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Extrait des Annales de la Société scientifique. de Bruxelles.

Tome LI, Série B, première partie, Comptes rendus des séances, p. 12


Session du 29 janvier 1931. Deuxième Section.

L’indétermination DE LA LOI DE COULOMB


Note de M. l’Abbé G. Lemaître

Heisenberg (3) a montré que le principe d’indétermination du mouve­


ment des particules entraîne une indétermination du champ électro­
magnétique.
(3) Die physikalischen Prinzipien der Quantentheorie, page 36 sq.
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Nous nous proposons d'appliquer ce résultat à la loi de Coulomb,


d’après laquelle le champ entourant une charge ponctuelle ce se compose
d’un champ magnétique nul et d’un champ électrique radial et
d’étendre le principe d'Heisenberg au cas de déterminations non instan­
tanées.
Heisenberg obtient la loi d’indétermination du champ de trois manières
différences. L’une d’elles consiste dans la discussion d’une expérience
élémentaire de mesure du champ par la déviation qu’il produit sur deux
particules électrisées (¡ni le. traversent. Nous commencerons par reprendre
ce raisonnement d'Heisenberg en y corrigeant une erreur de détail et en
précisant la signification.
On se propose d’explorer le champ électromagnétique existant à un
instant déterminé dans un volume donné, auquel on suppose pour sim­
plifier une forme cubique de côté l.
Deux particules de charge e traversent en même temps le cube parallè­
lement à un côté pris comme axe des y. On mesure la variation de la com­
posante de la quantité de mouvement suivant une direction perpendicu­
laire à la direction des trajectoires et prise comme axe des x. Les deux
trajectoires sont supposées dans le plan y. De ces mesures on peut
déduire la composante E.-,-du champ électrique et la composante IL du
champ magnétique. L’impulsion communiquée aux particules est en effet

où est la vitesse de l’une et l’autre particule, cl dl est le temps


pendant lequel elles sont sous l’influence du champ.
Remarquons que Ex provoque une variation de quantité de mouvement
de même sens pour les deux particules, tandis que Hz agit en sens opposé
sur chacune d’elles.
Il est essentiel que les deux particules traversent le champ en même
temps. Il est donc nécessaire de tenir compte de l’action qu’elles exercent
l’une sur l’autre. La variation de quantité de mouvement qui en résulte est

Cette correction n’affecte que la mesure de IL et non celle de Ex. C’est


ce point qui a été perdu de vue par Heisenberg.
L'indétermination de la mesure résulte : 1) de l’indétermination des
quantités de mouvement des particules, inversement proportionnelle à
l'indétermination admise pour leur position. Celle cause d'indétermina­
tion affecte la mesure des deux champs ; 2) de l’indétermination
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résultant de l'indétermination dr de leur distance qui affecte uniquement


la mesure du champ magnétique. Les indéterminations sont donc, de
l’ordre de grandeur

On peut disposer de edr de telle sorte que

L’ordrede grandeur des indéterminations est donc, donné par la formule


d’IIeisenberg

puisque r et vdt sont évidemment tout au plus égaux au côté l du cube


où se fait la mesure. Il n’est pas exact de dire que celte relation doit
avoir lieu pour toutes les composantes perpendiculaires entre elles de l’un
et l’autre champ. Ainsi, dans l’expérience discutée ci-dessus, la mesure de
Ez, Hx par l’observation des déviations suivant l’axe des z donnerait une
indétermination qui pourrait, être inférieure à . La relation
d’IIeisenberg doit, seulement avoir lieu pour l’un au moins des couples
de composantes perpendiculaires des deux champs.
Le résultat de la mesure est une valeur moyenne des champs
dans le cube l3. Ces valeurs sont appelées par Heisenberg des valeurs
instantanées. Il est clair que ceci n’est pas rigoureusement exact. Ce sont
des valeurs pendant le temps qu’il faut aux particules pour traverser le
cube. Comme les particules ne peuvent aller plus vile que la lumière, ce
sont des valeurs moyennes pendant le temps l/c. Il convient pourtant de
les appeler valeurs instantanées, puisqu’elles sont aussi instantanées que
le permet le principe de relativité.

Indétermination de la loi de Coulomb.


Supposons que le champ soit du à une charge en repos ze, e désignant
maintenant la charge élémentaire, celle de l’électron.
Nous ne pouvons affirmer que le champ magnétique est rigoureusement
nul, sinon le champ électrique serait complètement indéterminé. Nous
adopterons comme indétermination du champ électromagnétique, la plus
grande indétermination d’une de scs six composantes.
Nous obtiendrons le cas le plus avantageux en supposant que ces
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indéterminations sont égales et nous représenterons leur valeur commune


par . Nous aurons donc, d’après le principe d’Heisenberg,

où Z est toujours le côté du cube où se fait la détermination.


Nous nous préposons de comparer cette indétermination avec la valeur
du champ, d’après la loi de Coulomb. Nous obtenons

est l’inverse de la constante de fine structure, soit, environ 137,


Z peut être considéré comme l’indétermination de r. Comme E est propor­
tionnel à 1/r2, nous obtenons la détermination la plus avantageuse en
choisissant

ce qui donne

Nous obtenons donc le résultat suivant : le champ électromagnétique


instantané d’une charge ne comportant qu’un petit nombre de charges
élémentaires est complètement indéterminé.
Pour que le champ instantané soit déterminé à 1 % près, il faut que la
charge soit 5 X 107e.
Ces résultats sont indépendants de la distance à laquelle se fait la
détermination, ils supposent seulement que les dimensions du volume où
se fait cette détermination sont proportionnées à r dans le rapport de
l’approximation désirée. Il s’agit d’ailleurs uniquement de la valeur dite
instantanée, c’est-à-dire de la valeur moyenne des champs pendant le
temps l/c.
Si nous nous proposons de déterminer la valeur moyenne des champs
pendant un temps comportant T déterminations instantanées,
nous pourrons admettre, d’après les résultats connus du calcul des
probabilités, que l’indétermination de la valeur moyenne est réduite
proportionnellement à la racine carrée du nombre T des déterminations
élémentaires.
Le principe d’Heisenberg devient donc pour une détermination non-
instantanée
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et l'indétermination de la loi de Coulomb s’obtient en remplaçant h
par /¿/T, soit

Pour que le champ d’en électron ou d’un proton soit déterminé à 1 %


près, il faut que T soit plus grand que 5 X JO7, donc

la détermination doit être une moyenne durant un temps au moins deux


cent mille lois plus grand que le temps nécessaire à la lumière pour
parcourir la distance r de la charge au point au voisinage duquel on
détermine le champ dans un cube de côté égal au deux centième de
cette distance.
La généralisation que nous avons obtenue s’étend facilement à d’autres
formes qu'Heisenbcrg a données du principe d’indétermination des champs.
L’expression

se réduit pour dl = aux formules d’Heisenberg (l).


Il est facile de trouver des expressions invariantes d’où peut se
déduire cette formule. Citons en particulier :

et

où et désignent respectivement le champ et le tenseur d’énergie


du champ.
Enfin, remarquons que l’indétermination de la loi de Coulomb s’étend
immédiatement au champ de particules en mouvement et donc, par
exemple, au rayonnement d’énergie dû à l’accélération d’une particule.
Il en résulte aussi directement que l’action des noyaux atomiques sur
des particules rapides ne peut avoir qu’une signification statistique.

(1) Loc. cil., p. 38.

Louvain.— Imprimerie « Etablissements F. Ceuterick », rue Vital Decoster, 66.

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