nécessaires dans le cadre d’une cession ou d’une augmentation de capital (document de levée de capitaux) vu pour faire valider une stratégie et des prévisions financiéres par les actionnaires. Cette technique concerne de nombreux acteurs au sein de lentreprise, qui ont le concevoir, a participer a son élaboration ou a décider de valider des projets : responsables de projet, ingénieurs, responsables de marketing et commerciaux, responsables de centre de profit, contréleurs de gestion, directeurs financiers, dirigeants d'entreprise. Elle doit également étre maitrisée par les apporteurs de capitaux destinataires des business plans : banquiers, investisseurs, chevaliers blancs, qui doivent apprendre a ’analyser avec un regard critique. Le business plan s’élabore le plus souvent dans un contexte concurrentiel, interme ou exteme a Ventreprise. Les apporteurs de capitaux doivent arbitrer entre plusieurs projets. Les comités d’investissement au sein des entreprises s‘efforcent d’optimiser un budget d'investissement insuffisant pour financer ensemble des projets. De la méme facon, les personnes portant un projet sfefforcent de le vendre au mieux, en faisant jouer la concurrence entre investisseurs. Le business plan est un document synthétique de présentation d’un projet. Les calculs de rentabilité occupent une place importante car les investissements sont le plus souvent réalisés dans une optique de rentabilité. Ce theme occupe une place importante de ce livre. II convient de comprendre la signification des critéres de rentabilité les plus couramment utilisés : délai de récupération, ROI, valeur actualisée nette, taux interne de rentabilité, et de pouvoir arbitrer entre eux. Lorsque le business plan porte sur la totalité d’une entreprise, il convient de distinguer la rentabilité économique du projet de la rentabilité financiére apportée aux actionnaires. Ces calculs de rentabilité a ne constituent toutefois qu’un aboutissement. II convient préalablement de convaincre de la pertinence d’un choix stratégique, du caractére réaliste de prévisions, de démontrer la maitrise des aspects opérationnels et des risques. Lobjectif de ce livre est de vous procurer une compréhension de ce que doit étre le business plan, de vous apporter des outils pratiques d’analyse stratégique et financiers, des régles de présentation et des astuces permettant de faire la différence. Introduction >> Compléments en ligne Tout au long de ce livre, vous serez dirigé(e) vers les différentes feuilles du fichier Excel « Modéle financier », disponible a cette adresse : www.dunod.com/contenus-complementaires/9782100745715 Ces feuilles constituent une trame directement utilisable de calcul de renta- bilité et prévision financiére. Vous trouverez par ailleurs un fichier Excel reprenant les tables de I'annexe 2. a e Définir le business plan Executive summary | >> Le business plan, ou plan d'affaires’, est le document de synthése de présentation d'un projet d’investissement ou de l’évolution a moyen terme d'une entreprise. Les investissements font de plus en plus l'objet d’une étude préalable détaillée, aussi bien au sein des entreprises que dans les banques et auprés des investisseurs. L'importance des montants en jeu et les aléas, tout comme Vexigence accrue de rentabilité de la part des actionnaires, expliquent le recours croissant a cette technique. >> Ce chapitre vise a identifier les différentes catégories de business plan, a indiquer les circonstances dans lesquelles il est réalisé, a préciser son contenu. >> Nous répondrons aux questions suivantes : dans quelles circonstances un business plan est-il nécessaire, quelles sont les différentes catégories de business plan, a quoi sert il ? Que contient-il ? Quels sont les termes proches ? 1 Pian dafaires est habituelement retenu pour traduire le terme business plan. Le nom anglais étant largement plus courant que son équivalent francais, nous avons choisi de utiliser tout au long de ce livre. NO 1. Définir le business plan ___—Dans quelles circonstances réalise-t-on un business plan ? Quels en sont les destinataires ? Le tableau 1.1 retrace les principales circonstances dans lesquelles un business plan est nécessaire en les classant selon deux critéres. Tableau 1.1 - Synthése des circonstances nécessitant I’élaboration d'un business plan A utilisation interne A utilisation externe Business plan Validation des orientations Levée de capitaux : financier stratégiques et des plans capital, emprunt, subvention. portant dlaction vis-a-vis de 'action- __ Valorisation de Ventreprise sur ensemble naire ou de la société mere. par la méthode des DCF de lentreprise dans le cadre d'une acquisition cession ou d'une augmentation de capital Retournement : estimer les chances de survie et conditions de redressement d'une entreprise en difficulté, Business plan Faire adopter un projet interne | Réponse a appel d’offres projet a lentreprise, marchand ou non | générant des flux de trésorerie marchand dans le cadre d'une pluriannuels (partenariats publics- procédure de sélection privé, BTP, développement de nouveaux produits spécifiques). Calculer la rentabilité d'un inves- 2 tissement pour son client. Le business plan projet portant sur un projet interne a I’entreprise lest utilisé dans les contextes suivants : * Pour l’adoption du projet : en entreprise, les projets sont généra- lement sélectionnés dans le cadre d'une procédure formalisée. Le comité d’investissement interne a ’entreprise a le pouvoir de valider, rejeter ou demander la révision des projets qui lui sont soumis. Les projets sont évalués en fonction de leur cohérence avec les priori- tés stratégiques de ’entreprise, de leur rentabilité, de leur degré de risque, de leurs incidences sociales, environnementales... Les pro- jets marchands portent sur la création ou le développement de nou- veaux produits, ils contribuent directement a augmenter le chiffre © Dunod - Toute reproduction non autorisée est un di d'affaires. Les projets non marchands visent quant a eux a améliorer Vefficacité interne de l’entreprise (investissements de productivité, de rationalisation) [exemple | ‘Au cours d'une visite dans un salon professionnel, le directeur général d'une PME tombe en arrét devant une machine a découpe laser dernier cri. De profil ingénieur et ayant le goat pour les belles machines, il souhaite 'acquérir & tout prix. Son directeur financier parvient difficilement a le dissuader par une étude de rentabilité. Compte tenu du coat d’acquisition et du volume d’activité prévu, cet investissement ne pourra pas étre rentabilisé. Dans cet exemple, les calculs de rentabilité ont permis dapporter de la rationalité économique dans le choix diinvestissement. Du seul point de vue financier, I'entreprise a un objectif général de rentabilité Une procédure de sélection incluant des évaluations de rentabilité prévisionnelle est indispensable pour arbitrer entre les différents projets et optimiser lutilisa- tion du budget d’investissement par nature limité, * Pour négocier des contrats commerciaux qui générent des flux de trésorerie pluriannuels (réponse a appel d’offres) : certains contrats commerciaux requiérent un investissement initial significatif du four- nisseur (développement d’outils spécifiques, frais de recherche, créa- tion d’infrastructures...) et générent des revenus sur plusieurs années. Le fournisseur négocie le prix de vente de sa prestation a partir du cotit de l'investissement et de son exigence de rentabilité (ou taux de rentabilité interne). _ Un équipementier automobile négocie un contrat commercial pour la concep- tion et la fabrication d'une nouvelle pice dans le cadre d’un contrat pluriannuel. II doit préalablement investir dans des codts de développement et ‘acquisition d'un matériel spécifique. Le business plan lui sert, & partir de son investissement initial, des achats prévisionnels de son client et de son exigence de rentabilité, a négocier le prix de vente. * Parfois, le fournisseur de biens d’équipement participe au business plan de son client pour V’aider a démontrer la rentabilité de son projet vis-a-vis de sa hiérarchie. a + Dans le cadre des partenariats publics privés (PPP) : il s'agit d’un cas particulier de la situation précédente. Une ordonnance de 2005 permet a Etat francais de confier a une entreprise privée les diffé- rentes phases d’un projet (conception, investissement, exploitation) par un marché public unique. Ces projets peuvent porter sur des hopi- taux, prisons, infrastructures... Dans le cadre de ce partenariat public privé (PPP), I'Etat peut rémunérer le prestataire privé exclusivement sous la forme d’un loyer versé au cours de la période d’exploitation. I1revient donc a l’entreprise privée d’investir et de financer le projet. Le business plan est un outil indispensable pour quantifier 'investis- sement, trouver les financements nécessaires et négocier la rémunéra- tion des prestations avec le client public. 1. Définir le business plan Le business plan financier portant sur la totalité de I’entreprise I est utilisé dans les contextes suivants : * Pour la levée de capitaux. lentreprise peut avoir un fort besoin en capital a différentes étapes de sa vie : lors de sa création, d’une phase de fort développement ou en sortie de crise pour reconstituer des capitaux amputés par des pertes. Le business plan a pour objectif de justifier les besoins financiers, de démontrer aux investisseurs en capital la rentabilité de leur apport et aux banquiers, la capacité de remboursement de I’entreprise. Pour une augmentation de capital, il est nécessaire d’évaluer lentreprise, + Pour évaluer une entreprise par les flux de trésorerie futurs (DCF) dans le cadre d’une acquisition, cession, prise de participation. L’évaluation d’entreprise par les flux de trésorerie futurs actualisés (méthode des discounted cash flows ou DCF) constitue aujourd'hui la méthode Ja plus utilisée. Elle constitue d’ailleurs la seule méthode utilisable pour une entreprise en création ou en fort développement car elle s‘appuie sur son futur. L’élaboration d’un business plan est alors indissociable de utilisation de cette méthode. II justifie les hypotheses d’investissement, d’activité, de marge, de flux de trésore- rie retenues pour valoriser l’entreprise. L’acquéreur achéte en réalité un business plan dans lequel il croit. D/autres circonstances nécessitent la réalisation d’un business plan : * Certains actifs incorporels sont également valorisés a partir des flux de trésorerie futurs. Ainsi, la valeur d’une marque est souvent estimée a ve jon non autorisée est un délit, © Dunod - Toute reprodu partir de flux de trésorerie futurs actualisés représentant le différentiel de marge obtenu grace a cette marque par rapport 4 un produit géné- rique de méme nature ; * Les normes comptables IFRS requigrent la réalisation de business plan par centres de profit pour déterminer la nécessité de déprécier certains actifs. La norme IAS 36 prévoit de répartir les actifs en unités généra- trices de trésorerie et de calculer les cash flows prévisionnels de chacune de ces unités. Lorsque la somme des flux de trésorerie prévisionnels actualisés d'une unité est inférieure a la valeur comptable de ses actifs, une dépréciation des actifs de I'unité doit alors étre comptabilisée. Le business plan formalise les hypothéses d’activité et d’investissement nécessaires au calcul des flux prévisionnels. Nous détaillons ce proces- sus en fin d’ouvrage (voir annexe). A quoi sert le business plan ? Nous pouvons identifier quatre grandes finalités du business plan. * Vendre son projet. Il sert avant tout a convaincre de I'intérét d’un projet pour le faire adopter ou financer. Nous allons voir dans la suite du chapitre les 8 clés sur lesquels le porteur du projet doit absolument convaincre. + Préalablement, la trame du business plan aide le porteur du projet le concevoir : ce dernier doit apporter des réponses convaincantes sur chacun des thémes devant figurer dans le business plan. Il est trés utile de prévoir au sein de l’entreprise une trame et un modéle financier type pour assister les responsables de projet (voir trame de présenta- tion au chapitre 12). * Il ouvre également le dialogue entre le responsable du projet et les décideurs. La communication autour du business plan n’est pas uni- latérale. Aprés avoir étudié le projet, les destinataires du business plan peuvent, grace a leur expérience, réagir, proposer a leur tour leur propre vision, suggérer d'autres alternatives. * Ilconstitue enfin un outil de pilotage du projet tout au long de la vie de celui-ci. Parfois, une fois le projet adopté, le business plan est rangé dans un tiroir, sans que les réalisations soient comparées aux prévisions dans le déroulement du projet. Le suivi annuel permet tout d’abord de déceler des erreurs ou biais systématiques commis dans Vélaboration des projets anté- ricurs et dy remédier pour les projets futurs. Il incite ainsi les responsables de projet 4 une certaine prudence dans I’élaboration de leurs prévisions. a Il sert ensuite et surtout a piloter le projet tout au long de sa vie. Certains plans d’actions seront définis dans le business plan d'origine : décider du lancement d’une nouvelle tranche d’investissement en cas de succés, ou, au contraire, déclencher un plan de repli en cas d’échec... La per- formance d'un projet marchand est fréquemment évaluée a partir de la comptabilité analytique. Ainsi, une fois un projet marchand validé, une entreprise convertit les prévisions de revenus en objectifs budgétaires. Les réalisations sont ensuite comparées a ces objectifs. La comptabilité ana- lytique ne permet toutefois pas toujours de mesurer la performance du projet, notamment pour les projets non marchands. Il convient alors de constituer un tableau de bord de suivi du projet reprenant des indicateurs clés de succes : mesure de gains de productivité, amélioration d'un taux de service, augmentation de la satisfaction client... Ces indicateurs clés de succés permettent a leur tour d’évaluer la rentabilité du projet (voir le pilotage du projet au chapitre 13). 1. Définir le business plan _— Que contient le business plan ? Rappelons que le business plan sert a faire adopter un projet. I doit done contenir tout ce qui est nécessaire pour convaincre de son intérét vis-i-vis de ses destinataires. Les responsables de projet croient souvent que réaliser un business jonnels afin de réaliser un plan se limite 4 quantifier les revenus prévi calcul de rentabilité d’investissement. Cela s'explique par le fait qu’ils ne 2 commencent parfois a intervenir sur le projet qu’aprés validation (tout au moins implicite) de l'intérét stratégique du projet pour Ventreprise. Certes, I’évaluation de la rentabilité représente souvent une partie z cruciale du business plan, compte tenu de I’exigence de rentabilité des actionnaires. Elle n’en constitue toutefois que l'aboutissement. Pour les projets marchands, il convient tout d’abord de convaincre de 'intérét d'un marché et de la pertinence du positionnement stratégique choisi (voir chapitre 2). Il faut également s’appuyer sur des données de marché objectives pour démontrer le caractére réaliste des prévisions d’activité (voir chapitre 5), Pour les projets non marchands, une étude d’opportu- nité doit convaincre de V’intérét du projet pour lefficacité de Ventreprise. Des plans d'actions concrets accompagnés de la liste des personnes clés rassurent les destinataires sur la maitrise opérationnelle du projet. Le tableau 1.2 retrace les huit clés pour convaincre. © Dunod - Toute reproduction non autorisée est un di Tableau 1.2 - Les 8 clés pour convaincre 1. Analyse stratégique — Analyse exteme : opportunités/ menaces Analyse interne : forces/faiblesses Mission de I’entreprise Objectifs opérationnels 2. Prévisions d’activité ipaux plans d'action résumés 4, Rentabilité économique : VAN, TRI, DR, Indice de profitabilité. Que démontrer ? Le projet est cohérent avec l'environne- ment et la stratégie de entreprise. Lrentreprise a les atouts (facteurs clés de succes) pour réussir. Les prévisions d’activité sont réalistes par rapport & la taille du marché et du positionnement de entreprise. Elles s'appuient sur des données de marché objectives. Les aspects opérationnels du projet sont maitrisés. Différentes alternatives montrent que le projet a été mari. Le projet est économiquement rentable. 5, Différents scénarios Montrer son agilité, comment ’entre- prise s'organise-t-elle selon les différents Stats du marché (hypothése haute, moyenne ou basse). Explorer différents modes d’organisation, 6, Prévision financiére et rentabilité pour l'actionnaire 7. Analyse des risques Le besoin de financement est correcte- ment évalué. Le projet répond aux objectifs de renta- bilité de lactionnaire. Les risques ont été identifiés et couverts, ils sont acceptables pour 'investisseur. 8. Reporting + les annexes Les responsables du projet ont prévu un cadre de reporting pour les investisseurs. Toute information renforcant la crédibi. lité du projet. Le tableau 1.2 distingue le contenu de la partie financiére des deux grands types de business plan : * Le business plan projet débouche sur des calculs de rentabilité éco- nomique que nous verrons au chapitre 7. Le porteur du projet, sauf pour les projets exceptionnellement importants, ne se soucie pas du financement. Une fois le projet adopté, la dépense d’investissement 1. Définir le business plan est intégrée dans le plan de financement global de l'entreprise dont le directeur financier a la responsabilité. * Le business plan financier n’intégre pas systématiquement d’évalua- tion de la rentabilité économique. La prévision financiére permet d’évaluer les besoins de financement, la capacité de remboursement des emprunts, de versement des dividendes. Elle débouche sur léva- luation de l’entreprise et de la rentabilité financiére pour les action- naires en cas d’apport en capital, d’acquisition ou de cession. Pe esemcie | Le candidat @ un contrat de franchise réalise le business plan financier sous la forme d'un compte de résultat et plan de financement prévisionnels pour évaluer le montant des investissements et la capacité de remboursement des emprunts. II compléte toutefois son analyse par un calcul de rentabilité éco- nomique incluant le délai de récupération pour déterminer s'il récupérera le montant du droit au bail dans un délai raisonnable. Erneta ees Ete nkieans ¥ ¥ Sélection de projets Financer 'entreprise (document de levée de fonds) : apport en capital, emprunts & MLT ou & CT. Valoriser lentreprise : acquisition/cession/apport en capital Calculs de rentabilité Prévision financlere : évaluer le besoin de financement| économique et mettre en ceuvre les financements Valorisation par les flux de trésorerie prévisionnels Figure 1.1 - Les deux grandes catégories de business plan Pourquoi est-il important de présenter différents scénarios ? Le porteur du projet a la quasi-certitude que les hypothéses de son business plan ne se réaliseront pas en totalité. 10 Les scénarios servent a décrire comment s’organiser dans les dif- férentes hypotheses de marché : haute, moyenne et basse d’activité. Un investisseur vous demandera systématiquement comment vous comptez, vous organiser dans I’hypothése d'une baisse de 20% des ventes ; Ils permettent de combler les lacunes d’une version précédente, pro- poser un modéle économique plus performant ; Décrire et chiffrer différentes alternatives pour mener a bien le projet crédibilise votre démarche, montre que vous avez mari votre projet. Pour chaque scénario, revoir l'ensemble des hypothéses pour col- ler au plus prés a la réalité. Exemple : La sous-traitance d’une activité conduira a réduire les loyers, les couits de la fonction RH, Veiller 4 ce que les plans d'action propasés soient cohérents avec la politique de l’entreprise. Exemple : le recours a la sous-traitance fait-il partie des pratiques du groupe ? Qui réalise le business plan ? La réalisation du business projet est confiée au responsable projet. L’élabo- ration du business plan est toutefois un document multidisciplinaire et fait appel 4 de nombreuses compétences au sein de I'entreprise : marketing, production, logistique, distribution, juridique, fiscale, ce qui implique la participation de personnes d'autres fonctions. Ainsi, un fiscaliste pourra @tre mis 4 contribution pour étudier les conditions d’application du crédit S d’impét recherche ou plancher sur la définition des prix de transfert (entre filiales de pays différents). L’évaluation de la rentabilité ct les prévisions financiéres sont sou- vent réalisées par un contrdleur financier ou un contrdleur de gestion ou avec I’assistance de celui-ci. La coordination du business plan financier est habituellement confiée au directeur financier car la finalité est de nature financiére. Les termes proches aes Le terme business plan est aujourd'hui largement utilisé dans les groupes sans que son contour soit complétement défini par tous. II convient de le distinguer d’autres notions complémentaires ou proches. " a Le plan stratégique 4 moyen terme Ilse situe en amont du business plan portant sur l'ensemble d’une entre- prise et a souvent un horizon de temps plus long. Il formalise le travail de réflexion du comité de direction et des actionnaires d’une entreprise concernant ses orientations stratégiques sur les trois ans a cing ans a venir. Il est revu annuellement. II décrit les grandes tendances obser- vables ou prévisibles du marché, le positionnement souhaité par I’en- treprise, les grands objectifs ainsi que les principaux plans d’actions. Sont parfois traitées également dans ce document des questions géné- rales : par exemple, image de marque que ’entreprise souhaite avoir auprés de ses clients et dans le public, etc. Ces grandes orientations sont ensuite partiellement diffusées au sein de l’entreprise. Le plan straté- gique 4 moyen terme constitue ensuite pour les membres du comité de direction un cadre de référence pour leurs décisions importantes. Les plans d'action opérationnels sont souvent moins détaillés que dans un business plan et les aspects financiers moins développés car l'objectif de rentabilité y est moins immédiat. 1. Définir le business plan Le modeéle économique (ou business model) Cette notion est apparue avec les premiéres sociétés Internet pour décrire leur mode de génération de revenus (abonnement, facturation a la consommation, revenus publicitaires...). Elle est actuellement plus large et décrit la fagon dont Ventreprise s’organise pour satisfaire au mieux les besoins de ses clients dans des conditions de rentabilité et de flexibilité (répartition entre charges variables et fixes). L’amélioration du modéle économique repose sur une analyse stratégique préalable permettant d’identifier les facteurs clés de succés du métier et les pro- cessus qui les portent. L’entreprise attecte ses ressources en priorité sur les processus clés, évite de surinvestir sur les autres processus, voire en externalise, notamment ceux générant un fort besoin en capitaux inves- tis (immobilisations et BFR). L’externalisation d’une activité permettant de variabiliser des charges jusqu’a présent fixes améliore la flexibilité de Ventreprise. Des modéles économiques homogénes apparaissent dans certains secteurs d’activité. II est important de mettre en avant dans son business plan un modéle économique convaincant, de savoir le justifier lorsqu'il différe de la pratique des autres entreprises du secteur. 12 © Dunod - Toute reproduction non autorisée est un dé L’étude d’opportunité (ou business case) Crest une étude économique ayant pour but d’étudier l’opportunité d’un nouveau modéle économique : par exemple, décision de délocalisation ou sous-traitance d’une activité, automatisation d’une tache... Il décrit les conditions de mise en ceuvre et les bénéfices attendus. Il intégre ainsi fréquemment un modéle financier d'évaluation de la rentabilité et des risques. II ne contient pas a priori de plans d'action aussi précis et caden- cés dans le temps qu’un business plan car Ventreprise n’est pas encore dans les starting-blocks pour le mener a bien. Si ce nouveau modéle est validé, I'entreprise mettra sur pied un projet avec des plans d’actions précis qui seront présentés dans un business plan ultérieur. En pratique, toutefois, la différence entre ces deux documents est parfois ténue. Le budget Alors que le business plan présente des flux annuels sur un horizon pluriannuel, les budgets présentent des flux mensuels sur un horizon annuel. Les budgets issus d’un business plan constituent en quelque sorte la partie a court terme de celui-ci. Tous les budgets ne se rattachent toutefois pas a un projet spécifique et ne sont donc pas tous issus d’un business plan. En outre, le budget se limite a une simple présentation chiffrée, sans explications particuliéres. A 'inverse, dans le business plan, les prévisions financiéres découlent d’une analyse stratégique et de plans d’actions précis (voir en annexe, un exemple de budget de trésorerie). 13 \ NN — 1, Définir le business plan L’essentiel | >> Le business plan ou plan d’affaires est le document de synthése de présentation d’un projet d’investissement ou de I'évolution & moyen terme d'une entreprise. >> Le business plan projet a pour but de faire adopter un projet, marchand ou non marchand, dans le cadre d’une procédure de sélection interne a l’entreprise. Le business plan financier porte sur l'ensemble d’une entreprise, il sert a lever des capitaux (emprunts ou capital) ou a valoriser I'entreprise dans le cadre d'une cession ou acquisition. >> Les 8 clés pour convaincre identifient les points sur lesquels argumenter pour faire adopter son projet. 14 Mener une analyse stratégique Executive summary | >> L’analyse stratégique vise a établir un avantage concurrentiel durable afin d’assurer la pérennité a long terme de lentreprise et des bénéfices supérieurs a la moyenne du secteur. Elle est indissociable de analyse de la concurrence et elle est ala fois externe (analyse des forces en présence sur le marché) et interne a l'entreprise. Elle doit conduire celle-ci a définir un positionnement stratégique qui permette aux mieux d’exploiter les opportunités du marché ainsi que les forces de I'entreprise. >> Le business plan doit convaincre de la pertinence de la stratégie choisie. L’objectif de ce chapitre est, de se familiariser avec la démarche et les principaux outils de analyse stratégique afin de mieux défendre son projet. >> Nous répondrons aux questions suivantes : quelles stratégies une entreprise peut-elle mener sur un marché ? Comment analyser les forces en présence sur un secteur d’activité ? Comment segmenter un marché ? Comment identifier les facteurs clés de succés dune activité ? Comment faire la synthése de I'analyse stratégique avec la matrice Emoff ? © Dunod - Toute reproduction non autorisée est un dé 15, 2. Mener une analyse stratégique L’analyse stratégique est a la fois externe et interne a l’entreprise. Elle s‘articule autour de trois cercles concentriques : ~ Videntification de grands facteurs d’évolution auxquels rattacher le projet ; ~ Vanalyse de la dynamique concurrentielle du secteur d’activite ; — Vétat des lieux des forces et faiblesses des différentes fonctions de l’en- treprise : financiére, industrielle, ressources humaines, commerciale. Au chapitre suivant, nous abordons la démarche d’analyse financiére permettant de réaliser I’état des lieux financier de I’entreprise. Analyse externe : Opportunités et menaces Cre oe Gal Analyse interne : Forces et falblesses Figure 2.1 - L’analyse stratégique L’analyse externe L‘identification de grands facteurs d’évolution auxquels rattacher le projet Pour vendre son projet, il convient de montrer qu’il est cohérent avec des tendances de fond observables dans l’environnement pris au sens le plus large. Le modéle Pestel (tableau 2.1) classe ces grandes tendances ou facteurs d’évolution en six grandes catégories. 16 jon non autorisée est un délit, © Dunod - Toute reprodu Tableau 2.1 - Le modele Pestel : les six grands facteurs d'influence P Politique E Economique s Socioculturel et démographique T Technologique E Environnemental L Légal et réglementaire Tableau 2.2 - Exemples de facteurs d’influence Facteurs politiques + Stabilité des états * Fiscalité + Gestion des déficts de la sécurité sociale + Accords internationaux sur le commerce extérieur * Contréle des monopoles de fait * Disparition des monopoles de droit (Energie, transports) * Flexibilité du travail Facteurs socioculturels et démographiques * Vieillssement de la population * Niveau d'instruction * Mobilit sociale * Intemationalisation des besoins des consommateurs Facteurs environnementaux * Obligations de retraitement des déchets * Incitations & utilisation oéner renouvelables Facteurs économiques «Evolution du PIB + Taux diinflation + Taux d'intéret + Cours des matiéres premiéres + Internationalisation des marchés et des entreprises + Concentration économique * Développement des marchés asiatiques Facteurs technologiques * Diffusion de I'intemet haut débit + Investissements en R & D ‘* Rapidité des transferts technologiques Facteurs légaux et réglementaires ‘+ Harmonisation réglementaire au sein de 'Union européenne + Normes réglementaires d’hygiene et de sécurité 7 2. Mener une analyse stratégique Tableau 2.3 - Exemples d’évolution des facteurs Facteurs Evolution. Politique Le déficit des organismes de sécurité sociale de nombreux pays crée un environnement favorable au développement des médicaments génériques. Economique _| Les grandes entreprises s‘internationalisent et recherchent des fournisseurs capables de les accompagner dans les différentes régions du monde oi elles s‘implantent. Socio- Le vieillissement de la population dans les pays développés démographique constitue une opportunité de développement pour de nouvelles activités : services aux personnes, maisons de retraite. Technologique Le développement des télécommunications et d’internet favorise la délocalisation d activités administratives (centres d'appel client situé au Maroc, services de comptabilité client basés en Inde). Au niveau de la formation, Internet encourage le développement de formations mixtes avec une alterance de modules en présentiel et & distance. Environnement Réglementaire * Incitations fiscales & utiliser des sources d’énergie renouvelables, ala fois pour préserver l'environnement et prévoir 'aprés-pétrole. + LUnion européenne impose que, progressiverment, un pourcentage minimum de production d’énergie provienne d’énergies renouvelables (éolienne, hydroélectrique, solaire, biomasse). Ces pourcentages ne sont pas encore atteints dans de nombreux pays membres, ce qui incite les états membres et les grandes entreprises a entreprendre des programmes de recherche pour rendre ces énergies viables d'un point de vue économique. De nombreux secteurs diactivité en Europe font encore l'objet de normes techniques nationales. Ces normes constituent des barriares a l'entrée permettant parfois a des entreprises de taille moyenne de subsister a l'intéricur des frontiéres de chaque pays. L’Union européenne encourage l'uniformisa- tion des normes techniques pour l'ensemble des pays membres, ce qui favorise les grandes entreprises d’envergure européenne, On s'efforcera de rendre concrétes ces grandes tendances en exploi- tant des statistiques et en citant ses sources d'information. Au-dela de Videntification des tendances actuelles, le modéle Pestel sert également a réaliser un travail prospectif visant 4 discerner les tendances de fond pour les années a venir. 18 jon non autorisée est un délit, © Dunod - Toute reprodu L’analyse de la dynamique du secteur d’activité Il s’agit de décrire l’équilibre des forces concurrentielles en présence : Véquilibre existant et les évolutions prévisibles sur le secteur. La grille suivante (figure 2.2) a été développée par Michael Porter, professcur de stratégie a Harvard University dans les années 1980. Elle représente les cing forces concurrentielles en action sur un secteur d’ac- tivité. On constate que le niveau de rentabilité moyenne obtenu sur un secteur différe selon les secteurs d’activité. La thése de Michael Porter est que ce niveau de rentabilité moyen dépend de équilibre de ces forces concurrentielles, En outre, la capacité d'une entreprise @ obtenir une rentabilité supérieure a la moyenne du secteur dépend de sa capacité a développer des atouts concurrentiels durables. Cet équilibre n'est évi- demment pas statique, il est susceptible d’évoluer dans le temps et les entreprises ne sont pas passives par rapport a l’équilibre existant 4 un moment donné. Elles s’efforcent influer sur la structure du secteur par leur propre stratégie, Cette grille permet d’appréhender la réalité com- plexe d'un secteur et aide a imaginer les moyens de modifier, au profit de son entreprise, le jeu concurrentiel. Menace de nouveaux entrants | Pouvoir Concurrence entre Pouvoir denégociation > les entreprises de négociation des fournisseurs du secteur des clients Menace de produits de substitution Figure 2.2 - Grille des cing forces de Porter m La concurrence entre les entreprises du secteur [analyse de la concurrence conduit a s'intéresser aux points suivants : quel est le nombre de concurrents ? leur taille, leur positionnement res- pectif, leurs forces et faiblesses ? un processus de concentration est-il 19 2. Mener une analyse stratégique déja achevé, en cours ou prévisible ? les offres sont-elles fortement dif- férenciées d'une entreprise a l'autre ? La consultation des sites Internet des concurrents et des organismes professionnels (fédérations patro- nales...) est souvent trés riche de renseignements. Il convient égale- ment de s‘intéresser aux facteurs clés de succés devant étre maitrisés pour réussir dans son métier. Bien que ces facteurs soient spécifiques a des secteurs d'activité, nous pouvons les regrouper en cing grandes familles — la position sur le marché (part de marché) et son évolution (croissance et diminution) ; — la notoriété et implantation commerciale ; — la position comparative de l’entreprise en termes de cotits dapprovi- sionnement, de production et de commercialisation ; les compétences techniques ; — la puissance financiare, c’est-d-dire la capacité a financer de nouveaux investissements. [_txemple | Une entreprise de vente a domicile de produits surgelés définit les facteurs clés de succés nécessaires pour réussir dans son métier : * la capacité a entretenir une relation de proximité constante avec ses clients dans un but de fidélisation, grace a son équipe de télévendeurs et de livreurs, et des programmes de fidélisation ; *+ une parfaite maitrise de la logistique et de la gestion des stocks de maniére @ éviter des surstockages coliteux et des ruptures dissuasives pour les clients, et @ assurer une livraison rapide & moindre délai. En effet, les clients qui constatent des ruptures de stock avec ce mode d’achat particulier ont tendance a revenir & un mode d’achat traditionnel ; * la capacité a renouveler offre de produits cuisinés en permanence pour main- tenir 'attractivité des produits et accroitre le panier moyen. Pour développer un avantage concurrentiel durable, lentreprise doit mettre en ceuvre une des stratégies de base suivantes : un coat faible ou une différen- ciation ayant de la valeur pour les clients. Ces deux stratégies peuvent égale- ment étre mises en ceuvre sur un segment de marché étroit, c'est la stratégie de concentration sur une niche. m La domination par les coats Lrentreprise se donne pour objectif d’avoir les couits les plus bas du mar- ché. Pour cela, elle fabrique des produits sans fioriture, sans ou avec un 20 jon non autorisée est un délit, © Dunod - Toute reprodu nombre trés limité d’options. Elle utilise les matériaux les moins cod- teux, simplifie la conception du produit, limite les services entourant le produit, réduit au maximum ses frais généraux. Les conditions de réussite de cette stratégie dans le monde industriel sont : ~ une taille significative et donc une part de marché relative impor- tante. Etre leader en part de marché ne constitue pas une stratégie a part entiére ; en revanche, c'est souvent une condition nécessaire pour dominer par les cotits. Une taille importante procure tout d’abord un pouvoir de négociation élevé avec les fournisseurs, Elle permet ensuite de réaliser des économies d’échelle permettant de mieux absorber les cotits fixes ainsi que les investissements immatériels en R & D et publicité. Elle permet également de faire jouer la courbe d’expérience (voir infra) ; des moyens financiers importants, nécessaires pour financer les inves tissements de production de masse ; ~ la volonté constante, diffusée dans l'ensemble de I'entreprise, d’exploi- ter toutes les possibilités de réduction des cotits et des frais genéraux. Cette stratégie ne se limite pas au secteur industriel, Elle se retrouve également dans le secteur de la distribution (par exemple, les maga- sins hard discount vendant des marques distributeurs) et des services (par exemple, les compagnies aériennes low cost). Pe exemcie | Une compagnie aérienne fow cost parvient & comprimer ses colts grace aux mesures suivantes : * les clients achétent les billets directement auprés de la compagnie, ce qui Evite les commissions versées aux agences de voyage ; + elle utilise des aéroports périphériques oi les taxes d’atterrissage et de décol- lage sont moins élevées ; + elle facture les repas et boissons pris a bord. Ainsi, une compagnie aérienne américaine des années quatre-vingt a eu pendant un moment pour slogan publicitaire : « La seule compagnie aérienne a faire payer le café ». L’entreprise qui réussit 4 dominer par les coats obtient un profit plus élevé que la moyenne si elle parvient a vendre a un prix proche de la moyenne du secteur. Cependant, si le produit est percu comme étant moins attractif que ceux de ses concurrents, l’entreprise devra concéder un rabais sur les prix. 2 2. Mener une analyse stratégique Les risques liés la domination par les coats : = des entreprises concurrentes peuvent entrer dans une guerre des prix préjudiciable a ensemble du secteur. II n'y a, par définition, qu'une seule entreprise qui puisse dominer par les coats dans son secteur. La concurrence est souvent intense entre les entreprises utilisant cette stratégie car son succés dépend notamment de la part de marché ; = une attention exclusive portée a la réduction des cotits risque de rendre le produit moins attractif que celui des concurrents lorsque les gotits de la clientéle évoluent. La stratégie de domination par les coiits s'impose lorsqu’il n’existe pas de possibilité de différenciation sur les produits. m La stratégie de différenciation Elle consiste a proposer un produit, pergu comme unique sur le marché, en se démarquant de ses concurrents sur un critére autre que le prix bas. Lentreprise introduit dans le produit un ou plusieurs criteres de dif- férenciation qui peuvent avoir des formes tres diverses : = robustesse du produit ; — qualité et rapidité d’intervention du service aprés-vente (SAV) ; = délais de livraison rapides ; — absence de rupture de stocks ; = réseau de distribution étendu ; — design attractif du produit ; = options nombreuses ; ~ choix des couleurs ; — image de marque soutenue par des campagnes publicitaires. Lentreprise qui opte pour la différenciation ne se désintéresse évidem- ment pas du controle de ses coaits mais elle n’en fait pas son objectif unique. Le critére de différenciation choisi engendre le plus souvent un sur- coiit mais permet également de facturer un surprix. L’entreprise doit s'as- surer que les clients attachent de la valeur au critére de différenciation qu’elle choisit et que le surprix qu’ils sont préts a payer excéde le surcod Elle doit également s’assurer que ’avantage est bien percu par les clients, les y aider par des argumentaires de vente, des campagnes publicitaires. Pour développer un avantage concurrentiel durable, le critére de différen- ciation doit correspondre 4 une compétence clé de l’entreprise. En adop- tant cette stratégie, l’entreprise vise le plus souvent une partie seulement de la clientéle et done une part de marché limitée. La concurrence est 22 jon non autorisée est un délit, © Dunod - Toute reprodu souvent moins frontale que dans la stratégie de domination par les cotits, car les entreprises peuvent chacune adopter un positionnement original sur le marché en choisissant des critéres de différenciation différents. Les risques associés a la stratégie de différenciation sont : = que le surcoiit entrainé par la différenciation soit supérieur a Vavan- tage percu pour le client et donc au surprix qu’il accepte de payer. L’échec commercial du supersonique Concorde s'explique notam- ment par cette raison, Son avantage concurrentiel - pouvoir traverser VAtlantique dans un temps deux fois plus court ~ était certes réel et apprécié mais le surprix a été dissuasif pour que le projet soit exploité sur une grande échelle ; ~ que le critére de différenciation perde de son intérét pour les clients ; ~ qu’en étant copiée par la concurrence, offre de lentreprise se banalise ; [exemple | Pour contrer la concurrence des marques distributeurs, le groupe Danone pro- pose désormais des yaourts ayant des bénéfices pour Ia santé et l'esthétique (alicaments). Ces produits a forte valeur ajoutée contribuent a améliorer la pro- fitabilité du groupe. = qu'un retournement de la conjoncture rende les clients plus sensi au prix qu’au critére de différenciation. les = La concentration sur une niche Cette stratégie vise a | fer la concurrence. Une niche est un sous- ensemble d'un marché plus vaste. Ce peut étre une zone géographique (par exemple, une compagnie aérienne se limitant a des liaisons régio- nales), un produit spécifique (les logiciels d’assistance a la relance télé- phonique), un mode de distribution particulier (livraison de produits surgelés 4 domicile). La niche n’est pas nécessairement un marché de petite taille mais un sous-ensemble d’un marché plus vaste. Ainsi, le groupe Velux s’affiche comme le leader mondial d'un marché de niche, celui des fenétres de toit, qui est un sous-ensemble du marché des ouver- tures de maison (portes, fenétres, portails). Sa notoriété est telle que le nom commercial est devenu un nom commun. Pour pouvoir envisager une telle stratégie de concentration sur un segment de marché, il faut que les clients de ce segment aient des besoins 23 2. Mener une analyse stratégique particuliers ou que le mode de production ou de distribution optimum sur ce segment soit différent. Cette stratégie vise en fait appliquer une des deux stratégies précédentes sur un segment étroit de clientéle. Pour réussir, il faut satisfaire pleinement sa clientéle afin de dissuader d’éven- tuels nouveaux entrants. La faible taille de la cible est en quelque sorte une barriére a l’entrée, le cotit d’accés pour les concurrents devient pro- hibitif par rapport aux opportunités de gain. La stratégie de niche est généralement la plus difficile 4 maintenir sur le long terme. Les risques associés a la stratégie de concentration sur une niche sont: — la disparition de la niche elle-méme : l’entreprise qui se concentre sur une niche a souvent une taille plus petite que ses concurrents mul segments. Par conséquent, elle a a priori moins d’aptitudes pour réus- sir des diversifications dans de nouveaux métiers. Ce n'est toutefois Pas une régle absolue : des chaines d‘hotel aux Etats-Unis sont pro- gressivement parvenues 4 une couverture nationale en partant d’une implantation limitée a un seul Etat ; ~ Al'inverse, l'augmentation de taille de la niche : dans ce cas, la niche devient un marché attractif pour des concurrents pouvant étre beau- coup plus puissants ; — le syndrome de la « grosse téte » : le dirigeant de l'entreprise qui a réussi sur sa niche, grisé par son succés, perd le sens du réel et se diversifie imprudemment sur un marché plus vaste sur lequel il ne dispose pas des mémes atouts concurrentiels. II risque de gaspiller ses ressources sur ce projet de diversification et de compromettre ainsi la pérennité de son entreprise ; — des concurrents plus puissants décident de ratisser large en investis- sant dans des segments étroits de clientéle. Certaines entreprises développent une stratégie multiniche, ce qui nécessite dans le domaine industriel un outil de production flexible per- mettant la fabrication de petites séries de fagon économique. = Une entreprise est spécialisée dans les produits textiles spéciaux nécessitant une technologie de pointe. Son savoir-faire industriel combine la chimie, le tissage et les techniques d’induction. Elle est leader, au niveau mondial, dans une dizaine de marchés de niche a forte marge et réalise plus de 80% de son chiffre d’af- faires a "exportation. Elle consacre une part importante de son chiffre d'affaires ala recherche et au développement afin de préserver son avance technologique. 24

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