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Les approches communicationnelles, discursives et langagières des processus


d'organisation. Genèse et convergences d'un dialogue

Article  in  Sciences de la Société · July 2013


DOI: 10.4000/sds.366

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2 authors:

Bertrand Fauré Daniel Robichaud


Paul Sabatier University - Toulouse III Université de Montréal
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N° 88 - 2013
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SCIENCES DE LA SOCIÉTÉ
Dossier coordonné par Bertrand FAURE et Daniel ROBICHAUD
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Organizing • Organisation • Communication • Discours • Langage • Pratique
• Conversation • Interaction • Sensemaking • École de Montréal.

Presses Universitaires du Mirail


Université de Toulouse-Le Mirail
w3.pum.univ-tlse2.fr
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Prix : 21€ /(5$ GX&HQWUH
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SCIENCES DE LA SOCIÉTÉ n° 88 – © 2013

Les approches communicationnelles,


discursives et langagières des processus
d’organisation
Genèse et convergences d’un dialogue

Bertrand FAURÉ, Daniel ROBICHAUD*

L’
enjeu de ce numéro de Sciences de la Société
est de pointer certaines difficultés liées à la production de savoirs communs
entre des communautés linguistiques et disciplinaires différentes. Sans
prétendre apporter une réponse définitive aux questions soulevées, ce numéro
propose de les surmonter via un travail de coédition entre un laboratoire
français (LERASS, Toulouse) et québécois (LOG, Montréal) et via la publication
de certains articles dans les deux langues. Le thème retenu est celui des
organisations, ou plutôt, comme nous le verrons, de l’organizing1.

Trois raisons justifient un tel choix!:!i) Sciences de la Société a, depuis son


origine, accordé une place importante à ce thème (n° 74, 63, 61, 59, 50-51
pour les 10 dernières années)! ; ii) les organisations et plus généralement
* Respectivement, maître de conférences en Sciences de l’information et de la communication, IUT de Tarbes,
Université Toulouse 3, LERASS, et professeur, département de Communication, Université de Montréal.
bertrand.faure@iut-tlse3.fr, daniel.robichaud@umontreal.ca
1. Comme nous le verrons organizing ne se laisse pas aisément traduire. Toute solution –  «  dynamique
organisationnelle  », «  processus organisant  » (ou «  d’organisation  » comme dans le titre de cette
introduction) – risque de faire perdre de vue le fait que  organizing est un concept de ralliement, un étendard
pour tous ceux qui se réclament d’« approches » ou de « perspectives » processuelles des organisations, qu’il
s’agisse des «  tournants  » interprétatif (Putnam et Pacanowski, 1983), discursif (Oswick, Keynoy et Grant,
2000), linguistique (Vaara, 2010) ou pratique (Gherardi, 2000).
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4 Bertrand FAURÉ, Daniel ROBICHAUD

les dynamiques et processus organisationnels! (l’organisé et l’organisant)


occupent une place croissante dans le fonctionnement des sociétés modernes
et dans la vie sociale des individus qui les composent!; iii) une thématique
interdisciplinaire commune (communication, gestion, sociologie, psycholo-
gie) préoccupe les recherches anglophones et francophones sur les organisa-
tions : celle du « rôle de la communication dans les processus (de disloca-
tion/ recomposition des différents niveaux) de structuration des organisa-
tions!» (Le Moënne, 2000, p. 23) et des «!transformations sociétales, politi-
ques et économiques contemporaines que cette approche communicationnelle
des organisation permet de prendre en compte » (Bouillon, Bourdin, Loneux,
2008, p. 8)2.

Du côté anglophone, le «! tournant interprétatif! » (Putman et Pacanowski,


1983) a marqué l’émergence d’un champ disciplinaire – Organizational
Communication – qui s’est peu à peu autonomisé ou «!discipliné!» (Mumby
et Stohl, 1996) par rapport aux autres disciplines et qui est aujourd’hui
structuré par des programmes universitaires et des réseaux scientifiques dont
l’influence en Amérique du Nord et dans les sciences de la communication
est attestée par la publication régulière de Handbooks (Jablin et Putnam,
2000). Parallèlement, un autre réseau – plutôt européen et plutôt inscrit dans
les sciences de gestion – s’est constitué dans les années 1990 autour des
« Organizational Discourse Studies! » (Grant, Hardy, Oswick et Putnam,
2004, Alvesson et Käreman, 2000). Dans les années 2000, des espaces
institutionnels ont été ouverts pour construire des ponts entre les études de
communication et les études de discours (revue Discourse & Communica-
tion, voir notamment Jian, Schmisseur et Fairhurst, 2008).

Du côté francophone, trois traditions disciplinaires (la sociologie du travail,


les sciences de gestion et les sciences de la communication) reconnaissent le
rôle fondamental du langage, du discours et de la communication dans la
constitution des organisations. Au cours des deux dernières décennies, les
recherches sur!le «!langage au travail!» (Pène, Borzeix et Fraenkel, 2001!;
Boutet, 2001! ; Zarifian, 1996), sur «! les approches narratives des
organisations» (Giroux et Marroquin, 2005!; Girin, 1995!; Chanlat, 1990) et
sur «! les communications organisationnelles! » (Le Moënne, 1998! ;
Delcambre!; 2000, Bouzon et Meyer, 2006!; D’Almeida, 2001) ont connu des
évolutions significatives au cours des années 2000, récemment marquées par
des migrations conceptuelles (Bouillon, Bourdin et Loneux, 2007) et des
emprunts théoriques renforcés (Bonnet, Rosette et Gramaccia, 2010).

Au début des années 2010, le dialogue entre ces différentes approches est
plus vif que jamais et animait en 2012 plusieurs colloques internationaux en
communication et en gestion (International Communication Association,
European Group of Organization Studies3). Un travail de définition,
2. Voir les numéros 51/52 et 74 de Sciences de la société.
3. En 2012, le theme du Fourth International Symposium on Process Organization Studies était : “Language
and Communication @ Work: Discourse, Narrativity and Organizing” et le sous-theme 24 du 28th EGOS
Colloquium s’intitulait : “Organizations as Phenomena of Language Use: Interconnecting Discourse and
Communication”.
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Les approches communicationnelles, discursives et langagières... 5

clarification, distinction est toujours en cours concernant les notions de


langage, discours et communication (ainsi qu’avec d’autres notions dérivées
telles que!: relation, interaction, conversation, dialogue, texte, signification,
etc… (Cooren, Letourneau, 2012). En invitant des chercheurs d’origines
disciplinaires et linguistiques différentes à s’engager dans ces problématiques
transversales, ce dossier visait à mieux comprendre les conditions et mo-
dalités d’enrichissement de leur dialogue mutuel sur des questions telles que!:
en quoi peut-on dire que «!la communication, le discours ou le langage sont
organisants et/ou ! constitutifs de l’organisation! » ? Comment comprendre
des expressions telles que! : «! les organisations sont constituées par ou à
travers le langage/ discours/ communication!»!? Par « constituées » voulons-
nous dire que les organisations sont instituées, créées, produites ou formées
par le langage/ discours/communication! ? Ou bien voulons-nous dire que
les processus d’émergence, maintenance et transformation des organisa-
tions sont ancrés, encastrés, incorporés dans le langage/ discours/ communi-
cation ?

Ce dossier offre un portrait représentatif des débats que ces questions


soulèvent par-delà les barrières linguistiques ou disciplinaires. Il est constitué
de cinq articles d’universitaires Nord-Américains (Wisconsin, Québec) et
Européens (Angleterre, France) novices ou confirmés en communication ou
gestion. Publiés dans leur langue originelle et dans une traduction française,
les articles d’Alex Wright (Angleterre) et John Moore (Wisconsin) encadrent
ceux de leurs homologues francophones!: Sylvie Grosjean (Québec), Alexia
Jolivet (Québec-France) et Amaïa Errecart (France). La communication
organisationnelle et les approches dites «!constitutives!» (Putnam et Nicotera,
2009)4 sont au centre d’une réflexion qui peut être soit purement théorique et
méthodologique, soit appuyée sur des recherches empiriques (politique
environnementale, processus de normalisation, collaboration inter-
organisationnelle, usages des technologies).

La première section de cette introduction retrace la genèse du dialogue


interdisciplinaire dans lequel ces réflexions s’inscrivent ainsi que les
convergences actuelles d’intérêts entre des différentes communautés de re-
cherche anglophone et francophone. La seconde section introduit les recher-
ches retenues pour ce numéro, les concepts discutés (« routines perfor-
matives », « savoirs pratiques », « travail d’organisation »), les méthodolo-
gies mises en œuvre (analyse de discours, analyse de conversation, étude de
cas) et les apports pour les axes de convergence mis en avant dans la première
section.

4. Chacun des articles présente amplement ce courant et ses différentes « Écoles ». Un bon exemple de
forum actif et de dialogue interdisciplinaire sur ce courant est le site « Promoting the communicative
constitution of organization », <http://orgcom.wordpress.com/>.
Un autre exemple est <http://www.orgcominthenews.com>.
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6 Bertrand FAURÉ, Daniel ROBICHAUD

Un dialogue interdisciplinaire et interlinguistique


Par-delà les communautés disciplinaires, le même tournant épistémologique
est à l’origine du dialogue sur le rôle de la communication, du discours
et du langage dans les organisations : la nécessité de remplacer les approches
fonctionnalistes, positivistes, déductives, normatives et/ ou prescrip-
tives d’une « organisation-contenant-la-communication » (Axley, 1984),
d’approches interprétatives, constructivistes, inductives et/ou compréhen-
sives5 des « processus d’organisation » (ou « processus organisant »
– organizing process –) posant au centre de la problématique les processus,
activités et pratiques communicationnelles et considérant la communication
non pas simplement comme un transfert d’information dans les
organisations mais comme un processus constitutif de l’organisation
(Putnam, Pacanowski, 1983!; Weick, Browning, 1986).

Genèse interdisciplinaire

Des évolutions sociétales et organisationnelles «!globales!» sont à l’origine


de ce tournant épistémologique et expliquent la vigueur du dialogue actuel.
Mains visibles d’un management industrieux qui se pare de scientisme au
début du XXe siècle, phénomènes d’une société qui généralise sa
bureaucratisation dans les années de glorieuse croissance, les organisations et
leurs technologies invisibles sont aujourd’hui l’esprit (si ce n’est la lettre)
d’un capitalisme mondialisé et financiarisé. Revisitées par l’individualisme
effréné des années 1980, les anciennes cages d’acier sont peut-être devenues
des forteresses vulnérables dans les dérives technologiques des années 1990
(Taylor et Van Every, 1993), mais elles n’en sont pas moins porteuses d’un
imaginaire qui colonise et ritualise des aspects sans cesse plus nombreux
(politiques, familiaux, relationnels) de notre vie. L’économie des
organisations est désormais une socio-économie par l’organisation! : non
seulement, nous (inter)agissons avec des organisations de plus en plus
complexes, éphémères, disloquées dans le temps et dans l’espace, mais nous
interagissons aussi de plus en plus au nom de la (ré)organisation permanente
et de la responsabilité individuelle. Plus (dés)organisées dans leur
temporalité et leur spatialité, se produisant dans des contextes sans cesse plus
disloqués! et avec des participants aux modes d’existence de plus en plus
hybrides, les relations humaines doivent aussi être plus réflexives, ou plus
organisantes, c’est-à-dire être le cadre d’un ! travail d’organisation et de
construction de sens sur l’organisation6.

5. Ces regroupements n’ont pas valeur universelle : les approches déductives ne sont ainsi pas nécessaire-
ment fonctionnalistes et/ou normatives.
6. Le lecteur familier des travaux sur les organisations reconnaîtra dans ces lignes des clins d’œil à des titres
connus et non référencés pour ne pas alourdir la bibliographie : Taylor (1911), Chandler (1977), (Crozier
(1963), (Boltanski & Chiapello (1999), DiMaggio & Powell (1983), Taylor (1993), Deetz, (1992), De Terssac &
Lalande (2002)  ; Weick (1995), Fourastié (1974), Power (1997), Mayo (1977), Ciborra (2000), Williamson
(1981), Berry (1983), Morgan (1988).
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Les approches communicationnelles, discursives et langagières... 7

L’accélération et l’amplification de ces dislocations/ recompositions spatio-


temporelles (Cooren et Fairhurst, 2004!; Cooren et Vasquez, 2013!; Cunliffe,
Luhman et Boje, 2004 ; Jones, McLean et Quattrone, 2004!; Czarniawska,
2004! ; Le Moënne, 2004! ; Lorino et Tricard, 2012! ; Taylor et Van Every,
2000!; Tsoukas et Chia, 2002) est une tendance anthropologique lourde qui
touche non seulement les organisations mais aussi tous les autres aspects de
notre vie sociale, les organisations étant le cheval de Troie de cette transfor-
mation. Dans les années 1980, ces évolutions contribuèrent à faire
reconnaître la nécessité du nouveau paradigme sur les dimensions organisa-
tionnelles – organisées et organisantes – des pratiques communicationnelles,
discursives ou langagières.

Deux prémisses clés sont au cœur de l’analyse. D’abord, une ontologie


processuelle, dont la formulation était donnée dès 1969 par Weick dans son
ouvrage classique :

« L’argument central est que toute organisation est la manière même par
laquelle elle passe par des processus organisants […]. L’organisation est une
chose fluide, en changement continu, qui exige d’être constamment réaccom-
plie, et qui nous apparait comme une entité seulement lorsque cette fluidité
est figée à un moment précis dans le temps. Cela entraîne que nous devons
définir l’organisation [organization] en terme de processus organisants
[organizing] ». (p.!90-91, traduction libre, italique dans l’original).

Ensuite, la seconde prémisse est celle de la récursivité inhérente au langage


qui rend possible la métacommunication, c’est-à-dire la construction d’un
cadre qui devient ensuite lui-même à la fois l’objet et l’agent d’un travail
d’organisation, de révision, de construction de sens (Robichaud, Giroux,
Taylor, 2004). La communication, le discours et le langage peuvent être
appréhendés dans leurs dimensions organisantes (as organizing), ou
constitutives de l’organisation, lorsque ces deux prémisses sont articulées
l’une à l’autre. L’organizing apparait alors dans la diversité des processus par
lesquels les acteurs bâtissent alternativement des cadres ou des scripts, puis
les réifient en s’y soumettant pour accomplir leurs activités et «!faire sens!»
des situations qu’ils affrontent, pour éventuellement se placer à nouveau
«!au-dessus!» de ces derniers (Latour, 2013) et les réécrire. En français, l’idée
s’exprime mieux à la forme intransitive : s’organiser (se structurer,
s’institutionnaliser, se réguler), c’est métacommuniquer (construire un
métadiscours, un métatexte, une métaconversation) et engager le produit de
cette métacommunication (cadre ou script) comme ressource dans la
poursuite et la rationalisation de ses activités.

Les problématiques soulevées par ce couplage vont enrichir les disciplines


traditionnelles (micro-sociologie de la parole au travail (Drew et Heritage,
1992), psychosociologie de la construction de sens dans les organisations
(Weick, 2012), socio-économie des institutions (Powell et DiMaggio, 1991),
tout autant que des disciplines émergentes telles que les sciences de la
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8 Bertrand FAURÉ, Daniel ROBICHAUD

communication (approches interprétatives de la communication dans les


organisations (Deetz, 1982!; Putnam et Pacanowsky, 1983) et les sciences de
gestion (approches narratives des organisations (Boje, 1991!; Morgan, 1988!;
Weick et Browning, 1986). Ces deux dernières approches deviendront par la
suite des champs de recherche reconnus voyant « la communication comme
constitutive des organisations » (Putnam et Nicotera, 2009) ou « les
organisations comme des constructions discursives ou narratives» (Alvesson,
Käreman, 2000!; Fairhurst, Putnam, 2004!; Czarniawska, 1998).

Dans les années 1990, quatre problématiques « disciplinent » (Mumby et


Stohl, 1996) les approches communicationnelles des organisations : prendre
en compte d’autres «!voix!» que celle du top-management, d’autres modes de
rationalisation des pratiques de communication, d’autres objectifs, logiques,
rationalités et doctrines que la rentabilité économique et financière à court
terme ou que la concurrence comme mode privilégié de régulation des
échanges économiques.

Les recherches sur les pratiques de la stratégie (strategizing) (Balogun &


Johnson, 2004! ; Wittinghton, 1996)! ; sur l’appropriation des technologies
(Orlikowski, 1992, Groleau, 2002), sur le développement de savoirs
pratiques (Gherardi, 2000) vont mettre en évidence la richesse des pratiques,
processus, compétences communicationnelles (discursives, langagières,
conversationnelles, interactionnelles) mises en œuvre à l’interface des
cloisonnements institués (communication interne et externe, verticale et
transversale, formelle et informelle, humaine et mécanique…) lors d’activités
collaboratives et/ou interactives, médiatisées et/ou à distance, interculturelles
et/ou inter-organisationnelles, routinières et/ou quotidiennes.

D’autres dimensions des relations organisation-société, d’autres formes de


management que celui par les chiffres ont été ainsi mises en avant. Les
approches critiques (Alvesson, Willmott, 1992! ; Deetz, Mumby, 1995) se
développent en soulignant les enjeux communicationnels d’une sociabilité de
plus en plus colonisée par un modèle managérial d’organisation (Deetz,
1992), caractérisé par la logique de reddition de comptes (Munroe, Moritsen,
1996), la dévotion à l’idéologie normative du discours managérial (Barley,
Kunda, 1992), l’inégalité institutionnalisée entre les élites et les salariés
(Cavanaugh, 2000), entre les hommes et les femmes (Buzzanell, 1994).

Longtemps taxées de relativisme (McPhee, Myers, Trethewey, 2006), voire


de solipsisme, car refusant de supposer a priori l’existence et le pouvoir des
structures sociales (cultures, hiérarchies, genres…), les approches
inductives/ conversationnelles portent aujourd’hui leurs fruits. Plutôt qu’à
l’amélioration des techniques de communication interne/ externe,
verticale/ transversale ou à la critique des travers des modes de management
contemporain, ces recherches inductives se sont intéressées aux situations,
pratiques et processus communicationnels sans a priori sur qui, quoi et
comment peut-être organisant. L’accent est mis sur les textes et les conver-
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Les approches communicationnelles, discursives et langagières... 9

sations (Taylor, Cooren, Giroux, Robichaud, 1996) comme objets privilégiés


d’analyse et sur les théories en linguistique/ pragmatique (Austin, Searle,
Dewey, James, Grice,), littérature (Greimas, Bakthine, Propp), philosophie
politique (Habermas! , Foucault), sémiologie (Perce, Barthes, Derrida),
sociologie (Giddens, Luhman, Latour), micro-sociologie (Garfinkel,
Goffman, Schlegoff) qui permettent d’analyser ce que font les textes, les
discours, les récits, les narrations ainsi que les interactions, les dialogues, les
conversations dans les organisations. Ces approches dressent un portrait
nuancé des enjeux et problématiques de l’organizing de ce début de siècle.

Forts de multiples enquêtes de terrain menées de par le monde depuis bientôt


quarante ans, ces travaux montrent le potentiel critique des approches
inductives ou interprétatives!qui sans le chercher en tant que tel (le déduire),
mettent en évidence le caractère central du pouvoir – ou plutôt des
dimensions communicationnelles/ discursives/ langagières de l’autorité
(Benoit-Barné, Cooren, 2009). La critique devient moins radicale, plus
pragmatique (Hardy, Phillips, 2004!; Courpasson, Clegg, 2006), suggérant
par exemple le développement d’une formation critique au management
(Grey, 2004 ; Dehler, Welsh, Lewis, 2004) permettant de devenir un «!critical
reflexif practitionner! » (Cunliffe, 2004) ou le développement d’une
communicologie féministe des organisations (Aschraft et Mumby, 2004).
L’intérêt se porte sur la richesse des ressources et des savoirs qui peuvent être
constitués par des modes de coordination non marchands et/ou non
hiérarchiques. Les travaux de l’équipe de Montréal sur les associations
humanitaires (Cooren, Matte, Taylor, Vasquez, 2007), les réseaux de quartier
(Bencherkhi et Cooren, 2011) ou les partis politiques (Chaput, Brummans,
Cooren, 2011) sont particulièrement représentatifs d’un intérêt renouvelé
pour des logiques organisationnelles quelque peu exotiques. Mais ils ne sont
pas les seuls (voir notamment les analyses portant sur les réseaux terroristes
[Stohl, Stohl, 2011]).

Le développement du dialogue en France

Opérant un tournant épistémologique analogue7 à celui de leurs homologues


anglophones, des communautés de recherches francophones sur «!le langage
au travail! et les approches narratives des organisations! » (Boutet, 2001! ;
Chanlat, 1990, Girin, 1995! ; Giroux, Marroquin, 2005! ; Pène, Borzeix,
Fraenkel, 2001)8 et sur «! les communications organisationnelles! » ont su
développer un dialogue interdisciplinaire aujourd’hui animé par des intérêts
convergents similaires à ceux du dialogue international.

7.Voir notamment Lemoigne (2002) ou Mucchielli (2005). Ce positionnement épistémologique est au cœur de
démarches de recherche prenant leurs distances avec des catégories pré-construites issues des pratiques
professionnelles telles que la communication inter/externe, hiérarchique/transversale…(Bernard, 2002).
8. Voir notamment le site du réseau « Langage et Travail » :
http://www.langage.travail.crg.polytechnique.fr/publications.htm
'SdS_88_00_job 29/06/13 14:32 Page 10

10 Bertrand FAURÉ, Daniel ROBICHAUD

En France, les approches communicationnelles des organisations – au sens


(international) de «! Communication Constitutive de l’Organisation! »9 – se
sont structurées au cours des 10 dernières années, poursuivant les travaux
menés par le groupe Org&Co10 dans les années 1990 (Bouzon et Meyer,
2006! ; Le Moenne, 1998! ; Delcambre, 2000, Parent et Loneux, 2010) et
approfondissant les débats/défis soulevés au début de la décennie qui suivit
(Le Moënne, 2000) par une société conquise par la communication (Miège,
1997) et ses utopies (Breton, 1995) et par des entreprises de plus en plus
«!communicantes!» (Zarifian, 1996).

En 2010, un forum spécial de la revue Management Communication


Quarterly (Cooren et Grosjean, 2010) faisait le point sur les principaux axes
de recherche hexagonale autour des différents niveaux d’analyse
(interaction, technologie, politique) et des différents objets (savoirs
organisationnels, dynamique de projet, diversité culturelle, inter
organisationnel) des approches communicationnelles (Bouillon, 2010). Le
dossier soulignait la permanence des problématiques liées aux TIC en termes
d’usages/pratiques, appropriation, structuration (Mayère, 2010) et mettait
l’accent sur les enjeux d’une approche articulant l’écriture et l’oralité
(Delcambre, 2010) comme processus sociogénétiques (Huët, 2010) ou
performatifs (Fauré et Bouzon, 2010, Gramaccia, 2001).

Cette question est toujours au cœur des débats actuels (Putnam et Nicotera,
2009! ; Robichaud et Cooren, 2013). Peut-on dire par exemple qu’une
organisation «! change! » si ses textes (qui la stabilisent) et ses
«! conversations! » (qui la font vivre) n’évoluent pas en interdépendance
(Taylor, 1993)! ? Comment comprendre les «! processus de
dislocation! /recomposition des différents niveaux de structuration des
organisations!» (Le Moenne, 2000) sans mettre la normativité de l’écriture
(Cochoy, Garel et De Terssac, 1998! ; De La Broise et Grosjean, 2010! ;
Douyère, 2010) et la performativité de la parole (Denis, 2006 ; Gramaccia,
2001) au centre de l’analyse!(Delcambre, 2010!; Fraenkel, 2006) ?

Le début des années 2010 est caractérisé par le développement d’approches


critiques (Heller, Huët et Vidaillet, 2013! ; Bonneville, 2012) qui, tout en
prolongeant les travaux pionniers de Floris (1996) et Olivesi (2006), mettent
l’accent sur la portée sociétale des analyses communicationnelles de
l’individu au travail (Morillon, Bouzon et Cooren, 2009). Ces approches
soulignent également l’influence grandissante de la figure du manager et du
management par les chiffres (Fauré, 2007!; Le Moënne et, Parrini-Alemanno,
2010) et les nouvelles formes de dislocation spatio-temporelles des
organisations par projet (Gardère, 2010).

9. Voir notamment le site «  Promoting the communicative constitution of organization  »


http://orgcom.wordpress.com/. Un autre exemple est : www.orgcominthenews.com
10. Voir notamment le site du «  Groupe d’études et de recherche sur les communications
organisationnelles » : http://www.org-co.fr/.
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Les approches communicationnelles, discursives et langagières... 11

Les mêmes problématiques animent aussi les débats tenus au sein des
approches gestionnaires et sociologiques du! «!langage au travail!» (Giroux
et Giordano, 1988!; Chanlat et Bedard, 1990!; Girin, 1990!; Pène, Borzeix et
Fraenkel, 2001!; Giroux, Marroquin, 2005). Elles mettent l’accent sur le rôle
de l’écriture et de l’oralité (Grosjean et Lacoste, 1998!; Fraenkel, 2006), et
éclairent le dualisme du management contemporain! : le despotisme doux
(Courpasson, 2000) des mots/maux de la gestion (Gouadain, 2001),
l’idéologie du rendre compte (Boussard, 2001!;!Dumez, 2008) mais aussi les
ressources langagières, discursives et communicationnelles sur lesquelles se
développent de nouvelles compétences interorganisationnelles (Arnaud,
2008 ; Arnaud, Mills, 2012), stratégiques (Rouleau, Allard-Poesi, Warnier,
2007!; Fauré, Rouleau, 2011).

Synthèse des problématiques et des apports du dossier


Les approches communicationnelles, discursives et langagières des processus
d’organisation sont désormais des champs de recherche reconnus au sein de
leurs disciplines respectives. L’apport de ce dossier est de souligner des direc-
tions de recherches convergentes qui animent le dialogue entre ces différentes
approches et qu’illustrent à divers titres les articles de ce numéro. Les
discussions se concentrent sur des croisements théoriques ou méthodologiques.

Quelles « migrations conceptuelles »!et quelles contributions au dialogue?

Chacun11 des articles publiés dans ce numéro éclaire une des problématiques
récentes des approches communicationnelles, discursives ou langagières des
organisations en mobilisant/discutant/retravaillant un concept, une théorie ou
une méthodologie issue d’une autre discipline (sociologie du travail, gestion,
sociolinguistique, politique).

Alex Wright propose un système communicationnel d’enquête sur les


routines organisationnelles en confrontant les approches gestionnaires des
routines dynamiques (Pentland et Feldman, 2008) et l’approche Montréalaise
des communications organisationnelles (Cooren, Taylor, Van Every, 2006).
«!Je suggère l’adoption d’une perspective communicationnelle qui substitue,
à l’idée de routines ayant deux aspects (l’ostensif et le performatif), une
perspective concevant les routines comme performatifs. C’est uniquement
suite à ce recadrage ontologique que les chercheurs pourront affiner leurs
études et que les praticiens pourront mieux comprendre l’impact des routines
communicationnelles sur leur travail » écrit-il infra.

Sylvie Grosjean analyse les savoirs en action élaborés par des consultants
lors de réunions de rapport d’audit en confrontant les approches gestionnaires
des savoirs pratiques (Gherardi, 2000) et les approches constitutives des
11. La notion de «  migration conceptuelle  » fait référence au titre d’un numéro spécial de la revue
Communication & Organisation (Bouillon, Bourdin et Loneux, 2008).
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12 Bertrand FAURÉ, Daniel ROBICHAUD

pratiques communicationnelles (Putnam et Nicotera, 2009)! : «! Nous


constatons qu’il y a donc des rapprochements à faire entre les « Practices-
Based Studies!» et les approches constitutives (CCO), notamment en ce qui
concerne leur vision de la communication. En effet, la communication y est
abordée comme un processus par lequel les individus par et à travers leurs
interactions agissent, constituent des savoirs qu’ils négocient, qu’ils
structurent et qu’ils partagent » écrit-elle plus loin dans sa contribution à ce
numéro.

Alexia Jolivet analyse les jeux de pouvoirs qui se nouent au cours du


processus de certification d’un établissement de santé en confrontant
l’approche française du rôle de l’écriture dans le «!travail d’organisation!»
(De Terssac et Lalande, 2002) et l’approche Montréalaise de l’agentivité
textuelle dans la constitution des organisations (Cooren et Fairhurst, 2008)!:
« Nous proposons de mettre à l’épreuve la notion de « texte » à deux niveaux :
par une confrontation empirique (observer le texte dans sa dynamique
communicationnelle) et une confrontation théorique (en mettant en
complémentarité l’approche montréalaise plus descriptive avec une
approche française plus critique de l’organisation, celle du « travail
d’organisation » (Jolivet, ce numéro).

Amaïa Errecart analyse les espaces communicationnels hybrides qui se


construisent entre organisations partenaires en confrontant les approches
performatives des discours politiques (Charaudeau, 2007) et les approches
communicationnelles/narratives des organisations (Weick et Browning,
1986) : « Cette analyse, s’inscrivant dans une perspective communication-
nelle, repose sur l’apport de l’analyse discursive comme outil méthodo-
logique privilégié. Cette approche va ainsi dans le sens de la rencontre
encore récente mais féconde au plan heuristique entre ces deux « disciplines
du discours » (Errecart, ce numéro).

John Moore analyse les dispositifs interactionnels (interactional device)


mobilisées par un centre d’appel en santé mentale en confrontant les
approches sociolinguistiques du discours (Waring, 2007) et les approches
ethnométhodologiques des interactions au travail (Drew et Heritage, 1992)!:
«!L’analyse qui suit viendra donc soutenir les découvertes de Kitziger tout en
soulignant un usage spécifique des constructions si–alors dans
l’accomplissement de buts organisationnels, ainsi que leur rôle dans la
constitution de l’info-ligne Mind dans les interactions » (Moore, ce numéro).

À des titres divers, ces discussions s’inscrivent dans les axes de convergence
soulignés dans la première section!:

– comprendre le rôle de la communication dans les dislocations/ recomposi-


tions spatiotemporelles des formes organisationnelles. C’est notamment ici le
cas de Wright la notion de téléaction des mobiles immuables et de Errecart
avec les espaces communicationnels hybrides)!;
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Les approches communicationnelles, discursives et langagières... 13

– développer des cadres théoriques (performativité, agentivité, régulation,


appropriation) permettant d’analyser le pouvoir des textes et des conversa-
tions ainsi que leur articulation. C’est notamment le cas ici de Jolivet avec la
notion de malléabilité des textes), de Grosjean avec les savoirs-en-
(inter)action), de Wright avec le système d’enquête communicationnelle et de
Moore avec les dispositifs interactionnels!;

– analyser de manière inductive l’organisation-en-train-de-se-faire en


partant de l’interaction (conversationnelle ou textuelle) et sans présumer
l’origine (humaine ou non-humaine) de l’action, c’est-à-dire sans exclure de
l’analyse le non verbal, les corps, les pratiques, la matière. C’est ce que fait
ici Grosjean avec la notion d’approche multimodale des dimensions
langagière, matérielle et corporelle et Wright avec la notion de coorientation
humain-non humain ;

Approfondir la réflexion critique en communication organisationnelle et en


analyse discursive des organisations. C’est ce que fait ici Jolivet avec
l’analyse des jeux de pouvoir), Errecart avec l’analyse critique de discours et
Wright avec l’analyse des modalités déontiques.

Avec toutes les limites de l’exercice, le tableau suivant propose une synthèse
de ces migrations conceptuelles et de ces apports.

Tableau 1 – Synthèse des migrations conceptuelles et des apports des articles

Auteurs Problématique Migrations conceptuelles Apports

Jolivet Normes, écriture, Sociologie du travail Malléabilité des textes lors


pouvoir d’organisation d’un processus de certification
Grosjean Corporalité, Practice-based studies L’élaboration des savoirs
matérialité of knowledge pratiques lors d’une réunion
interaction sur un rapport d’audit
Wright Système d’enquête Approche dynamique Rôle des non humains. Auto-
communicationnelle des routines rité des déontiques. Téléaction
des mobiles immuables
Errecart Relations inter- Analyse de discours Construction d’un espace
organisationnelle communicationnel hybride
entre organisations partenaires
Moore Dispositifs Sociolinguistique Rôle des constructions
interactionnels «!si-alors!» dans la constitu-
tion organisationnelle
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14 Bertrand FAURÉ, Daniel ROBICHAUD

Quels choix de traduction!?


Le titre de ce dossier soulève un problème qui loin d’être seulement linguis-
tique est aussi épistémologique, théorique et peut-être idéologique : que vient
faire un mot anglais «!organizing » (US) ou!«!organising!» (UK) dans un titre
français ? Une langue n’est pas, comme chacun le sait, un outil de
communication, elle est aussi la matrice de façons de penser et d’agir propres
à une culture, une communauté, un groupe. Utiliser l’anglais dans le français,
c’est peut-être faire allégeance à un «!impérialisme!» linguistique, culturel et
finalement économico-politique. Or, Sciences de la société est une revue
francophone qui par principe tente de ne pas contribuer à cette anglicisation
du vocabulaire dans les sciences de l’organisation.

Pour autant, organizing est un terme presqu’impossible à traduire littérale-


ment. En anglais, le gérondif «!-ing » peut exprimer une action en cours sur
quelque chose, l’état de cette chose ou l’action réalisée par cette chose. Par
exemple, organizing comittee peut signifier le fait d’être en train d’organiser
un comité, le fait que ce comité soit en cours d’organisation ou la fonction
même de ce comité. Dépendante du contexte, cette signification peut être
traduite en français par une proposition relative (comité qui (s’)organise), un
participe présent (comité (s’)organisant), un infinitif ([être en train
d’]organiser un comité) ou un complément d’objet (comité d’organisation).
Le suffixe ing permet toute cette polysémie et cette adaptabilité sémantique.
Conserver organizing c’est exprimer la complexité et la diversité du «! en
train de se faire! », du «! chemin qui se construit en marchant! », des
«! processus pratiques de constitution de l’organisation! » de manière plus
précise et condensée qu’en français.

C’est aussi inscrire le concept dans des filiations théoriques qu’une


traduction – telle que celle de processus d’organisation retenue dans le titre
de cette introduction au dossier – risque de faire perdre de vue. Organizing
est devenu un concept de ralliement, un étendard pour tous ceux qui se
réclament d’une vision processuelle, pratique, interprétative, discursive,
communicationnelle de l’organisation (Chua, 2007). Un simple suffixe
exprime en fait tout un paradigme qui traverse les frontières disciplinaires
(communication, gestion, sociologie, psychologie), ouvrant la voie à un
cortège d’autres concepts – sensemaking (Weick, 1995), storytelling (Boje,
1991), strategizing (Wittington, 1996) – qui mettent le langage, le discours,
la communication au centre de l’analyse d’une organisation-en-train-de-se-
faire!: émergente, constituée, maintenue, transformée.

Certes, une telle perspective peut contribuer à véhiculer le dogme actuel du


changement permanent : l’individu, les organisations, les structures
sociales… doivent s’adapter aux modifications de leur environnement!: être
flexibles, réactives, résilientes. Pour autant, organizing est un terme
ambivalent ou iconoclaste au regard de la critique classique de l’idéologie
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Les approches communicationnelles, discursives et langagières... 15

sous-jacente à l’anglicisation du vocabulaire en management, car donnant


droit de cité à une façon de concevoir et d’étudier les organisations plus
soucieuses des processus continus qui assurent leur existence même. Les
trois articles francophones publiés dans ce dossier l’ont tous utilisés à de
telles fins analytiques.

La décision finale de conserver dans le titre du dossier le terme anglais


employé dans l’appel à communication est donc un choix épistémologique et
théorique tout autant que linguistique. Ce choix motive aussi la décision de
publier dans les deux langues deux articles soumis et révisés en anglais
(Wright et Moore) et d’inclure un «! guide anglais-français des principaux
concepts ». Ce dossier espère ainsi indirectement contribuer au dialogue
entre les approches communicationnelles et discursives des organisations en
jetant les bases d’un lexique commun.

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SCIENCES DE LA SOCIÉTÉ
Dossier coordonné par Bertrand FAURE et Daniel ROBICHAUD
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Organizing • Organisation • Communication • Discours • Langage • Pratique
• Conversation • Interaction • Sensemaking • École de Montréal.

Presses Universitaires du Mirail


Université de Toulouse-Le Mirail
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