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REMACOOP

Revue Marocaine des Coopératives


6
Editée par l’Office du Développement
de la Coopération (ODCO)

 éforme du cadre juridique des coopératives au Maroc : Transition de


R
l’agrément à l’enregistrement 

Entreprenariat sociale : Levier d’emploi et de promotion de la femme 

F inancement, marketing et mode de gouvernance  : Approche


multidimensionnelle de la performance

 oopératives marocaines : Contribution à la protection de l’environne-


C
ment et au développement durable

Edition 2016
Sommaire
Editorial 3
Le Secteur Coopératif au Maroc
•L’évaluation de la performance des coopératives: cas de la coopérative
tighanimine de production de l’huile d’argan 6
•Les coopératives au Maroc : Transition de l’agrément vers l’enregistrement,
quelles perspectives ?
17
•Financement et spécificités des règles des coopératives agricoles maro-
caines 23
•Améliorer la vie de la femme rurale par le biais de l’apprentissage et la for-
mation : Evaluation de l’impact d’un projet d’appui à l’entreprenariat social 37
•Evaluation de la fonction marketing des coopératives artisanales de la ré-
gion de Rabat-Salé 48
•L’insertion socio-professionnelle des jeunes par les coopératives 59
•Coopératives de femmes : une forme d’entreprendre autrement 68
Point de vue
•Nouvelles trajectoires de l’innovation : le solidaire et le vert 78
•La gouvernance coopérative : Originalité, différenciation ou problématique ? 83
Reportage
•Coopérative «Yacout » : Et si Cléopâtre était encore en vie ? 94
Entretien
•Entretien avec M. Ahmed GHAZALI, Professeur émérite et expert juriste au
sein de l’équipe chargée d’élaboration du projet de loi cadre de l’Economie
Sociale et Solidaire au Maroc 102
De tout horizon
•Les coopératives au couleur de feuille d’érable rouge 108
Statistiques 111

Adresses 118
Editorial
L’année 2016 a été marquée par une ouverture sur l’environnement via des
dynamique importante des différents produits ou services typiques. Le rythme
acteurs de l’économie sociale et d’exploitation des ressources naturelles
solidaire (ESS) aux niveaux national et par les différentes organisations de l’ESS
international. demeure très limité et en deçà des
possibilités de renouvellement de ces
Avec la tenue de la COP22 au Maroc
ressources contrairement aux entreprises
en novembre 2016, la plupart des
privées généralement peu attentives à
événements et rencontres organisés
exploiter sans compromettre les besoins
cette année étaient orientés vers le
des générations futures.
développement durable. Occasion
idoine pour mettre en relief l’importante Par ailleurs, le Maroc s’est investi dans
relation entre l’ESS et le développement plus d’initiatives d’encouragement
durable. de la dynamique de l’ESS à travers,
entre autres, la mise en place d’un
Les assises nationales de l’économie
environnement juridique motivant.
sociale et solidaire organisées en juillet
2016 étaient, bien entendu, dédiées C’est ainsi que la nouvelle loi des
à cette thématique. Des expériences coopératives 112.12 est entrée en
nationales et internationales venant vigueur en application cette année
des pays d’Afrique (Mali, Sénégal, après la promulgation des différents
Tunisie…), d’Europe (Espagne, France, textes d’application. Elle permet de
Belgique…), des Amériques (Canada, simplifier la procédure de leur création
Colombie, Mexique) et d’Asie et offre la possibilité aux coopératives
(Malaisie) avaient mis en exergue de participer aux marchés publics et
la contribution de l’ESS à asseoir un ouvre de nouvelles opportunités pour
développement local durable dans améliorer la gouvernance au sein de
divers contextes et cultures avec des ces institutions.
valeurs et des principes universels.
De même, le projet de loi cadre de l’ESS
Ces derniers accordent une place
a été élaboré et validé techniquement
particulière à l’élément humain et sa
et mis dans les circuits d’approbation
relation avec son environnement. En
au niveau du Secrétariat Général
effet, le développement local, basé
du Gouvernement. Ce projet de
sur l’ESS, est mis en œuvre grâce à la
loi délimite le champ de l’ESS en
participation de la population locale
définissant les organisations de l’ESS
à la valorisation des richesses des
de droit (coopératives, mutuelles et
différents territoires. Il ne s’en déduit
fondations constituées par dahir ou loi)
nullement un enfermement au niveau
et celles éligibles (associations d’utilité
de chaque territoire mais plutôt une
économique et sociale, entreprises
dynamique locale qui anime des
à finalités sociale, associations de
territoires dans un cadre coopératif
microcrédit). Il définit également les
pour répondre à des défis locaux et une
instances de coordination et de suivi-
évaluation des politiques publiques (ODCo). C’est dans cet esprit qu’une
en relation avec l’ESS. Un intérêt a été proposition de restructuration de
accordé au niveau de ce projet de loi à l’office a été présentée et validée lors
l’innovation sociale. Autres acquis de ce du dernier conseil d’administration.
projet de loi : la reconnaissance officielle Ladite réorganisation est projetée en
de l’ESS comme composante de deux temps  : en premier lieu, créer
l’économie nationale ainsi que la visibilité une structure de planification et de
de représentativité des acteurs et des coopération, une entité dédiée au
politiques publiques de développement pilotage des systèmes d’information
et de la promotion de l’ESS. avec réadaptation de la représentation
régionale avec le nouveau découpage
En plus des articles dédiés à la présenta-
administratif régional. En second
tion et l’analyse de cet environnement
lieu, il s’agira d’étendre le périmètre
juridique avec un éclairage complet sur le
d’action de l’office pour couvrir tous
projet de loi cadre de l’ESS à travers une
les maillons de la chaine de valeur en
interview avec le professeur Ahmed Gha-
incluant la promotion des produits et
zali, l’un des experts chargés d’élaborer
services des coopératives. De même,
ledit projet de loi cadre, le présent numé-
la modernisation des outils de travail à
ro de la revue REMACOOP revient sur les
l’office sont en cours de déploiement  :
défis du mouvement coopératif comme
il s’agit notamment de la concrétisation
le financement et la gouvernance.
des recommandations du schéma
La contribution des jeunes et des femmes directeur des systèmes d’information.
au travail coopératif a été abordée sous Enfin, il est à préciser que l’ODCo
des angles différents en soulignant les accorde une importance particulière
acquis, les défis et surtout les opportunités à l’ouverture sur l’université afin
non encore exploitées. L’une des d’améliorer les connaissances relatives
contributions à ce sujet s’est étendue sur à l’ESS généralement et au mouvement
l’analyse de l’impact direct sur l’inclusion coopératif plus particulièrement.
financière des femmes suite à un projet A cet égard, d’importants travaux
développé sur le terrain. de recherche sont lancés, plusieurs
Le souci de préservation de rencontres scientifiques dédiées à l’ESS
l’environnement et de développement sont organisées en partenariat avec
durable est souligné à plusieurs reprises l’ODCo et des masters spécialisés en
au niveau des articles de ce numéro ESS sont initiés au niveau de certaines
avec un zoom sur une expérience de universités.
valorisation des produits de terroir qui La présente revue est ouverte à toutes
s’est inscrite dans le processus de qualité les contributions des résultats des travaux
avec respect de l’environnement. de recherche développés au niveau
Cette dynamique du mouvement des universités ainsi qu’aux articles de
coopératif marocain et la révision du l’ensemble des acteurs qui mettent en
cadre législatif y afférant engendreront œuvrent ou qui accompagnent des
des réajustements dans les missions projets coopératifs.
et les attributions de l’Office du Abdelkrim AZENFAR
Développement de la Coopération Directeur de l’ODCO

4 REMACOOP 6
Le Secteur Coopératif au Maroc

REMACOOP 6
5
Le Secteur Coopératif au Maroc

L’évaluation de la performance des coopératives:


cas de la coopérative tighanimine de production
de l’huile d’argane

Par :

Said AHROUCH Fatima BEN ALI


Enseignant chercheur, LEREMOS, FSJES, LEREMOS, FSJES,
Université Ibn Zohr, Agadir Université Ibn Zohr, Agadir
Mail : s.ahrouch@uiz.ac.ma Mail : fatima.benali@migdev.org

Introduction suivis avec efficacité (Bouquin,


2004). En fait, si la mesure de la
La performance organisation-
performance a toujours constitué
nelle des entreprises coopéra-
dans les entreprises «  classiques  »
tives est le garant de l’allocation
un terrain fertile de recherches et
optimale des ressources locales
d’applications, qu’on est-il alors
et de l’inclusion sociale à travers
dans le management des entre-
la réalisation des objectifs orga-
prises coopératives  ? Peut-on
nisationnels, quelles que soient
parler d’une performance sociale
leur nature et leur variété (Bour-
indépendamment des perfor-
guignon, 2000). Toutefois, on ne
mances économique et finan-
peut parler de performance que
cière  ? La performance organi-
si on peut la mesurer et que cette
sationnelle serait-elle à l’origine
mesure puisse être comparée
des autres performances  ? Quels
aux résultats escomptés ou à des
sont les indicateurs de mesure
références bien connues. La réa-
d’une telle performance  ? Telles
lisation d’une performance alors
sont les questions auxquelles nous
se fait dans le cadre d’un proces-
allons trouver des réponses à la
sus qui nécessite la procuration
lumière d’une revue de littérature
des ressources au moindre coût
et d’une manière empirique en
et leur utilisation avec efficience
étudiant le cas de la coopérative
afin de réaliser les objectifs pour-
féminine TIGHANIMINE.

6 REMACOOP 6
Le Secteur Coopératif au Maroc

En fait, le défit majeur des coopéra- de vie de ses adhérents. Toutefois, assu-
tives est d’adopter des outils de mana- rer l’équilibre entre les valeurs de la coo-
gement novateurs et pertinents permet- pérative et les objectifs économiques
tant de concilier les valeurs coopéra- devient de plus en plus difficile dans un
tives, la raison d’être et l’objectif éco- environnement complexe et compétitif.
nomique de la structure en s’intégrant Cette difficulté se manifeste au sein des
dans un environnement complexe et coopératives à deux niveaux :
compétitif. L’adoption des outils nova-
◆ Interne  :
Permettre la satisfaction
teurs désigne un changement dans le
et le bien être des adhérents
processus de fonctionnement organisa-
tionnel de la coopérative. Ce change- ◆E
 xterne: Assurer un bon
ment devra en principe amener la struc- fonctionnement organisationnel
ture à modifier ou améliorer sa manière pour résister à la concurrence
de faire par le biais d’implication et de et bien se positionner dans les
participation de toutes les parties pre- marchés national et international.
nantes de l’organisation, notamment La coopérative à travers la réalisation
les membres coopérants. Il s’agit à ce de cet équilibre cherche comme
niveau de produire de l’innovation dans toute autre entreprise à atteindre la
les systèmes de gestion de la structure performance sociale et économique
via l’amélioration de la productivité et par la combinaison de l’efficacité et
du bien être des membres. Il s’agit des l’efficience dans la mise en œuvre de
innovations organisationnelles pour ré- sa stratégie. Il s’agit de mettre en place
pondre à des besoins sociaux en impli- de nouvelles pratiques managériales
quant la participation et la coopération permettant la participation des
des acteurs concernés, notamment les adhérents et des parties prenantes, le
utilisateurs et les usagers. renforcement de l’organisation interne
Les coopératives constituent l’une et l’amélioration de la productivité afin
des composantes importantes du de réaliser un avantage concurrentiel
secteur de l’économie sociale et soli- dans le marché.
daire ayant démontré leurs apports en
1. Revue de littérature
matière de création d’emplois via la
valorisation des ressources locales. Une Les coopératives sont confrontées
valorisation assurée par les membres aujourd’hui à de nouvelles
adhérents en respect des principes problématiques en matière de suivi
universels de la coopération, à savoir la et d’évaluation de la performance.
démocratie, l’engagement, la respon- Pour garantir une réelle rentabilité
sabilité partagée, la transparence et la sociale des capitaux investis, il faut
solidarité dans le but de création de la élaborer des stratégies plus cohérentes.
richesse et la promotion des conditions Intervenir uniquement par des actions

REMACOOP 6
7
Le Secteur Coopératif au Maroc

occasionnelles et opportunistes n’est productives (processus de production)


plus acceptable. Il faut donc suivre avec le succès comme attribut.   C’est
le management par l’amélioration un concept relativement récent en
continue axé sur la performance afin de littérature managériale (Bouquin, 1986),
réponde aux attentes de la population mais il est plus en plus utilisé notamment
cible. Cette revue de littérature traitera lorsqu’il s’agit d’évaluer la mise en
de la performance générale et de la œuvre par les entreprises des stratégies
performance sociale. dites de développement durable
(Capron et Quairel, 2005).
1.1. La performance générale
La performance désigne aussi
Le concept de performance la réalisation, l’accomplissement et
est largement utilisé en sciences l’exécution1. Elle contient, dans son
du management à tel point où on
sens anglais, l’action, son résultat et
parle souvent de management de
son exceptionnel succès (Bourguignon,
performance. Plus encore, cette notion
1995). Ainsi on peut retenir trois types
est de plus en plus utilisée dans les
de performance  : la performance-
institutions publiques pour approcher
action  comme un processus qui se
l’efficacité, la productivité ou le
déroule dans le temps ; la performance-
rendement. Afin de cerner la notion
résultat d’une action et la performance-
de performance, il importe donc d’en
succès. Toutefois, la performance-
donner une définition générale et de
action dépasse largement les deux
préciser particulièrement qu’est ce
autres performances puisqu’elle intègre
qu’une performance sociale.
les résultats, les activités et les tâches à
Selon le dictionnaire Larousse, accomplir. En fait, dans le domaine de
la performance est définie comme management, la notion de performance
le  résultat chiffré  obtenu suite à une est souvent utilisée en contrôle de
épreuve (surtout sportive), l’exploit gestion en prenant son sens anglais
ou la réussite remarquable dans (action, résultat, succès). Ces trois sens
un domaine précis (améliorer ses sont en effet regroupés dans la définition
performances par exemple). Il s’agit donnée par Bourguignon (2000, p. 934)
donc de l’accomplissement d’une selon laquelle la performance est définie
tâche ou d’une mission avec succès «  comme la réalisation des objectifs
en mettant en valeur les résultats organisationnels, quelles que soient la
obtenus. En management, ce vocable nature et la variété de ces objectifs.
comprend le degré de réalisation Cette réalisation peut se comprendre
des objectifs à travers des actions au sens strict (résultat, aboutissement) ou

1. Etymologiquement le mot performance provient du mot « parformance » utilisé en français du


13ème siècle et qui signifiait « accomplir, exécuter ».

8 REMACOOP 6
Le Secteur Coopératif au Maroc

au sens large du processus qui mène au La réalisation d’une performance se


résultat (action)…. ». En fait, on ne peut fait dans le cadre d’un processus qui
parler de performance que si on peut la nécessite la procuration des ressources
mesurer et que cette mesure puisse être au moindre coût et leur utilisation avec
comparée aux résultats escomptés ou à efficience afin de réaliser les objectifs
poursuivis avec efficacité. Ce processus
des références bien connues.
peut être décrit par le schéma ci-dessous.

Schéma
Schéma 11: La
: La performance
performance

Processus
Ressources Résultats

Economie Efficacité
Efficience

Source : Bouquin, 2004

1.2. La performance sociale l’amélioration des conditions de vie des

La performance sociale est la membres adhérents : réduction de la


concrétisation effective dans la pauvreté et des disparités sociales,
réalité des objectifs sociaux d’une amélioration de la qualité de vie,
organisation. Elle tient compte des amélioration de la situation économique
relations internes entre l’institution et ses et sociale, etc. En outre, la performance
employés et des relations que la même sociale d’une organisation peut être
institution entretient avec les autres définie comme les résultats obtenus
parties prenantes  : clients-bénéficiaires, à chaque maillon d’une chaîne
pouvoirs publics, bailleurs de fonds, composée de trois maillons  : intention
société civile, etc. Ainsi, lorsqu’on parle – actions – effets (Lapenu et al. 2004). Il
de la performance sociale au sein s’agit en effet des meilleures possibilités
d’une coopérative, on désigne les effets et réalisations de l’organisation en
termes de principes, actions et impact
créés par cette organisation produisant
(schéma 2).

REMACOOP 6
9
Le Secteur Coopératif au Maroc

Schéma 2 : performance sociale

Ainsi, les coopératives peuvent et d’accroitre la performance sociale


mesurer leurs performances selon un dans le cadre du management
processus d’évaluation à plusieurs stratégique. Cela permettrait de savoir
niveaux. D’abord évaluer les intentions quels sont les résultats finaux et leurs
et les principes sur la base desquels impacts par rapport aux objectifs
seront définies les actions à mener. escomptés (efficacité), mais aussi
Ensuite, évaluer les actions dans le comment ces résultats sont obtenus et
cadre du processus amenant vers dans quelles conditions (efficience).
les résultats escomptés et attendus Malheureusement, par rapport aux
par les membres. Enfin, évaluer les entreprises capitalistes, les coopératives
résultats obtenus et mesurer leur sont largement dépassées en matière
impact en termes de changements de mesure de performance. En fait,
positifs encaissés par les bénéficiaires. les premières ont cherché, à partir des
La logique de performance dans les années quatre vingt-dix, à améliorer
coopératives devrait répondre en la mesure de leur performance en
fait aux besoins réels de toute une cherchant de nouveaux outils de
communauté dans le cadre d’une mesure de la performance financière2et
responsabilité sociale vis-à-vis des en intégrant des indicateurs non
adhérents, salariés, environnement financiers3 de performance (Berland,
et territoire. Ainsi, l’intégration d’une 2009), il n’est pas de même dans
logique de performance dans le les secondes. C’est pourquoi les
management des coopératives serait coopératives marocaines sont appelées
un moyen important pour éclaircir les plus que jamais à améliorer la mesure
normes et les objectifs de performance de leur performance par des critères de

2. Chercher des indicateurs plus représentatifs de création de la valeur dans les entreprises
(Economic Value Added, Cash flow, retour sur investissement, etc.).
3. Il s’agit d’indicateurs d’une performance principalement immatérielle. Les actifs immatériels
sont mal traduits dans les documents comptables (Kaplan et Norton 2001a).

10 REMACOOP 6
Le Secteur Coopératif au Maroc

référence pour quantifier et qualifier les sur leur place dans les processus de prise
performances économique et sociale, de décision et de gestion. Un échange
sans oublier la performance politique a été également fait avec les femmes
(maintien de bonnes relations avec adhérentes au moment de l’exercice
les parties externes pour gagner leur de leur activité pour les mettre plus à
faveur et leur appui) et la performance l’aise et pouvoir observer les expressions
systémique en mettant l’accent sur les et l’interaction entre les différentes
facteurs qui permettent la pérennité de adhérentes.
l’organisation notamment l’adaptation
2.2. Résultats et discussion
à l’environnement et la réalisation d’un
écart favorable entre les intrants et les Les outils méthodologiques cités
extrants (Morin, Savoie et Beaudin, 1994) ci-dessus ont permis de collecter un
ensemble d’informations relatives à
2. L’étude de cas : la coopérative
l’activité de la coopérative Tghanimine
Tighanimine
permettant de découvrir et d’analyser
2.1. Méthodologie de recherche ses performances économique et
sociale.
Pour illustrer la performance de la
coopérative Tighanimine, nous avons 2.2.1. Présentation de la coopéra-
fait des entretiens semi-directifs avec tive Tighnanimine4
la présidente et la trésorière de cette
La coopérative Tighanimine est l’une
coopérative et 30 femmes adhérentes.
des coopératives pionnières dans la
Cette méthode qualitative a pour
région de l’arganeraie. Elle est créée en
avantage de recueillir le maximum
10 juillet 2007 à l’initiative d’un groupe
d’informations à travers un échange
restreint de femmes agricoles ayant
guidé par un ensemble de questions sur
un savoir faire ancestral. Elle compte
les modes de gestion, le fonctionnement
actuellement 68  femmes adhérentes
interne et la stratégie mise en œuvre par la
issues du village Tighanimine, lieu
coopérative. Ces éléments permettront
d’implantation de la coopérative5,
la connaissance de la structure et son
et des villages du voisinage. C’est la
mode de fonctionnement. Alors que
première coopérative certifiée Fair
le questionnaire adressé aux membres
Trade Max Havlaar1. Elle a une série
permettra de savoir le degré de
de produits de bonne qualité, variés et
satisfaction des femmes adhérentes
certifiés. Elle a adhéré au programme
(revenus et épanouissement) au sein de
de commerce équitable à travers
la coopérative tout en mettant l’accent

4. Site web : http://cooptighanimine.com


5. Siège social : Douar Tighanimine ELBAZ, Commune rurale Drarga, Route de Marrakech à 12
Km d’Agadir.

REMACOOP 6
11
Le Secteur Coopératif au Maroc

l’organisation  Fair Trade International. mise en place des cahiers de charges


Elle a créé sa marque  TOUNAROZ. Il de l’arganier et de certifications,
s’agit d’une huile d’argane de qualité la coopérative Tighanimine avait à
supérieure dont l’objectif est de la collaborer avec des clients exigeants
commercialiser au niveau international en matière de qualité. Ce qui a permis
afin de promouvoir le travail des femmes d’une part aux femmes  adhérentes de
de la coopérative et de faire connaître bien maitriser les étapes de production
leur histoire. En plus de l’huile d’argane avec de bonnes pratiques d’hygiène et
alimentaire, la coopérative produit d’autre part à la direction d’améliorer
et commercialise d’autres produits à ses pratiques en matière de gestion et
savoir l’huile d’Argane cosmétique, de contrôle de qualité.
shampoing et savon à base d’argane,
ghassoul Beldi, crème à base d’argane, 2.2.3. Performance sociale
Amlou et le miel.
La performance sociale est liée
à la performance économique. En
2.2.2. Performance économique
effet, grâce à l’augmentation de la
La capacité de production de la production vendue, la coopérative
coopérative Tighanimine dépasse les contribue à la réduction de la pauvreté
6 tonnes par an. Cette production est dans son milieu par la création
écoulée sur le marché national (Ma- d’emplois directs et indirects. Ainsi, la
roc) à hauteur de 60 % et international rémunération des femmes adhérentes
(France, Canada, Allemagne) à hau- s’élève à 40 DH par Kg d’amendons
teur de 40 %. Cette performance éco- concassés en plus de la rémunération
nomique, mais commerciale aussi, a annuelle liée à la répartition de
permis d’améliorer la rémunération des l’excédent dégagé. En outre, les
femmes adhérentes et d’augmenter femmes adhérentes qui possèdent des
à 10 000 DH leurs parts sociales dans le matières premières6 (appelées Afyach
capital de la coopérative. selon la langue locale) sont rémunérés
Parmi les points forts de la coopérative, par le prix du marché élevé à un dirham
selon sa présidente, c’est la maitrise du par Kg. En 2015, les femmes adhérentes
processus de production en respectant ont eu en moyenne 2  200 DH par mois
les normes de qualité et la traçabilité du comme rémunération. Ces ressources
produit. Une maitrise qui est le résultat permettent aux femmes de ramener
d’une longue expérience et pratiques leurs enfants à l’école, d’améliorer le
habituelles de la coopération. Certes, régime alimentaire, d’accéder aux
depuis sa création en 2007 et avant la soins, etc. En plus, des emplois créés

6. La certification FairTrade exige que l’huile d’argane soit extraite d’une matière première
(Afyach) collectée par les femmes adhérentes et propres à elles.

12 REMACOOP 6
Le Secteur Coopératif au Maroc

au profit des femmes adhérentes, la La coopérative fonctionne sur la


coopérative Tghanimine emploie 6 base d’un règlement interne précisant
salariés avec des salaires décents. les rôles, responsabilités de chaque
adhérente ainsi que la conduite du
D’après les entretiens avec les
travail de production, la rémunération
femmes adhérentes, leur adhésion à
et les sanctions en cas de non respect
la coopérative a impacté aussi bien
du règlement interne. Ce dernier
leur personnalité que leurs conditions
a été élaboré après la création de
de vie. En effet, les revenus reçus par
la coopérative suite à une série de
les femmes leur permettent d’acquérir
réunions entre les femmes adhérentes.
une autonomie financière pour cou-
Il est actualisé lorsque de nouvelles
vrir leurs propres charges. De même le
circonstances l’exigent. Pour améliorer
travail au sein de la coopérative a ren-
davantage son fonctionnement, la
forcé davantage la patience, le respect
coopérative objet d’étude a élaboré
mutuel et la solidarité entre les femmes.
un manuel de procédures afin de
Elles s’entraident, planifient des activités
renforcer le coté formel d’organisation
communes et développement collecti-
et répondre aux exigences externes de
vement leur coopérative. Celle-ci leur a
certification
donné l’opportunité de développer leur
connaissance, valoriser et partager leurs L’horaire de travail au sein de la
expériences. coopérative est bien précis et adapté
aux spécificités de la population locale.
2.2.4. Performance organisation- Il porte sur les cinq premiers jours de
nelle : la bonne gouvernance la semaine  : du lundi au vendredi de
La coopérative Tighanimine est 09 h à 17 h. Samedi et dimanche sont
gérée par un Conseil d’Administra- considérés comme jours de repos
tion (CA) composé de 6 membres élus hebdomadaire.
par l’Assemblée Générale (68 femmes Quant à la prise de décision, la
membres) de la coopérative. Les réu- majorité des femmes adhérentes
nions du CA sont tenues trimestrielle- de la coopérative participent
ment selon les statuts, mais les membres aux Assemblées générales tenues
du CA se réunissent chaque mois avec annuellement dans le siège social de la
les membres adhérents pour discuter coopérative. C’est une obligation des
les problèmes et difficultés rencontrés, statuts sauf dans le cas des contraintes
les produits futurs et les nouvelles dispo- personnelles  (maladie, urgence…). La
sitions en matière de gestion. Chaque participation des femmes adhérentes
réunion donne lieu à un procès verbal dans l’assemblée générale est
(PV) rédigé et archivé. indispensable du fait qu’elle constitue

REMACOOP 6
13
Le Secteur Coopératif au Maroc

l’un des moments les plus importants les premiers cours d’alphabétisation
dans la vie de la coopérative où les dans le village en 2006. La réussite
décisions importantes seront prises et de la présidente dans la gestion de
les réalisations de la coopérative seront la coopérative est basée selon les
présentées à travers le rapport moral femmes interrogées sur cinq éléments
et financier. Ces derniers sont élaborés fondamentaux  : la transparence, la
annuellement par un comptable et bonne communication, la bonne
les comptes certifiés par un expert gestion des conflits, la concertation et la
comptable. Avant la prise de toute visibilité des méthodes et du règlement
décision, le conseil d’administration interne. Dans le cadre d’une démarche
(CA) de la coopérative organise de motivation, la coopérative consacre
mensuellement et selon les besoins aussi des moments de distraction au
une réunion formelle où il présente profit des femmes  : voyages, visites
aux adhérentes des propositions d’échanges et fêtes au sein de la
pour développer les projets de la coopérative pour apaiser la fatigue des
coopérative et les décisions à prendre. longues périodes de travail.
Celles-ci seront validées à l’unanimité.
Les performances organisationnelles
Les femmes interrogées confirment leur
réalisées par la coopérative Tighanimine
satisfaction de cette approche de prise
ont été récompensées par des
de décisions reflétant la reconnaissance
certifications nationale et internationale
des femmes en tant que composante
en l’occurrence les labels :
essentielle de la coopérative et donnant
à leur accord une place importante ◆B
 IO : Conformité du produit labélisé
dans le processus décisionnel. «  BIO  » à l’agriculture biologique
Certaines décisions proposées par le fondée sur la non utilisation des
CA sont débattues, revues et d’autres engrais chimiques et des pesticides
appliquées en respect des avis des de synthèse.
femmes adhérentes. ◆ I GP  Indication Géographique
:
Toutes les participantes aux Protégée permettant de préserver
entretiens effectués qualifient la gestion les dénominations géographiques
de la coopérative de bonne grâce et offre une possibilité de
à la personnalité de la présidente et déterminer l’origine d’un produit
son charisme sans nier le rôle joué quand il tire une partie de sa
spécificité de cette origine.
actuellement par la trésorière de la
coopérative. La présidente est très ◆F Label « Commerce équi-
 airTrade :

respectée par les femmes adhérentes table» octroyé par l’association


du fait qu’elle a accompagné ces « Fairtrade Labelling Organizations
femmes depuis le démarrage du projet International » (FLO) dont l’objectif
coopératif, même avant en leur assurant est de parvenir à une plus grande

14 REMACOOP 6
Le Secteur Coopératif au Maroc

équité dans le commerce mondial. Conclusion


Il contribue au développement
En guise de conclusion, l’analyse
durable en offrant de meilleures
du modèle de la coopérative à travers
conditions commerciales et en ga-
l’étude de cas de Tighanimine, montre
rantissant les droits des producteurs
que la performance est le résultat d’un
et des travailleurs. C’est un levier de
long processus de construction et ancrage
développement et de réduction
des valeurs de la coopération. Ce
des inégalités visant la juste rému-
processus combine ressources humaines,
nération des producteurs en plus
matérielles, méthodes de gestion et
des dimensions éthiques, sociales et
contrôle de qualité. Ce qui permettra
environnementales. 
un bon positionnement dans le marché
◆O
 NSSA  : Certification de l’Office concurrentiel et le maintien d’une image
National de Sécurité Sanitaire des saine tout au long de l’existence de la
produits Alimentaires donnant structure. L’innovation dans le style de
confiance au consommateur et à leadership de l’organisation, adoption
tous ses partenaires. des règles de travail plus souples et
adaptés aux besoins des femmes
En plus des certifications obtenues,
adhérentes garantissent l’atteinte
la coopérative Tighanimine a acquis
efficace et efficiente des objectifs.
le trophée de la meilleure coopérative
Cette étude permet de conclure que
marocaine à l’occasion de l’année des
la performance est liée à la maitrise
coopératives 2012.
du processus de production et des
Afin de maintenir et renforcer ses per- procédures de la bonne gouvernance.
formances, la coopérative Tighanimine Pour la coopérative Tighanimine ce sont
vise à développer davantage son activi- les facteurs déterminants dans l’atteinte
té apicole et mettre en place un restau- des objectifs économiques et sociaux
rant solidaire pour recevoir les femmes et de la structure. La performance dans
visiteurs de la coopérative en offrant des sa dimension sociale constitue donc la
plats à base d’argane. Aussi, deux autres garante du bon fonctionnement de la
projets sont en perspective. Le premier structure coopérative, chose qui est tout
porte sur la vente en ligne en cours de à fait légitime du fait que la force de
concertation avec un partenaire en toute structure réside dans son potentiel
France pour assurer le stockage des pro- humain.
duits de la coopérative et leur livraison
Du fait que la performance est un
aux clients français. Quant au second, il
processus continue, la coopérative Tigha-
s’agit d’une crèche et préscolaire pour
nimine est consciente des défis à surmon-
les femmes adhérentes pour assurer la
ter par un plan de développement inté-
garderie de leurs enfants.

REMACOOP 6
15
Le Secteur Coopératif au Maroc

gré permettant aux femmes adhérentes ◆U


 n tableau des formations réalisées
d’améliorer leurs revenus mais aussi leurs avec le nom des femmes ayant
conditions de travail, de bénéficier de la participé.
sécurité sociale (CNSS ou mutuelles). ◆D
 es réunions de suivi et contrôle du
Ces aspects sont à prendre en consi- travail des salariés
dération pour maintenir la cohérence ◆D
 es séances d’écoute prévues des
de la coopérative et le rendement des problèmes et besoins des femmes.
femmes adhérentes. La coopérative
La coopérative Tighanimine étant
dispose de certains indicateurs pour
consciente du volume d’investissement
mesurer la performance organisation-
dans le renforcement de sa structure
nelle, économique et sociale à savoir :
interne, ne néglige pas l’environnement
◆D
 es tableaux de mesure du externe et la participation à certaines
rendement de chaque femme, actions sociales en coopérant avec
la capacité de production de la des partenaires institutionnels. A titre
coopérative par périodes et les d’exemple, les campagnes de propreté
horaires exactes pour produite une organisées par certains organismes, mise
quantité x. en place d’un circuit touristique dans
◆U
 n schéma de contrôle qualité 13 villages dans la zone de montagne
propre à la coopérative  de la commune Drarga, création de
l’association Mesguina des ayants droits
◆U
 n tableau de contrôle de l’absen-
de l’argane pour préserver les droits des
téisme des femmes adhérentes.
ayants droits de la zone Mesguina.

Références Bibliographiques
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 ouquin H., (2004), Le contrôle de gestion, Presses universitaires de France, collection Gestion,
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B
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juillet – août, pp. 61-66.
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C
des entreprises : l’utopie mobilisatrice de la performance globale, Journée Développement
Durable, AIMS – IAE d’Aix-en-Provence, pp. 1-22
Lapenu C., Zeller M., Greeley M., Chao-Béroff R., Verhagen K., (2004), Performances sociales:
une raison d’être des institutions de microfinance…et pourtant encore peu mesurées.
Quelques pistes, Revue Monde en Développement, Tome 32, 2004/2 – N°126, pp. 51-68.
 orin EM., Savoie A., Beaudin G. (1994), L’efficacité de l’organisation : conception intégrée.
M
Editeur Gaëtan Morin.

16 REMACOOP 6
Le Secteur Coopératif au Maroc

Les coopératives au Maroc : Transition


de l’agrément vers l’enregistrement,
quelles perspectives ?
Par :

Slimane Lhajji
E-Mail : lhajjislim@yahoo.fr

La promulgation d’une nouvelle loi l’ancienne procédure qui reposait


n°112.12 1 relative aux coopératives sur l’agrément au profit de celle de
exprime l’ultime volonté des pouvoirs l’enregistrement. Quelles sont les raisons
publics de promouvoir le secteur de ce choix  ? et quel est l’apport de
coopératif marocain en lui procurant cette nouvelle procédure sur le secteur
plus d’indépendance et en lui exigeant coopératif marocain ?
d’une part plus de bonne gouvernance
et d’autre part avec l’expression d’une
Quelles sont les raisons de ce choix ? 
profonde conviction du rôle du dit Avec l’application de l’ancienne
secteur dans le développement socio- loi n° 24.83 fixant le statut général des
économique du pays. coopératives et les missions de l’office
Ainsi la loi précitée a apporté un du développement de la coopération4,
grand changement dans les procédures plusieurs difficultés avaient surgi
de création des coopératives notamment celles, liés à la création des
et des attributions de l’Office de coopératives.
Développement de la Coopération
Les principales difficultés soulevées
(ODCo), par la mise en place d’un
se résumaient en :
registre public pour l’enregistrement des
coopératives2.  ◆ la non-adéquation de quelques
dispositions juridiques notam-
Aussi l’inscription dans le dit registre
ment la règle d’institution et
procure la personnalité morale à
d’adhésion des personnes mo-
la coopérative3, ce qui a mis fin à
rales aux coopératives, ainsi

1. Loi n°112.12 relative aux coopératives,


bulletin officiel n°6318 du 18 décembre 2014
4. L a loi n° 24.83 qui fixent le statut général
2. Article 9 de la loi n°112.12 relative aux des coopératives et les missions de l’office
coopératives, bulletin officiel n°6318 du 18 du développement de la coopération,
décembre 2014 bulletin officiel n°3773 du 20 février 1985,
3. Article 11 de la loi n°112.12 relative aux modifiée par le dahir portant loi n°1.93.166
coopératives, bulletin officiel n°6318 du 18 du 10 septembre 1993, bulletin officiel
décembre 2014 n°4220 du 15 septembre 1993

REMACOOP 6
17
Le Secteur Coopératif au Maroc

que la désignation d’un contrô- La lourdeur de la procédure de


leur financier dans les petites et la création des coopératives :
moyennes coopératives ;
En effet avec l’ancienne loi stipulait
◆ l’insuffisance des moyens finan- que la création des coopératives
ciers et de l’autofinancement, la
devrait passer obligatoirement par
faiblesse des services rendus aux
deux étapes, celle de la constitution
membres et les difficultés pour ob-
et celle de l’agrément. La première
tenir des prêts;
était tributaire de l’avis des autorités
◆ lafaiblesse du niveau de forma-
locales et de l’administration technique
tion des gestionnaires et cadres
responsable du secteur d’activité de
des coopératives et la mécon-
la coopérative, qui doit en parallèle
naissance des méthodes de ges-
procéder à l’élaboration d’une étude
tion, des besoins du marché et des
variables économiques, ce qui se sur le projet de constitution. Le passage
répercute sur les difficultés de la à la deuxième n’est possible qu’une fois
commercialisation des produits l’intention de création de la coopérative
des coopératives ; dispose d’un avis favorable émanant
◆ lanon-tenue des assemblées gé- des deux départements concernés
nérales annuelles, en violation des quelque soit le temps écoulé surtout en
dispositions juridiques ; l’absence de délai pour obtention de
◆ la
désignation de contrôleurs des ces avis.
comptes non spécialisés;
La multiplicité des intervenants dans
◆ l’absence au sein des coopéra- la procédure de la création des
tives de structures administratives
coopératives:
et techniques nécessaires pour
assurer une gestion rigoureuse, et Outre l’autorité locale, l’administra-
la limitation des unions des coo- tion technique concernée par le secteur
pératives, qui constituent un instru- d’activité de la coopérative et l’ODCo,
ment pour rationaliser l’utilisation d’autres acteurs interviennent dans
des moyens disponibles, bénéficier l’agrément des coopératives, en l’oc-
des équipements et des ressources
currence le comite consultatif perma-
humaines communes, et améliorer
nent (CCP) qui se compose des repré-
la capacité de négociation.5
sentants du ministère de l’intérieur, des
◆L
 a lourdeur et la multiplicité des in-
finances, et de l’autorité du tutelle de
tervenants dans la procédure de
l’ODCo. Ce comité procède à l’étude
création des coopératives consti-
des dossiers d’agrément et donne son
tuent l’une des principales raisons
qui justifient ce choix: avis au ministre de tutelle de l’ODCo en
vue d’y statuer.

5. L e plan de developpement economique


et social 2000-2004 volume 2

18 REMACOOP 6
Le Secteur Coopératif au Maroc

Une telle situation décourageait tribunal de première instance, afin


plusieurs porteurs de projet à se constituer de commencer leurs activités7.
en coopératives. La nouvelle procédure
L’ensemble de ces mesures aspirent
de création des coopératives au niveau à l’encouragement de la création des
de la loi n° 112.12, est plus engageante coopératives. Ce choix tient sa légitimité
et permet de reduire clairement : de plusieurs points :
◆ L
 e nombre des administrations ◆ L
 ’engagement pour la «  pro-
concernées par la création
motion des coopératives  » en
des coopératives, puisque les
réponses aux recommandations
porteurs de projet coopératifs
de l’Alliance Coopérative Inter-
n’auront à faire qu’a l’ODCo,
nationale (ACI) et le Bureau In-
les autorités locales, et le registre
ternational du Travail (OIT)8 .
des coopérative tenu auprès du
secrétariat-greffe du tribunal de ◆ L
 a concrétisation du projet de
première instance. restructuration et de renforce-
◆ L
 e délai de l’appropriation de ment institutionnel du secteur
la personnalité morale, puisque coopératif, qui était l’objet d’une
l’ODCo est tenu de valider la convention TCP /MOR/6716, si-
dénomination dans deux jours, et gnée par l’ODCo avec l’organi-
les autorités locales sont obligées sation internationale de l’agricul-
de délivrer le reçu de dépôt de ture et de l’alimentation (FAO)
dossier séance tenante. en 19989.

◆ L
 e rôle important montant et
◆ L
 e nombre de documents
qui composent les dossiers de prouvé des coopératives, en tant
constitution6. qu’acteurs de l’économie sociale
et solidaire, très influents.
◆ L
 etemps d’attente pour démarrer
◆ L
 ’adoption proclamée et sans
l’activité, puisque juste après l’en-
registrement au registre des coo-
pératives, la coopérative entre- 7. Article 10 de la loi n°24.83 fixant statut
général des coopératives et les missions
prend ses activités. Alors qu’avec de l’Office de Développement de la
l’ancienne loi, les coopératives Coopération
devaient attendre la publication 8. «  Promoting cooperatives  »information
de leur agrément au bulletin offi- guide to ILO recommandation n°193(
Bureau international du Travail )
ciel et procéder au dépôt légal
auprès du secrétariat-greffe du 9. La coopération entre la FAO et le Royaume
du Maroc «  Principales réalisations depuis
l’ouverture de la Représentation de la
6. Article 11 de la loi n° 112.12 relative aux FAO à Rabat en 1982 » Représentation en
coopératives Maroc - juillet 2011-

REMACOOP 6
19
Le Secteur Coopératif au Maroc

retenue du cadre coopératif ment applicable dans les Etats membres


par l’ensemble des programmes de l’OHADA. Il s’agit de l’acte uniforme
nationaux et sectoriels. OHADA du 15 décembre 2010 relatif au
droit des sociétés coopératives10. Parmi
◆ L
 ’influence des textes de loi
ces pays plusieurs ont des mémoran-
régissant les coopératives dans
dums de coopération dans le domaine
d’autres pays en tant que source de développement de l’économie
d’inspiration. sociale et solidaire.
Enregistrement des coopératives  :
Lecture dans d’autres législations
coopératives 
17 pays africains membres de l’OHA-
DA (Organisation pour l’harmonisation
en Afrique du droit des affaires) ont opté
pour l’enregistrement des coopératives
10. L’acte uniforme OHADA du 15 décembre
auprès des tribunaux, en adoptant en 2010 relatif au droit des sociétés
2010 un acte uniforme relatif aux socié- coopératives, signé à Port Louis le 17
octobre 1993, tel que révisé à Québec le
tés coopératives. Ce texte est directe-
17 octobre 2008.

20 REMACOOP 6
Le Secteur Coopératif au Maroc

Tableau comparatif 1112


relatif à l’enregistrement des coopératives entre le Maroc et certains
pays africains

Législation Ohada11 Marocaine 12

Dénomination Le Registre des Coopéra-


Le Registre des Sociétés Coopératives
du registre tives
♦recevoir l’immatriculation des sociétés recevoir également les en-
coopératives et de leurs sociétés faîtières registrements, les mentions
régies par le présent Acte uniforme ; constatant les modifications
♦ r ecevoir également les inscriptions et les et les demandes de radia-
Objet mentions constatant les modifications sur- tion du dit registre .Art. 10
venues depuis leur immatriculation, dans la
situation juridique des sociétés coopératives
et des sociétés coopératives faîtières. Art 69

Est composé d’un Fichier National et d’un Est composé d’un registre
Composition Fichier Régional. Art.70. central et des registres
du registre locaux. Art. 9

♦  Le Registre des Sociétés Coopératives est le registre central est tenu


tenu au niveau local par l’autorité adminis­ par l’ODCo.
trative chargée de la tenue dudit registre. les registres locaux sont
♦ Dans chaque Etat Partie, l’autorité admi- tenus par le secrétariat
Organisation greffe auprès du tribunal
nistrative chargée de la tenue du Registre
du Registre de premier instance. Art.9
des Sociétés Coopératives est l’organe
des Sociétés
Coopératives déconcentré ou décentralisé de l’autorité
nationale chargée de l’administration terri-
toriale ou l’autorité compétente, auquel est
immédiatement rattaché le siège de la
société coopérative. Art.70.

Les informations figurant dans les formulaires Le registre central des


remis à l’autorité administrative chargée de la coopératives centralise et
Destination des tenue du Registre des sociétés coopératives diffuse les données tenues
informations sont destinées à l’information du public. Art.70. par les registres locaux aux
tiers. Art. 9

Délai La société coopérative requiert son immatri- La coopérative requiert


d’immatricula- culation, dans le mois de sa constitution, au son enregistrement une
tion Registre des Sociétés Coopératives. Art.75 fois immatriculée. Art. 11

11. L’acte uniforme OHADA

12.La loi n° 112.12 relative aux coopératives

REMACOOP 6
21
Le Secteur Coopératif au Maroc

Aucune société coopérative ne peut être Aucune coopérative ne


Nombre immatriculée à plusieurs registres ou à un peut être enregistrement
d’immatricula- même registre sous plusieurs numéros. Art.77 dans plusieurs registres ou
tion dans un même registre.
Art.13
Toute société coopérative jouit de la Toute coopérative jouit de
personnalité juridique à compter de son la personnalité juridique à la
Personnalité
immatriculation au Registre des Sociétés date son enregistrement au
juridique Coopératives. Art.78 Registre des Coopératives.
Art.11
Toutefois, l’exercice de son activité est soumis Contrôle par les adminis-
Règlement aux règles qui régissent cette activité. Art.78 trations concernées par
d’exercice de l’activité de la coopéra-
l’activité tive. Art 78

Conclusion : En effet la préservation de la


«  vocation coopérative  » ou «l’identité
L’instauration d’un registre des coo-
coopérative »  doit être un éminent défit
pératives est une mesure de reconnais-
pour aménager le secteur coopératif,
sance et protection des coopératives
par l’Etat, d’où l’obligation de la protec- surtout en l’absence de tout contrôle
tion du terme  « coopérative » ou « union préliminaire, lors du pré-enregistrement.
de coopératives  » par la loi13 et obliga- Les assises de cette nouvelle législation
tion des organismes enregistrés dans le des coopératives15 sont favorables encore
dit registre a l’utiliser dans leur dénomi- faut-il laisser le temps au temps pour en
nation, publicité, marque, emballage ou juger la pertinence de l’adoption du
autre documents. système d’enregistrement. Car le cadre
Le choix de la règle de l’enregistrement juridique est à double tranchant, puisqu’il
des coopératives exprime la volonté peut être facilitateur ou une entrave pour
de promouvoir le secteur coopératif la promotion des coopératives en jouant
par l’allègement de la procédure et un rôle  déterminant pour la viabilité et
la limitation des acteurs intervenants l’existence des coopératives.
dans le processus de constitution des
coopératives. Un choix qui influence
les missions de l’ODCo et celles des
administrations techniques, ainsi le rôle
de l’ODCo se voit centrer dans le volet
du contrôle du respect des coopératives
des textes règlementaires régissant les
coopératives14. 15. L a loi n° 112.12 relative aux coopératives,
Décret n° 2.15.617 fixant les règles
d’organisation et de gestion du registre
13. L ’article 95 de la loi n° 112.12 relative aux des coopératives, bulletin officiel n° 6455
coopératives du 11 avril 2016 et l’arrêté du ministre de
la justice et des libertés n° 1369.16 du 9 mai
14. L ’article 78 de la loi n° 112.12 relative aux 2016, bulletin officiel n° 6482 du 14 juillet
coopératives 2016 page 5466.

22 REMACOOP 6
Le Secteur Coopératif au Maroc

FINANCEMENT ET SPÉCIFICITES
DES RÈGLES DES COOPÉRATIVES
AGRICOLES MAROCAINES
Par :

M. Abdeljabbar Bouroua
E-Mail : bouroua@hotmail.com

Doctorant, Département des Sciences humaines,


Unité de Recherche « Sciences Economiques et Sociales Appliquées à
l’Agriculture », Institut Agronomique et Vétérinaire Hassan II - Rabat - Maroc

Résumé
Cet article a pour objectif de traiter le comportement financier d’un échantillon de
coopératives marocaines des produits de terroir, en l’occurrence celles des filières
d’arganeraie et oléicole.Il consiste, en premier lieu, à analyser et à classer les modes
de financement les plus choisis par les coopératives. Il s’intéresse, en second lieu,
à une analyse de la relation entre les spécificités des règles des coopératives et
leur capitalisation. L’étude empirique examine ainsi un échantillon non probabiliste
opportun de 16 coopératives, en faisant recours à une enquête effectuée via une
entrevue, puis à une analyse des données qualitatives de l’échantillon durant les
périodes 2013, 2014 et 2015. Les tests de validité des hypothèses relatives aux questions
de recherche reposent sur une démarche à caractère descriptif, renforcée par un
modèle d’analyse qualitative.

Mots clés: Coopérative, modes de financement, règles de la coopérative,


capitalisation.

Introduction un instrument important de lutte


contre la précarité, la pauvreté et le
Depuis le lancement de l’Initiative
chômage, et jouent un rôle essentiel
Nationale de Développement Humain
dans l’amélioration des conditions
et le Plan Maroc Vert respectivement
sociales et matérielles de la population,
en 2005 et 2008 qui ont réservé aux
notamment rurale.
coopératives des produits de terroir
un intérêt particulier, les coopératives Selon l’Office de Développement
des produits de terroir sont devenues de la Coopération «ODCo», le nombre

REMACOOP 6
23
Le Secteur Coopératif au Maroc

de coopératives agricoles au Maroc a et sociaux. Elle est gérée selon les valeurs
atteint, à fin juin 2015, 9.966 coopératives et les principes fondamentaux…».
avec 347.827 adhérents (es) et un Ces principes très spécifiques à la
capital de 1.542.409.329 DH. Les coopérative sont déterminants dans sa
investigations entreprises par le Ministère capitalisation.
de l’Agriculture et de la Pêche Maritime
La présente recherche s’inscrit
« MAPM » ont permis d’inventorier plus de
dans ce cadre, elle vise à explorer
100 produits de terroir et le recensement
le comportement des coopératives
de plus de 200 groupements de
quant aux modes de financement
producteurs des produits de terroir.
qu’elles choisissent et la relation entre
Une récente étude,par l’Agence Pour
la spécificité des coopératives et leur
le Développement Agricole «  ADA» sur
capitalisation. L’étude s’est intéressée
100 coopératives de produits du terroir,
à un échantillon de seize coopératives
a montré que leur chiffre d’affaires est
marocaines de produits de terroir,
passé de neuf millions de dirhams en
labellisés et certifiés, des huiles d’argan
2008 à 320 millions en 2014. Le nombre
et d’olives. La première section de
des coopératives d’argan a atteint, à
ce travail s’articulera sur l’analyse des
fin juin 2015, 290 avec 7.302 adhérentes
différents modes de financement utilisés
et un capital de 2.311.126 DH; soit une
par les organisations coopératives. La
capitalisation moyenne, jugée faible, de
deuxième section discutera les apports
316 DH par adhérente. 29 coopératives
théoriques traitant des spécificités
d’argan ont été certifiées (Normacert,
des coopératives en relation avec
2015). Quant aux coopératives de
leur capitalisation. Les questions de
l’huile d’olive de terroir, leur nombre
recherche, la méthodologie, l’analyse
a atteint 54. Depuis 2008, la loi 25-06
et les résultats seront énoncés et
relative aux Signes Distinctifs d’Origine
développés dans la troisième section
et de Qualité «  SDOQ  » des denrées
consacrée essentiellement à l’étude
alimentaires a permis, en plus de garantir
empirique.
l’origine, la traçabilité et la qualité aux
consommateurs, de renforcer la valeur Selon Cook (1993), la formule
ajoutée des coopératives (Azenfar, coopérative avantagerait les membres
Mahfoudi, 2015). en permettant de lutter contre le pouvoir
de marché, profiter de gains monétaires
Selon l’article 1 de la loi marocaine
associés aux économies d’échelle,
n° 112-12 fixant le Statut Général des
réduire le risque, offrir des services
Coopératives: «La coopérative est un
jusqu’alors indisponibles et bénéficier de
groupement de personnes physiques ou
marges supplémentaires. Néanmoins,
morales, qui conviennent de se réunir
moins de leviers de financement
pour créer une entreprise qui leur permet
sont disponibles pour la coopérative
de satisfaire leurs besoins économiques
comparativement à l’entreprise à

24 REMACOOP 6
Le Secteur Coopératif au Maroc

capital-actions, en plus d’être souvent rative. Malgré que le problème ne soit


incertains, voire problématique. La pas exclusif au mouvement coopératif,
formation de capital et le rendement ce mode de financement demeure dif-
sont parmi les principaux enjeux des ficile pour des projets à grande échelle,
coopératives lesquels doivent offrir puisque la coopérative ne détient pas
des services et du travail qui font sens suffisamment de fonds considérant le
commercialement. versement de ristournes annuellement.
Les membres participent financièrement
1- Choix du mode de financement
à leur coopérative par le biais de leur
par les coopératives
part sociale, contribution qui varie selon
De l’apport financier de ses les coopératives. Lors d’exercices finan-
membres ou d’un financement ciers positifs, les membres peuvent avoir
externe dépendra la viabilité de la un accès limité aux bénéfices, versés
coopérative (Stockbridge et al., 2003). par le biais de ristournes proportionnelles
Le développement et l’élargissement à l’utilisation des services de la coopéra-
des marchés du crédit et de l’assurance, tive par le membre, et affectent égale-
aussi problématique soit-il, n’en est ment une partie de ces trop-perçus afin
pas moins indispensable pour garantir de constituer la réserve de la coopéra-
la fluidité financière (Fraval, 2000). Les tive (Noël, 1987; ACI, 2007).
différents marchés de marchandises
Selon la déclaration sur l’Identité
sont cloisonnés et non intégrés dans
Coopérative Internationale de l’ACI
un fonctionnement d’ensemble : cette
(2007), le principe de l’autonomie et
séparation des circuits entretient des
fluctuations de prix et limite les revenus. l’indépendance va même jusqu’à
La mise à exécution des règles est aussi limiter la recherche de fonds externes,
importante que les règles elles-mêmes ainsi que la rédaction d’accords
(Kaji, 1998). Des règlements et des avec d’autres institutions, y compris
systèmes de mise à exécution mal conçus les instances gouvernementales dans
dans le secteur financier peuvent avoir l’optique de préserver l’indépendance
des répercussions néfastes sur la volonté de la coopérative (Prakash, 2003). Les
des organismes de prêt de prêter, membres du conseil d’administration
sur la capacité des organisations qui sont élus parmi les membres de la
empruntent, d’emprunter et d’investir coopérative lors d’assemblées et
et, par conséquent, sur la performance répondent à une règle d’indépendance
de l’économie toute entière. voulant que la coopérative s’administre
de façon autonome (Noël, 1987).
2.1 - L’autofinancement Néanmoins, la participation financière
L’autofinancement constitue un mé- des membres est complexe puisque
canisme de capitalisation parmi ceux ceux-ci ne sont pas, dans la plupart
dits traditionnels pour la formule coopé- des cas, en mesure de verser de gros

REMACOOP 6
25
Le Secteur Coopératif au Maroc

montants d’argent à leur coopérative marché. «  L’absence de l’information


et ce, en plus de n’avoir que rarement sur les prix et de nouvelles technologies,
l’incitatif de le faire, puisque le principe l’absence des interconnections entre
coopératif repose sur l’utilisation et non les acteurs du marché, les distorsions
sur l’apport de capitaux (Doyon, 2005). sur le marché des inputs et outputs et
l’absence de crédit souvent rendent
2.2 - Les subventions difficile pour les petits producteurs de
Au niveau de l’optimisation de bénéficier des opportunités du marché »
la distribution des subventions, le (Fonds International de Développement
Canada et les États-Unis ont connu des Agricole « FIIDA », 2001).
coopératives rentables en raison des
L’accès au crédit est faible à cause
subventions du gouvernement pour le
des obstacles comme les coûts de
secteur. Cependant, les subventions
transaction et les faiblesses dans le
ne sont pas une condition de la
milieu institutionnel, mais aussi les faibles
réussite. Par exemple, les coopératives
mécanismes de l’exécution des contrats
de la Nouvelle-Zélande fonctionnent
et des droits de propriété qui sont
sans subventions du gouvernement,
cruciales dans une économie de libre
mais bénéficient en revanche d’une
marché (Smithet Stockbridge, 1999).
législation plus souple que d’autres
pays, ce qui a favorisé l’innovation dans L’emprunt est incertain dans la
la conception de la coopérative (Evans mesure où les institutions financières ne
et Meade, 2005). sont pas enclines à investir dans une
coopérative puisqu’elles se basent
L’activité d’une organisation coopé-
souvent sur les mêmes ratios financiers
rative peut également être compro-
que les entreprises capitalistes alors que
mise par des subventions par le fait de
les bénéfices de ces deux institutions
ne pas se concentrer sur ses activités de
divergent à plusieurs niveaux. De
base et de ne pas proposer des incita-
plus, les coopératives sont souvent
tions claires à ses membres, et par l’as-
perçues comme des entités avec
sistance et l’interférence émanant de
une gouvernance problématique,
donateurs et gouvernements qui inte-
étant donné les intérêts divergents des
ragissent avec elles plus comme agents
membres, laissant place à une sous-
de développement que comme entre-
capitalisation de l’entreprise et une
prises privées(Penrose-buckley, 2007).
augmentation des risques financiers
2.3 - Recours à l’emprunt bancaire  (Doyon, 2002). Pour surmonter la limite
inhérente des coopératives quant
Il y un consensus pour dire que
à l’accès au capital, des formes
l’opportunité pour les petits producteurs
d’adaptation rendues possibles suite à
agricoles d’augmenter leurs revenus en
des changements législatifs facilitant
vendant leurs produits, dépend de leur
d’une manière limitée le recours aux
capacité à participer avec succès au

26 REMACOOP 6
Le Secteur Coopératif au Maroc

emprunts du fait de la fragilité de la aussi à la coopérative une plus grande


situation de gouvernance interne et de certitude sur la qualité et la quantitéde
l’absence de garanties réelles. Toutefois, produits qu’elle recevra. Grâce au cir-
elles semblent comporter certains cuit de commercialisation garanti et à
risques : « le recours massif aux emprunts l’octroi d’un crédit, la contractualisa-
risque de déstabiliser la coopérative et de tion permet aux agriculteurs d’investir
provoquer un déséquilibre des pouvoirs dans des actifs spécifiques, comme
de décision et de contrôle au détriment des arbustes pérennes ou des installa-
des adhérents  » (Audroing, 1995). Les tions de séchage. Elle permet aussi aux
coopératives d’approvisionnement coopératives d’investir dans des actifs
souffrent peu des limites financières, car spécifiques, tels que des équipements
le besoin en capital est moindre que de transformation plus sophistiqués ou
pour les coopératives actives dans le un stockage réfrigéré, car elles ont da-
secteur de la transformation (Idem). vantage de certitude concernant la
quantité et le type de produits qu’elles
2.4- 
Recours aux avances contrac-
recevront. Enfin, elle encourage les
tuelles
échanges répétés entre les exploitations
La notion de la performance est et les entreprises (Ménard et Valceschini,
approchée en mettant en relief la 2005; Verhaegen et Van Huylenbroeck,
théorie «  Resource-basedview  » qui 2002).
avance que le marché des facteurs
définit le succès des entreprises plus Toutefois, il n’existe pas seulement
que le marché des produits. Ce sont les de bons côtés à la contractualisation,
ressources de grande valeur d’usage puisque celle-ci doit être établie selon les
dont dispose l’entreprise qui expliquent normes afin d’éviter d’éventuels conflits
son succès (Ngobo et Stephany 2001). et des problèmes de part et d’autre,
tels quela faible qualité d’intrants,
La théorie des contrats permet d’ex- omission ou délai dans la manutention
pliquer les contraintes contractuelles des produits, coûts associés à la non-
auxquelles sont confrontées les coopé- reconduction d’un contrat, etc.
ratives dans un environnement d’op- (Hayenga et al, 2000). De plus, un autre
portunisme, d’asymétrie d’information, désavantage souvent évoqué du côté
de rationalité limitée et des conditions du producteur agricole est celui de la
d’économie des coûts de transaction perte d’indépendance dans le cadre
(Williamson, 1979) et de négociation de contrats de production (Idem). De
(Zusman 1992). La coopérative est ainsi fait, les producteurs doivent s’interroger
un lien de contrats.La contractuali- pour savoir si la problématique associée
sation réduit l’incertitude en garantis- à la perte d’autonomie surpasse les
sant un circuitde commercialisation à avantages de la contractualisation,
l’exploitant agricole et en diminuant la notamment la diminution des risques.
probabilité de tromperie. Elle apporte

REMACOOP 6
27
Le Secteur Coopératif au Maroc

En effet, cette problématique a trait Nilsson, 2001; Fahlbeck, 2007). La non-


au fait que la contractualisation ne transférabilité des parts limite, par le fait
permet pas d’atteindre à la fois une même, l’horizon de temps disponible
coordination verticale et horizontale pour effectuer des investissements dans
du secteur agricole, ce qui est pourtant le modèle de coopérative traditionnelle
nécessaire et permet de mieux (Vitaliano, 1983; Nilsson, 2001). En fait,
distribuer la valeur ajoutée à travers l’argent investi par le membership
l’ensemble des maillons de la chaîne. actuel de la coopérative bénéficiera,
Plusieurs problèmes internes au niveau à long terme, à la génération suivante,
de la capitalisation ont limité le rôle même si les investissements pouvaient
de coordination de la coopération en être très profitables pour les membres
agriculture (Vézina, 2013). de le faire, et ce, à cause du problème
de l’horizon(Jensen et Meckling, 1979).
2 - Relation entre spécificités des Par conséquent, la coopérative voit
coopératives et capitalisation  : sa valeur diminuer et son capital
apports théoriques augmenter très lentement par rapport
Le problème d’accès au capital fait à ce que la situation pourrait être si les
l’objet de cinq différentes problématiques investissements à long terme étaient
rattachées à la mauvaise définition possibles (Nilsson, 2001).
des droits de propriété, dont les trois
3.2 - Le problème du portfolio
premiers trois sont souvent connus sous
l’appellation « residual claims problems » Selon Trechter, le problème du portfolio
(Uzea, 2011), à savoir les problèmes intervient au sein de la coopérative
de l’horizon, du portfolio, du passager puisque le membre-investisseur n’est
clandestin qui sont issus de la divergence pas en mesure d’investir dans sa
entre les intérêts des membres à la coopérative de façon à respecter son
fois utilisateurs et investisseurs de la aversion au risque, qui le caractérise
coopérative. Les deux autres problèmes personnellement en tant qu’investisseur
sont l’hétérogénéité du membership (Vitaliano, 1983; Cook, 1995; O’Connor
(Lamarque, 2012) et le désalignement et Thompson, 2001; Trechter, 2003).
Royer (1999) signale que le conseil
des incitations (Royer, 2009).
d’administration opterait alors pour un
3.1 - Le problème de l’horizon portfolio conservateur afin de se prémunir
contre les risques et les divergences
Le problème de l’horizon se caractérise
d’opinions entre les membres (Trechter,
par le fait que les parts coopératives
2003). Ainsi, ce problème se traduit
ne peuvent être transférées lorsqu’un
par des investissements sous-optimaux
membre se retire de son institution et que ainsi qu’une stratégique d’affaires très
la structure coopérative a tendance contraignante de la part des membres
à avoir une stratégie d’investissement (Cook, 1995; Nilsson, O’Connor et
limitée dans le temps (Vitaliano, 1983; Thompson, 2001).

28 REMACOOP 6
Le Secteur Coopératif au Maroc

3.3 - Le problème du passager clan- membership des coopératives, ce


destin phénomène est également présent
Cette problématique, souvent associée dans un secteur donné, puisque
à la formule coopérative, détient à la certains producteurs, non-membres de
fois une dimension interne et une autre la coopérative, peuvent bénéficier des
externe. Par rapport au resquillage retombées positives rattachées à la
interne, il s’agit d’une problématique présence d’une coopérative dans leur
associée à l’égalité des membres au secteur de production (Nourse, 1992).
sein d’une coopérative(Vézina, 2013). Ainsi, des producteurs agricoles, non-
En effet, le membership fait totalement membres de la coopérative, voient leur
abstraction de l’ancienneté ou encore situation améliorée par la présence
de la participation financière des de l’institution dans leur secteur, sans
membres étant donné son adhésion toutefois y participer financièrement ou
ouverte : une caractéristique intrinsèque simplement de façon philanthropique
au mouvement coopératif (Cook, (Idem).
1995).Les nouveaux membres ont peu
d’incitatifs à investir dans la coopérative, 3.4 - P
 roblème de l’hétérogénéité du
car ces capitaux ne prendront pas de membership
valeur dans la forme coopérative dite Le fait que la coopérative recourt
traditionnelle. au marché des capitaux exacerbe
Cook (1995) mentionne que ce l’hétérogénéité du membership. Ainsi,
problème peut se solder par une si l’objectif de la coopérative est de
réticence des membres à investir dans croître et que ses besoins en capitaux
leur coopérative et, en fin de compte, augmentent, en optant pour ce type
à un manque flagrant de capital. de capitaux, il y a création d’un hybride
De son côté, Nilsson (2001) avance qui contient à la fois des membres et
que la coopérative permettrait à ces des investisseurs; comment concilier
nouveaux arrivants d’être des passagers les aspirations de ces deux groupes ?
clandestins au sein de la coopérative, Ce qui montre qu’il existe un lien entre
ce qui amènerait une distorsion des la capitalisation et la préservation de
signaux de marché étant donné que l’identité coopérative. On est en face
les membres, déjà actifs depuis des à des problèmes déjà omniprésents
années au sein de la coopérative, ont rattachés à la préservation des valeurs
moins d’incitatifs à continuer d’investir coopératives (Lamarque, 2012).
temps et argent dans la coopérative, 3.5 - P
 roblème de désalignement des
car il n’y a aucune différenciation selon incitations
l’ancienneté du membership.
L’alignement des incitations doit
Outre les problèmes de passager permettre de contrecarrer le resquillage
clandestin qui existent à l’intérieur du des producteurs agricoles et d’éviter les

REMACOOP 6
29
Le Secteur Coopératif au Maroc

décisions individuellement rationnelles, premier mode de financement préféré


mais collectivement irrationnelles(Royer, par ces coopératives est la subvention.
2009). Quand les petits exploitants Près de 80% des coopératives d’argan
agissent collectivement, ils peuvent interviewées ont obtenu des subventions
accéder facilement au crédit et résoudre lors du démarrage de leurs projets et
le problème de leur capitalisation. 70%ont obtenu des subventions liées
Ils peuvent bénéficier également de à l’activité. Quant aux coopératives
coûts de transaction réduits pour leurs oléicoles interviewées, 50% ont obtenu
échanges de marché. Ils obtiendront des subventions d’investissement et
des informations de marché, un 30% des subventions d’exploitation.
meilleur accès sécurisé à de nouvelles L’obtention de subventions a,
technologies afin de cibler les marchés certainement, aidé les coopératives
à forte valeur ajoutée, leur permettant à réaliserleurs projets d’investissement.
de concurrencer plus efficacement Néanmoins, un esprit de dépendanceà
les agriculteurs et les entreprises la subventiona été ancré chez ces
agricoles(Markelova et al., 2009). coopératives qui les découragent
à chercher d’autres sources de
4.3 -Résultats : financement externes ou à renforcer
Dans le but de répondre à nos leurs capitaux. D’ailleurs, le capital de
questions de recherche, une étude démarrage est généralement très faible
exploratoire est menée auprès d’un d’autant plus que l’article 26 de la loi
échantillon non probabiliste opportun 112-12 sur les coopératives un capital
composé de 16 coopératives de minimum de 1.000 DH pour créer une
valorisation des huiles d’arganet d’olives coopérative.
de terroir dont les produits sont labellisés
Il est indispensable de noter
et certifiés depuis au moins 2010, situées
que l’augmentation du capital ne
dans des régions à fort potentiel. Les
constitue pas une réelle opportunité
entrevues sont réalisées avec leurs
de financement. Dans près de 80%, les
dirigeants via un guide d’entretien semi-
apports des nouveaux adhérents sont
directif.La majorité des coopératives
très limités et ont pour but d’intégrerla
interviewéesn’ont pas dedirecteurs ou
coopérative plutôt que de participer au
de responsables financiers, et ce par
capital ou aux plans de financement.
manque de ressources financières.
L’entrée de nouveaux adhérents
4.3.1 - A
 nalyse des modes de finan- durant ces dernières années n’a été
cement des coopératives possible qu’après que les non-membres
Toutes les 16 coopératives ont remarqué une amélioration des
interviewées réclament des subventions conditions sociales des membres
auprès des bailleurs de fonds, car le adhérents (es) dans les coopératives.

30 REMACOOP 6
Le Secteur Coopératif au Maroc

Néanmoins, la création de «  MCC  »,de 15% par un crédit financé


nouvelles parts sociales, même par le Crédit Agricoledu Maroc « CAM »
s’il a permis d’augmenter la part et de 5% par un autofinancement du
d’approvisionnement en matières GIE.
premières, l’effet sur la capitalisation
La difficulté d’accès à l’endettement
a été faible en raison de la modestie
incite les coopératives à rechercher
des contributions dans le capital par
de l’autofinancement, même si
la majorité  des membres qui ont soit
l’endettement est préféré chez
des revenus très moyens, soit ils sont
les coopératives. Néanmoins, plus
des salariés chez la coopérative.
de 70% des coopératives trouvent
L’activité de la coopérative ne génère
des difficultés d’accès au crédit
que de faibles ristournes annuelles. La
bancaire, que ce soit pour les crédits
capitalisation moyenne par adhérent
de fonctionnement(avance sur
ne dépasse pas 350 DH chez les
marchandises « ASM », facilité de caisse
coopératives d’argan et 450 DH chez
notamment) ou d’investissement, et
celles de l’huile d’olives interviewées.
ce en raison des conditions bancaires
Malgré l’appel des dirigeants lancé aux
désavantageuses et de la réticence
adhérents pour améliorer leurs parts
de certaines banques commerciales à
sociales, il semble qu’ils n’arrivent pas
financer les groupements de l’agriculture
à assimiler les gains qui peuvent être
solidaire qu’elles considèrent comme un
générés, car ils se considèrent comme
créneau risqué, car mal gouverné.Par
des utilisateurs et non des investisseurs.
ailleurs, près de 70% des coopératives
L’adoption de l’approche de affirment ne pas être au courant de
l’autofinancement n’empêche l’existence de l’aval «  CCG  » de la
pas les coopératives de saisir des Caisse Centrale de Garantie.
opportunités prévues dans le cadre
Néanmoins, le Crédit Agricole du
des programmes de mise à niveau
Maroc, fidèle à sa mission de service
ou d’appui, de crédits ou de services
public, a pu débloquer la situation en
bancaires subventionnés par des
finançant, soit à titre individuel, soit
plans sectoriels gouvernementaux, tel
dans le cadre de partenariats avec les
que le programme CatalystFundqui
institutionnels, tel que le MAPM,plusieurs
a été destiné à financer20 projets de
groupements (coopératives, unions de
Groupements d’Intérêt Economique
coopératives, groupements d’intérêt
«  GIE  »pour un montant de 300 millions
économique),à des conditions
de dirhams. Le projet d’investissement
bancaires avantageuses,avec l’aval
de chaque GIE a été financé à hauteur
« CCG » qui garantit entre 60 et 70% du
de 30 % par un don de l’Etat, de50% par
crédit bancaire en principal,à court,
un don des Etats-Unis d’Amérique  de
moyen et long terme.
Millennium Challenge Corporation

REMACOOP 6
31
Le Secteur Coopératif au Maroc

Par ailleurs, 50% des coopératives est faible à négocier des prix de ventes
interviewées affirment qu’elles préfèrent satisfaisants couplés à ces avances,
ne pas recourir au crédit bancaire par soit parce que certaines coopératives
conviction. En effet, les membres de ces refusent de recevoir des avances
coopératives sont hétérogènes sur cette sur commandes pour risque de non-
question, et c’est l’avis des membres qui tenue des engagements contractuels
sont contre le crédit qui est retenu en à moyen terme envers les clients.
dernier lieu. Quant auxcoopératives qui L’esprit d’engagement est quasi-absent
ont bénéficié d’un financement bancaire chez les membres dont la majorité est
(une seule de l’huile d’argan et deux de analphabète.
l’huile d’olives), celles-ci affirment que
Grâce aux avances, les coopératives
les montants accordés sont endessous
de l’huile d’argan interviewées ont vu
des besoins d’exploitation sollicités,
leur chiffre d’affaires évoluer de 40%
avec unretard dans le traitement
de 2013 à 2015. Plus de 50 % de leurs
des demandes et le déblocage des
ventes sont écoulées dans les marchés
crédits  ; ce quia affecté énormément
organisés et plus de 70% de leurs produits
leur trésorerie pour l’approvisionnement
sont vendus en vrac. Les coopératives
précoce en matières premières
de l’huile d’olives interviewéesont vu leur
etprogrammer des commandes dans les
chiffre d’affaires évoluer de25% de 2013
délais.
à 2015. Plus de 25% de leurs ventes sont
Les avances sur commandes effectuées écoulées dans les marchés organisés,
par les clients aux coopératives dans et plus de 70% de leurs produits sont
le cadre de la réalisation de contrats vendus en vrac. La vente sur les marchés
commerciaux constituent également informels est due à la faible capacité
une préférence pour assurer le du leadership à négocier correctement
financement des dépenses d’exploitation des contrats permanents avec des
des coopératives (achat de stock distributeurs organisés affectant ainsi
des fruits secs, et des olives, transport, leur trésorerie. La grande et moyenne
rémunération main d’œuvres…). 80% distribution «  GMD  » a permis seulement
des coopératives des huiles d’argan et à quelques coopératives de l’huile
d’olives interviewées préfèrent recourir d’olivesalimentaire de générer des flux de
aux avances des clients au lieu des trésorerie. Ce produit, plus demandé que
crédits bancaires. Néanmoins, seulement l’huile d’argan alimentaire, se développe
40% des coopératives oléicoles arrivent grâce à l’importance du marché de
à conclure des contrats stipulant des distribution qui pourra dépasser les
avances sur les commandes contre frontières nationales. Cependant, 70%
60% pour les coopératives d’argan. Les des coopératives réclament le retard
autres coopératives des deux filières de paiement causé par les Grandes et
n’ont pas pu décrocher des avances, Moyennes Surfaces «  GMS  » affectant
ainsi leur trésorerie.
soit parce que la capacité du leadership

32 REMACOOP 6
Le Secteur Coopératif au Maroc

4.3.2 - S
 pécificité des coopératives dans le cadre de contrats à terme. Ces
et modes de financements coopératives se contentent de vendre
des coopératives des petites quantités en vrac dans les
marchés informels ou dans les salons et
4.3.2.1 - Problème d’horizon les foires. Ces ventes, très faibles,ne leur
La non-transférabilité des parts permettent pas de constituer un fonds de
entre membres et/ou non membres, roulement consistant pourle paiement
l’interdiction d’entrée de nouveaux des adhérents à temps et complique
membres chez certaines coopératives, l’opération d’approvisionnement en
même si la majorité des membres matières premières, notamment les fruits
sont des personnes âgées, ainsi que secs de l’arganeraie (prix spéculatifs)
l’exigence de l’appartenance à la face à la diminution des superficies
localité comme condition à l’adhésion exploitées due à la dégradation des
pour des personnesdisposant de superficies, aux surexploitations, aux
moyens financiers, renforcent la sous- sécheresses structurelles, et ce malgré
capitalisation pour plus de 80% des les opérations de reboisement dans les
coopératives interviewées. Elles les régions d’arganeraie.
exposent également aux problèmes
de financement de leur besoin 4.3.2.3- P
 roblème de passage
d’exploitation face aux menaces du clandestin
marché d’approvisionnement de la L’adhésion à la coopérative n’étant
matière première (olives et fruits secs pas obligatoire. Dans plus de 70% des cas
d’argan notamment) qui est caractérisé de coopératives, les producteurs non-
par la déviation des livraisons par les membres bénéficient des retombées
membres des coopératives et par les sans participer financièrement à la
spéculations locales. coopérative. Ils pouvaient s’accaparer
les gains engendrés par l’action
4.3.2.2- Problème de portfolio collective sans en supporter les coûts,
Au niveau de ce problème, il a été ce qui leur conférait des bénéfices
constaté l’impossibilité pour la majorité encore plus élevés que ceux des
des coopératives interviewéesde adhérents. Cette situation incite les
respecter le profil d’investisseur de leurs membres à vendre leur productionà
membres  ; ce qui ne permet pas à la d’autres acheteurs même à prix plus bas
coopérative de dégager un fonds de étant donné qu’ils sont payés à temps.
roulement ainsi qu’un capital financier Mais, cette situationcrée,en même
dédié à l’investissement en technologie. temps, un climat d’incohésion sociale
Cette situation est aggravée par le refus et affaiblit l’esprit d’appartenance, et
par les membres du bureau de gestion donc un désengagement progressif
ou du conseil d’administrationde pour contribuer au développement des
certaines coopérativesdes avances des investissements de la coopérative.
clients pour réaliser des commandes

REMACOOP 6
33
Le Secteur Coopératif au Maroc

4.3.2.4 - Problème de désaligne- verticale, car les coopératives ne


ment des incitations peuvent vendre que de petites
Près de 70% des coopératives commandes conditionnées ou en vrac ;
interviewées,membres des groupe- ce qui les prive du conditionnement
ments, affirment que la création des de leurs produits, renforce leur faible
Groupements d’Intérêt Economiques pouvoir à négocier des contrats
n’a pas permis à toutes les coopératives commerciaux, accentue leur déficit de
de vendre leurs produits. En effet, l’op- trésorerie et limite leur possibilité à
portunisme négatif de certains membres générer des marges supplémentaires
de conseil d’administration fait que pour les adhérents (es) qui peuvent
les livraisons concernent en priorité les servir, en partie, à renforcer le capital
quantités produites par les coopératives social. En outre, il y a lieu d’ajouter
des membres influents du conseil. Ainsi, que prèsde 80% des leadershipsdes
le désalignement des incitations ne per- coopératives et des groupements sont
met pas d’atteindre ni la coordination confrontés au problème des lobbies des
horizontale, ni la coordination verticale. spéculateurs des matières premières et
à la concurrence.
La coordination est affectée
également par le problème de Les résultats de l’enquête ont
gouvernance des coopératives ou démontré que d’autres facteurs
des groupements. En fait, la faible liés au problème socioculturel et
gouvernance, due elle-même à la d’apprentissage des membres limite la
qualité du leadership, fait perdre aux capitalisation des coopératives :
coopératives ou leurs groupements, soit
4.3.2.5- Problème socio-culturel
des commandes importantes, soit des
gains importants dus à l’absence de Chezprès de 40% des coopératives,
compétences commerciales pouvant l’incohésion sociale entre les membres
négocier correctement, pour des a des répercussions importantes non
produits labellisés et certifiés, les contrats seulement sur la capitalisation de la
commerciaux (prix, avances, conditions coopérative, mais également sur sa
de livraison, conditions de paiement…). pérennité. Ainsi, l’irrégularité de la
La trésorerie des coopératives se trouvent tenue des assemblées ou l’organisation
affectée et l’investissement entravé. d’assemblées formelles font perdre à
certaines coopératives des commandes
Par ailleurs, la faible coordination importantes affectant ainsi leur capacité
est due aussi à l’éloignemententre financière propre et leur accès à la
les coopératives, à la faible cohésion technologie.Par ailleurs, les divergences
sociale, ou encore à l’hétérogénéité entre les membres de la coopérative sur
de la qualité des produits entre les le recours ou non, aux crédits bancaires
coopératives qui entrave la coordination privent les coopératives de cette
même pour des produits labellisés et sourcede financementavalisée par la
certifiés. Ce problème de coordination CCG face à la difficulté d’accès aux
horizontale entrave la coordination sources de financement non bancaire.

34 REMACOOP 6
Le Secteur Coopératif au Maroc

4.3.2.6- Problème d’apprentissage En effet, l’étude a dévoilé que les coo-


Plus de 90% des coopératives pératives ont des difficultés de capitali-
d’argan et d’huile d’olivesinterviewées sation, soit parce que des facteurs socio-
affirment que les membres n’ont pas pu culturels ou de leadership les empêchent
développer une mentalité d’investisseurs de renforcer l’autofinancement ou de
et se considèrent comme des utilisateurs recourir au financement bancaire. Le
et non comme des associés dans financement externe soulève des ques-
la coopérative. Par conséquent, ils tions liées àl’absence de garanties réelles
ignorent les gains que pourra générer et/ou de gouvernance des coopératives
une contribution dans le capital de la rendant l’accès au financement ban-
coopérative. D’ailleurs, la majorité de caire très difficile. La communication
ces coopératives n’ont pas été créées sur la garantie de la Caisse Centrale de
par affectio societatis de leurs membres, Garantie « CCG » pourra contribuer à ré-
mais plutôt par nécessité sociale ou par soudre le problème de financement ban-
exigence institutionnelle. caire. Le financement par les avances
représente un privilège pour certaines
Les séances de formation et coopératives du fait qu’elles ne peuvent
d’apprentissagedestinées à la majorité pas toutes y accéder. Le leadership est
des coopératives ont visé souvent les crucial à ce niveau.
dirigeants(le président généralement)
et ont rarement visé les membres D’autres résultats ont indiqué égale-
des coopératives, y compris ceux ment que les spécificités des coopéra-
du bureau de gestion ou du conseil tives ont un lien avec leur capitalisation.
d’administration. En plus, l’impact de ces Les pratiques suivies lors du choix des
programmes de formation dispensés est modes de financement par les coopé-
considéré très moyen, ce qui ne renforce ratives dénotent l’importance des pro-
par l’esprit d’adhésion des membres au blèmesliés à la spécificité de la coopé-
projet de la coopérative.Cette situation rative qui affecte sa capitalisation. Ainsi,
crée des problèmes au leadership pour les problèmes rattachés à la mauvaise
convaincre les adhérents(es) à s’investir définition des droits de propriété tels que
et investir dans la coopérative par celui de l’horizon, de portfolio,du pas-
l’augmentation, par exemple, de leurs sage clandestin et du désalignement
parts dans le capital même dans le cas des incitations entravent la capitalisation
ils peuvent le faire. des coopératives. Ces problèmes se ré-
sument à la non-transférabilité des parts
Conclusion : entre les membres et lesnon membres,
à l’interdiction d’entrée de nouveaux
L’objectif de ce travail de recherche membres, au non-respect du profil
consiste à approcher le comportement d’investisseurs-membres par la coopéra-
financier des coopératives de l’échan- tive, à la faible mentalité d’investisseurs
tillon en matière de choix des modes de des membres et à la faible assimilation
financementet à vérifier la relation de la par les coopératives de leur rôle d’inves-
spécificité des règles des coopérativesa- tisseurs en se considérant comme des
vec leur capitalisation.

REMACOOP 6
35
Le Secteur Coopératif au Maroc

utilisateurs. L’accès au capital par les à la qualité du leadershipet au niveau


coopératives est lié également au pro- d’apprentissage dispensé au profit des
blème de désalignement desincitations membres.
du à l’opportunisme négatif de certains
Néanmoins, la problématique de la
membresdes coopératives ou des GIE
capitalisation des coopératives nécessite
qui entravent la coordination par l’ali-
l’étude et l’intégration d’autres facteurs,
gnement des incitations.
institutionnels, financiers et juridiques,
Les résultats de l’enquête ont démon- pouvant expliquer davantage cette
tré que d’autres facteurs liés au pro- problématique de financement des
blème socioculturel et d’apprentissage coopératives afin d’avoir des résultats
des membres limite la capitalisation des scientifiques plus significatifs pouvant
coopératives. Ils résident dans l’incohé- servir à tous les intervenantspour
sion sociale entre les membres et dans coordonner leurs efforts dans l’appui à la
la mauvaise gouvernance, qui sont dus commercialisation des coopératives.

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• Ruete, M. (2014). «  Les investissements inclusifs dans le secteur agricole: Les
coopératives et lerôle du gouvernement » à Investment in Agriculture, International
Institute For SustainableDevelopment.

36 REMACOOP 6
Le Secteur Coopératif au Maroc

Améliorer la vie de la femme rurale par le


biais de l’apprentissage et la formation :
Evaluation de l’impact d’un projet d’appui
à l’entreprenariat social
Par :

Mme. Fadoua Bakhadda


Doctorante à la Faculté des Sciences de l’Education

Contexte Général tant qu’activités économiques obéis-


sant aux lois du marché, doivent être
Au cours des 15 dernières années,
rentables et pérennes quel que soit leur
un certain nombre deprojets et pro-
lieu d’exercice (milieu rural ou urbain) »
grammes socio-économiques ont été
(INDH,2011).Une grande partie de ces
lancés au Maroc pour lutter contre la
activités génératrices de revenus est
pauvreté et la discrimination et promou-
développée en milieu rural sous forme
voir le développement de la femme
de coopérative et/ou association.
marocaine. Le lancement de l’Initiative
Selon l’office de développement de la
Nationale de développement humain
coopération (ODCO), les coopératives
(INDH) en 2005 a permis le développe-
ment de plus de 10000 activités géné- totalisent 13.882 jusqu’à fin 2014 regrou-
ratrices de revenus (AGR) depuis sa pant 461.878 coopérateurs. Le nombre
création jusqu’en 2013 (INDH, 2013). Ces de coopératives agricoles au Maroc à
AGR sont définies par l’INDH comme fin juin 2015 est de 9 966 avec 347 827
une activité qui consiste à produire des adhérents  et un montant d’environ 1
biens ou des services et/ou à transfor- 542 409 329 de dirhams comme capital
mer des produits en vue de les vendre. (ODCO, juin 2015).
A la différence des projets d’infrastruc-
Programme d’Appui au Développe-
tures sociales de base (piste rurale,
ment Féminin (PADEF)
école, dar taliba, eau potable, etc.),
qui sont des biens publics dont la com- En 1998, une étude exploratoire liée
munauté bénéficie et qui ne génèrent à l’entrepreneuriat féminin dans les
pas de revenus directement, l’AGR ne zones rurales et urbaines a été menée
bénéficie, en premier lieu, qu’à ceux par le Fonds des Nations Unies pour
qui la mettent en œuvre, ses promo- la femme (UNIFEM), Oxfam Québec
teurs. Ces activités tirent leur revenu du et l’Association Marocaine d’Appui
marché et obéissent donc à la loi de à la Promotion de la Petite Entreprise
l’offre et de la demande. Les AGR, en (AMAPPE) dans trois provinces du Maroc:

REMACOOP 6
37
Le Secteur Coopératif au Maroc

Tétouan, Chefchaouen, et Azrou. Le PADEF a connu trois étapes


Cette étude s’est focalisée sur deux fondamentales. La première étape a été
éléments cruciaux du développement de 2002 à 2005. L’objectif principal de
de l’entreprenariat féminin : cette phase était de mettre en place des
structures entrepreneuriales agricoles
1) La capacité des femmes rurales à
reconnues juridiquement, de sorte que
devenir des entrepreneures dans
les femmes dans une région donnée
ces régions ;
pourraient être réunies pour travailler en
2) Le type de produits qui intéressent groupe et être formées sur la façon de
ces femmes. gérer une entité de petite entreprise. Les
L’étude a révélé que les principaux coopératives ont été choisies comme
obstacles à l’entrepreneuriat sont les forme juridique de structure rassemblant
éléments de recherches ci-dessous : les efforts et le travail fournies par des
1) l’absence d’une structure formelle groupes de femmes dans le milieu rural.
de l’entreprise pour soutenir La deuxième étape du PADEF était de
les petites entreprises pour les 2005 à 2008. Elle a porté sur l’achat
femmes ; de matières premières, machines et
équipements pour les coopératives et la
2) Le manque de connaissances
formation des femmes de coopération
sur la gestion, la production et
sur la production et la gestion. Enfin, la
la commercialisation pour les
dernière étape a été de 2008 à 2011.
petites entreprises ;
Elle a porté sur l’aide aux 340 femmes
3) La nécessité d’autonomiser les appartenant à 22 coopératives de
femmes à partir d’une base trois régions (Chaouen, Tetouan et
économique et sociale. Azrou), initialement crées dans la cadre
Sur la base des résultats de du PADEF, afin de promouvoir plus
l’étude, le Programme d’Appui au efficacement le marché et de vendre
Développement de l’entrepreneuriat leurs produits ainsi que des techniques
des femmes, connue sous le nom de production plus efficaces.
«PADEF», a été développé et mis en
œuvre dans le but de responsabiliser Objectif de la recherche
ces femmes rurales en répondant à Une recherche académique de
leurs difficultés entrepreneuriales. Le l’évaluation de ce programme a
programme a débuté en 2002 et a pris vu le jour après 8 ans de travail de
fin en 2011. Le programme a été financé ces coopératives. Le but de cette
par la coopération bilatérale espagnole recherche est d’examiner l’impact du
«Junta d’Andalousie et Oxfam Novib». programme PADEF sur les bénéficiaires
AMAPPE a été l’organisation en charge et leurs ménages. En particulier,
de la mise en place, le suivi et le l’évaluation visait à déterminer l’impact
renforcement du PADEF. du renforcement des compétences

38 REMACOOP 6
Le Secteur Coopératif au Maroc

entrepreneuriales sur la perception de Hypothèses et model de recherche :


l’amélioration de la pauvreté.
Les différentes recherches documen-
L’hypothèse majeure testée était taires et bibliographiques évaluantl’im-
que l’autonomisation économique pact des microentreprises sur la femme
et sociale par le développement des en termes de perception de la pauvreté
compétences entrepreneuriales pourrait nous ramènent à choisir le modéle de
modifier positivement la perception de recherche ci-dessous. Ce dernier a été
la pauvreté des ménages des femmes adopté dans plusieurs recherches visant
rurales. à évaluer le renforcement économique
de la femme dans plusieurs pays émer-
Les résultats seront utiles pour geants, et/ou pauvres où l’entreprena-
les organismes de financement, les riat féminin a été considéré comme une
décideurs et les gestionnaires de source de l’emploi et du développe-
programme. En outre, étant donné ment de toute une famille. Ce modèle
que peu d’études rigoureuses ont été a été développé par Pr. Xavier en 2008,
entreprises pour déterminer l’impact professeur chercheur à l’université Shakiti
des services de microentreprises (Chen, en Inde et l’université de Washington DC,
1997), les résultats de cette étude seront consultant en micro entreprise et déve-
loppement durable auprès du conseil
également utiles pour les universitaires.
économique et social des Nations Unies.

Program PADEF

Renforcement
des compétences
entrepreneuriales ( gestion,
commercialisation,
juridique…etc)
 mélioration de la
A
perception de la
Renforcement économique pauvreté

Renforcement social

Modèle de recherche du Pr.Xavier

REMACOOP 6
39
Le Secteur Coopératif au Maroc

Trois hypothèses découlent de ce Cette hypothèse a été testée en uti-


modèle. Ces dernières se résument lisant 5 items adaptés par Xavier et al.
comme suit : (2008),Chen (1997) et les objectifs du
PADEF  : compétences de communi-
H1 : Le renforcement des compé-
cation, travail d’équipe, compétences
tences entrepreneuriales in-
managériales, compétences commer-
fluence la perception de pau-
ciales et de marketing et compétences
vreté
de production.

H2 : Le renforcement économique est et al. (2008) and Chen (1997): acquisi-
un déterminent de la perception tion d’argent à dépenser dans les besoin
de la pauvreté quotidiens du foyer, et acquisition d’ar-
gent à dépenser dans seulement la nour-
Cette hypothèse a été mesurée en
riture pour le foyer.
utilisant deux items adaptés parXavier

Acquisition d’argent à
dépenser dans seulement la
nourriture pour le foyer Changement de la
Renforcement
économique perception de la
Acquisition d’argent à pauvreté
dépenser dans les besoin
quotidiens du foyer

H3 : Le renforcement social est un prendre des décisions personnelles au


déterminent de la réduction de niveau du foyer, capacité de partager
la perception de pauvreté des décisions familiales au foyer avec
le conjoint, capacité d’imposer son avis
Cette hypothèse a été mesurée en se
au niveau du foyer
basant sur trois items adaptés par Xavier
et al. (2008) et Chen (1997): capacité de

40 REMACOOP 6
Le Secteur Coopératif au Maroc

capacité de prendre des


décisions personnelles au
niveau du foyer

capacité de partager des Renforcement Changement de la


décisions familiales au foyer social perception de la
avec le conjoint pauvreté

capacité d’imposer son avis


au niveau du foyer

Méthodologie de recherche Étude quantitative

Comme indiqué, l’objectif de cette Les données ont été recueillies à


recherche était d’évaluer l’impact l’aide d’interviews. Cette approche
du programme PADEF sur la vie socio- a été choisie en raison de la nature
économique des femmes. Les deux sensible de la plupart des questions.
approches qualitatives et quantitatives Les données ont été recueillies sur une
ont été employées. période de 7 semaines, en partie en
raison du déplacement nécessaire pour
Étude qualitative atteindre la plupart des foyers ruraux.
Un focus groupe de11 femmes a Toutes les 340 femmes impliquées
eu lieu en premier. Le groupe était dans le programme de PADEF ont été
composé de 3 femmes de Chaouen, 2 contactées directement par téléphone
de Tétouan, 6 de Azrou qui ont toutes ou par d’autres membres de la famille
été en mesure de se rendre à un point d’un téléphone pour demander si
de rencontre à savoir le village de elles étaient prêtes à répondre à des
Ait Amer O Ali  (Province d’Azrou).Le questions au sujet de leur expérience
groupe de discussion a eu lieu dans acquise grâce au programme PADEF.
une salle privée située dans un bureau Les entrevues ont varié entre 30 et
d’une coopérative. Des questions aux 45 minutes, la durée moyenne était
participantes ont exploré les perceptions d’environ 40 minutes.
sur les principales réalisations suite aux
♦ développement du Questionnaire
acquis du programme PADEF, et les
changements qu’elles ont vécu au Pour rester cohérent avec les re-
niveau personnel, financier, situation cherches antérieures des principales va-
familiale et sociale depuis qu’elles ont riables du modèle (amélioration perçue
rejoint la coopérative. de compétences de gestion, l’autono-
misation économique, l’autonomisation
Suite aux résultats de ce focus
sociale / familiale et l’amélioration de la
groupe, des modifications mineures du
pauvreté) ont été mesurés à l’aide des
modèle conceptuel sontapparues pour
éléments précédemment validés. Le
capturer des constructions clés.

REMACOOP 6
41
Le Secteur Coopératif au Maroc

questionnaire final a été traduit en arabe ration perçue dans la capacité de


marocain. prendre des décisions personnelles
mineures) ;
Un test pilote du questionnaire a
ensuite été effectué pour déterminer si 8) Une corrélation entre les éléments
les questions étaient claires et faciles à de développement de l’esprit
comprendre et à mettre en place. d’entreprenariat et l’amélioration
perçue dans les compétences de
Résultats escomptés depuis l’analyse commercialisation.
des données
9) Une corrélation entre les éléments
Les données de cette recherche de développement de l’esprit
ont été exploités selon une analyse d’entreprenariat et l’amélioration
factorielle exploratoire. Ils ont relevé les perçue dans la capacité à travail-
résultats suivants : ler en équipe.

1)Une relation positive entre le déve- Résultats de la recherche


loppement entrepreneurial et l’au-
tonomisation économique existe ; Les résultats de cette recherche
ont été d’une grande surprise aux
2) Le développement entrepreneu- bailleurs de fonds du PADEF. Le résultat
rial influence l’autonomisation
escompté est que ces 360 femmes
sociale. Cependant, la causalité
entrepreneurs dans le milieu rural sont
inverse ne se justifiait pas.
très satisfaites de leur développement
3) Le développement de l’esprit et de l’argent engendrée grâce aux
d’entreprise influe la conceptuali- efforts de commercialisation fournies
sation de la réduction de la pau- dans le cadre du PADEF, mais en termes
vreté ; d’enrichissement, elles restent toujours
4) Une relation positive existe entre pauvres. La clef de cette énigme revient
l’autonomisation économique et à l’aspect culturel du genre dans notre
l’autonomisation sociale ; pays, les projets de développements
renforcent les compétences de femme
5) L’autonomisation sociale influe la
dans la production de ce qu’elle sait
conceptualisation de la réduction
faire et non dans ce qui peut l’enrichir.
de la pauvreté ;
Les femmes produisent, mais c’est les
6) L’autonomisation économique in- hommes qui vendent dans les différents
flue sur la conceptualisation de la souks et marchés. La part du gâteau qui
réduction de la pauvreté ; revient à la femme reste très minime.
7) Une corrélation entre l’autonomi- Cependant, les femmes se réjouissent
sation économique (amélioration d’avoir eu au moins l’opportunité de
perçue du pouvoir d’achat) et produire et de vendre et changent leurs
l’autonomisation sociale (amélio- perception vis-à-vis de la pauvreté vu

42 REMACOOP 6
Le Secteur Coopératif au Maroc

que ce qui compte pour elles enfin de quement pauvres. Pourtant, les réponses
compte c’est l’amélioration de la qualité qualitatives suggèrent que, pour de
de la vie familiale. nombreuses personnes l’amélioration de
leur autonomisation sociale compense
Il y a un certain nombre de raisons
leur perte économique.
possibles expliquant ce résultat. Tout
d’abord, les observations faites au cours Cependant, certaines ont également
des entrevues suggèrent que beaucoup fait remarquer qu’une mauvaise foi entre
de femmes sont tenues de dépenser les deux genres (le mari et l’épouse) a
leur revenu gagné sur leurs foyers. été créée suite à l’argent perçu par la
Par exemple, l’autorisation d’un mari coopérative. La plupart des ménages
pour que la femme fasse partie d’une ont indiqué qu’ils ont donné les mauvais
coopérative est souvent accordée chiffres de leurs revenus à leurs maris pour
sous condition que tout argent gagné éviter l’obligation de donner leur argent.
soit investi pour faire face aux besoins
La troisième explication possible
familiaux . A titre d’exemple le chauffage
pour les résultats que l’autonomisation
(achat de bois au niveau d’Azrou) ou de
économique est négativement liée à
vêtements pour enfants. En conséquence
la réduction de la pauvreté est que
l’augmentation des revenus se traduit
certains des produits des coopératives
par l’amélioration de la consommation
ont besoin d’intermédiaires masculins
globale de la famille. Toutefois, cela ne
pour leur vente, notamment les maris ou
se traduit pas nécessairement par une
les enfants de sexe masculin à l’épicerie,
réduction de la pauvreté du point de vue
ou négociateurs intermédiaires. Dans de
de la femme. Au contraire, elle couvre
tels cas, les hommes gardent souvent
simplement certaines des responsabilités
le revenu gagné. En tant que tel il est
financières antérieures de son mari.
difficile pour les femmes de se sentir
Une seconde raison possible pour économiquement autonome.
l’association négative entre l’autono-
misation économique et la perception Limites de la Recherche
de réduction de la pauvreté, basée sur Les différentes limites de cette
les commentaires de nombreuses coo- recherche se résument dans la dimension
pérantes au cours de leurs entrevues, géographique et culturelle des ménages
pourrait être lié au fait que les femmes qui a été de l’ordre de 340 femmes
doivent donner tous leurs revenus à leurs œuvrant dans le secteur agricole. En
maris à dépenser parce qu’il est le chef termes d’économie sociale et solidaire,
de famille. Ceci est une question cultu- la région du sud est beaucoup plus
relle. Ainsi, les femmes peuvent faire active en termes de productivité
de l’argent en raison de l’amélioration féminine. Dans cette perspective, il serait
des compétences en entrepreneuriat judicieux d’étaler cette recherche vers
et devenir plus puissantes socialement, une population plus performante et plus
mais elles peuvent aussi rester économi- élargie dans les conditions socioculturelles

REMACOOP 6
43
Le Secteur Coopératif au Maroc

sont plus souples et où la femme est plus La pauvreté a été évaluée à partir
libre de suivre sa chaine de production de différents points de vue en fonction
depuis la matière première jusqu’au des situations économiques et sociales
consommateur final. des populations. Les résultats de ces
La présente recherche vient pour recherches soulèvent un certain nombre
cibler une population dont les limites des de questions pour les chercheurs en
ménages de la première étude sont économie sociale et les chercheures
considérablement prises en compte, au niveau du GENRE. Cependant,
tester les hypothèses développées la principale question est de savoir
ci-dessous, et relever les différentes comment s’assurer que l’autonomisation
évidences du terrain afin de les analyser économique contribue à la réduction de
et enrichir les perspectives des décideurs la pauvreté des femmes. De nombreux
en économie sociale et solidaire. projets sont lancés au Maroc dans le
but d’émancipation économique des
Conclusion femmes en tant que clé de la réduction
Les résultats de cette recherche de la pauvreté. Cette recherche suggère
indiquent que le programme de PADEF que le choix du produit et la relation
a eu un effet positif sur les bénéficiaires sociale entre les femmes et leur chef
et leurs ménages. En particulier, l’étude de ménage sont un facteur important
a révélé que le développement des qui doit être pris en considération. Les
compétences entrepreneuriales grâce à hommes doivent comprendre que les
l’autonomisation sociale a eu un impact femmes ont tous les droits d’utiliser leur
positif sur la perception de l’amélioration argent comme ils le souhaitent.
de la pauvreté des femmes rurales.

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REMACOOP 6
47
Le Secteur Coopératif au Maroc

Évaluation de la fonction marketing des coopératives


artisanales de la région de Rabat-Salé
Par :

Imane Ouanaim Mariem Liouaeddine


Doctorante chercheuse Professeur assistant, Université Ibn
E-Mail : ouanaim.imane@gmail.com Tofaîl, Faculté des Sciences Juridiques,
Economiques et Sociales
E-Mail : liouaeddine@gmail.com

Résumé
Le présent article a pour objectif d’évaluer la fonction marketing au sein des
coopératives artisanales marocaines.
Pour ceci, nous avons mené une enquête auprès de 30 coopératives artisanales
relevant de la région de Rabat-Salé.
Les résultats obtenus montrent que la démarche marketing est peu valorisée au
sein de ces coopératives ce qui entrave la commercialisation de leurs produits. Pour
dépasser cette difficulté, nous proposons des recommandations sous forme de plan
d’actions.

Classification JEL : M31-P13


Mots clés : Marketing, Coopératives, Maroc.

Abstract:
This article aims to evaluate the marketing function within Moroccan handicraft
cooperatives.
For this, we conducted a survey within 30 craft co-operatives in the region of
Rabat-Salé.
The results show that the marketing approach is undervalued in these cooperatives
hindering the selling of their products. To overcome this difficulty, we propose action
plan as recommendations.

JEL classification: M31-P13


Key words: Marketing, Co-operatives, Morocco.

48 REMACOOP 6
Le Secteur Coopératif au Maroc

Introduction Pour apporter des éléments de


réponse à ces questionnements, nous
Considéré comme clé de voute
étudions dans un premier point le
du développement local au Maroc,
concept du marketing au sein des
le secteur coopératif connaît de nos
coopératives, où nous exposerons
jours une période de foisonnement sans
les caractéristiques du marketing des
précèdent.
coopératives ainsi que la démarche
La prospérité de l’esprit coopératif proprement dite du marketing au sein
est motivée par la capacité des d’une coopérative.
coopératives de développer des
activités génératrices de revenus qui Ensuite, nous présentons les données
permettent l’amélioration des conditions utilisées ainsi que la méthodologie
de vie de la population moins favorisée. adoptées pour évaluer le rôle de
la fonction marketing au sein des
Par ailleurs, les coopératives en
coopératives d’artisanat de la région
tant que pilier de l’économie sociale
de Rabat-Salé.
et solidaire connaissent des difficultés
et subissent la pression des marchés Enfin, nous présentons les résultats
concurrentiels. Cette situation les de la phase d’évaluation qui consiste
amènent à se transformer pour survivre à traiter les données recueillies
afin d’atteindre leurs objectifs et par l’enquête dans l’optique de
satisfaire les besoins et les aspirations répondre à notre problématique
des coopérateurs. Par conséquent, les principale «  l’évaluation de la fonction
coopératives sont tenues de développer marketing  des coopératives artisanales
leur stratégie marketing. de la région de Rabat-Salé ».
Cet article vise à apporter des
éléments de réponse aux questions
I. L a démarche marketing au sein
axées principalement autour des des coopératives
réalités du secteur en terme de forces et Le marketing fait partie des sources
faiblesses, opportunités et menaces du incontournables de développement
marché et des techniques marketing, de la compétitivité des coopératives
adoptées pour rendre les coopératives en vue d’une croissance durable et
plus performantes. Ainsi, notre recherche rentable. Il se matérialise à travers
vise à répondre aux questionnements l’innovation et la conquête. La frontière
suivants : entre le marketing de la coopérative et
1. Comment s’articule une dé- celui de l’entreprise classique semble
marche mercatique pour une perméable.
coopérative ? En effet, les exigences des clients se
2. Quelles sont les dimensions marke- sont développées au fil des années avec
ting à adopter pour la promotion la multiplicité et la diversité de l’offre et
des coopératives artisanales dans l’apparition de mouvements verts et
la région de Rabat-Salé ? de consumérisme qui plaident pour un

REMACOOP 6
49
Le Secteur Coopératif au Maroc

marketing éthique et responsable. Ces 2- Le marketing opérationnel


exigences sont des suppliques et ce,
La fonction du producteur ne se
quel que soit la nature de l’entreprise
limite pas dans la maîtrise du processus
qui vend le produit et/ou le service.
de production et de transformation mais
1. Le marketing stratégique elle s’étend aussi à la commercialisation
des produits. Dans le cas où les
La capacité à actionner le levier produits coopératifs sont issus du terroir,
de satisfaction des besoins des l’indication géographique (IG) est un
consommateurs nécessite la bonne moyen essentiel pour défendre les
maitrise du marketing stratégique. Ce intérêts des producteurs face à une
dernier se traduit par les actions de concurrence déloyale.
la segmentation client, l’innovation
produits, l’adoption d’une stratégie de Pour cela, la coopérative doit
marque (Identité) et à travers la mise opter pour un plan marchéage
en place de nouveaux modèles de cohérent qui intègre d’une part, une
distribution. dimension économique, sociale et
environnementale et d’une autre, les
Pour réussir le défis de l’adapta-
spécificités des produits coopératifs. Ce
tion aux changements, les coopéra-
plan est comme suit :
tives doivent nécessairement mettre
en place un processus d’innovation ♦ Politique du produit : puisqu’il
optimisé tant sur les produits que sur les s’agit des produits artisanaux,
conditionnements. Grâce à leurs liens la coopérative doit mettre en
privilégiés avec l’amont, les coopéra- évidence la typicité, l’authenticité
tives sont bien placées pour garantir et l’originalité de ses produits.
aux consommateurs la qualité, la tra-
çabilité et l’authenticité de ce qu’ils ♦ Politique de prix et de distribution:
consomment et construire ainsi des liens La coopérative doit s’adapter au
de confiance avec eux. Dans cette principe du commerce équitable.
logique, la marque est une caution, et
♦ P
 olitique de communication qui
construire un portefeuille de marques
a pour mission de sensibiliser les
fortes doit être une priorité pour les coo-
consommateurs sur l’engage-
pératives.
ment de la coopérative dans le
Pour le canal de distribution, il est à développement durable et de les
signaler que les consommateurs recher- informer sur les attributs des pro-
chant l’authenticité, ce qui suppose de duits coopératifs.
mettre à leur disponibilité les produits
Compte tenu de l’importance
coopératifs dans les grandes surfaces,
de la fonction Marketing dans le
tandis que les coopératives s’organisent
développement des coopératives et
généralement pour développer leurs
dans alignement avec la concurrence,
canaux de distribution alternatifs et
il paraît judicieux d’évaluer et d’analyser
vendre en direct.

50 REMACOOP 6
Le Secteur Coopératif au Maroc

le rôle de la fonction marketing au sein 1. Population cible


des coopératives dans le cadre d’un
Nous avons choisi dans le cadre de
cas concret.
notre recherche, un échantillon aléa-
Ainsi, nous avons choisi dans toire de 30 coopératives artisanales se
le cadre de ce travail, d’évaluer situant dans les différentes villes  de la
la fonction marketing auprès des région Rabat-Salé à savoir  : khemissat,
coopératives artisanales relevant de la Rabat, Salé, Temara. Ces coopératives
région de Rabat-Salé. Le choix de ces représentent un exemple paradigma-
coopératives se justifie par le fait que tique pour notre analyse factuelle, étant
cette région est connue par l’artisanat considéré leur prépondérance dans la
et pour prendre en considération l’avis région.
de plusieurs coopérateurs d’endroits
différents. 2. Présentation du questionnaire :

Le questionnaire a été structuré selon


II. Méthodologie les principaux thèmes de notre enquête
La démarche adoptée pour évaluer qui sont les suivants : 1) Identification de
la fonction marketing auprès des la coopérative; 2) Organisation de la
coopératives artisanales s’est basée fonction commerciale; 3) Management
sur des techniques d’enquêtes par de la force de vente; 4) Management
questionnaire à travers une étude sur de la relation avec les clients et les
terrain. Cette démarche est judicieuse fournisseurs ; 5) Choix de la politique de
pour mieux cerner les politiques menées tarification.
dans ce secteur ainsi que les doléances
des coopératives. L’enquête s’est III. Résultats
déroulée entre les mois de Septembre L’analyse globale montre que pour
et Octobre 2014. la stratégie marketing mix ainsi que
La démarche menée est basée sur pour chaque niveau organisationnel, les
deux approches. Premièrement, une coopératives ont aussi bien des points
étude quantitative concrétisée par des forts que des potentiels à améliorer
questionnaires distribués et renseignés (Tableau 3).
par les membres des coopératives. En effet, l’analyse des éléments
Deuxièmement, une étude qualitative du marketing mix montre qu’en ce
sous forme d’observations et qui concerne l’adoption ou non de
d’entretiens avec des responsables des l’emballage dans la politique de
organismes publics marocains (Office commercialisation des coopératives
du Développement de la Coopération 60% des coopératives observées ne
« ODCo », chambre de l’artisanat, maison l’adoptent pas alors que le reste de
de l’artisan et différents départements l’échantillon utilise un emballage non
ministériels, société civile). L’enquête a attractif (Graphique 1). Il est à signaler
été réalisée sur le logiciel SPSS 21.0. que la non adoption d’un emballage

REMACOOP 6
51
Le Secteur Coopératif au Maroc

impact en partie, négativement, IV. Discussion des résultats


la commercialisation des produits
Hormis le fait que la planification
coopératifs et par conséquent la
marketing est l’œuvre du conseil
pérennité de la coopérative. En effet,
d’administration de la coopérative, la
l’analyse de la commercialisation
stratégie marketing d’une coopérative
nous en renseigne davantage, dans la
devrait valoriser l’Homme aussi bien
mesure où, l’enquête révèle que 25 des
adhérent que client. De ce fait, les
coopératives enquêtées rencontrent
coopératives doivent rechercher
des difficultés de commercialisation
aussi la satisfaction des besoins des
(Graphique 2).
consommateurs qui peut être mise
Afin de remédier au défaut de la en évidence par différentes actions
commercialisation de leurs produits, notamment :
l’affiliation des coopératives à des
• La réalisation des études de marché:
groupements d’intérêt économiques
Ces études permettent de situer les
(GIE) est une solution qui a montré a
opportunités et les menaces liées à
mainte reprise ses vertus. En mettant
l’environnement externe et procéder
en commun leurs ressources limitées,
en interne à un diagnostic visant à
les coopératives peuvent réduire les
ressortir les faiblesses et les forces de la
coûts de production en réalisant des
coopérative.
économies d’échelle, améliorer les
conditions de commercialisation et •La Segmentation : Cette étape
promouvoir leurs produits à l’échelle consiste à identifier l’existence de
nationale et même internationale. familles de consommateurs ayant les
mêmes attentes vis-à-vis du produit et
Cependant, l’analyse de l’affiliation
devant donc réagir de la même manière
ou non des coopératives enquêtées
à une même stimulation marketing.
à un GIE démontre que 90% de ces
coopératives ne sont pas affiliées à •Le Ciblage : Cette technique a
un GIE (Graphique 3). Cette prise de le mérite d’optimiser le ciblage de la
position a été justifiée par des raisons coopérative. Elle consiste à choisir les
de gestion et de concurrence. Les segments sur lesquels la coopérative
coopératives devraient renforcer leur fera porter son effort et devra plus
stratégie marketing en tenant au moins innover et produire.
une base de données client.
• Le Positionnement : Les coopératives
L’analyse de la tenue ou non d’une sont appelées à mettre en valeur leurs
base de données client, révèle que 80% produits ou marque et ce, en leur
des coopératives n’utilise pas une base donnant une personnalité qui précise
de données client, sachant que les ses avantages différenciateurs par
fichiers clients sont indispensables pour rapport aux produits concurrents. Il
connaitre sa clientèle et permettent faudra également destiner le message
d’optimiser les opérations marketing à l’intention des consommateurs pour
(Graphique 4). lesquels ces différences sont motivantes.

52 REMACOOP 6
Le Secteur Coopératif au Maroc

 ecommandations au niveau de la
R A cet effet, la fixation du niveau
politique du produit : optimal du prix suppose une définition
préalable des objectifs visés comme
Concernant la politique du produit, la
la rentabilité et une connaissance de
coopérative devrait dresser une liste de
données concernant la coopérative et
toutes les nouvelles gammes de produits,
son environnement comme le niveau de
ainsi que des différentes spécifications
la demande ou le niveau de prix offert
ou des cahiers des charges pour tous
les nouveaux produits et leurs variantes. par les concurrents. A ce niveau, les
Un cahier des charges de produit type actions possibles de la coopérative sont
contient : les suivantes :

♦ L e nom du produit, voire un numéro ♦  long terme : fixer le prix au même


A
de référence ou un code ; niveau que ceux prévalant sur le
marché  pour permettre une rému-
♦ Le marché cible ;
nération correcte et satisfaisante
♦ Une description de la fonction du des producteurs.
produit, ou de l’utilisation envisagée ;
♦ A court terme : fixer le prix en des-
♦ La taille possible et l’influence sur sous des prix en cours, car le prix est
le développement du conditionne- souvent vu comme indicateur de
ment ; qualité.
♦ Le prix de vente visé  et une
estimation des quantités à produire ;  ecommandations au niveau de la
R
politique de la distribution :
♦ La date limite de lancement qui
pourrait coïncider avec une foire ou En poursuivant le but d’un bon ni-
un salon professionnel. veau de marge commerciale avec des
opportunités d’écoulement du produit,
Les plans de développement des
la coopérative a la possibilité de vendre
produits peuvent être considérablement
directement au consommateur ou par
influencés par de nombreux facteurs liés à
le biais d’un intermédiaire (coopérative-
l’environnement dans lequel fonctionne
détaillant-consommateur ou coopéra-
la coopérative, ainsi que par l’adoption
tive-grossiste-détaillant-consommateur).
de nouvelles techniques et de nouveaux
équipements et matières premières. La décision doit être prise selon
des critères comme par exemple la
 ecommandations au niveau de la
R localisation de la demande, le niveau
politique du prix: des prix, les coûts de distribution, le degré
La fixation du prix doit refléter à la de nouveauté du produit etc.
fois l’utilité perçue par le client à l’égard La distribution peut être réalisée soit
du produit, la structure des coûts de de manière intensive, c’est-à-dire avec
la coopérative et les attentes des plusieurs points de vente, soit de manière
coopérateurs. sélective, c’est à dire des points de vente

REMACOOP 6
53
Le Secteur Coopératif au Maroc

sélectionnés selon les critères de taille engagement dans le développe-


par exemple. Aussi la coopérative est ment humain durable.
appelée à :
Les coopératives artisanales ana-
♦ Eviterles circuits longs (éviter les lysées, peuvent s’unir dans le cadre
intermédiaires), pour maitriser la de « union ou un GIE » qui les aidera à
distribution. commercialiser et à promouvoir leurs
produits à l’échelle nationale voire inter-
♦ Envisager
la vente via internet pour
nationale. L’union permettra aux coo-
attirer de nouveaux consomma-
pératives de mettre en commun leurs
teurs ;
ressources limitées pour mieux affronter
♦ Respecter la qualité de service la concurrence et assurer leur pérennité.
(respect des délais de livraison et
du service après-vente etc.). Conclusion
L’évaluation de la fonction
 ecommandations sur la politique
R
marketing des coopératives artisanales
de communication (promotion) :
de la région de Rabat-Salé, révèle
Afin de parvenir à toucher les que malgré le rôle important de cette
cibles visées par les coopératives, nous démarche mercatique dans la pérennité
proposons de recourir aux supports de et le développement des coopératives,
communication suivants : elle demeure non valorisée par les
coopératives.
♦ La participation à des foires,
salons professionnels régionaux, En effet, l’analyse montre que la
nationaux et internationaux ; plus part des coopératives enquêtées
n’adopte pas une politique d’emballage,
♦ Le message publicitaire Rationnel
ne tient pas une base de données client
et Ethique ;
et n’est pas affiliée à un GIE.
♦ Le
marketing direct : le mailing, le
Cette situation a pour conséquence
catalogue et les brochures ;
de contraindre leur capacité de
♦ La promotion des ventes ; commercialisation, ce qui a également
été révélé par l’étude, dans la mesure
♦ La publicité médias (magazine,
où sur les 30 coopératives enquêtées 5
radio, télévision) ;
seulement estiment ne pas rencontrer
♦ Exploiter
les réseaux sociaux, site des difficultés de commercialisation de
web etc. ; leur produits.

♦ Lacoopérative doit opter égale- De ce fait, les coopératives sont ap-


ment pour une communication pelées à développer leurs politique de
responsable qui met en avant son communication à travers l’instauration

54 REMACOOP 6
Le Secteur Coopératif au Maroc

d’une publicité grand public et élabo- le package des différents produits soit
ration de site internet etc. Elles devraient plus attrayant et plus esthétique, car
également miser sur le facteur humain, la bouteille, le carton, le pot sont des
et ce, à travers : la formation du person- vendeurs muets.
nel du service marketing, la réalisation C’est dans ces conditions que les
d’études de marché et si nécessaire le coopératives artisanales gage du déve-
recrutement des personnes spécialisées loppement écologique, économique
dans le domaine. et social, peuvent donner sens à leur
Aussi, il faudra réaliser des tests objectif de pérennité, de s’aligner avec
packaging afin d’améliorer l’emballage la concurrence et de développer leur
des produits. Un effort d’innovation capacité à s’adapter dans un environ-
doit être fourni à ce niveau, pour que nement en permanente mutation.

REMACOOP 6
55
Le Secteur Coopératif au Maroc

Tableau 3: Les principaux résultats obtenus

Ressources et moyens Points forts Points faibles


•  n savoir-faire ancestral
U •L
 es apprentis sont formés
transmis à travers les selon les méthodes tradi-
générations. tionnelles ;
Ressources humaines • Dimension genre. •U
 ne quasi-absence de
personnel formé en :
techniques de vente,
marketing, négociation.

Les coopératives bénéfi-


Situation financière cient du soutien financier
de l’INDH.
• Un savoir-faire artistique ; •C
 apacité de production
• Des articles de qualité. limitée
Production
•L
 ’instabilité des com-
mandes

•L’absence de  : cellule


marketing, stratégie de
marketing  ; politique de
Stratégie marketing
segmentation.
•L
a non-formulation du
positionnement voulu.
• Emballage non-attractif ;
• Produits naturels ;
Produit • Produits élaborés avec •  as d’étiquetage sur l’em-
P
soin. ballage.

• L e coût de la matière
•  rix déterminé en fonc-
P première élevé réduit la
Prix
tion des coûts marge bénéficiaire

Marketing Promotion • la communication dans • Limitée et insuffisante


Mix les foires, salons etc.   •A bsence de politique de
(communica-
publicité
tion)
•A
 ucun réseau de distribu-
tion n’est établit ;
Place •L
 a distribution s’effectue
(distribution) par les méthodes clas-
siques  : face à face, télé-
phone.

Source 4: Auteurs

56 REMACOOP 6
Le Secteur Coopératif au Maroc

Graphique 1 : Difficulté de commercialisation Graphique 2 : Politique d’emballage

Source 5: Auteurs Source 6: Auteurs

Graphique 3: Affiliation à un groupement d’intérêt économique

Source 7: Auteurs

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REMACOOP 6
57
Le Secteur Coopératif au Maroc

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58 REMACOOP 6
Le Secteur Coopératif au Maroc

L’insertion socio-professionnelle
des jeunes par les coopératives

Par :

Laabid Abdelouahed
E-Mail : a.laabid@odco.gov.ma

I- Introduction: Ne renonçant pas face à cette


situation, les pouvoirs publics ont
Dans le cadre de l’auto emploi, les
adopté une série de mesures telles
coopératives comme composante
que la promulgation de la loi n° 36/87
de l’économie sociale et solidaire,
dédiée à l’octroi de prêts de soutien à
proposent un cadre idéal pour l’insertion
certains promoteurs, et de la loi n° 16/87
des jeunes dans la vie active, du fait de
qui consistait à instaurer des dispositions
la possibilité qu’elles offrent à tous les
d’encouragement en faveur des jeunes
jeunes de pouvoir croiser leurs efforts
diplômés de la formation professionnelle.
pour entreprendre et innover dans
Ces deux lois ont créé une exception
différentes activités génératrices de
vis-à-vis de l’ancienne loi 24/83 fixant le
revenue.
statut général des coopératives et les
Ainsi, touts les efforts déployés par le missions de l’office du développement
gouvernement marocain moyennant de la coopération (ODCO) concernant
diverses actions prévalant les secteurs le nombre minimum des adhérents qui
sociaux, malgré leur importance, n’ont était passé de 7 à 3 en vue de requérir
pas abouti à se prémuniser des aléas la création des coopératives par ces
du chômage, la précarité, et l’exclusion jeunes. Bien sûr d’autres réformes ont été
sociale… devant les besoins pressant consenties pour atténuer le problème
des jeunes en matière de travail. Selon d’insertion des jeunes notamment au
les données du Haut Commissariat au niveau législatif comme la révision du
Plan (HCP)1, sur la situation du marché du code du travail ou l’émission de la
travail au Maroc au premier trimestre de nouvelle loi n°12.112 des coopératives
l’année 2016, le nombre de chômeurs qui a suscité de nouvelles dispositions
au Maroc a atteint 1.169.000 personnes. juridiques au niveau des procédures,
Le taux de chômage est passé à 10%. de la bonne gouvernance et de la
Parmi les jeunes agés de 15 à 24 ans, gestion, ou au niveau institutionnel tels
il a atteint 23% et au sein des jeunes que la création de l’Agence Nationale
diplômés il a atteint 17,5%. de Promotion de l’Emploi…

1. Statistiques : Haut commissariat au plan

REMACOOP 6
59
Le Secteur Coopératif au Maroc

En outre, plusieurs programmes ont diplômés en chômage et matérialiser


été élaborés ciblant l’insertion des jeunes leurs attentes.
à savoir : Idmaj, Taehil et Mokawalati…
Pour assumer pleinement son
II- L ’Office du Développement de rôle d’instigateur d’un mouvement
la Coopération (ODCO) outil de coopératif attrayant, efficace et
mise en œuvre de la politique indépendant, l’ODCO répartit ses
publique du gouvernement dans actions de façon à couvrir toutes les
le secteur coopératif: régions du Maroc en fonction de ses
attributions autour des axes stratégiques
L’intégration sociale des populations suivants :
est au cœur des activités de promotion
du mouvement coopératif au Maroc. ♦ Laformation et l’information coo-
L’ODCO, en tant qu’organisme chargé pérative en prêtant son concours
de la mise en œuvre de la politique aux coopératives et à leurs unions
gouvernementale dans ce domaine, dans ces domaines à travers le
et grâce à son rôle catalyseur sur le financement des campagnes
terrain, intensifie ses interventions à de vulgarisation et de formation
travers la multiplication des actions et en centralisant et diffusant la
de sensibilisation, d’encadrement, documentation relative à la coo-
de formation, d’appui juridique, de pération.
restructuration et de mise à niveau des ♦ L’assistance économique et juri-
coopératives et leurs unions . Dans ce dique dictée par la conjoncture
cadre les coopératives de jeunes et de économique en constante évolu-
femmes bénéficient d’une attention tion qui interpelle une assistance
particulière que ce soit dans les plus importante aux coopératives,
programmes transversaux ou ciblés en pour les aider à faire face à de
coordination avec les administrations tels changements. Ces actions
concernées. peuvent avoir un caractère écono-
Son principal objectif est l’insertion mique ou juridique et concernent
par l’économique à travers la la réalisation d’opérations de dia-
mobilisation des synergies des petits gnostic et d’audit auprès des dif-
producteurs dans la mise en œuvre des férents types de coopératives et
projets coopératifs, notamment dans l’assistance des membres des coo-
les communes en milieu rural, pour leur pératives en matière de gestion.
intégration dans le marché au niveau Quant aux actions juridiques en
régional et national et l’amélioration plus de la centralisation et l’étude
de leur situation socio-économique. des dossiers de constitution des
La coopérative est par excellence coopératives et de leurs unions,
un moyen économique adéquat l’ODCO contribue à l’élaboration
pouvant propulser beaucoup de jeunes et la proposition de toutes réformes

60 REMACOOP 6
Le Secteur Coopératif au Maroc

législatives et réglementaires et développement économique et social,


toutes mesures à caractère parti- et donc, la coopérative est devenue
culier relatives à la création et au plus efficace dans la consolidation des
développement du secteur coo- relations au sein de la communauté, au
pératif, tout en fournissant des ser- motif qu’elles forment ensemble une
vices de consultation juridique aux structure économique à portée sociale
coopératives. et culturelle. Cette caractéristique a fait
que de nombreux experts considèrent
Le secteur coopératif a connu un
que le domaine vital du secteur
développement notable et contribue
coopératif peut réellement contribuer
de ce fait au développement du
à résoudre les principaux problèmes
tissu économique, à la diminution du
de développement, en particulier dans
chômage et à la lutte contre l’exclusion
l’emploi, la création et la distribution des
et la pauvreté.
richesses.
Il est à signaler que le nombre
Les coopératives ont démontré
des coopératives au Maroc dépasse
grâce à leur réalisme et à leur compéti-
actuellement 15.700 coopératives
tivité économique qu’elles sont suscep-
regroupant plus de 484 231 adhérents.
tibles de survivre et de surmonter la crise
Les coopératives de femme
en douceur. Ces particularités leur ont
représentant 14% regroupent 37 960
permis de parvenir à un développement
adhérentes, quant aux coopératives des
tangible, tant en quantité qu’en termes
jeunes diplômés elles sont au nombre
de qualité, ce qui a permis d’atteindre
de 371 coopératives regroupant
le niveau actuel avec près de 16000
4042 adhérents.
coopératives. Ces entreprises exercent
III- L ’impulsion des coopératives au des activités variées dans divers secteurs
terme d’une solide insertion des et régions, chose qui conduit les jeunes
jeunes diplômés : diplômés après la conviction de l’uti-
lité de la méthode coopérative et son
Les coopératives sont d’une
efficacité dans la création d’emploi,
importance exceptionnelle parmi les
grâce aux opérations de sensibilisation
composantes de l’économie sociale
et de vulgarisation de l’Office de Déve-
et solidaire en raison de l’accent
loppement de la Coopération en coor-
qu’elles mettent sur le service humain
dination avec tous les partenaires (ac-
en répondant à leurs besoins en
teurs, ministères, institutions publiques
fonction des valeurs de solidarité,
et associations de soutien), à constituer
de participation démocratique, du
ou à adhérer à ce genre d’entreprises.
bénévolat et de l’engagement.
Elles procurent un espace d’intérêt Dans cette ambiance, les
à de larges segments de la société coopératives de jeunes diplômés ont
en raison de leur rôle en qualité de connu une augmentation au cours
partenaire de l’action de terrain pour le des dernières années, rehaussant leur

REMACOOP 6
61
Le Secteur Coopératif au Maroc

nombre de 289 coopératives en 2011, à Coopératives), les plantes médicinales


371 en 2015 raffermi par un effectif de et aromatiques (9 coopératives) et 31
4042 jeunes diplômés adhérents. Ces coopératives restant dans une variété
coopératives convergent leurs activités de secteurs. Le capital généré par ces
vers les secteurs de l’agriculture (152co coopératives est arrivé à 16.321.736
opératives),l’alphabétisation(122coopé DH, ce qui ramène la moyenne par
ratives), l’Artisanat (21 coopératives), la coopérative à 43.993 DH et à plus de 10
forêt (21 coopératives), le transports (15 adhérents par entité.

IV. Evolution par année des coopératives de jeunes diplômés:

Evolution du nombre des


Années Variation(%)
coopératives

2011 289

2012 305 5,53

2013 327 7,21

2014 343 5

2015 371 8,16

Ce tableau, illustre que le taux jeunes diplômés avec 72 coopératives


d’évolution des coopératives de jeunes soit 19%, suivie par la région Orientale
diplômés a connu une nette progression avec 68 coopératives et puis Tanger-
variant de 5% jusqu’à plus de 8% entre Tétouan par 37 coopératives
2011 et 2015 avec une amélioration
Au niveau sectoriel, le domaine
cumulée de 28,37% entre 2015 et 2011.
agricole détient le pourcentage le plus
Ce développement prouve la force élevé (41%) de ce type d’entreprises
économique et sociale de ce type avec 152 coopératives ralliant 1788
d’entreprises et sa pertinence dans la jeunes diplômés suivi par le secteur de
réalisation des aspirations des jeunes l’alphabétisation et de l’éducation et
souhaitant s’intégrer par le biais de leurs de la formation avec 110 coopératives
propres coopératives. représentant 30% avec 1043 jeunes
lauréats et enfin viennent les secteurs
Géographiquement la région de
de l’artisanat et la forêt avec 21
Fès - Meknès vient au premier rang en
coopératives chacun.
termes de nombre de coopératives des

62 REMACOOP 6
Le Secteur Coopératif au Maroc

V. Répartition par secteur des coopératives de jeunes diplômés:

Secteurs Coopératives Adhérents Capitaux

Agriculture 152 1788 10.711.558

Alphabétisation 122 1148 1.480.984

Artisanat 21 189 761.923

Forêts 21 440 247.400

Transport 15 58 908.000

Centre de conseil 13 115 220.600

Plantes médicinales 9 88 1.470.471

Denrées alimentaires 5 113 39.450

Commerçants détaillants 3 16 175.000

Tourisme 2 11 17.200

Argan 1 8 3500

Art et culture 1 7 6000

Commerce électronique 1 8 5600

Exploitation de carrière 1 8 28.800

Main d’œuvre 1 21 8.200

Pêche 1 4 25.950

Télécommunication 1 11 30.000

Traitement de déchets 1 9 81.100

Total 371 4042 16.321.736

*Source : ODCO 2016

VI- Contraintes au développement est judicieux de rappeler que les chances


des coopératives des jeunes  de réussite dans les premières années
diplômés au Maroc : d’exercice dépendent amplement des
caractéristiques liées aux jeunes eux
Avant de mentionner les différentes même et à leur environnement. Quant
contraintes de ces types d’entreprises, il aux facteurs qui entravent le bon essor

REMACOOP 6
63
Le Secteur Coopératif au Maroc

de ces coopératives, ils sont liés à nombre de coopérateurs avec plus


des conditions, tant endogènes telles de 23 millions de membres, suivi par
que  la fragilité de leurs structures et l’Allemagne (20 509 973) et l’Italie
l’insuffisance de leurs moyens humains, (13 063 419). Ces trois pays se distinguent
techniques et financiers, qu’exogènes également en termes d’effectifs de
liés aux aléas de leur environnement salariés. L’Italie compte plus d’un million
économique et social. de salariés, la France près d’un million et
l’Allemagne plus de 830 000.
Les principales contraintes émanant
de ces organismes eux-mêmes sont 1. Les jeunes fascinés par l’Economie
l’insuffisance de leurs capitaux propres ; Sociale et Solidaire en France :
manque de qualifications des ressources
humaines (administrateurs et gérants…) ; En 2010, 435 490 jeunes (soit 8,6% de
absence de l’esprit coopératif ; manque l’ensemble des salariés de moins de 30
de locaux adéquats… ans), travaillent dans l’ESS. Parmi eux,
on recense 34% d’hommes et 66% de
Les contraintes externes majeures femmes.
se présentent au niveau des difficultés
d’accès aux crédits bancaires et aux Les jeunes de moins de 30 ans
marchés; infrastructures et enclavement représentent 18,6% des salariés de
(routes, moyens de transport et de l’ESS: c’est plus que le travail en secteur
communication…). public (15,1%), mais bien moins que le
privé hors ESS (25,4%). Entre 2008 et 2010,
On peut noter aussi : un double mouvement est en action.
♦ Difficultés
de commercialiser et En effet, la tranche des moins de 30
labéliser leurs produits/services ans dans le champ des organismes de
l’ESS est en repli (–2,8 points) alors qu’en
♦ Manque d’expérience
même temps, confronté au reste du
VII. Expériences étrangères : privé et au public, l’ESS progresse dans
l’emploi global des salariés de moins de
Au niveau des coopératives, parmi 30 ans (+ 0,7 point)2.
les pays membres de l’Union Européenne,
En France, l’ESS représente
l’Italie avec 41 552 coopératives,
aujourd’hui 2,37 millions de salariés, soit
l’Espagne comptant 24 276 et la France
10,5% de l’emploi3. Pour renouveler leurs
avec 21 000, sont les premiers pays
effectifs salariés et équipes dirigeantes,
en termes de nombre d’entreprises
les structures ouvrent leurs portes aux
coopératives.
jeunes, et ces derniers sont attirés par les
Le mouvement coopératif français valeurs et principes fondateurs de l’ESS.
occupe le premier rang en terme de

2. Source : Observatoire Nationale de l’ESS- CNCRES (France),


3. Chiffres CNCRES

64 REMACOOP 6
Le Secteur Coopératif au Maroc

♦ Création d’emplois: D’après l’as- 2. Les coopératives des jeunes


sociation Recherches & Solidarités, le diplomés en Italie :
nombre de salariés dans l’ESS a progres-
Les coopératives italiennes coo-
sé d’environ 25% depuis 2000. Les em- pèrent avec le gouvernement national
plois se focalisent essentiellement dans afin de lutter contre le chômage des
quatre secteurs d’activité : jeunes. Les délégués de Generazioni,
l’action sociale, les activités finan- le réseau des jeunes de la coopérative
d’usagers Legacoop ont poursuivi leur
cières et d’assurance (assurances mu-
échange de points de vues avec les
tualistes, banques coopératives...), la
représentants du ministère du Dévelop-
santé et l’enseignement.
pement économique, pour évaluer les
♦ Besoins en recrutement relatifs à la limites actuelles auxquelles sont confron-
pyramide des âges : sur la période 2011- tées les jeunes lorsqu’ils tentent de lancer
2020, près de 608  000 salariés de l’ESS, leurs propres entreprises coopératives.
dont 97 000 cadres, devraient aller ou Au cours des discussions, Ils ont souligné
le besoin d’améliorer l’accès aux fonds
sont déjà partis à la retraite4. Les recrute-
pour les jeunes cherchant à fonder des
ments potentiels ne concernent pas que
coopératives ou pour les chômeurs, et
les jeunes diplômés : 11400 embauches
ont proposé de même une réduction
par an pourraient bénéficier aux jeunes d’impôts afin de permettre aux coopé-
moins ou non qualifiés5 (source Credoc). ratives de réinvestir dans les affaires, tout
♦ Intérêt des jeunes pour l’ESS : Dans
particulièrement dans la recherche et la
formation.
le cadre de l’enquête Avise-CESOD réa-
lisée en 2014, 58,7% des jeunes interro- Au cours de sa campagne de
gés ont estimé qu’un emploi dans l’ESS promotion du modèle des coopératives
répondrait à leurs souhaits. Pour 89% des parmi les jeunes, Generazioni s’est
jeunes interrogés, travailler dans ce sec- approché des lycées et des universités
teur permettrait de se sentir utile pour la afin d’encourager les étudiants à
s’impliquer dans un jeu de stratégie
société. Une fois en poste, les attentes
d’affaires tout en leur présentant les
semblent largement satisfaites : 85,1%
valeurs et principes des coopératives.
des jeunes y travaillant sont satisfaits de
Le projet, nommé Sapienza Business
leur emploi contre 73,2% de ceux évo- Game, est promu par Legacoop
luant dans le secteur public ou privé Lazio, Generazioni Lazio et certaines
marchand. associations étudiantes comme
Sapienza in Movimento et AIESEC.

4. Chiffres CNCRES
5. Source Credoc

REMACOOP 6
65
Le Secteur Coopératif au Maroc

Legacoop s’engage pour impliquer des jeunes hommes et jeunes femmes


les jeunes dans sa stratégie à long diplômés qui ont choisi de travailler en
terme. Generazioni a réussi à obtenir groupe à leur compte et de créer leur
un rôle important dans les bureaux de propre entreprise coopérative. Ce type
Legacoop et prend part à chaque d’insertion via les coopératives connai-
processus de direction et de prise de tra prochainement une dynamique qui
décision. sera soutenue et stimulée par les nou-
veaux amendements de la nouvelle loi
Les coopératives italiennes ont fait n°12.112 des coopératives parmi les-
preuve d’une résistance remarquable quels on peut citer :
en temps de crise, en augmentant
l’emploi de 8 % au cours des dernières 1. Formalité simplifiée pour la
années. En plus de fournir du travail création des coopératives et
aux jeunes, les coopératives peuvent leurs unions avec suppression de
également leur permettre de lancer leurs l’agrément,
propres entreprises. Il y a actuellement 2. Inscription aux registres
13 000 coopératives de jeunes en Italie. des coopératives (local et
Les coopératives emploient également national) ce qui va conférer
plus de 7,4 % de la population active en aux coopératives la possibilité
Italie. de soumissionner aux marchés
publics,
Comptant 15 organisations régio-
nales, « Generazioni  » fut le premier 3. Traitement des opérations avec
réseau de jeunes coopérateurs euro- les tiers dans la limite de 30%,
péens mis en place. Ces objectifs ont 4. Possibilité d’adhésion des per-
été définis autours du « développement sonnes morales dans les coopé-
de l’entreprenariat coopératif chez des ratives,
jeunes », « l’encouragement de la pré-
5. Limite minimum des adhérents à 5
sence des jeunes au sein des conseils
adhérents au lieu de 7,
d’affaires coopératives et institutions»
«l’élargissement des opportunités entre- 6. Limite des parts sociales des
preneuriales pour les coopératives start- personnes morales à 35% dans le
up dirigées par des jeunes ». capital des coopératives,
7. Gouvernance  : gestion des
VIII. Perspectives des coopératives coopératives par un ou plusieurs
des jeunes diplômés : gestionnaires ou un conseil
Les coopératives, en vertu du prin- d’administration selon le chiffre
cipe de l’engagement vers la commu- d’affaire ou le nombre des
nauté sont devenues des partenaires adhérents,
fidèles de la société du fait du rôle 8. possibilité de création d’un
qu’elles jouent dans l’insertion à travers conseil de vigilance au sein des
l’accompagnement et l’encadrement coopératives,

66 REMACOOP 6
Le Secteur Coopératif au Maroc

9. Transformation de la coopérative les jeunes diplômés car ceux qui ont


en société, fusion, choisi déjà la formule coopérative
ont fait preuve d’enthousiasme et de
10.Dispositions pénales pour
détermination.
préserver les droits et intérêts des
coopérateurs. Par conséquent, appréhender ces
nouveaux mécanismes serait un atout en
L’appréciable croissance réalisée
faveur de l’insertion des jeunes diplômés
par les coopératives en quantité et en
à l’instar de :
qualité (plus de 15700 coopératives
avec un total dépassant les 484  231 ♦ L’élaboration et l’animation
adhérents et un capital consolidé de des programmes de formation
6.304.499.365,00 DH), reflète la place spécifiques au profit des jeunes
que ces entités occupent ce qui leur concernant par exemple le
permet de caractériser positivement montage des projets, gestion,
l’économie sociale et solidaire au études …
Maroc en tant que modèle économique
♦ La création des fonds régionaux
contribuant au développement socio-
de soutien pour les coopératives
économique du pays.
et les entreprises des jeunes
Enfin, en dépit des efforts consentis
♦ L’établissement des mécanismes
par les pouvoirs publics et acteurs
pour faciliter l’accès aux crédits
concernés dans le secteur coopératif,
bancaires.
il est nécessaire de procéder à de
nouvelles approches et d’encourager

REMACOOP 6
67
Le Secteur Coopératif au Maroc

Coopératives de femmes :
une forme d’entreprendre autrement

Par :

Mme Hayat Zouhir Mr Slimane Lhajji


E-Mail : hayzouhir@yahoo.fr E-Mail : lhajjislim@yahoo.fr

Résumé
La crise mondiale a démontré la pertinence des coopératives en tant que structures
fortes et fiables, qui contribuent amplement à la dissémination de la culture de l’entreprise
coopérative partout dans le monde.
Au Maroc le secteur coopératif est reconnu comme un pilier important pour la
création de la richesse, la lutte contre l’exclusion et la précarité, la création de l’emploi et
de la cohésion sociale, mobilisant toutes les couches sociales autour d’un développement
intégré et pérenne.
Ainsi, le secteur coopératif marocain a connu une profonde mutation et évolution
qualitative et quantitative des coopératives qui ont dépassé le chiffre de 15.735 unités1,
avec une montée considérable de coopératives de femmes qui ont affiché un nombre
frôlant les 2.300 coopératives2.
En effet, les femmes au Maroc se sont engagées dans une voie de création d’entreprises
coopératives avec des compétences entrepreneuriales majoritairement innées dans
divers secteurs innovants et parfois insolites. Ces entités contribuent à la création de
nouvelles opportunités d’emploi direct et indirect, l’offre des biens et de services à travers
la valorisation des produits locaux et la préservation du patrimoine culturel local.
Cet entreprenariat féminin à travers les coopératives a permis certes une amélioration
économique et culturelle des femmes notamment en milieu rural, une évolution de son
statut sociale, sans omettre les effets d’entrainement positif pour sa famille, ses enfants et
son environnement en général.
La présente contribution zoomera sur les coopératives de femmes au Maroc, leurs états
d’évolution, en faisant ressortir leurs apports dans le développement de l’entreprenariat
féminin pour étaler ensuite les mesures favorisant leur épanouissement sur la base des
difficultés rencontrées par ce type de coopératives.

Mots clés : coopératives de femmes, entreprenariat féminin

1. Source ODCo
2. Source ODCo (2.280 coopératives)

68 REMACOOP 6
Le Secteur Coopératif au Maroc

Introduction : A cet effet on se contentera d’établir


leurs apports dans le développement de
Outre le choix entre l’appellation des
coopératives de femmes ou féminines, l’entreprenariat féminin et de réfléchir
celle de coopératives de femmes est sur les mesures qui peuvent favoriser
plus expressive. Ces dernières constituent leur évolution et ce en se basant sur les
un sujet très important de part son difficultés rencontrées.
évolution particulière et ses impacts
Le développement des coopératives
remarquables. A cet effet l’Office de
de femmes : concis historique
Développement de la Coopération y
réserve un intérêt particulier. Après un demi-siècle d’existence
 En effet au Maroc la conscientisation le secteur coopératif marocain a pris
des pouvoirs publics de l’importance du un grand élan par la multiplication
model « coopérative » s’est traduite par du nombre des coopératives qui ont
la création en 1962 du bureau de déve- dépassé actuellement les 15.000 entités
loppement de la coopération(BDCO) œuvront dans divers secteurs, qui
restructuré en 1975 sous l’appellation de embrassant de nouveaux créneaux
l’Office de Développement de la Coo- prometteurs et innovants, et touchent
pération (ODCo) chargé des coopéra- une large population de différents âges,
tives dans les volets de la formation, l’in-
et strates sociales. C’est ainsi qu’on
formation, assistance juridique, études
constate une évolution très marquante
et proposition de reformes législatives
de ce genre des coopératives (voir
et réglementaires relatives à la création
des coopératives. l’article sus cité)4.

Aussi plusieurs et études ont été En effet, leur nombre au départ était
effectuées à la promotion des coopé- très modeste puisque jusqu’au 2004, il
ratives de femmes. (Rachida ELGHIAT, ne dépassait pas 376 coopératives.
2011) 3.

Secteur 1999 2002 2004


Agriculture 70 137 229
Artisanat 93 114 135
Habitat 1 1 1
Commerce 3 5
Pêche 2 3
Alphabetisation 2 2
Consommation 1 1
Total 164 260 376
Evolution des coopératives de femmes selon les secteurs selon les secteurs d’activité
Source : ODCo (annuaire statistiques)
3. «  Les coopératives de femmes aux Maroc : Etat des lieux » par Rachida Elghiat, REMACOOP 1, 2011
4. « Les coopératives de femmes aux Maroc : Etat des lieux » par Rachida Elghiat ,REMACOOP 1, 2011

REMACOOP 6
69
Le Secteur Coopératif au Maroc

Mais a partir de l’année 2005,date nombre des coopératives de femmes


mémorable datant le lancement de n’a cessé de se multiplier nettement
l’initiative nationale de développement pour atteindre à la fin de l’année 2015,
humaine (INDH) par Sa Majesté le Roi 2280 coopératives, se répartissant selon
Mohammed VI que dieu le glorifie, le les secteurs comme suit :

Nombre de coopératives Nombre


Secteurs
de femmes d’adhérentes

Agriculture (H.R.A) 763 13 835

Alphabetisation 8 59

Argane 274 7 117

Art et culture 1 14

Artisanat 987 13 965

Commercants detaillants 10 70

Consommation 3 22

Denrees alimentaires 170 1 766

Forets 7 127

Imprimerie-papeterie 1 7

Main d’oeuvre 13 101

Pêche 8 178

Plantes medicinales et aromatiques 35 699

Total 2280 37 960

Source : ODCo 2016

70 REMACOOP 6
Le Secteur Coopératif au Maroc

Répartition des coopératives de femmes selon les secteurs d’activité


Source : ODCo 2016

D’après ce graphique les coopéra- l’ensemble des coopératives.


tives de femmes se caractérisent par
Les coopératives de femmes à la
la prépondérance de celles œuvrant fin de l’année 2015, présentent les
dans le secteur de l’artisanat que celles caractéristiques suivantes :
de l’agriculture ce qui les démarque de

Coopératives Total
de femmes des coopératives

Nombre total 2280 15735

Nombre des adhérents 37960 484231

moyenne des adhérents par coopérative 16 30

Moyenne du capital par coopérative en MDH 7460 411196

Source : ODCo

Le développement des coopératives nent comme moyen d’intégration des


de femmes : des impacts et apports femmes dans le développement, dans
la lutte contre la pauvreté et l’amélio-
Assurément l’essor des coopératives
ration de leur qualité de vie de façon
de femmes au Maroc est très important durable. L’application de ce modèle
d’où les retombées qui sont nécessai- permet aux femmes de s’associer pour
rement significatives, en effet «  Le mo- démarrer une entreprise qui répondrait
dèle coopératif est certainement perti- à leurs besoins, qui générerait locale-

REMACOOP 6
71
Le Secteur Coopératif au Maroc

ment l’activité économique et sociale Le volet social :


et dans laquelle elles sont supposées y
L’amélioration de niveau de vie im-
participer pleinement. »5
plique celle de la situation sociale des
En effet un bref inventaire des acquis femmes dans la société dès lors qu’elles
des coopératives de femmes, fait ressortir sont considérées comme des acteurs
leur prouesses sur plusieurs plans à savoir très actifs dans la société. L’entreprena-
l’économique, le social, le culturel, le riat féminin à travers les coopératives,
politique et l’environnemental, relate que ces femmes dans la gestion
démocratique et participative de leurs
Le volet économique :
coopératives sont autonomes, créa-
C’est l’un des volets crucial qui dé- trices qui contrôlent leurs projet. Finale-
termine la pérennité de la coopérative, ment ces coopératives contribuent à :
qui à défaut de revenu le projet est
♦ Amélioration
de l’état sanitaire des
totalement condamné. L’adhésion des
femmes et de leurs proches,
femmes aux coopératives a permis de
leur garantir un revenu, qui malgré quel- ♦ Affermissement du statut social de
quefois sa modestie et son irrégularité, ces femmes,
il a permis aux femmes une autonomie ♦ Réduction des inégalités,
financière. Cette autonomie améliore ♦ Changement du comportement
à des degrés différents leur niveau de de l’entourage envers la femme.
vie et celui de leurs familles. En somme
il s’agit de : Le volet culturel :

♦ la création des richesses en l’adhésion à la coopérative, poussait


produits et services, les femmes parfois à renforcer leurs
♦ la génération des revenus, compétences pour faire face aux
exigences de gestion et de négociation.
♦ l’autonomisation financière des
femmes, l’adhésion à la coopérative à permis
♦le développement d’esprit d’en- aux femmes de bénéficier des sessions
treprenariat au sein des femmes, d’alphabétisation, alors que pour celles
menbres du conseil d’administration
♦ la valorisation des produits locaux,
elles ont été amenée à renforcer leurs
♦ la création des emplois directs et compétences pour faire face aux
indirects, exigences de gestion et de négociation,
♦ la création des effets d’entraine- Ce qui a contribué à :
ment (infrastructures, électrifica-
♦ L’alphabétisation des femmes et
tion…),
leurs familles,

5. « La contribution du modele cooperatif au developpement axe sur le genre: le cas des cooperatives
feminines d’extraction et de commercialisation d’huile d’arganier au maroc » par isabelle drainville, juillet
2001.

72 REMACOOP 6
Le Secteur Coopératif au Maroc

♦ Au développement de leurs Le développement des coopératives


capacités en technique de pro- de femmes : des contraintes
duction, de commercialisation et
Les coopératives de femmes
de communication (esprit d’entre-
s’exposent en général aux mêmes
prenariat),
contraintes du mouvement coopératif,
♦ Ala préservation du patrimoine en dépit de quelques particularités qui
culturel, et le savoir faire local et peuvent se résumer dans l’environne-
des métiers. ment socio culturel inadapté ne facili-
Le volet politique : tant pas l’intégration de la femme. Les
autres difficultés concernent les points
Les coopératives féminines suivantes :
cherchent à défendre les intérêts des
♦ E
 sprit
de dépendance vis-à-vis de
femmes par des actions de négociation,
plaidoyer et lobbying auprès des l’administration et à d’autres inter-
décideurs et des partenaires. Certaines venants en termes d’accompa-
coopératives se sont constituées en gnement et d’appui financier,
unions, associations, GIE (groupement ♦ Le
non respect de la législation ré-
d’intérêt économique) pour mieux se glementant les coopératives, (gé-
positionner et faire entendre leurs mots. néralement par méconnaissance),
♦ M
 odeste niveau d’instruction
Le volet environnemental :
surtout pour les femmes dans le
Les coopératives de femmes parti- monde rural,
cipent à la préservation de l’environ- ♦ D
 ifficultésd’accès au finance-
nement et la gestion durable de la bio- ment ce qui condamne tout effort
diversité. La constitution même de cer- d’investissement,
taines coopératives de femmes entrait
♦ R
 aretéet cherté de la matière
dans ce cadre. C’est le cas des coo-
première,
pératives de femmes d’argane dans
♦ Difficultés
de commercialisation
les régions Sud Ouest du Maroc, dans le
des produits.
cadre de plusieurs projets vue la contri-
bution de plusieurs intervenant natio- Le développement des coopéra-
naux, et internationaux (GIZ, Oxfam, tives de femmes  : environnement
JICA). En général toutes les coopéra- favorable
tives de femmes dans d’autres secteurs
Au Maroc, le regroupement des
ont le souci du respect de l’environne-
femmes en coopératives leur a permis
ment et n’exploitent q’une faible por-
certes une amélioration de leur situation
tion de la production des Ecosystèmes
naturels . économique, une évolution de leur
statut social, sans omettre les effets
d’entrainement positifs sur leur famille

REMACOOP 6
73
Le Secteur Coopératif au Maroc

en particulier et sur leur environnement recommandations résident dans l’adop-


en général. tion de la convergence et de la coordi-
nation entre les différents intervenants,
Cette conviction était imprégnée
l’instauration des opportunités d’accès
depuis une dizaine d’années, aussi lors
au financement exclusivement dédiées
de l’atelier national sur les coopératives
aux coopératives de femmes,…
de femmes tenu à Mehdia en 1999  or-
ganisé par l’ODCo avec ses partenaires En somme, l’environnement est
il a été conclu que « la formule coopé- propice au développement des coo-
rative a été considérée comme étant pératives de femmes, par l’éxistence
favorable à l’intégration des femmes d’importants programmes de dévelop-
au développement ainsi qu’étant une pement, d’un appui institutionnel adé-
véritable école au développement de quat, et d’un arsenal juridique propice.
la société civile par la responsabilisation,
Programmes de développement :
la solidarité, la gestion des ressources,
etc... »6 D’envergure nationale, internatio-
nale et sectorielle, les programmes re-
En effet, les coopératives de femmes
gorgent de possibilités de création des
en tant que composante de l’économie
coopératives de femmes, parmi les plus
sociale et solidaire ont pu se forger une
déterminants l’Initiative Nationale de
place cruciale dans le tissu coopératif
Développement Humain (INDH), le Plan
marocain à travers des initiatives
Maroc Vert (PMV), qui ont contribué à la
marquantes et un potentiel d’innovation
création d’un grand nombres de coo-
et de créativité considérable.
pératives de femmes et dans différents
Ce résultat est le fruit de nombreuses secteurs.
volontés manifestes aussi bien par l’Etat
Appui institutionnel :
à travers les différentes institutions
concernées que par les coopératives et Pour la promotion des coopératives,
plus particulièrement le rôle déterminant l’ODCo a vu ses attributions renforcées
alloué à l’Office de Développement de par les dispositions de la nouvelle loi n°
la coopération. 112.12 relative aux coopératives7 dans
le volet de sensibilisation, la formation
Vu l’importance de ce genre de
et le contrôle des entités coopératives.
coopérative et dans le but de soutenir Le but principale réside dans la construc
et promouvoir l’entreprenariat féminin tion d’un tissu coopératif Marocain per-
à travers les coopératives, d’importants formant et fiable, qui est constitué par
efforts sont nécessaires à déployer par des coopératives pérennes.
les acteurs en relation. Les principales

6.  La contribution du modele cooperatif au developpement axe sur le genre: le cas des cooperatives
feminines d’extraction et de commercialisation d’huile d’arganier au maroc » par isabelle drainville, juillet
2001

74 REMACOOP 6
Le Secteur Coopératif au Maroc

De ce fait l’accompagnement des Conclusion :


coopératives semble une source de L’encouragement de l’entreprena-
cette pérennité souhaitée. La réalisation
riat féminin à travers les coopératives
de cet accompagnement est l’apa-
doit être prioritaire pour assurer l’inclu-
nage de plusieurs départements, qui
sion des femmes dans le tissu écono-
doivent tenter la coordination entre eux
miques, selon les statistiques du Haut
pour la mener à bien.
Commissariat du Plan, pour la période
entre le troisième trimestre de l’année
Arsenal juridique,
2014 et celui de 2015 « Le taux de chô-
Ces dernières années le Maroc mage est ainsi passé, de 9,6% à 10,1%
s’est lancé dans la promulgation d’une au niveau national, de 14,5% à 15,1% en
armada de textes législatifs qui lui font milieu urbain et de 4,1% à 4,3% en mi-
honneur. En effet il fallait faire face aux lieu rural. Parmi les hommes, il est passé
règlementations et procédures qui ac- de 9,2% à 9,6% et parmi les femmes de
culent le développementet embrasser 10,6% à 11,1%.  »8 , et sans prendre en
celles qui l’encouragent. considération le taux de sous emploi des
A ce titre il faut citer les textes rela- femmes durant la même période, l’inté-
tifs à la labélisation, identification géo- rêt de leur insertion est donc vitale.
graphique protégée, produits biolo- Leur adhésion à des coopératives
giques,…alors que d’autres sont en mixtes ou exclusivement de femmes est
cours en l’occurrence ceux relatifs à synonyme de création d’une activité
l’économie sociale et solidaire, com- génératrice de revenu et de valorisation
merce équitable, … de leur travail sous estimé auparavant.
Mais celui qui reste d’actualité et La stratégie nationale de développe-
dont les attentes sont grandes est la loi ment de l’économie sociale et solidaire
n°112.12 relative aux coopératives qui (2010-2020) qui place la dimension
va permettre de faciliter sûrement la genre comme étant une composante
création des coopératives en général stratégique et transversale, a été énu-
et celles des femmes en particulier vu mérée parmi les stratégies et les pro-
la simplification apparente de la procé- grammes mis en œuvre pour stimuler
dure de création. les transformations économiques et so-
ciales favorables à l’égalité de genre9.

7. La loi n° 112.12 relative aux coopératives, Bulletin Officiel n° 6318 du 18 décembre 2014 (version
arabe)
8. «  ACTIVITE, EMPLOI ET CHOMAGE » -Troisième trimestre 2015- Haut Commissariat du Plan Royaume
du Maroc
9. «  Synthèse du rapport Genre 2015 » Direction des études et des prévisions financières - Ministère de
l’Economie et des Finances – Maroc.

REMACOOP 6
75
Le Secteur Coopératif au Maroc

Aujourd’hui le Maroc dispose de 2280 femmes seront candidates un jour à


femmes présidentes de coopératives, et éxercer la fonction de gestion de leur
avec le principe de l’altérnance, 37960 entreprise coopérative.

Bibliographie
• Rachida Elghiat, 2011 : « Les coopératives de femmes aux Maroc: Etat des lieux »
REMACOOP n°1,
• Isabelle drainville, juillet 2001 : « la contribution du modele cooperatif au developpement
axe sur le genre: le cas des cooperatives feminines d’extraction et de commercialisation
d’huile d’arganier au maroc » mémoire de maîtrise / université de sherbrooke
• Bulletin Officiel du Royaume du Maroc (version arabe), 2014 : « La loi n° 112.12 relative aux
coopératives », BO n° 6318 du 18 décembre 2014
• Haut-Commissariat du Plan Royaume du Maroc, 2015 : « ACTIVITE, EMPLOI ET CHOMAGE ».
Publication statistique-Troisième trimestre 2015.
• Ministère de l’Economie et des Finances – Royaume du Maroc, 2015 : « Synthèse du rapport
Genre 2015 ». Direction des études et des prévisions financières.

76 REMACOOP 6
Point de vue

REMACOOP 6
77
Point de vue

Nouvelles trajectoires de l’innovation :


le solidaire et le vert

Hicham ATTOUCH
Professeur habilité, FSJES, Université Mohamed V Souissi
Rabat-Maroc.
Président Forum des Économistes Marocains
E-Mail : attouch@gmail.com

1. Introduction des entreprises, de la société


civile… donnant naissance à de
Le réchauffement climatique,
nouvelles trajectoires d’innova-
le stress hydrique, le change-
tion. Deux parmi celles-ci méritent
ment progressif des habitudes des
citation durant les trois dernières
consommateurs … sont autant de
décennies:
mutations qui renforcent la ten-
dance déjà lancée par le som- ♦ L a trajectoire de l’écono-
met de la terre de Stockholm en mie sociale et solidaire, qui
1972 de passage vers le dévelop- après un premier âge d’or
pement durable. Cette tendance innovant vers la fin du 19ème
se confirme de plus en plus par et début du 20ème a connue
l’apparition de nouvelles géné- depuis 1980 un essor consi-
rations d’innovations qui tiennent dérable contre l’asymétrie
compte de la condition humaine de l’information. Cette tra-
et du respect écologique. Ainsi, «il jectoire et essentiellement
est probable que l’ère de l’inno- à l’origine de l’innovation
vation tirée par la consomma- sociale (InnoSol). Cette der-
tion touche à sa fin et que nous nière souvent immatérielle
entrions dans celle de l’innovation et intangible procédurale,
tirée par les enjeux sociétaux.» organisationnelle ou insti-
(Georghiou, 2009).
tutionnelle concernant des
Par ailleurs, Différentes par- activités peu ou pas déve-
ties prenantes se sont impliquées loppées se caractérise es-
au fil des années dans cet effort sentiellement par la territo-
mondial de rupture avec les in- rialisation et les dynamiques
novations de consommation de collectives et participatives.
masse. Ceci dit, les initiatives se La loi française de l’ESS dans
multiplient de la part des gouver- son article 15 considéré
nements, des autorités locales, l’innovation sociale comme

78 REMACOOP 6
Point de vue

une réponse en produits ou ser- de l’innovation au Maroc? Auparavant,


vices à des besoins sociaux non il est nécessaire de voir les caractéris-
ou mal satisfaits y compris tout le tiques du milieu innovateur solidaire et
processus de transformation so- vert tel qu’il ressort des bonnes pratiques
ciale qui s’y rattache (élaboration, internationales.
conception, production, diffusion,
organisation, consultation et finan- 2. Milieu innovateur solidaire et vert
cement) (Guérin et Richez-Battesti, Pendant longtemps le développe-
2015 : 6).
ment fut associé à la croissance éco-
♦ L
a trajectoire de l’économie verte nomique de masse impliquant une
axée plus récente mettant l’ac- division internationale du travail entre
cent davantage sur l’écologique pays dominateurs riches et des pays
et la durabilité face à l’économie qualifiés par certains auteurs de déve-
brune «énergies fossiles» et au ré- loppement de tiers monde. A la fin du
chauffement climatique. L’inno- 2ème siècle l’avènement de l’internet va
vation issue des efforts des acteurs bouleverser la donne au profit de l’im-
inscrits dans cette trajectoire est matériel et la connaissance. Les innova-
qualifiée de verte (InnoVerte). tions deviennent de plus en plus « soft »
L’objectif central c’est de tirer un marquées par la réduction de la durée
bénéfice environnemental com-
de vie des produits et la forte dose de
parativement aux alternatives
servuction. N’étant pas encore satisfaite
existantes.
et devant les problématiques générées
De ce qui précède, nous essayerons par les deux premiers milieux 1.0 et 2.0
à travers cet article de voir comment se (Cf. figure n° 1).
profilent les trajectoires solidaire et verte
Figure n° 1 : Evolution des milieux innovateurs et du développement

Source : construction auteur

REMACOOP 6
79
Point de vue

Partant des fondamentaux du ♦ Environnementale: Ancrage terri-


développement soutenable un torial, proximité, durabilité, saison-
nouveau milieu 3.0 émerge. Ce milieu nalité.
en pleine gestation se matérialise bien
La saga ne s’arrêtera certainement
dans l’économie sociale est solidaire et
pas à ce niveau puisque les germes
l’économie verte.
d’un nouveau milieu innovateur se
Ces économies qui apparemment se profilent à travers l’inter-culturalité. Les
complètent à deux niveaux. Le premier innovations attendues seront une hybri-
niveau celui du système des valeurs qui dation des besoins des citoyens de dif-
sous-tend les deux économies marqué férentes cultures et non des innovations
par l’éthique, la responsabilité sociétale stéréotypées pour un citoyen du monde
des organisations, la coopération, la inexistant.
solidarité intra et intergénérationnelle.
Globalement, les nouvelles trajec-
Le second niveau se concrétise à travers
toires de l’innovation plaident pour la
la performance multidimensionnelle
circularité, la fonctionnalité, l’utilité…
recherchée par les 2 économies aux
Ce faisant les innovations apparaissent
plans:
au cours du processus de production-
♦ Economique: rationalité socioéco- servuction sous forme de: éco-innova-
nomique fondée sur l’utilité socié- tion, écotechnologies, recyclage des
tale et intérêt collectif, création de déchets, réduction de l’usage des res-
richesses, emplois et revenus, créa- sources (emballages par exemple)…
tion de valeur partenariale pour ou lors de l’utilisation par le consomma-
une répartition équitable; teur : réduction de la consommation de
♦ Sociale:
dignité, inclusion, démo- l’énergie, réduction de toutes les natures
cratie, équité, estime, altruisme et de pollution, recyclage des produits,
réalisation de soi ; réutilisation, réemploi, réparation…
Figure n° 2 : Génération des innovations entre soutenabilité et valeur économique

Source : Commission européenne (2012)

80 REMACOOP 6
Point de vue

Ces innovations sont certes à l’ori- pouvoirs publics au travers l’application


gine d’une croissance durable. Seule- d’une réglementation spécifique;
ment elles exigent un effort coordonné la taxation pollueur-payeur et les
et concerté entre différentes parties subventions-appui. Ce n’est que plus
prenantes à commencer par les pou- tard que des innovations radicales ou
voirs publics (Cf. figure n° 2). de transformation apparaissent créant
de nouvelles générations d’entreprises
Les bonnes pratiques internationales
(coopératives et vertes) et de nouveaux
montrent qu’en général le décollage
marchés.
des nouvelles trajectoires est l’œuvre des
Tableau n° 1 : Exemples d’implications sectorielles de la croissance
verte pour 3 secteurs

Source : Crifo et al (2010 : 47)


Il parait bien à travers les différentes 3. InnoSol- InnoVerte au Maroc
innovations vertes (Cf. tableau n° 1)
Le Maroc riche d’une longue
que l’économie solidaire notamment
tradition de solidarité et d’une diversité
les coopératives constitue un allié
géographique et se trouvant dans
stratégique de premier ordre, et que une zone de stress hydrique compte
sans le solidaire le vert ne pourra beaucoup sur le développement du
s’épanouir. secteur coopératif et des secteurs liés à
Par ailleurs, une forte implémentation l’économie verte.
des nouvelles trajectoires d’innovation Ainsi dans le cadre de la capitalisation
dans les pays et les territoires exige une et la valorisation des initiatives locales,
culture entrepreneuriale favorable au l’Etat joue depuis des années le rôle
solidaire et au vert. Qu’en est-il pour le de locomotive grâce à des stratégies
Maroc ? volontaristes mariant à la fois les volets
de la gouvernance, du financement et
d’accompagnement.

REMACOOP 6
81
Point de vue

Sur le plan solidaire, les efforts consen- Sur le registre de l’économie verte,
tis durant des décennies ont permis de le bal fut ouvert officiellement grâce au
multiplier l’effectif des coopératives tout rapport du Conseil Economique Social
en permettant une certaine diversifica- et Environnemental qui a mis comme
tion de leurs activités. Certes, l’agriculture objectif à l’horizon 2020 l’atteinte de
reste le secteur numéro 1 où prolifèrent 90000 emplois verts dans quatre secteurs
les coopératives mais cela ne signifie de base  : assainissement et épuration
pas traditionalisme puisque différentes des rejets liquides, gestion des déchets
innovations sont introduites et dans les solides ménagers, efficacité énergétique
et énergies renouvelables. Outre les
cinq domaines identifiés par Schum-
coopératives vertes des startups vertes
peter  : produit, procédés, débouchés,
développent des solutions innovantes  :
entrants et organisation. Les autres sec-
covoiturage, digesteurs, huiles bio,
teurs surtout artisanat, tourisme, habitat
publicité vélos...
connaissent également un dynamisme
innovant particulièrement suite à l’adop-
4. Conclusion
tion de la stratégie nationale de l’ESS
2010-2020. En guise de conclusion, le champ de
la créativité dans l’économie solidaire et
Quelques exemples d’innovations verte est très large. Les idées écologiques
de coopératives vertes  : les sacs écolo- donnent naissance à des innovations
giques, les éco logements, les produits multiples partant la plupart du temps
de décoration issus de recyclage, les d’une finance solidaire. Certes il y a une
coopératives de tri, les produits de terroir recherche d’innovations génératrices de
valorisés (dattes, Safran, argile, artisa- revenu mais également soucieuse de
nat…). l’avenir de la planète et des besoins de
générations futures.

Bibliographie
•G
 eorghiou L., Université de Manchester, Rencontres de la croissance COE-Rexecode,
22/10/2009 cité dans NS (2011), ESS panorama et enjeux en Provence-Alpes-Côte d’Azur.
• Commission Européenne (2012), Connecting smart and sustainable growth through smart
specialisation: A practical guide for ERDF managing authorities, Novembre.
•C
 rifo P., Crassous-Doerfler R. et Flam M. (2010), L’économie verte et le rôle de l’industrie
dans la croissance verte, rapport pour le cercle de l’industrie, Juin.
•M
 inistère Délégué auprès du Premier Ministre, Chargé des Affaires Economiques et
Générales (2011), Stratégie Nationale de l’Économie Sociale et Solidaire 2010-2020,
Décembre 2011.
•G
 uérin T. Richez-Battesti N. (2015), Guide de l’innovation sociale 2015  : comprendre,
caractériser et développer l’innovation sociale en Provence-Alpes-Côte d’azur, Les
cahiers de l’Observatoire Régional ESS - CRESS PACA/LEST-CNRS AMU, n° 2, 1ère édition -
mars 2015.

82 REMACOOP 6
Point de vue

La gouvernance coopérative :
Originalité , différenciation ou problématique ?

Par :

Benouaicha Mostafa
E-Mail : mousting01@hotmail.com

La gouvernance représente l’en- exercer leur pouvoir en fixant de nou-


semble des processus, des pratiques, velles règles en particulier en matière de
des politiques et des structures qui dé- gestion .
terminent la manière dont une organi-
Les réglementations visaient non
sation est dirigée, administrée et contrô-
seulement la garantie des droits de
lée. Elle comprend aussi généralement
toutes les parties-prenantes, mais
les relations entre les nombreuses parties
également la fluidité et la stabilité
prenantes et les objectifs généraux. Les
des rapports transformant le style
parties prenantes sont les personnes qui
de gouvernance en indicateur de
jouent un rôle direct dans l’organisa-
confiance. La diversité de ces rapports,
tion  : les membres, les dirigeants, et les
la taille des organisations, leur formes
conseils ;et indirect comme les consom-
juridiques ou les modifications qu’elles
mateurs, les fournisseurs, sous traitants les
peuvent subir, leurs champs d’activités,
collectivités territoriales, les ONG ….etc.
rendent le champ de la gouvernance
L’émergence de ce qu’on nomme difficile à cerner .
la gouvernance d’entreprise dans les
Approchée sous l’aspect de la dé-
années 80, en réaction à une succes-
mocratie participative, la gouvernance
sion de crises qui ont touché le secteur
avant d’émerger en tant que modèle
du crédit, a provoqué l’essor d’une
moderne longtemps recherchée par les
nouvelle réglementation en matière de
entreprises capitalistes, était une pra-
gestion des grandes entreprises. L’ob-
tique innée au système coopératif. Si
jectif était de contrecarrer les abus de
dans l’entreprise c’est un moyen d’inté-
pouvoir de dirigeants peu contrôlés par
gration et un stimulant d’efficacité en in-
l’administration des entreprises (c’est-à-
troduisant une plus grande démocratie ;
dire les représentants des actionnaires
dans la coopérative, elle est à la base
propriétaires), et inciter ces derniers à
de son originalité .

REMACOOP 6
83
Point de vue

Dans le contexte coopératif, la gou- gouvernance qui constitue un pôle de


vernance se résume à la manière dont régulation et de stabilité grâce à ses
les administrateurs, les membres qui les caractéristiques et son originalité qui a
choisissent et les gérants, œuvrent de su marier  la performance économique
manière coordonnée, chacun respec- et la satisfaction des intérêts collectifs
tant son rôle, pour la bonne réussite de de leurs membres.
la coopérative, tant sur le plan écono-
Les spécificités de la gouvernance
mique que social.
coopérative s’avèrent garantes de la
En effet, au sein des coopératives, continuité comme modèle d’affaires
et contrairement à beaucoup d’autres distinct, offrant un potentiel considérable
types d’entreprises, la participation de nouvelles solutions qui favorisent
des membres a permis la réponse à le développement de l’homme en
leurs besoins de manière très efficace lui assurant les outils nécessaires pour
en assurant l’exécution des décisions façonner et contrôler ses activités.
qui dirigent les politiques de l’entité. Quelles sont donc les bases d’une telle
Système qui a toujours été à la base originalité  ? et en quoi se distingue-t-
pour améliorer la performance et la elle de la gouvernance des entreprises
rentabilité en prenant des décisions capitalistes  ? Notre contribution n’a
de manière concertée, transparente et
pas la prétention de traiter toutes les
surtout contrôlée par différents organes.
problématiques qui nécessitent des
La résistance aux multiples crises études approfondies, mais de lancer le
du système capitaliste dont ont fait débat sur les aspects d’un modèle dont
preuve les coopératives a renforcé le terrain reste vierge, car pas assez
la confiance dans leur mode de exploré .

84 REMACOOP 6
Point de vue

La gouvernance : unité du concept des dirigeants, contre-pouvoir visant à


diversité des logiques assurer la valeur des actions placées.
Il elle assure également la dynamique
Si les soubassements et les bases
des rapports entre les conseils
du concept de la gouvernance se
d’administration et les gestionnaires et la
rapprochent, les réalités qu’ils expriment
façon dont ces deux groupes abordent
et les buts recherchés différent suivant
les problèmes et les dilemmes qui se
les institutions auxquelles elle s’applique.
présentent à eux.
la diversité des formes (SA, PME, TPE,
Coopérative,SCOP…) entraine une Le déplacement des pouvoirs
diversité des applications et des dans l’entreprise a des conséquences
équilibres à assurer . qui vont au-delà du fonctionnement
La gouvernance de l’entreprise interne de l’entreprise. Au pouvoir
capitaliste assure l’équilibre des pouvoirs relatif des cadres dirigeants et au
entre les dirigeants salariés directement pouvoir des actionnaires, s’ajoute le
en phase avec la logique productive de pouvoir des « parties-prenantes » c’est-
l’entreprise, les actionnaires majoritaires à-dire des partenaires de l’entreprise,
se centrant sur le résultat financier. Le ainsi que le pouvoir de ses clients. Dans
conflit central se déplace : hier interne les coopératives, les relations entre
à la logique productive, il oppose sociétaires et « parties prenantes » ne
aujourd’hui la logique productive et la sont pas les mêmes non plus qu’entre
logique financière. Ce n’est pas le cas actionnaires et « parties prenantes ». Elles
des coopératives où les deux logiques entretienent fréquemment avec leurs
sont canalisées et orientées en premier partenaires des relations de proximité,
lieu par l’intérêt des membres. Les des liens sociaux qui vont au-delà de
coopératives sont établies pour servir l’échange strictement commercial.
les intérêts des membres ; la rentabilité D’autant plus que dans les coopératives
est donc un moyen d’atteindre un but les sociétaires sont en même temps
et non le but en soi. En deuxième lieu, acteurs et partie-prenantes.Par contre
comme les actions des coopératives si les actionnaires sont légalement
ne sont pas négociées sur le marché, propriétaires de grandes entreprises, ils
les contraintes externes, telles que la ne les contrôlent pas de fait, la direction
pression des actionnaires majoritaires ou ayant été cédée à une nouvelle classe
la menace d’être racheté, ne se posent de gestionnaires professionnels.
pas.
Pour les PME ou les TPE souvent à
La gouvernance d’entreprise caractère familiale la situation diffère.
correspond donc à un contre-pouvoir On considère souvent que pour elles, la
des actionnaires par rapport au pouvoir relation actionnaires-dirigeants n’est pas

REMACOOP 6
85
Point de vue

une source de conflits, ce qui pourrait la valeur créée échappe en partie


être apparemment logique puisqu’il n’y et définitivement à l’appropriation
a pas de séparation entre la fonction privative. La primauté est donnée à
de propriété et celle de direction. Or l’homme et non pas au capital au sens
ces entreprises sont organisées selon où la finalité première des coopératives
différents statuts juridiques. Certaines est d’être des instruments économiques
d’entre elles ouvrent leur capital à des pour des aspirations sociales, culturelles
actionnaires externes, notamment et économiques des membres.
financiers, ou délèguent la gestion à Ces principes et valeurs mondia-
un dirigeant extérieur à la famille : dans lement reconnus, sont les garants de
ce cas, il y a modification des relations l’identité coopérative et se manifestent
traditionnelles et se trouvent confrontées dans l’exercice du pouvoir nourris par
aux mêmes contraintes. La nouvelle l’équité et l’équilibre. La garantie dé-
loi coopérative marocaine (loi 112-12) mocratique assure le pouvoir accordé
va rapprocher certaines coopératives à tous les membres de rester maitres
de cette situation en leur permettant, de leur entreprise et d’en apprécier et
suivant leur taille de désigner un gérant sanctionner la gestion dans un cadre
au lieu d’un conseil d’administration. participatif : l’assemblée générale, or-
gane souverain reste détenteur exclusif
Les facteurs de la différenciation
des pouvoirs.
1) les principes fondateurs 
2) Une participation économique
La spécificité de la gouvernance des
Les coopératives sont des entités
coopératives découle de leurs valeurs économiques. Le lien qui unit les adhé-
et principes fondateurs. Ces principes rents est une participation économique
forment leur identité organisationnelle et commune. La coopérative contribue à
les mécanismes de cette gouvernance la réalisation des activités économiques
démocratique : la primauté de l’homme de ses adhérents. Mais elle n’est pas
sur le capital,  la propriété collective et un simple fournisseur de biens ou ser-
la libre adhésion, la solidarité, l’équité vices, ou même un client assurant des
et l’égalité, le pouvoir démocratique débouchés pour ses coopérateurs. Les
et l’implication économique de tous profits réalisés par la coopérative sur
les membres, la juste répartition de la les transactions générées par les adhé-
richesse sont les principes et valeurs qui rents reviennent, en majeure partie, aux
adhérents eux-mêmes. Elle ne poursuit
façonnent l’action collective finalisée.
donc pas la réalisation des transactions
Dans la gouvernance démocratique, économiques pour elle-même, mais elle
le pouvoir n’est pas proportionnel le fait toujours pour le compte de ses
au nombre de parts détenues, et adhérents.

86 REMACOOP 6
Point de vue

En retour, tous les membres partagent fait du membre le principale acteur de


les avantages de la coopération, géné- toute cette dynamique lui permettant de
ralement, selon leur degré d’utilisation contrôler son destin .
des services offerts par la coopérative.
Pour cette raison, l’assemblée
La démocratie élective reste liée à la dé-
générale est l’organe suprême dans les
mocratie et à l’équité économique.
coopératives, et le pouvoir ne tient pas
3) Une solidarité au montant du capital détenu mais au
nombre de votants. La règle de base est
La solidarité s’exerce à travers une ainsi que chaque adhérent a un droit de
double dimension. La première est celle vote quel que soit le nombre de parts
qui lie les adhérents entre eux. L’exigence sociales qu’il détient ou quel que soit
démocratique n’est pas seulement le volume d’activité qu’il réalise avec
un mode d’exercice du pouvoir, elle la coopérative. Il s’agit évidemment
a également une incidence forte sur d’une différence fondamentale avec
les coopérateurs puisqu’elle conduit à les sociétés par actions où chaque
reconnaître que chacun d’eux a un droit actionnaire est représenté selon la
équivalent à s’exprimer. Or la solidarité participation qu’il détient.
naît de la reconnaissance mutuelle
des droits fondamentaux de chacun Le pouvoir démocratique échoit
qui est à la base du contrat social qui en effet à tous les membres au sens
les unit. En ce sens, il n’existe pas de de la définition donnée par l’ACI : «les
solidarité similaire entre les actionnaires coopératives sont des organisations
d’une société de capitaux, car chaque démocratiques dirigées par leurs
actionnaire n’a de représentation qu’à membres qui participent activement à
travers le nombre d’actions qu’il détient. l’établissement des politiques et à la prise
de décision». 
les éléments d’opérationnalisation La gouvernance participative est
L’assemblée générale un des éléments clefs de leur succès.
Fondée sur le principe  «  un membre, un
La gouvernance coopérative est vote», tous les membres sont des déci-
un système qui départage l’exercice deurs d’importance égale dans l’entre-
et le contrôle du pouvoir. Elle cherche prise. La gouvernance des coopératives
en permanence les meilleurs équilibres confère à chaque individu-coopérateur
entre les différents pouvoirs composants une importance dans les mécanismes de
d’une démocratie élective. Dans prise de décisions qu’il ne pourrait reven-
la coopération, le but est pluriel en diquer dans les sociétés de capitaux .
portant non seulement sur la création
de richesse, mais aussi sur la satisfaction Ce principe démocratique est à la
des aspirations des membres ce qui base de la spécificité du rapport que la

REMACOOP 6
87
Point de vue

coopérative entretient avec ses adhé- défense» dans la régulation interne. Son
rents qui constitue également un avan- rôle a une finalité en lien avec les prin-
tage et une opportunité, car le pouvoir cipes de la coopération. Il est, tout à la
démocratique donne une légitimité qui fois, le représentant des coopérateurs,
favorise une certaine adhésion person- l’organe de prise de décision, et l’or-
nelle à la coopérative et aux valeurs gane de contrôle des gestionnaires. Par
qu’elle défend. Les adhérents disposent rapport aux sociétés commerciales qui,
donc d’une double légitimité vis-à-vis le plus souvent, confondent les fonctions
de la coopérative. Ils ont un pouvoir de de président du conseil d’administration
désignation des administrateurs sur une et de directeur général, les coopéra-
base démocratique et ils ont un pouvoir tives maintiennent cette dissociation
économique sur les profits réalisés sur la qui a pour effet de renforcer le pouvoir
base des transactions effectuées par effectif du conseil d’administration par
chacun d’entre eux. Alors que le pou- rapport au directeur. De surcroît, alors
voir de décisions est lié à la personne, le que le processus de sélection des admi-
pouvoir économique est lié au volume nistrateurs est relativement libre dans
des transactions. les sociétés commerciales, c’est-à-dire
qu’il est le plus souvent sous le contrôle
Le CA dans l’action collective du PDG, le membre du conseil d’une
finalisée coopérative est un acteur issu de la
base, motivé par les valeurs et les prin-
La gouvernance d’une coopérative
cipes de la coopération. Il s’engage
diffère de celle d’une société, car les
dans la conduite des affaires «non pas
conseils d’administration des coopé-
par intérêt financier, mais par convic-
ratives n’agissent pas seulement à titre
tion. la légitimité de son indépendance
d’organe de la haute direction et des
découle d’un processus démocratique
décisions stratégiques pour optimiser le
authentique. 
rendement de l’investissement (comme
le font les conseils d’administration des Les relations des dirigeants avec les
sociétés), ils vont plus loin : le conseil membres sont équilibrées, cohérentes et
d’une coopérative doit s’occuper des faiblement conflictuelles par le fait que
besoins de ses membres tout en permet- les dirigeants jouissent d’une légitimité
tant à la coopérative de rester perfor- élective et sont issus de la base.
mante et compétitive sur le marché .
Dans les structures coopératives le
Le conseil d’administration est au dirigeant est un militant de l’égalité,
cœur de la gouvernance des coopéra- du partage et de la solidarité. Son
tives. Mandataire de l’assemblée géné- engagement est un «engagement
rale, c’est un organe collectif de déci- citoyen». Le mandat d’administrateur
sion qui est a à la première «ligne de élu dans les structures de coopération

88 REMACOOP 6
Point de vue

n’obéit pas à la logique financière des via des délégations mais c’est à lui
administrateurs et dirigeants des firmes que revient la charge du personnel.
classiques cotées. Son mandat relève Il existe donc trois niveaux potentiels
du quasi-bénévolat. de rapports. Le premier est entre le
directeur et le président, le second
Le directeur : fonction de direction entre le président et son conseil
d’administration et le troisième entre le
Les deux fonctions essentielles d’une
conseil d’administration et les adhérents.
organisation, celle de direction et celle
Le directeur est donc Sous la direction,
de présidence, sont dissociées dans le
le contrôle et la surveillance du conseil
cas des coopératives. Non seulement
d’administration.
les fonctions sont différentes mais le
statut des personnes est en lui-même La gouvernance doit donc répondre
opposé. Le directeur est un salarié, le à l’administration stratégique et être
président est un adhérent. Le directeur réservée au conseil d’administration,
est un Salarié de la coopérative et non en contrepartie la gestion doit être
mandataire social dont la rémunération réservée à la direction et correspondre
est fixée par le conseil d’administration à la réalisation de la mission par des
qui peut lui confier certain pouvoirs programmes organisationnels.

La gouvernance coopérative trouve générale comme instance collégiale


donc sa légitimité dans le pouvoir qui le délègue (pris individuellement
suprême détenue par l’assemblée aucun membre n’a de pouvoir sur la

REMACOOP 6
89
Point de vue

coopérative ) au conseil d’administration à l’origine de la coopérative. Ces


qui devient mandataire avec le choix adhérents sont souvent unis par un
des moyens, le temps convenable ,de attachement très fort à leur coopérative
contrôler la bonne gestion du directeur qui, d’une certaine manière, est leur
pour assurer l’atteinte des objectifs fixés . œuvre. Les organes de gouvernance et
de gestion sont concentrés aux mains
La gouvernance peut-elle devenir des mêmes personnes. Les difficultés
problématique ? financières des débuts d’activité
n’aident pas également l’emploi d’un
Si  la gouvernance participative  fait
personnel de gestion; dans plusieurs cas
partie sur le papier du code génétique
un artisan, un agriculteur, un enseignant
de la coopérative, la réalité montre
peuvent se révéler d’excellents
toutefois que celle-ci  n’est pas tou-
administrateurs. Pour certains c’est une
jours un acquis. En effet, toutes sortes
opportunité à saisir au sens où le système
de raisons peuvent conduire à limiter
de coopération est une forme de
cette dynamique participative dont
promotion de la diversité des modèles
principalement les déviations du sys-
d’ascension et de réussite sociale et
tème dues à l’ignorance volontaire ou
même politique.
involontaire des principes de base des
coopératives ou par manque de forma- Le développement de l’activité,
tion et d’information. Ses modes d’exé- le besoin de toucher de nouveaux
cution ne peuvent donc se décider de marchés, l’extension géographique, la
façon dogmatique. Il est nécessaire de diversification des activités distendent
prendre en compte les contingences de le lien entre les administrateurs et les
la coopérative, et notamment son envi- adhérents. Non seulement cela se traduit
ronnement. Plusieurs situations peuvent par une distanciation des relations entre
être distinguées suivant le cycle de vie adhérents et administrateurs mais, dans
certains cas, le processus démocratique
de ces institutions, sans pour autant
lui-même devient impossible à organiser
prétendre généraliser les conclusions
au sein d’une même assemblée.
comme des vérités absolues.
Une coopérative qui rassemble une
Les coopératives épousent plusieurs vingtaine d’adhérents à ses débuts et
formes et tailles, et elles relèvent des se développe pour atteindre les limites
défis très différents aux diverses étapes d’une région, ou plusieurs régions. Lui
de leur croissance et de leur évolution. rend la tache difficile pour réunir tous les
adhérents en un même lieu.
Au démarrage des activités avec
le nombre limité des membres le Les différentes législations d’un cer-
conseil d’administration regroupe tain nombre de pays dont le Maroc
généralement les adhérents qui étaient ouvrent la possibilité de créer des sec-

90 REMACOOP 6
Point de vue

tions. Mais si cette alternative permet voir de décision de chacun est fonction
de sauvegarder la démocratie même du nombre d’actions en sa possession.
indirecte, elle pose des problèmes orga- Si ce type d’entreprises s’est révélé
nisationnels et peut constituer un handi- très efficace pour mobiliser des capi-
cap face à la concurrence dans les cas taux, il a aussi conduit nombre d’entre
des décisions économiques rapides. elles à  concentrer le pouvoir de déci-
sion dans les mains de quelques action-
Pour une gouvernance éclairée
naires au détriment des autres. Dans un
La gouvernance éclairée des contexte de  gouvernance d’entreprise
coopératives est une approche qui fondée sur le pouvoir financier, le risque
permet d’équilibrer avec succès les est grand que des dirigeants-spécula-
pratiques de pointe — communes à teurs prennent des décisions favorisant
la plupart des entreprises — tout en leur propre intérêt à court terme et  lé-
optimisant la proximité des membres sant les intérêts de l’entreprise à long
et en demeurant fidèle aux valeurs terme. Or, l’histoire récente a montré
fondamentales et à la mission de les limites de cette économie qui mo-
l’organisation. Bien que chaque situation nopolise les seuls profits au service de
soit unique, les coopératives de pointe quelques-uns.
sont celles qui favorisent leurs valeurs et
A l’opposé, en appliquant une gou-
principes uniques, et qui s’engagent à
vernance éclairée, les coopératives
demeurer compétitives sur le marché
peuvent inspirer la confiance sur le mar-
tout en tirant parti des composantes
ché, valoriser leur statut, consolider leur
d’une structure de gouvernance qui
réputation d’entités solides et uniques,
priorise les besoins des membres. Les
et contribuer à créer des économies
orientations et les stratégies d’entreprise
concurrentielles et des collectivités
fort différentes de celles empruntées par
unies. Elles doivent servir de référence
les entreprises capitalistes sont le fruit
pour un système de production huma-
des spécificités des coopératives.
nisé favorisant une croissance efficace
Le monde de l’entreprise est large- et une viabilité financière, tout en jetant
ment dominé par le modèle des socié- des bases solides pour une meilleure
tés de capitaux dans lesquelles le pou- coopération pour l’avenir.

REMACOOP 6
91
Point de vue

Référnces principales
• Nacer Eddine SADI & Françoise Moulin, «la gouvernance des structures à forte identité
sociale», Ouvrage collectif «l’entreprise coopérative : L’organisation de demain», Ellipse
2013
• G
 uide de gouvernance des coopératives .Institut Français des Administrateurs (IFA) dec-
2013
• la gouvernance des coopératives agricoles . Laure MENARD – Juriste COOP de France
7-2013
• Gouvernance et contrôle . Christine Collette Benoît Pigé .Edition Dunod, Paris, 2008

• la bonne gouvernance dans les coopératives de solidarité.par André-Anne tremblay_


hadija_indatou ;Maria cécilia_zuluaga_essai/IRCUS /décembre 2007.

92 REMACOOP 6
Reportage

REMACOOP 6
93
Coopérative «Yacout » :
Et si Cléopâtre était encore en vie ?

par :

Mme Hayat Zouhir Mr Slimane Lhajji


E-Mail : hayzouhir@yahoo.fr E-Mail : lhajjislim@yahoo.fr

Prélude qui respirent la santé et le fameux


savon noire (savon beldi) qui fait
Depuis la nuit des temps
partie de la tradition cosmétique
au Maroc, existait toujours une
séculaire dans les rituels du
complicité dissimulée entre
hammam comme un soin lavant.
la nature et la femme, cette
dernière s’approvisionnait d’elle Cet héritage et ce patrimoine
pour accommoder des recettes culturel seront repris par la
naturelles spécialement dédiées coopérative Yacout. L’une des
pour cette belle créature qui est coopératives innovante qui a bien
connue par sa conquête pour su associer les aspects modernes
une beauté naturelle illuminée et et traditionnels, par l’utilisation
radieuse. de matières première naturelles
locales dans une forme moderne.
Ainsi, les conseils des grandes
mères, ne se sont pas révolues, « Yacout » ou «rubis » est l’une
elles insistaient entre autres pour des pierres rare précieuse qui
l’usage du khôl traditionnel pour symbolise l’amour, la passion, la
un regard langoureux de tigresse, victoire, le bonheur et la pureté.
des masques naturels pour garder Tant de symbole qui effigie cette
un teint éclatant clair, de l’Aker coopérative, que seul l’exposé de
elfassi1 en rouge à lèvres ou fard son parcours depuis sa création le
à joues, du henné et du ghassoul confirmera.
pour des cheveux teintés en feu

1. Aker Elfassi: à base de poudre de grenadine et de coquelicot naturel séché au soleil

94 REMACOOP 6
Reportage

Le secteur coopératif artisanal de Le choix du cadre coopératif n’était


Rabat : Naissance d’un rubis pas sornette, mais il émanait d’une
conviction unanime de l’importance du
L’année 2013 a connu à Sala Al travail en groupe.
Jadida la naissance d’une nouvelle
coopérative, vouée pour la femme, Les adhérentes de manière innée
avaient une connaissance sur l’extrac-
constituée par 8 adhérents dont deux
tion de l’huile d’argane et quelques
hommes, et qui se sont fixés comme
notions sur la préparation de quelques
objet la production d’huile d’argane et
potions des produits cosmétiques essen-
des produits cosmétiques.
tiellement traditionnels.
Elle est Gérée par un conseil Cet acquis à été perfectionné par
d’administration composé de trois des formations spécialisées depuis la
membres, et son capital de départ création, la coopérative a débuté par
s’élevait à 3.500 dirhams. une formation en naturopathie qui leur
a permis d’entourer de prés le monde
La coopérative Yacout fait appel
fantasmagorique de la fabrication des
aux services des salariés temporaires
produits naturels et de cerner certaines
lors de la préparation des grandes com-
plantes et découvrir leurs secrets cachés.
mandes, la participation aux foires et
dans ses points de vente. Mais la formation en cosmétologie
a constitué un tournant crucial en la vie
de la coopérative, vu la nature des
thématiques enseignées en liaison
avec la chimie et les caractéristiques
des huiles naturelles et leurs dérivés,
l’anatomie et la physiologie
de la peau et des cheveux, les
tensioactifs et leurs applications
dans les produits cosmétiques, les
aspects de qualité, d’hygiène et
de sécurité dans le laboratoire .
Cette dernière formation qui a
été enseignée par monsieur Robert
Woestenborghs, Senior Expert du
programme PUM2, a permis la
fabrication des différents produits
cosmétiques tels que le savon
naturel, le baume, la crème et la
lotion.

2. PUM (Netherlands senior experts)  (Programma Uitzending Managers)

REMACOOP 6
95
Reportage

L a coopérative «Yacout»  : Un Essor De même, La richesse de la nature


étonnant en terme de plantes aromatiques
et médicinales a ouvert une porte
Depuis sa création les adhérents de
de créativité à la coopérative, qui
la coopérative « Yacout » ont fait preuve
s’approvisionne désormais de la nature
d’un grand dynamisme pour prendre
et profite des bienfaits de certaines
de l’avant et se professionnaliser.
plantes, qui sont ajoutées, pétries à
En effet, ils étaient présents à certains produits, vu leurs effets relaxant,
diverses sessions de formation dont, anti-inflammatoire, anti allergéniques,
celles organisées par l’Office de ou finalement leurs apport quand à la
Développement de la Coopération et préservation de la jeunesse qui constitue
dédiées à la gestion des coopératives. le souhait tant désiré de chaque femme
De plus, la participation de sur terre
la coopérative «  Yacout » aux Ainsi, la production de la coopérative
différentes foires, expositions à l’échelle s’est diversifiée, de la production de
internationale, nationale, régionale l’huile d’argane seulement pour côtoyer
et locale, leur a permis de multiplier la de près l’univers fascinant d’autres
production et d’améliorer la qualité de dérivés de cette huile magique, à savoir
ses produit, vu que sa politique se basait l’huile aromatisée, laits corporels, les
essentiellement sur l’écoute des clients. masques et savons.

96 REMACOOP 6
Reportage

Chaque produit se réserve une La production s’accomplie


formule spécifique en termes de matière dans le local de la coopérative qui
première, de grammage, de texture, englobe plusieurs salles comme celle
du temps réservé à chaque étape de du tri, extraction et de décantation,
préparation, dont seule la coopérative d’emballage, du sanitaire, de
détienne le secret,. production, de stockage, d’exposition
en plus d’une salle d’administration.
Aussi, en bas de chaque produit
figure les initiales de la coopérative, Cette production est exposée sur les
et tous les produits se plaisent à rayonnages de deux points de vente
condenser leur identité dans un esprit situés à Rabat sans omettre la livraison
d’authenticité. en directe sur commandes aux clients
ou l’exposition dans les foires et quelques
événements parmi lesquels ceux
organises par les corps diplomatiques
au Maroc.

L a coopérative «Yacout » : une orga-


nisation exemplaire

Tout visiteur pour les locaux de la


coopérative «Yacout » sera séduit par
les odeurs dégagées, aux sources des
produits d’argane bio mythique, et
surtout sera émerveillé par la l’espace
d’exposition qui met en lumière une
collection infinie de produits d’argane,
avec une parfaite organisation interne.
Cette production a été facilitée
par l’acquisition d’important matériel
financé à hauteur de 70 % soit 100.000
MAD par l’initiative Nationale de
développement humain avec la
participation de la coopérative qui
s’élevait à 30.000 MAD.

Ce matériel englobait un moulin à


beur en inox, une presse d’extraction
d’huile d’argane à une tête, un
torréfacteur à gaz semi automatique,
des bacs en inox alimentaire.

REMACOOP 6
97
Reportage

Les missions de gestion, l’autorisation ou l’agrément sanitaire par


d’approvisionnement, de production, de l’ONSSA3 conformément aux dispositions
commercialisation et de communication de la   loi n°28-07 relative à la sécurité
sont reparties entre les adhérents de la sanitaire.
coopérative selon leurs compétences. Ainsi les produits cosmétiques, sont
Pour mener à bien sa mission, assujettis à la procédure d’enregistre-
la coopérative détient des fiches ment selon la circulaire N° 48 DMP/204
spécifiques telle que celle de la réception fixant le cadre relatif à l’enregistrement
de la matière première, de production, des produits cosmétiques.
de livraison… Le souci de la coopérative Selon cette circulaire susmentionnée
est de garantir une production bio à cent le produit cosmétique est défini comme
pour cent. Aussi un intérêt particulier est suit  :  «  Toute substance ou préparation
porté aux numéros des lots, sachant que destinée à être mise en contact avec les
chaque lot de matière première doit diverses parties superficielles du corps
comporter obligatoirement une fiche humain (épiderme, systèmes pileux et
technique et un bulletin d’analyse délivré capillaire, ongles, lèvres et organes gé-
par le service qualité des fournisseurs. nitaux externes) ou avec les dents et les
De ce fait la coopérative «  Yacout » muqueuses buccales en vue, exclusive-
ne s’aventure guère dans la production ment ou principalement, de les nettoyer,
d’un des produits si l’une de ses de les parfumer, d’en modifier l’aspect
composantes ne dispose pas de ladite et/ou de corriger les odeurs corporelles
fiche technique et du bulletin d’analyse. et/ou de les protéger ou de les maintenir
L’exemple de la macération de l’ail est en bon état.»
un projet inexécutable à défaut de ces
deux documents.

La coopérative «Yacout » : des Projets


ambitieux

Pour accéder pleinement et librement


au marché national qu’international,
la coopérative Yacout était contrainte
d’enregistrer ses produits, une procédure
qui diffère de celle pour les coopératives
du secteur alimentaire d’origine animale
ou végétale, qui doivent disposer de

3. ONSSA : Office national de sécurité sanitaire des produits alimentaires.


4. DMP : direction du médicament et de la pharmacie, ministere de la santé.

98 REMACOOP 6
Reportage

L’examen des dossiers de demande coopératives.


d’enregistrement, de renouvellement
De plus la coopérative doit affronter
d’enregistrement; de retrait ou de de
le fardeau des honoraires trop élevés
suspension ou d’interdiction de vente
liés à la procédure de la BPF (bonnes
d’un produit cosmétique et d’hygiène
pratiques de fabrication) mentionnée
corporelle et de cosmétovigilance, sont
dans la loi n°17.045 sans omettre le temps
soumis à l’approbation de la commission
que doit prendre ladite procédure.
consultative d’enregistrement qui est
composée de : L a coopérative «Yacout » : regard sur
♦ La Direction du Médicament et de l’avenir
la Pharmacie, L’aventure fantastique de la
♦ Le Centre Antipoison et de coopérative «Yacout» regorge de
Pharmacovigilance, renseignements. Elle est le symbole de la
♦ LaDirection de l’Epidémiologie et diversité en matière d’idées innovantes,
de Lutte Contre les Maladies, de la concertation et la communication
tout d’abord avec les membres des
♦ Les Professeurs d’enseignement
supérieur en dermatologie. coopératives et son ouverture à son
environnement.
Actuellement, la coopérative
«Yacout» après un parcours de La coopérative «Yacout» est consi-
combattant, a su placer sa demande dérée également comme préservatrice
d’enregistrement auprès des services de l’environnement de par son mode
concernées (la direction du médicament de faire à travers l’utilisation de produits
et de la pharmacie - Ministère de la bio, non synthétiques.
santé) besogne qui n’était pas des plus
Pour l’avenir, la coopérative « Yacout»
faciles, surtout qu’on exigeait parmi les
est en cours de réalisation d’un projet sin-
pièces à fournir  : une copie légalisée
gulier: un nouvel atelier construit selon
de l’extrait du registre du commerce,
les normes sanitaires reconnues, avec un
le numéro de la patente et la C.N.S.S.
show room pour présenter ses produits.
Faisait défaut pour les coopératives au
Maroc qui de par la loi n°24.83 fixant le Cet avenir se voit également promet-
statut général des coopératives et les teur par la promulgation de la nouvelle loi
missions de l’Office de Développement sur les coopératives n° 112.12 qui présente
de la coopération et qui a été abrogée une large ouverture pour la coopérative
par la nouvelle loi n°112.12 relative aux « Yacout » et plus spécialement sa possibilité

5. Dahir n° 1-06-151 du 30 chaoual 1427 (22 novembre 2006) portant promulgation de la loi n° 17-04
portant code du médicament et de la pharmacie. B.O N° 5480 du 15 kaada 1427 (7-12-2006)

REMACOOP 6
99
Reportage

de participer aux marchés publics gamme des produits de la coopérative


entre autres. De plus, la coopéra- « Yacout » et leurs qualités. Est-ce n’est
tive «  Yacout  » envisage de créer un pas un hasard qu’actuellement la
coopérative «  Yacout  » est la cible de
nom de marque pour ces produits.
convoitise. En effet l’écho de la qualité
Enfin…. !Et si Cléopâtre était encore de ses produits a dépassé les frontières
en vie  parmi nous, elle serait mieux du pays.
servie et trop pouponnée par la large

100 REMACOOP 6
Reportage

Entretien

REMACOOP 6
101
Entretien avec M. Ahmed GHAZALI, Professeur
émérite et expert juriste au sein de l’équipe
chargée d’élaboration du projet de loi cadre de
l’Economie Sociale et Solidaire au Maroc
par :
Mme Saadia Ahendar et M.Slimane Lhajji

M. Ahmed Ghazali
Professeur émérite

1- Le champ de l’ESS au Maroc a ment du nouveau règne, de re-


enregistré d’importantes avan- placer la personne humaine, au
cées. Il est aussi confronté à cœur des activités économiques
plusieurs défis. et de réduire, en conséquence,
les insupportables inégalités de
 ourquoi une loi cadre de l’ESS
P
niveaux de revenus et de vie des
au Maroc ?
populations.
 t est-ce qu’elle constitue vrai-
E
ment une priorité au Maroc ? Ce n’est pas pour rien que Sa
Majesté le Roi Mohammed VI a
Une loi-cadre sur l’ESS viendrait été, dès les premières années de
à point nommé au Maroc pour son accession au trône, qualifié
deux raisons essentielles : de «  Roi des pauvres  » et que le
Roi s’implique directement et per-
La première est éminemment
sonnellement dans la lutte contre
politique. Elle traduirait au niveau
la fragilité économique et sociale
législatif la volonté politique de
et l’action humanitaire, aussi bien
l’Etat, manifeste depuis l’avène-
au Maroc qu’à l’étranger.

102 REMACOOP 6
Entretien

La deuxième, non moins importante, ♦ Une phase technique de


est une réponse à l’impérieux besoin de préparation du projet de loi-cadre
reconnaitre une ESS visiblement émer- par le Ministère de l’Artisanat et de
gente et de la doter, en tant que com- l’Economie Sociale et Solidaire qui en est
posante prometteuse de notre écono- l’initiateur. Cette phase se caractérise
mie nationale, d’une meilleure gouver- par la mise en œuvre d’une approche
nance et de conditions de promotions participative, organisée autour d’un
au service de l’inclusion économique et partenariat avec la FAO, pour profiter
sociale, par la démultiplication d’orga- de sa capacité de mobilisation de
nisations à finalités sociale viables et par l’expertise, de l’organisation de réunions
l’emploi et l’auto-emploi. de travail, d’ateliers nationaux et
régionaux, de concertations avec les
2- Comment vous avez pu concilier entre acteurs institutionnels et opérationnels
l’ouverture sur les expériences législa- de l’ESS et d’implication des différentes
tives étrangères et le souci de garder administrations publiques concernées
la particularité marocaine au niveau par cette économie. Cette phase a
de cette loi ? été menée avec succès par le Ministère
Comme vous le savez, le Maroc est de l’Artisanat de l’économie sociale
un pays de traditions religieuses et com- et solidaire et s’est conclue par la
munautaires ancestrales, faites d’en- formalisation du projet de loi-cadre
traide et de solidarité. La culture de par- dans sa version technique.
tage, de la générosité individuelle, fami-
liale et communautaire sont au cœur ♦ La phase politique de validation de

même des relations sociales. L’organi- ce projet de loi par le gouvernement à


sation des travaux collectifs au service travers sa mise en circulation par le Se-
des membres de la communauté ou crétariat Général du Gouvernement et
de l’intérêt général, relève, encore au- son adoption en conseil de gouverne-
jourd’hui, d’un réflexe collectif, chaque ment et en conseil des ministres. Cette
fois renouvelé. phase politique se conclue par l’adop-
tion de ce texte par le parlement et par
S’il n’est pas aisé de formaliser ces
pratiques et traditions dans un texte sa promulgation par Dahir Royal ; sa pu-
de loi, au diapason avec le contexte blication au bulletin officiel annonçant
du moment, il importe, néanmoins, de sa mise en vigueur.
rappeler l’adéquation de ce terreau
4- Quels sont les principaux axes du pro-
de culture profonde à la promotion de
jet de loi cadre de l’ESS au Maroc ?
l’ESS dans son acception moderne, à
vocation universelle. Le contenu du projet a pour but
de satisfaire à trois exigences mises en
3- Quelles sont les principales étapes de
évidences par des études préliminaires.
l’élaboration du projet de la loi cadre
de l’ESS au Maroc ? Il s’agit tout d’abord de doter le
Maroc d’une définition légale claire
Il me semble qu’elles sont multiples
et précise de ce que l’on entendra
et agencées en deux grandes phases :

REMACOOP 6
103
Entretien

désormais par l’expression «  économie sociale et solidaire est constituée de


sociale et solidaire ». On a constaté en l’ensemble des activités économiques,
effet que l’on utilise cette expression marchandes ou non marchandes,
sans savoir exactement, d’une part ce créatrices de valeur, de revenus et
qu’elle représente en comparaison avec d’emplois, assurées par des personnes
d’autre sortes d’activités économiques morales de droit privé qui poursuivent
et d’autre part par le biais de quelles l’intérêt collectif de leurs membres, de
sortes d’entités elle peut s’exercer. leurs bénéficiaires et/ou qui contribuent
à l’intérêt général.»
Il s’agit, ensuite, de consacrer
légalement un mode de gouvernance Trois idées fondamentales sous-
de ses activités, à travers l’adoption tendent cette définition :
d’un système de reconnaissance,
♦ L
 ’ESSest d’abord une économie,
d’enregistrement et de suivi des
qui doit créer de la valeur et
organisations de l’économie sociale et
fournir des opportunités d’emploi
solidaire, ainsi qu’un cadre institutionnel
et d’auto-emploi ;
de représentation de ces organisations
au plans national et régional. ♦ E
 lleprivilégie la personne humaine
Il est question, enfin, d’un ensemble sur le capital et se fonde, en
de dispositions déclinant la politique conséquence, sur l’entraide, la
publique générale de l’Etat vis-à- solidarité et le vivre ensemble, et
vis de ces organisations dans le but non sur l’individualisme froid qui
de les accompagner et de les aider caractérise l’économie capitaliste 
à se développer et à prospérer ♦ E
 lle est sociale et sociétale, et
économiquement, financièrement et donc toujours au service de
humainement. l’intérêt collectif des membres et
des bénéficiaires des organisations
5- Quelle est la définition de l’ESS propo- qui la composent et de l’intérêt
sée par le projet de la loi cadre ? général ;
Un benchmark a été réalisé à
6- Pour la délimitation du champ de l’ESS,
propos du concept d’ESS consacré par
vous avez opté pour des organisations
différentes législations étrangères (une
de l’ESS de droit et d’autres éligibles.
vingtaine environ). On a également pris
en compte les différentes propositions Là aussi le benchmark et la doctrine
de la littérature an niveau national. de l’ESS nous ont été d’une grande
utilité. Ils nous ont aidé à résoudre
Dans un but de simplification, tout
rapidement la question du noyau
en prenant en considération et en
dur de l’ESS  : les coopératives et les
anticipant les différentes déclinaisons
mutuelles, composantes historiques
possibles des activités de l’économie
de cette économie, sont qualifiées
sociale et solidaire, voici le projet de
d’organisations d’ESS de droit par le
définition proposée  : «  L’économie

104 REMACOOP 6
Entretien

projet de loi-cadre, de même que les les valeurs et les principes de l’ESS, elle
fondations créées par dahir ou par la loi. peut être qualifiée d’OESS et profiter des
conditions promotionnelles attachées à
La réalité marocaine nous a incités,
cette qualité.
par ailleurs, à innover pour mieux
préciser et baliser les contours de cette 8- 
Dans le projet de loi cadre de
économie. En effet, il y a de plus en plus l’ESS, qu’elle est la place des
d’associations qui exercent des activités coopératives d’une façon générale,
d’ESS, telle que définie par la loi-cadre. au-delà de celles régies par la loi
C’est le cas par exemple des associations
112.12 ? quel est l’impact de ce projet
de microcrédit qui comptent parmi
de loi-cadre sur les coopératives en
les organisations d’ESS de droit parce
particulier ?
qu’elles sont réglementées par une
loi spécifique en tant qu’association Le poids économique et sociale des
d’utilité économique et sociale. C‘est coopératives et leur historique justifient
aussi le cas de plusieurs dizaines de la place centrale qu’elles occupent
milliers d’associations qui œuvrent dans le dispositif de la nouvelle loi-
dans les domaines des activités cadre.
génératrices de revenus, de protection
Elles sont et demeureront le noyau
sanitaire et sociale de protection de
dur autour duquel cette loi sera décli-
l’environnement…etc.
née. Elles seront aussi la locomotive qui
Il nous semble pertinent de permettre tirera l’ESS vers de nouveaux et pro-
aussi bien aux associations qui ont une metteurs horizons, grâce aux nouvelles
vocation d’utilité économique et sociale opportunités de mise à niveau et de
qu’aux entreprises à finalités sociale, développement des OESS.
dont le besoin se fait sentir également,
Le projet de loi n’a pas manqué aussi
d’être éligibles à la qualification
d’ouvrir de nouvelles perspectives d’in-
d’organisation d’économie sociale et
novation institutionnelles et opération-
solidaire (OESS).
nelles face au secteur coopératif en lui
7- Pour ces dernières, notamment les as- permettant d’avoir recours par exemple
sociations et les entreprises sociales, aux entreprises d’activité et d’emploi à
forme coopérative, qu’on propose d’in-
comment peut-on distinguer celles
troduire au Maroc et aux coopératives
qui font partie du champ de l’ESS des
de commercialisation.
autres ?
9- En résumé, quels sont les principaux
Chaque fois qu’une association
ou une société commerciale apporte acquis dudit projet de loi cadre à l’ESS
la preuve, conformément à une Maroc ?
procédure légale établie à cet effet, L’adoption du projet de loi-cadre
qu’en raison de ses statuts et de ses sera, sans l’ombre d’un doute, un
activités, elle poursuit une finalité d’utilité acquis politique du Maroc aussi bien en
économique et sociale, en respectant interne qu’à l’international, en raison du

REMACOOP 6
105
Entretien

leadership qu’elle peut conférer à notre d’engagements du gouvernement,


pays, surtout en direction de l’Afrique, clairement énoncés dans un texte de
et du modèle qu’ elle peut représenter loi.
à cet égard également. Parmi la
vingtaine de pays disposant aujourd’hui 10- Une fois la loi cadre de l’ESS validée
d’une telle loi, le Maroc sera le premier et approuvée, quelles seront les prére-
pays en Afrique et dans la région MENA quis pour réussir sa mise en œuvre ?
à se doter d’une telle loi.
Comme dans tout texte de loi de
Le reste des acquis tombe sous le cette importance et de cette sensibilité,
coup du bon sens  : reconnaissance sa bonne mise en œuvre dépendra
officielle de l’ESS comme composante principalement de la réelle volonté des
de l’économie nationale, cohérence du différentes parties concernées d’en
mode et des activités de gouvernance respecter l’esprit et de l’effort dans la
publique et professionnelle, visibilité durée pour en assurer les différentes
de représentativité des acteurs, déclinaisons.
politique publique générale, faites

106 REMACOOP 6
De tout horizon

REMACOOP 6
107
De tout horizon

Les coopératives au couleur


de feuille d’érable rouge

Par :

Mme Hayat Zouhir Mr Slimane Lhajji


E-Mail : hayzouhir@yahoo.fr E-Mail : lhajjislim@yahoo.fr

Plusieurs évènements placent Mouvement coopératif cana-


le secteur coopératif canadien dien
au haut de la scène mondiale, le
Au Canada la première coo-
classement privilégié par le maga-
pérative a été créée en 1861 à
zine « Corporate Knights » des coo-
Stellarton à l’instar de celles de la
pératives canadiennes au haut
Grande-Bretagne, jusqu’au 1914
du sommet des coopératives les
date de la création de et la United
plus durables du monde. La pré-
Farmers’ Co-operative (union coo-
sidence de l’alliance coopéra-
pérative des fermiers) en Ontario,
tive internationale par le canada,
plusieurs coopératives agricoles
l’organisation du sommet interna-
ont été constituées et d’autres
tional des coopératives, la réunion
pour les besoins d’assurance et
des coopératives francophones et
de fourniture en matériels ont été
anglophones de la coopération
constituées.
canadienne par l’institution de en
2013 la Coopératives et mutuelles Cette période reste mémorable
Canada (CMC), avec la fusion par la création de la première so-
entre la Canadian coopérative ciété coopérative d’épargne et
association (CCA) et le Conseil de crédit par Alphonse DESJAR-
canadien de la coopération et DINS en 1900 et qui après sa mort
de la mutualité (CCCM) et plus en 1920 on comptait 160 entités
au Québec.
encore, autant de prouesses qui
font de l’exemple des coopéra- Au cours des années 30, au
tives canadiennes des modèles à temps de la crise le « mouvement
travers le monde. d’Antigonish» qui est un mou-

108 REMACOOP 6
De tout horizon

vement social et économique se ba- Cette distinction des représentations


sant sur l’éducation permanente des des coopératives francophones et an-
adultes, l’université St. Francis Xavier, glophones, va allait se dissiper le 1er avril
offre programmes sociaux et écono- 2014 par la constitution de «  Coopéra-
miques pour répondre aux difficultés, tives et mutuelles Canada  » «  Co-ope-
plusieurs formes de coopératives ont ratives and Mutuals Canada  »(CMC),
vu le jour parmi les plus importantes les entre les deux plus importantes repré-
coopératives de crédit. sentations l’Association des coopéra-
tives du Canada (ACC) et le Conseil
Après la période d’après guerre le
canadien de la coopération et de la
secteur coopératif Canadien a connu
mutualité (CCCM), suite à la decision
un développement exponentiel avec
de l’assemblée générale des deux enti-
la création des coopératives dans de
tés ruenies le 28 juin 2013 à Edmomnton.
multitudes de secteurs de l’agricul-
ture, le crédit, l’assurance, les forets, la Cette association qui se veut voulait
construction, la pêche, le commerce en nationale et, bilingue dans les deux lan-
détail.… gues officielles du Canada, puisait des
expériences des deux dernières institu-
La parade du mouvement coopé-
tions, et optera pour le développement
ratif canadien, garde une place privilé-
et la promotion des coopératives sur
giée à la ville de Levis, que l’on appelle
l’ensemble du territoire canadien, en
« ville de la coopération », la ville natale
se proposant comme représentante
du fondateur des caisses Desjardins et le
du mouvement coopératif auprès du
lieu d’ouverture de la première caisse.
gouvernement fédéral, qui défend les
intérêts de ses membres car «  Les en-
Regroupements coopératifs
treprises coopératives et les mutuelles
En ce qui concerne le regroupement existent dans toutes les régions du pays
des coopératives canadiennes l’une et dans tous les secteurs de l’économie.
des premières c’est l’Association des Leur bien-être est important pour toutes
Coopératives du Canada (Canadian les Canadiennes et tous les Canadiens »
Co-operative Association) qui a été fon- selon M.  Léo Leblanc, président de
dée en 1909. En 1940, il y a eu la consti- CMC.
tution du Conseil québécois de la coo-
les coopératives et mutuelles au Ca-
pération et de la mutualité (CQCM), en
nada (CMC) « soutient soutiennent éga-
tant qu’instance représentative regrou-
lement la recherche de grande enver-
pant plusieurs fédérations, confédéra-
gure en partenariat avec les principales
tions…
institutions de recherche et avec le gou-
Dans la même décennie et précisé- vernement pour éclairer les décisions
ment en 1946, le Conseil canadien de la politiques. Nos membres proviennent
coopération et de la mutualité (CCCM) de plusieurs secteurs économiques,
d’est institué, il regroupe actuellement incluant la finance, l’assurance, l’agro-
l’ensemble des coopératives et mu-
alimentaire et l’approvisionnement,
tuelles francophones du Canada.

REMACOOP 6
109
De tout horizon

la vente de gros et la vente de détail, ♦ Faire


croître les coopératives et les
l’habitation, la santé, les ressources fo- mutuelles et multiplier les occa-
restières, l’éducation, les services funé- sions, en concertation avec les
raires, les services publics et le dévelop- membres et les fédérations.
pement communautaire. »1 A cet effet, la CMC a établis des co-
mités nationaux actuels, dont le comité
L’unification du mouvement coopé- des affaires gouvernementales qui a
ratif et mutualiste a permis à l’économie pour mission de recueillir les perspectives
coopérative et mutuelle de totalise to- nationales sur le secteur coopératif dans
taliser annuellement plus de 70 milliards le cadre de ses représentations auprès
$ en chiffre d’affaires2 et plus de 18 mil- du gouvernement. Aussi ledit comité
lions de membres3, qui adhèrent à plus s’est impliqué dans l’élaboration d’une
de 9000 coopératives et mutuelles4 à Stratégie nationale de développement
travers toutes les régions du Canada. coopératif, de plus elle a appuyé la
création du Fonds canadien d’investis-
Apres sa constitution le CMC en sement coopératif (FCIC).
favorisant l’interopération a établit le
Fonds canadien d’investissement coo- Conclusion :
pératif (FCIC), qui permet l’accès au
Le mouvement coopératif canadien
capital lors de l’étape de démarrage et
est sujet de plein d’éloge, en effet le sol
celle de croissance des coopératives.
canadien a été le théâtre de plusieurs
Parmi les objectifs dressés par la évènements d’ordre planétaire concer-
CMC et qui riment avec le Plan d’action nant les coopératives, de surcroit plu-
pour une décennie des coopératives sieurs modèles de coopératives ont
de l’Alliance coopérative internationale été conçus et donnent inspirations et
(ACI), elle aspire a : poussent à réflexion.

♦ F
 airede la CMC « le réseau des L’exemple alléchant concerne la
réseaux de coopératives » par le coopérative des caisses Desjardins, et
développement des communica- celui des coopératives des services de
santé, qui peuvent être de bons auspice
tions,
pour renforcer le secteur coopératif
♦ C
 ollecterles renseignements et marocain qui semble dans le besoin d’y
des données sur les coopératives orner son tissu.
et les mutuelles au Canada

1. « Rapport annuel 2014 - 2015 » La coopératives et mutuelles Canada (CMC)


2. « Rapport annuel 2014 - 2015 » La coopératives et mutuelles Canada (CMC)
3. « Rapport annuel 2014 - 2015 » La coopératives et mutuelles Canada (CMC)
4. « Rapport annuel 2014 - 2015 » La coopératives et mutuelles Canada (CMC)

110 REMACOOP 6
Statistiques
Tableau n°1:
Les coopératives par secteur (fin décembre 2015)
Secteur Nombre Adhérents Capital en dh
AGRICULTURE 10 542 355 343 1 546 586 107
ARTISANAT 2 497 35 584 121 875 157
HABITAT 1 146 50 361 4 748 761 961
ARGANE 299 7 448 2 332 326
FORETS 236 9 899 9 135 038
DENREES ALIMENTAIRES 236 2 306 851 851
PLANTES MEDICINALES ET AROMATIQUES 157 3 715 3 595 668
PECHE 153 5 562 7 499 668
ALPHABETISATION 122 1 148 1 480 984
TRANSPORT 86 1 840 7 320 938
COMMERCANTS DETAILLANTS 78 1 409 6 078 424
CONSOMMATION 41 6 855 11 801 700
EXPLOITATION DES CARRIERES 38 1 335 981 800
MAIN D›OEUVRE 32 340 181 800
TOURISME 19 139 108 050
TRAITEMENT DE DECHETS 14 426 208 500
CENTRES DE GESTION 13 115 220 600
IMPRIMERIE-PAPETERIE 9 66 40 000
MINES 6 245 984 400
TELECOMMUNICATION 5 39 59 100
ART ET CULTURE 5 48 63 500
COMMERCE ELECTRONIQUE 1 8 5 600
Total 15 735 484 231 6 470 173 172

Les coopératives par secteur (fin décembre 2015)

112 REMACOOP 6
Statistiques

Tableau n°2 : Les coopératives de femmes par secteur (fin décembre 2015)

Secteur Nombre Adhérents Capital en dh


ARTISANAT 987 13965 7 379 626
AGRICULTURE 763 13835 6 724 659
ARGANE 274 7117 1 877 126
DENREES ALIMENTAIRES 170 1766 597 501
PLANTES MEDICINALES ET AROMATIQUES 35 699 187 300
MAIN D’OEUVRE 13 101 20 850
COMMERCANTS DETAILLANTS 10 70 20 750
PECHE 8 178 55 300
ALPHABETISATION 8 59 102 600
FORETS 7 127 26 400
CONSOMMATION 3 22 12 400
IMPRIMERIE-PAPETERIE 1 7 700
ART ET CULTURE 1 14 7 000
Total 2 280 37 960 17 012 212

Les coopératives de femmes par secteur (fin décembre 2015)

113
Statistiques

Tableau n°3 : Les coopératives des lauréats diplômés par secteur (fin décembre 2015)
Secteur Nombre Adhérents Capital en dh
AGRICULTURE 152 1 788 10 711 558
ALPHABETISATION 122 1 148 1 480 984
ARTISANAT 21 189 761 923
FORETS 21 440 247 400
TRANSPORT 15 58 908 000
CENTRES DE GESTION 13 115 220 600
PLANTES MEDICINALES ET AROMATIQUES 9 88 1 470 471
DENREES ALIMENTAIRES 5 113 39 450
COMMERCANTS DETAILLANTS 3 16 275 000
TOURISME 2 11 17 200
ARGANE 1 8 3 500
ART ET CULTURE 1 7 6 000
EXPLOITATION DES CARRIERES 1 8 28 800
MAIN D’OEUVRE 1 21 8 200
PECHE 1 4 25 950
TELECOMMUNICATION 1 11 30 000
TRAITEMENT DE DECHETS 1 9 81 100
COMMERCE ELECTRONIQUE 1 8 5 600
Total 371 4 042 16 321 736

Les coopératives des lauréats diplômés par secteur (fin décembre 2015)

114 REMACOOP 6
Statistiques

Tableau n°4 : Les coopératives par région (fin décembre 2015)


Région Nombre Adhérents Capital en dh
FES-MEKNES 1 835 36 202 417 055 382

CASABLANCA-SETTAT 1 780 76 958 2 313 779 800

RABAT-SALE-KENITRA 1 667 45 741 930 703 447

TANGER-TETOUAN-AL HOCEIMA 1 486 39 162 395 063 655

MARRAKECH-SAFI 1 407 71 558 594 782 006

SOUSS-MASSA 1 395 38 113 869 377 020

LAÄYOUNE-ASSAKIA AL HAMRA 1 293 11 357 12 924 593

ORIENTAL 1 215 53 227 525 896 669

BENI MELLAL-KHENIFRA 1 203 57 134 255 545 158

GUELMIM-OUED NOUN 1 157 11 015 58 555 720

DRÄA-TAFILALET 999 41 283 93 139 823

EDDAKHLA-OUED EDDAHAB 298 2 481 3 349 900

Total 15 735 484 231 6 470 173 172

Les coopératives par région (fin décembre 2015)

REMACOOP 6
115
Statistiques

Tableau n°5: Les coopératives de femmes par région (fin décembre 2015)
Région Nombre Adhérents Capital en dh

LAÄYOUNE-ASSAKIA AL HAMRA 393 3 457 1 246 443

SOUSS-MASSA 352 8 947 1 994 800

MARRAKECH-SAFI 227 4 497 2 043 189

FES-MEKNES 226 3 558 2 845 222

TANGER-TETOUAN-AL HOCEIMA 216 3 168 2 303 485

GUELMIM-OUED NOUN 199 2 182 489 750

BENI MELLAL-KHENIFRA 133 2 221 1 775 647

ORIENTAL 129 1 902 703 226

DRÄA-TAFILALET 129 4 712 1 400 838

CASABLANCA-SETTAT 127 1 640 1 047 104

RABAT-SALE-KENITRA 107 1 372 1 021 910

EDDAKHLA-OUED EDDAHAB 42 304 140 600

Total 2 280 37 960 17 012 212

Les coopératives de femmes par région (fin décembre 2015)

116 REMACOOP 6
Statistiques

Tableau n°6 :
Les coopératives des lauréats diplômés par région (fin décembre 2015)

Région Nombre Adhérents Capital en dh

FES-MEKNES 73 658 3 480 962

ORIENTAL 72 487 1 955 400

RABAT-SALE-KENITRA 49 1 121 1 126 736

TANGER-TETOUAN-AL HOCEIMA 38 290 2 135 500

BENI MELLAL-KHENIFRA 38 365 2 046 905

DRÄA-TAFILALET 28 341 3 733 283

MARRAKECH-SAFI 20 181 176 900

SOUSS-MASSA 16 223 973 873

GUELMIM-OUED NOUN 14 111 95 600

CASABLANCA-SETTAT 14 195 540 177

LAÄYOUNE-ASSAKIA AL HAMRA 9 70 56 400

Total 371 4 042 16 321 736

REMACOOP 6
117
Adresses

L’Administration Centrale :

Office du Développement de la Coopération


13, Rue Dayet Aoua, Agdal , Rabat - Maroc
Tel : 05.37.77.10.33/34/ Fax : 05.37.77.10.05
• E-mail: odco@odco.gov.ma - Site web: www.odco.gov.ma
Les Délégations :
• Agadir : Avenue Hassan 1er Imm Amal Souss BP 532
TEL/FAX : 05.28.23.33.97 • E-mail : agadir@odco.gov.ma
• Al Houceima : 3,Avenue Al Andalous BP 259. Al Houceima
TEL/FAX : 05.39.84.14.75 • E-mail : alhouceima@odco.gov.ma
• Beni Mellal : Rue Chabbi BP 1750 Oulad hemdan
TEL/FAX : 05.23.42.04.31 • E-mail : benimellal@odco.gov.ma
• Casablanca : n° 45 Rue Elhabacha 2ème Etage, Appt 3 BP 1066
TEL/FA X : 05.22.30.44.36 • E-mail : casablanca@odco.gov.ma
• Eddakhla : Imm Al Khair 2ème Etage Quartier Mly Rachid
TEL/FAX : 05.28.93.29.83 • E-mail : eddakhla @odco.gov.ma
• Fès : 60, Avenue Zerktouni Atlas BP 2039
TEL/FAX : 05.35.65.43.62 • E-mail : Fes@odco.gov.ma
• Guelmim : 840,Hay Al Kods, BP 415
TEL/FAX : 05.28.87.30.38 • E-mail : guelmim@odco.gov.ma
• Kenitra : Angle Avenue Mohammed Diouri et Avenue Lyarmok, BP 249
TEL/FAX : 05.37.37.56.31 • E-mail : kenitra@odco.gov.ma
• Laayoune : Immeuble 87 Avenue 24 novembre Appt N° 1 Hay Saada BP : 493
TEL/FAX : 05.28.89.29.48 • E-mail : laayoune@odco.gov.ma
• Marrakech : 82,Avenue Yougoslavie Imm Mellak BP 2209
TEL/FAX : 05.24.43.77.88 • E-mail : marakech@odco.gov.ma
• Meknès : 6, Rue Antsirabé N°1 Etage 1.BP 332
TEL/FAX : 05.35.51.49.80 • E-mail : meknes@odco.gov.ma
• Oujda : Avenue Mohamed V, Imm Al Bourssa 3éme Etage N°5 BP 49
TEL/FAX : 05.36.68.28.33 • E-mail : oujda@odco.gov.ma
• Safi : Plateau N°6, 3éme Etage Lot Bouzobaa Avenue ibn Zaidane N.V
Safi B.P 366
TEL/FAX : 05.24.62.10.95 • E-mail : safi@adco.gov.ma
• Settat : Avenue Hassan II Imm 20 Appt 6,2eme Etage BP 813
TEL/FAX : 05.23.40.51.45 • E-mail: settat@odco.gov.ma
• Tanger : Avenue Youssef Ben Tachfine, Imm Fraihi, BP 1134
TEL/FAX : 05.39.94.67.85 • E-mail : tanger@odco.gov.ma
Les auteurs sont seuls responsables des opinions exprimées
dans leurs articles

Mise en page et impression : Imprimerie El Maarif Al Jadida - Rabat - 2017

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