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Article Annepsy Olry-Louis 1995 Num 95 2 28827
Article Annepsy Olry-Louis 1995 Num 95 2 28827
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Olry-Louis Isabelle
Université Paris Nanterre
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Résumé
Résumé
Cet article vise à inventorier les principaux modèles relatifs aux styles d'apprentissage, ainsi que les instruments d'évaluation
auxquels ils ont donné lieu, en adoptant la perspective d'une synthèse critique. Un certain nombre de critères servent à
positionner les modèles les uns par rapport aux autres, notamment le nombre et la nature des dimensions retenues, le caractère
descriptif ou normatif du modèle, et la perspective plus ou moins interactionnelle adoptée. Une revue des instruments de mesure
prend en compte la méthode de recueil de données utilisée, et recense les principaux résultats disponibles en matière de
validation.
En conclusion, quelques questions sont abordées au sujet de la diversité des instruments de mesure et de leur recouvrement
avec d'autres outils. Finalement, sur le plan pratique, une réflexion sur l'utilisation de ce type d'outil est envisagée, et, d'un point
de vue conceptuel, une restructuration de la diversité des styles est proposée.
Mots-clés : styles d'apprentissage, styles cognitifs, styles de conduite, validation de questionnaires.
Abstract
Summary : Learning styles : From concepts to measurement.
This article surveys the main models relating to learning styles, as well as the evaluation instruments to which these models have
given rise, using the approach of a critical review. A number of criteria can be used to place models in relation to each other. In
particular, models can be compared on the number and type of dimensions used, the descriptive or normative nature of the
model, and the degree to which an interactional perspective is used. A study of measurement instruments considers the data
recording method used and summarises the main results available regarding validation.
In conclusion, a number of questions are raised concerning the diversity of measurement instruments and their overlap with other
tools. Finally, from a practical perspective the use of learning style instruments is discussed and from a conceptual perspective a
restructuration of the diversity of styles is proposed.
Key words : learning styles, cognitive styles, behaviour styles, validation of questionnaires.
Olry-Louis I. Les styles d'apprentissage : des concepts aux mesures. In: L'année psychologique. 1995 vol. 95, n°2. pp. 317-342.
doi : 10.3406/psy.1995.28827
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/psy_0003-5033_1995_num_95_2_28827
L'Année Psychologique, 1995, 95, 317-342
Isabelle 0lry-L0UIS
This article surveys the main models relating to learning styles, as well as
the evaluation instruments to which these models have given rise, using the
approach of a critical review. A number of criteria can be used to place models
in relation to each other. In particular, models can be compared on the number
and type of dimensions used, the descriptive or normative nature of the model,
and the degree to which an interactional perspective is used. A study of
measurement instruments considers the data recording method used and
summarises the main results available regarding validation.
In conclusion, a number of questions are raised concerning the diversity of
measurement instruments and their overlap with other tools. Finally, from a
practical perspective the use of learning style instruments is discussed and
from a conceptual perspective a restructuration of the diversity of styles is
proposed.
INTRODUCTION
L'intérêt manifeste présenté par les travaux sur les styles cognitifs pour
l'étude des styles d'apprentissage ne doit pas masquer que, d'une part, les
résultats obtenus dans un paradigme expérimental peuvent difficilement
être transposés tels quels à une situation naturelle d'apprentissage, et que
d'autre part, plusieurs dimensions cognitives devraient être prises en compte
simultanément. Chacune d'elles offre, en effet, une grille de lecture qui pro
pose de ramener les stratégies d'apprentissage à deux styles qui sont donnés
comme deux pôles, ce qui ne doit pas induire que nous sommes en présence de
types (Huteau, 1985), et nous inciter à envisager une multiplicité d'interméd
iaires entre les deux pôles. Il semble donc vain, pour l'instant, de combiner
toutes ces recherches pour parvenir à une typologie satisfaisante des straté
giesd'apprentissage. Flahaut (1985) souligne par ailleurs les imprécisions
majeures auxquels les styles cognitifs restent attachés, en raison de « bases
théoriques confuses » et d'une « certaine faiblesse empirique ». L'auteur pose en
particulier le problème des relations entre les styles et leur opéra tionnalisa-
tion, et celui des liens entre les différents styles.
Bien que Sternberg ait conçu son questionnaire dans le but d'évaluer
des « styles de pensée », le contenu des items — relatif au fonctionnement
du sujet lorsqu'il se trouve confronté à des situations nouvelles, aux types
de problème qu'il préfère... — le rend assimilable à un questionnaire de
styles d'apprentissage. Pour catégoriser ces styles (Sternberg 1988; Stern-
berg et Wagner 1991) il choisit la métaphore du gouvernement, dans la
mesure où celui-ci comporte selon lui les mêmes composantes que le sys
tème mental : trois fonctions, quatre formes, deux niveaux, deux domaines
et deux tendances. Ce modèle permet donc de définir 13 styles correspon
dant à 13 dimensions unipolaires.
des dimensions les plus consistantes, sur laquelle nous reviendrons, cer
tains modèles nous paraissent comporter trop — dans ce cas, les auteurs
ne font pas d'hypothèses sur les interactions entre styles — ou trop peu de
dimensions — c'est notamment le cas des modèles fondées sur des varia
blesbipolaires. La prise en compte de 5 à 10 dimensions nous semblerait
raisonnable. Une autre remarque est relative aux nombre d'items consti
tuant les dimensions : un certain nombre de questionnaires (Gouzien,
1991 ; Keefe et Monk, 1986 ; Carbo, Dunn et Dunn, 1986) comportent un
nombre insuffisant ou inégal d'items par variables. L'instrument de
mesure de Sternberg est, de ce point de vue, le mieux construit : il fait
intervenir huit items pour chacune des dimensions, les items portant tan
tôt sur les tâches préférées, tantôt sur les comportements. En ce qui
concerne Kolb, la première version du LSI, antérieure à 1985, consistait en
9 séries de 4 items à classer par ordre de préférence. Le fait que cet outil
soit de type ipsatif, les premiers choix influençant les autres, et qu'un effet
d'ordre trahisse la structure du LSI a été très contesté. La seconde version
de l'instrument a corrigé ces défauts, mais les résultats obtenus dans les
études de validité — notamment celles qui cherchent à retrouver une
structure factorielle proche du modèle postulé — s'avèrent encore trop
variables, pour que le questionnaire soit considéré valide (cf. Cornwell,
Manfredo et Dunlap, 1991 ; Ruble et Stout, 1990 ; Sims, Veres, Watson et
Buckner, 1986 ; Sims, Veres et Shake, 1989 ; Veres, Sims et Locklear,
1991).
Enfin, une critique générale à l'ensemble des questionnaires présentés
concerne le fait que la situation d'apprentissage à propos de laquelle le
sujet doit choisir des comportements et attitudes le caractérisant bien n'est
jamais décrite autrement qu'en termes généraux. La consigne dit le plus
souvent : « dans une situation d'apprentissage, vous... » et les items sont
exprimés de façon vague et abstraite. Or, l'introspection étant un exercice
difficile, une consigne donnant des indications sur la situation pourrait être
facilitante, et assurer une plus grande fiabilité des résultats.
(Richard, 1990). George (1990) préfère quant à lui distinguer deux modal
ités d' apprentissage, selon que celui-ci se réalise par l'action ou par le
tutorat.
Pour opérationnaliser précisément l'hypothèse selon laquelle les styles
sont vicariant8 et varient selon la situation d'apprentissage, on pourrait
soumettre des sujets à la passation de plusieurs questionnaires construits
de façon identique et portant sur les mêmes styles, mais s'appliquant à des
situations d'apprentissage spécifiques. Une recherche de ce type, nécessi
tant la construction d'un nouvel instrument de mesure, a été conduite
(Olry-Louis, 1992) : les corrélations inter-situationnelles s'avérant du
même ordre de grandeur que les corrélations inter-styles, il apparaît sou
haitable d'évaluer les styles dans une situation d'apprentissage spécifiée.
3 - CONSTRUCTION ET VALIDATION
DES INSTRUMENTS DE MESURE
facilement chez ces derniers. Par ailleurs le style de pensée externe est très
associé au type extraverti. Le MBTI a également été appliqué en même
temps que le LSI de Kolb : les corrélations montrent que les expérimentat
eurs actifs sont plutôt extravertis, les observateurs réfléchis étant plutôt
introvertis, et que les expérientiels concrets sont intuitifs, les conceptuali-
sateurs abstraits étant rationnels (Kolb, 1984).
L'article de Furnham (1992) relate trois études concernant les corréla
tionsqu'entretiennent plusieurs mesures des styles d'apprentissage avec
celles de la personnalité. Les dimensions d'extraversion, de névrosisme, de
psychoticisme et de dissimulation d'Eysenck — mesurées par l'EPQ — ont
été corrélées avec les questionnaires suivants : le LSQ de Honey et Mum-
ford, le CST de Whetten et Cameron, et le LSI de Kolb. Les corrélations
observées suggèrent les conclusions suivantes : lorsqu'ils apprennent, les
sujets extravertis privilégient l'activité et le pragmatisme, appliquant
concrètement leurs idées au moyen de stratégies actives, tandis que les
sujets introvertis préfèrent minutie, soin et méthode, et évitent la partic
ipation directe aux activités. Les sujets présentant un degré élevé de névro
sisme font plus appel aux stratégies « pas à pas » qu'aux stratégies « essais
et erreurs », et évitent la prise de risque. L'article montre qu'il existe bien
une relation entre personnalité et styles d'apprentissage et l'auteur discute
les implications de ces résultats en termes de validité d'utilisation de ques
tionnaires spécifiques aux styles.
L'article de Reynolds et Gerstein (1991) met en relation styles d'apprent
issage et styles de décision et examine les caractéristiques d'apprentissage
de sujets dits dépendants en matière de prise de décision. Les 144 sujets
adultes de l'expérience sont sélectionnés sur la base d'un questionnaire de
styles de décision — l'ACDM de Harren qui distingue les styles rationnel,
intuitif et dépendant — , puis évalués du point de vue de leur style d'apprent
issage avec le LSI de Kolb, et le PEPS de Price, Dunn et Dunn. Seul le PEPS,
peut-être parce que ses styles correspondent davantage à des indicateurs du
pattern comportemental qu'à des mesures de facteurs sous-jacents, donne
des résultats significatifs sur 4 dimensions : la motivation, la persistance, la
responsabilité et le bruit. Ainsi, les décideurs dépendants ont une motivation
réduite pour l'apprentissage, font preuve d'une persistance limitée et ass
ument peu la responsabilité de leur apprentissage. Cet article montre qu'il
existe une relation entre les styles d'apprentissage, tels qu'ils sont évalués
par Price, Dunn et Dunn et les styles de décision tels qu'ils sont évalués par
Harren, et propose d'adapter les méthodes éducatives aux déficiences des
sujets dépendants en matière de décision.
3.1.3. L'entretien
cet article, nous avons estimé que considérer la manière dont ont été opé-
rationnalisés les concepts contribue à l'élucidation de la notion de style
d'apprentissage. Mais à son terme, il faut admettre que ce concept reste
profondément marqué par ses origines empiriques : trop de conceptions
personnelles disparates s'affrontent et trop peu d'éléments théoriques
organisés sont disponibles. Nous pouvons cependant considérer que ces
conceptions reposent finalement sur deux approches : la première est
dynamique et souligne tantôt les comportements, tantôt les attitudes, ou
bien encore les préférences relatives au contexte social et environnemental
de l'apprentissage ; la deuxième est cognitiviste et se centre sur les proces
sus d'acquisition ou de fonctionnement. Distinguer parmi ces dimensions
ce qui relève des préférences « de surface » variables selon les situations, et
ce qui relève des processus actifs d'apprentissage plus stables pourrait
constituer une tentative de clarification. Price et Griggs (cités dans Rey
nolds et Gerstein, 1991) écrivent que le style d'apprentissage se réfère à la
manière d'apprendre que la personne préfère, tandis que le style cognitif se
réfère à la manière dont le cerveau traite l'information. Nous estimons per
sonnellement que les styles les plus pertinents dans la littérature sont
d'une part ceux relatifs aux processus — ils reposent vraisemblablement
sur la DIC avec un emploi différentiel des processus holistiques et analyti
ques —, d'autre part relatifs aux comportements — plutôt indépendants
ou conformistes, plutôt actifs ou réfléchis, plutôt introvertis ou extravert
is — , et enfin reliés aux attitudes — plus ou moins motivées —, ce der
nier volet nous semblant particulièrement sujet à variation selon le
domaine et plus généralement, selon le contexte d'apprentissage.
Concevoir un modèle et une opérationalisation à partir d'une telle cla
rification, puis le valider par l'observation des stratégies en situation réelle
d'apprentissage, et par l'administration conjointe d'autres épreuves
semble être une piste prometteuse. Une autre voie intéressante consisterait
à chercher quelles sont les caractéristiques personnelles et contextuelles qui
contribuent le plus à un apprentissage en profondeur, tel qu'il est défini
par Schmeck et ses collaborateurs. Pour tester la validité de la perspective
interactionniste, on pourrait tenter de faire varier le contexte d'enseign
ement de façon à évaluer dans quelle mesure celui-ci intervient dans le style
d'apprentissage mis en œuvre.
Un deuxième aspect caractéristique des travaux menés dans le domaine,
qui constitue peut-être la contrepartie de sa faiblesse conceptuelle, est relatif
à la richesse d'utilisation d'un questionnaire mesurant les styles d'apprentis
sage, dans une perspective diagnostique en formation et en orientation.
Furnham (1992) s'interrogeait sur la prolifération de questionnaires de
styles qui s'ignorent entre eux et sur le recouvrement de leurs mesures
avec celles des questionnaires de personnalité. Il est en effet légitime de se
demander s'il est souhaitable d'utiliser un instrument de mesure spécifique
aux styles d'apprentissage si celui-ci mesure la même chose que des ques
tionnaires de personnalité. La question que pose cet auteur est de savoir si
Les styles d'apprentissage 339
RÉSUMÉ
Cet article vise à inventorier les principaux modèles relatifs aux styles
d'apprentissage, ainsi que les instruments d'évaluation auxquels ils ont donné
lieu, en adoptant la perspective d'une synthèse critique. Un certain nombre de
critères servent à positionner les modèles les uns par rapport aux autres,
notamment le nombre et la nature des dimensions retenues, le caractère des
criptif ou normatif du modèle, et la perspective plus ou moins interactionnelle
adoptée. Une revue des instruments de mesure prend en compte la méthode de
recueil de données utilisée, et recense les principaux résultats disponibles en
matière de validation.
En conclusion, quelques questions sont abordées au sujet de la diversité des
instruments de mesure et de leur recouvrement avec d'autres outils. Finale
ment,sur le plan pratique, une réflexion sur l'utilisation de ce type d'outil est
envisagée, et, d'un point de vue conceptuel, une restructuration de la diversité
des styles est proposée.
Mots-clés : styles d'apprentissage, styles cognitifs, styles de conduite,
validation de questionnaires.
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Allieu N., Leudet M. F. — (1992) Leur donner des méthodes, pas si simple,
Cahiers Pédagogiques, n° 304-305, 64-66.
Astolfï J.-P. — (1987) Styles d'apprentissage et différenciation pédagogique,
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Atkinson G. — (1991) Kolb's learning style inventory : A practitioner's
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13, 149-161.
340 Isabelle Olry-Louis