Fundamentals of Management Essential Concepts and Applications 14th Edition Robbins Test Bank

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Fundamentals of Management

Essential Concepts and Applications


14th Edition Robbins Test Bank
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Fundamentals of Management Essential Concepts and Applications 14th Edition Robbins Test Ban

Fundamentals of Management, 9e (Robbins)


Chapter 2 The Management Environment

1) A common myth is that organizations can be too big to fail.


Answer: TRUE
Explanation: Many people believe that large companies that dominate their industries don't
require outstanding management. They are, in fact, often described as "too big to fail."
Diff: 1
Objective: 2.1
Learning Outcome: Describe the components of the management environment

2) Organizational consistency is one of the foundations of long-term success.


Answer: FALSE
Explanation: The one constant that all organizations face, regardless of their size, is the need to
change and adapt to today's business environment.
Diff: 2
Objective: 2.1
Learning Outcome: Describe the components of the management environment

3) Organizational traditions should not be followed if they don't fit with the current demands of
customers and shareholders.
Answer: TRUE
Explanation: Organizations that are too bound by tradition and don't (or refuse to) change are
less and less likely to survive the turbulence in today's world.
Diff: 2
Objective: 2.1
Learning Outcome: Describe the components of the management environment

4) A major cause of the shutdown of a BMW assembly plant in South Carolina in 2010 was a
bank crisis in Iceland.
Answer: FALSE
Explanation: A volcanic eruption in Iceland was the cause of the shutdown, preventing
deliveries to the plant.
Diff: 2
AACSB: Dynamics of the global economy
Objective: 2.1
Learning Outcome: Identify the fundamental concepts and issues of international business and
management

1
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5) The external environment of an organization includes factors and forces that can affect how
the organization operates.
Answer: TRUE
Explanation: The external environment includes any outside agent that can influence the
performance of the organization.
Diff: 2
AACSB: Multicultural and diversity understanding
Objective: 2.1
Learning Outcome: Describe the components of the management environment

6) The components of an organization's external environment include a technological component


and a political component.
Answer: TRUE
Explanation: The technological component may include such things as new software, while the
political component may include office holders who directly affect a company's business.
Diff: 2
AACSB: Analytic thinking
Objective: 2.1
Learning Outcome: Describe the components of the management environment

7) The sociocultural component of the external environment of an organization includes trends


and traditions, but not basic attitudes and values.
Answer: FALSE
Explanation: The sociocultural component of the external environment includes all beliefs and
values as well as attitudes and behavioral patterns.
Diff: 1
Objective: 2.1
Learning Outcome: Describe the components of the management environment

8) The overall trend toward globalization is part of the political component of an organization's
external environment.
Answer: FALSE
Explanation: Globalization is part of the global component of an organization's external
environment.
Diff: 2
AACSB: Dynamics of the global economy
Objective: 2.1
Learning Outcome: Identify the fundamental concepts and issues of international business and
management

2
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9) High interest rates have been identified as a major cause of the economic meltdown that began
in 2008.
Answer: FALSE
Explanation: Low interest rates, rather than high interest rates, have been named as a cause of
economic problems.
Diff: 2
AACSB: Dynamics of the global economy
Objective: 2.1
Learning Outcome: Identify the fundamental concepts and issues of international business and
management

10) Prior to the recent recession that began in 2008, many businesses became highly leveraged,
which is another term for a company with a high debt-to-assets ratio.
Answer: TRUE
Explanation: With cheap credit, companies tended to take on too much debt.
Diff: 2
AACSB: Analytic thinking
Objective: 2.1
Learning Outcome: Describe the components of the management environment

11) The U.S. housing market been identified as a major cause of the economic meltdown that
began in 2008.
Answer: TRUE
Explanation: When the bubble in the housing market burst, the economy went into recession.
Diff: 2
AACSB: Analytic thinking
Objective: 2.1
Learning Outcome: Describe the components of the management environment

12) The capitalistic system that the United States uses is thought to be perfect by most
economists.
Answer: FALSE
Explanation: The recent recession alone provides proof that the system is far from perfect.
Diff: 1
Objective: 2.1
Learning Outcome: Describe the components of the management environment

13) Experts now agree that the role of government in the U.S. economy will be greatly
diminished in the years to come.
Answer: FALSE
Explanation: If anything, the opposite is true. Experts see a more active role for government in
the U.S. economy in the years to come.
Diff: 2
Objective: 2.1
Learning Outcome: Describe the components of the management environment

3
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LE MENDIANT ET LA FIÈRE DEMOISELLE

Le hasard voulut que nous fussions, M. l’Instituteur et moi, témoins du


petit événement que voici : Il y a parfois chez nous, aux abords de la forêt,
un vieux mendiant. Aujourd’hui encore il était là, plus pauvre et plus
misérable que jamais, et l’on avait peine à le distinguer des lattes de la
clôture vermoulue contre laquelle il s’appuyait. Mais il arriva qu’une toute
petite fille courut à lui pour lui donner une piécette de monnaie. Cela n’était
en soi nullement fait pour étonner, mais surprenante était la manière dont
elle s’en acquitta. Elle fit une jolie petite révérence, tendit vite son aumône
au vieillard, comme si personne ne devait s’en apercevoir, s’inclina
derechef, et disparut. Mais ces deux petites révérences étaient au moins
dignes d’un empereur. Ceci parut irriter tout particulièrement M.
l’Instituteur. Il voulut se diriger vers le mendiant, probablement pour le
chasser ; car, on le sait, il appartient au comité de l’œuvre des pauvres et il
est un adversaire résolu de la mendicité. Je le retins.
— Mais ces gens-là sont secourus, oui, on peut même dire, pourvus de
tout le nécessaire, s’emporta-t-il. S’ils s’obstinent à mendier en pleine rue,
c’est tout simplement… de l’insolence.
— Cher monsieur, tentai-je de l’apaiser, mais il continuait à m’entraîner
vers la lisière du bois. Monsieur l’Instituteur, insistai-je, il faut que je vous
raconte une histoire.
— Est-ce si pressé ? demanda-t-il d’un air venimeux.
Je pris sa question à la lettre.
— Oui, très urgent, répliquai-je. Avant que vous ayez oublié ce que
nous venons de voir, tout fortuitement.
L’instituteur se méfiait de moi depuis ma dernière histoire. Je lus cela
sur sa figure et le rassurai :
— Non, il n’y est pas question du bon Dieu. Le bon Dieu n’y figure pas
du tout, c’est quelque chose d’historique.
Ce disant, j’avais gagné la partie. Il suffit de prononcer le mot
« historique » pour que les oreilles d’un instituteur s’ouvrent. Car l’histoire
est une chose particulièrement estimable, inoffensive et d’ailleurs
susceptible d’être utilisée dans un but pédagogique. Je vis que l’instituteur
essuyait de nouveau ses lunettes, ce qui signifiait que ses facultés visuelles
s’étaient portées dans ses oreilles, et adroitement j’en conclus qu’il fallait
profiter de cette minute favorable. Je commençai :
— C’était à Florence. Lorenzo de Medicis, qui, très jeune, ne régnait
pas encore, venait d’imaginer son poème : Trionfo di Bacco e Arianna, et
déjà tous les jardins en résonnaient. Il y avait encore en ce temps-là des
poésies vivantes. Des ténèbres du poète, elles montaient dans les voix, et
voguaient sur elles, comme sur des canots d’argent, sans crainte, vers
l’inconnu. Le poète commençait une chanson, et tous ceux qui la
chantaient, l’achevaient. Dans le Trionfo, comme dans la plupart des
poésies de ce temps, la vie était célébrée, — la vie, ce violon aux cordes
lumineuses et chantantes, sur le fond obscur qu’est le bruissement du sang.
Les strophes inégales montent dans une gaîté enivrante, mais chaque fois
qu’elle est à bout de souffle, un refrain reprend, simple et bref, qui descend
de cette hauteur vertigineuse, et, effrayé par l’abîme, semble fermer les
yeux.
Ce refrain disait :

Que belle est la jeunesse qui nous réjouit.


Comment la retenir ? Elle fuit et regrette.
Qui veut être joyeux, le soit donc
aujourd’hui,
Car pour demain il n’y a nulle certitude.

Peut-on s’étonner que les hommes qui chantaient cette chanson aient été
pris d’une hâte, d’un besoin de dresser toutes les fêtes sur ce présent, sur le
seul rocher sur lequel il valût la peine de bâtir ? Et c’est ainsi encore que
l’on peut expliquer cette foule de figures qui se pressent sur les tableaux des
peintres florentins qui s’efforçaient de réunir dans une seule image tous les
princes et les femmes et les amis, car on peignait lentement, et qui pouvait
savoir si au temps du prochain tableau tout serait encore aussi jeune, aussi
multicolore et aussi uni. Cette impatience s’exprimait naturellement avec le
plus d’évidence chez les jeunes gens. Les plus brillants d’entre eux étaient
assis ensemble, après un banquet, sur la terrasse du Palazzo Strozzi, et ils
s’entretenaient des jeux qui devaient avoir lieu prochainement devant
l’église Santa Croce. Un peu à l’écart, dans une loggia, se tenait Palla degli
Albizzi, avec son ami Tomaso, le peintre. Ils semblaient discuter avec une
animation croissante, jusqu’à ce que Tomaso s’écriât tout à coup :
— Cela tu ne le fais pas, je parie que tu ne le fais pas.
— Qu’avez-vous ? s’informa Gaetano Strozzi, et il s’approcha avec
quelques amis.
Tomaso expliqua :
— Palla veut s’agenouiller à la fête devant Beatrice Altichieri, la fière,
et la prier de lui permettre de baiser le bord poussiéreux de sa robe.
Tous éclatèrent de rire, et Leonardo, de la maison Ricardi, fit observer :
— Palla réfléchira ; il sait que les plus belles femmes ont pour lui un
sourire qu’on ne leur voit jamais ailleurs.
Et un autre ajouta :
— D’ailleurs Beatrice est encore si jeune. Ses lèvres sont encore d’une
fermeté trop puérile pour sourire. C’est pourquoi elle semble si fière.
— Non, répliqua Palla degli Albizzi, avec une violence excessive. Sa
jeunesse n’est pas la cause de sa fierté. Elle est fière comme une pierre entre
les mains de Michel-Ange, fière comme une fleur sur une image de
madone, fière comme un rayon de soleil qui traverse des diamants.
Gaetano Strozzi l’interrompit avec quelque sévérité :
— Et toi, Palla, n’es-tu pas orgueilleux aussi ? A t’entendre, on dirait
que tu veux te mêler aux mendiants qui à l’heure des vêpres attendent dans
la cour de la Santissima Annunziata que Beatrice Altichieri, le visage
détourné, leur fasse l’aumône.
— Cela aussi, je le ferai, s’écria Palla, qui, les yeux brillants, se fraya un
chemin entre ses amis, dans la direction de l’escalier, et disparut.
Tomaso voulut le suivre.
— Laisse, intervint Strozzi, il faut qu’il reste seul à présent. Il deviendra
plus vite raisonnable.
Puis les jeunes gens se dispersèrent dans les jardins.
Ce soir-là, comme les autres, une vingtaine de mendiants et de
mendiantes attendaient les vêpres dans la cour de la Santissima Annunziata.
Beatrice, qui les connaissait tous par leurs noms, et allait même parfois chez
les enfants et les malades, dans les pauvres maisons de la Porta San Nicolo,
avait coutume de donner à chacun d’eux, en passant, une petite monnaie
d’argent. Aujourd’hui elle semblait devoir venir en retard ; déjà les cloches
avaient appelé et il n’y avait plus que quelques filaments de leur son qui
pendaient des tours sur le crépuscule. Il y eut un mouvement d’inquiétude
parmi les pauvres, provoqué aussi par la présence d’un mendiant inconnu,
qui s’était glissé dans l’ombre du portail de l’église, et, jalousement, ils
s’apprêtaient à le chasser, lorsqu’une jeune fille, vêtue d’une robe noire
presque semblable à un vêtement de nonne, parut dans la cour, et, arrêtée
par sa bonté, alla de l’un à l’autre, tandis qu’une de ses suivantes tenait
ouverte une bourse où elle puisait ses petits dons. Les mendiants tombèrent
à genoux, sanglotèrent, et, la durée d’une seconde, essayèrent de poser leurs
doigts fanés sur la traîne de la robe effacée de leur bienfaitrice, ou baisèrent
son bord extrême de leurs lèvres mouillées et balbutiantes. Beatrice avait
parcouru tout le rang ; aucun de ses pauvres familiers n’avait manqué à
l’aumône. Mais, soudain, elle aperçut, sous l’ombre du portail, une autre
forme étrangère, vêtue de haillons, et prit peur. Elle fut prise d’un trouble.
Tous ses autres pauvres, elle les avait connus dès son enfance, et leur faire
l’aumône était devenu pour elle un acte naturel, comme de laisser tremper
ses doigts dans les coupes de marbre, pleines d’eau bénite, qui sont placées
à l’entrée de toutes les églises. Mais jamais encore elle n’avait imaginé qu’il
pût y avoir des mendiants étrangers ; comment pouvait-on s’arroger le droit
de leur faire l’aumône sans avoir mérité la confiance de leur pauvreté par la
connaissance qu’on en avait ? N’eût-ce pas été une présomption inouïe que
de faire la charité à un inconnu ? Et tandis que ces sentiments obscurs se
disputaient son cœur, la jeune fille passa à côté du nouveau mendiant,
comme si elle ne l’avait pas remarqué, et pénétra dans l’église haute et
fraîche. Mais lorsque vint l’instant du recueillement, elle ne put se souvenir
d’aucune prière. La peur l’envahit qu’elle pût ne plus retrouver le pauvre
homme près du portail, à la sortie des vêpres, et qu’elle n’eût rien fait pour
adoucir sa misère, alors qu’était si proche la nuit qui rend toute pauvreté
plus dénuée et plus triste que le jour. Beatrice fit signe à celle de ses
compagnes qui portait la bourse et se dirigea avec elle vers l’entrée. Le
vide, dans l’intervalle, s’y était fait ; mais l’étranger était toujours encore là
et, appuyé à une colonne, semblait prêter l’oreille au chant qui, étrangement
lointain, venait de l’église comme d’un ciel. Son visage était presque
entièrement voilé, ainsi que c’est parfois le cas chez des lépreux qui ne
découvrent leurs hideuses blessures que lorsqu’on est debout près d’eux et
qu’ils sont sûrs que la pitié et le dégoût parleront également en leur faveur.
Beatrice hésita. Elle tenait elle-même la petite bourse dans ses mains et elle
n’y sentait que quelques pièces. Mais prenant une soudaine décision, elle
alla vers le mendiant et, d’une voix incertaine, un peu chantante, sans
détacher ses regards fuyants de ses propres mains, elle dit :
— Ce n’est pas pour vous blesser, monsieur… Ne suis-je pas, si je ne
me trompe, votre débitrice ? Votre père, je crois, a fait dans notre maison,
cette belle grille en fer repoussé, vous savez, qui orne notre escalier. Plus
tard, un jour, j’ai trouvé dans la chambre… où il avait coutume de
travailler… quelque bourse… je pense qu’il l’a perdue… certainement.
Mais le mensonge maladroit de ses lèvres poussa la jeune fille à genoux
devant l’étranger. Elle déposa la bourse en brocart dans ses mains cachées
par le manteau, et balbutia :
— Pardonnez…
Beatrice sentit encore que le mendiant tremblait. Puis elle s’enfuit. —
L’histoire est finie. Messire Palla degli Albizzi resta dans ses haillons. Il
donna tous ses biens et parcourut le pays, pauvre et pieds nus. On dit que
plus tard il a habité les environs de Subiaco.
— Quels temps, quels temps ! dit l’instituteur. A quoi bon tout cela ? Il
allait devenir un débauché et cet événement a fait de lui un vagabond, un
maniaque. Plus personne aujourd’hui ne parle sans doute de lui.
— Si, répondis-je discrètement, son nom est quelquefois cité dans les
grandes litanies catholiques parmi les intercesseurs, car il est devenu un
saint.
Cette histoire aussi, les enfants l’ont entendue, et à la colère de M.
l’Instituteur, ils prétendent qu’en elle aussi le bon Dieu figure. J’en suis
moi-même un peu surpris ; car j’avais promis à l’instituteur de lui raconter
une histoire sans Dieu. Mais les enfants — c’est vrai — doivent le savoir
mieux que nous.
UNE HISTOIRE RACONTÉE A L’OBSCURITÉ

J’allais endosser mon manteau et me rendre chez mon ami Ewald. Mais
je m’étais oublié sur un livre, un vieux livre du reste, et le soir était tombé
comme vient le printemps en Russie. Un instant plus tôt, la chambre était
claire jusque dans les recoins les plus éloignés, et voici que toutes les
choses semblaient n’avoir jamais connu que le crépuscule ; partout
s’ouvraient de grandes fleurs, et un éclat glissait autour de leurs calices de
velours, comme sur des ailes de libellule.
Le paralytique n’était certainement plus à sa fenêtre. Je restai donc chez
moi. Qu’avais-je projeté de lui raconter ? Je ne le savais plus. Mais un
instant plus tard, je sentis que quelqu’un attendait de moi cette histoire
perdue, un homme solitaire peut-être, qui était assis loin d’ici, à la fenêtre
de sa chambre sombre, ou peut-être cette obscurité elle-même qui nous
entourait, moi et les choses. Ainsi se fit-il que je commençai de raconter à
l’obscurité. Et elle se penchait toujours plus profondément sur moi, de sorte
que je pouvais parler de plus en plus bas, précisément comme il le fallait
pour mon histoire. Celle-ci se déroule du reste dans le présent et commence.
Après une longue absence, le docteur Georges Lassmann rentrait dans
sa petite patrie. Il n’y avait jamais possédé grand’chose, et à présent deux
sœurs vivaient seules encore dans sa ville d’origine, toutes deux mariées, et,
semblait-il, bien mariées. Les revoir après douze années, tel était le but de
son voyage. Du moins le croyait-il. Mais la nuit, tandis que dans le train
bondé il ne pouvait pas dormir, il lui apparut qu’en réalité il venait pour son
enfance, et espérait en retrouver quelque chose dans les vieilles rues : un
porche, une tour, un puits, n’importe quelle occasion de joie ou de tristesse
en laquelle il se reconnaîtrait. On se perd si facilement dans la vie. Plusieurs
choses justement lui revenaient : le petit logement dans la rue Heinrich,
avec les loquets luisants et les planchers peinturés, les meubles épargnés et
ses parents, ces deux hommes usés, presque déférents à leur égard ; les jours
de semaine rapides et pressés, puis les dimanches qui semblaient des salles
vidées, les rares visites que l’on recevait en riant ou avec timidité, le piano
désaccordé, le vieux canari, le fauteuil hérité dans lequel il n’était pas
permis de s’asseoir, un anniversaire, un oncle qui vient de Hambourg, un
théâtre de marionnettes, un orgue de Barbarie, une invitation d’enfants, et
quelqu’un appelle : « Clara ». Le docteur est sur le point de s’endormir. On
est arrêté dans une gare, des lumières passent, et le marteau attentif éprouve
les roues qui résonnent. Et c’est comme : Clara, Clara. Clara, réfléchit le
docteur, tout à fait éveillé à présent, quoi donc Clara ? Et aussitôt il sent un
visage, un visage d’enfant, avec des cheveux blonds et lisses. Non pas qu’il
puisse le décrire, mais il a le sentiment de quelque chose de silencieux, de
faible, de dévoué, d’une paire d’étroites épaules de fillette, comprimées
encore par une robe décolorée au lavage, et il va inventer un visage — mais
voici qu’il sait déjà qu’il n’a pas besoin de l’inventer, le visage est là, ou
plutôt, il était là, autrefois. Ainsi le docteur Lassmann se souvient-il de
Clara, son unique compagne de jeux, non sans peine.
Jusqu’à l’époque où on l’envoya dans un internat, vers l’âge de dix ans,
il avait partagé avec elle tout ce qui lui advenait. Clara n’avait ni frères ni
sœurs, et il en avait aussi peu qu’elle ; car ses sœurs aînées ne s’occupaient
pas de lui. Mais depuis lors, il ne s’était plus jamais informé d’elle.
Comment était-ce donc possible ? Il s’appuya en arrière. Elle était une
enfant pieuse, se souvint-il encore, avant de se demander une fois de plus :
qu’a-t-elle bien pu devenir ? Pendant quelque temps il fut tourmenté par la
pensée qu’elle pût être morte. Une angoisse infinie l’envahit dans le
compartiment étroit et comble ; tout semblait confirmer cette supposition :
elle était une enfant débile, elle n’avait pas été choyée chez elle, elle
pleurait souvent ; sûrement, elle était morte. Le docteur ne supporta pas plus
longtemps cette pensée ; il dérangea quelques dormeurs et sortit dans le
couloir du wagon. Là il ouvrit une glace et regarda dans le noir où dansaient
des étincelles. Il se sentit plus calme. Et lorsque, plus tard, il eut rejoint son
compartiment, il s’y endormit malgré sa position incommode.
La rencontre avec ses deux sœurs mariées ne se déroula pas sans
quelque gêne. Tous trois semblaient avoir oublié combien loin ils étaient
toujours demeurés les uns des autres, malgré leur étroite parenté, et ils
essayèrent d’abord de se comporter en frère et sœurs. Mais bientôt ils se
réfugièrent d’un accord tacite dans ce ton neutre et poli que la société a
spécialement créé pour servir en de telles circonstances.
Lassmann était chez sa plus jeune sœur dont le mari occupait une
situation particulièrement enviable : il était industriel et de plus portait le
titre de conseiller impérial. Après le quatrième plat du dîner, le docteur
demanda :
— Dis-moi, Sophie, qu’est donc devenue Clara ?
— Quelle Clara ?
— Je ne puis retrouver son nom de famille. La petite, tu sais, la fille du
voisin avec laquelle j’ai joué comme enfant.
— Ah, tu veux dire Clara Sœllner ?
— Sœllner, c’est juste, Sœllner. Je me rappelle maintenant. Le vieux
Sœllner, n’était-ce pas cet affreux vieillard, — mais qu’est devenue Clara ?
La sœur hésita.
— Elle s’est mariée, — d’ailleurs elle vit très à l’écart.
— Oui, fit M. le Conseiller, et son couteau glissa en crissant sur
l’assiette, très à l’écart.
— Tu la connais aussi ? demanda le docteur, tourné vers son beau-frère.
— Oui…i…i, très superficiellement ; elle est assez connue ici.
Les deux époux échangèrent un regard d’entente mutuelle. Le docteur
supposa que pour une raison quelconque il devait leur être désagréable de
parler de cela, et n’insista pas.
En revanche, M. le Conseiller montra d’autant plus d’empressement à
reprendre ce sujet lorsque sa femme eut laissé les messieurs prendre seuls
leur café noir.
— Cette Clara, interrogea-t-il avec un sourire malicieux, et il considéra
les cendres de son cigare qui tombaient dans le cendrier en argent, elle était
cependant, paraît-il, une enfant tranquille et même plutôt laide ?
Le docteur se tut.
M. le Conseiller se rapprocha de lui avec un air confidentiel.
— Quelle affaire ! N’en as-tu jamais recueilli des échos ?
— Tu sais bien que je n’ai parlé à personne.
— Pourquoi, parlé ? sourit finement le conseiller. Tu aurais pu le lire
même dans les journaux.
— Quoi donc ? demanda le docteur nerveusement.
— Voilà, elle lui a brûlé la politesse, — cette phrase surprenante suivit
une bouffée de fumée, et l’industriel en attendait à présent l’effet, avec un
bien-être infini.
Mais cet effet produit ne sembla pas lui plaire. Il prit un air préoccupé,
se redressa, et commença sur un autre ton, objectif, et comme offensé :
— Hum, on l’avait mariée à Lehr, l’architecte. Tu ne dois plus l’avoir
connu. Pas vieux du tout, de mon âge. Riche, très convenable, tu sais, tout à
fait convenable. Elle n’avait pas le sou, elle n’était pas jolie, aucune
éducation, bref… C’est vrai que l’architecte ne voulait pas une grande
dame, mais une modeste ménagère. Voilà que Clara, — on la recevait
partout, dans le meilleur monde, on lui témoignait beaucoup de
bienveillance, vraiment, oui, on se conduisait comme il faut, elle aurait
donc facilement pu se faire une situation, n’est-ce pas ? — voilà donc que
Clara — un jour, à peine deux ans après la noce — partie pour ne plus
revenir ! Tu peux te représenter cela : partie ! Partie, où ? En Italie. Un petit
voyage de plaisir, naturellement pas seule. Pendant toute l’année précédente
déjà, nous ne l’avions plus invitée, — comme si nous avions pressenti cela.
L’architecte, mon ami, un homme d’honneur, un homme…
— Et Clara ? l’interrompit le docteur en se levant.
— Ah oui. Eh bien, le châtiment du ciel l’a atteinte. Donc l’homme en
question — on dit que c’est un artiste, n’est-ce pas ? — un oiseau volage,
comme cela, pour la frime, n’est-ce pas ?… Donc, lorsqu’ils furent de
retour à Munich : adieu, et on ne l’a plus revu. La voici, avec son enfant sur
les bras.
Le docteur Lassmann arpenta la chambre d’un air agité :
— A Munich ?
— Oui, à Munich, répondit le conseiller en se levant à son tour. On
prétend d’ailleurs qu’elle mène là une existence très misérable.
— Que veut dire très misérable ?
— Mon Dieu, pécuniairement, fit le conseiller en regardant son cigare,
et puis, en général… n’est-ce pas ? une de ces existences…
Soudain, sa main soignée se posa sur l’épaule de son beau-frère, sa voix
gloussa de plaisir.
— Tu ne sais pas ? On prétend même qu’elle vit de…
Le docteur se retourna brusquement et se dirigea vers la porte. M. le
Conseiller, dont la main était retombée de l’épaule de son beau-frère, mit
dix bonnes minutes à se remettre de sa stupéfaction. Puis il alla chez sa
femme, et dit avec mauvaise humeur :
— J’ai toujours dit que ton frère était un drôle de corps.
Et celle-ci, qui venait de faire un petit somme, bâilla d’un air
paresseux :
— Mon Dieu, oui.
Quinze jours après, le docteur partit. Il avait appris tout à coup qu’il
devait chercher sa jeunesse ailleurs. A Munich, il trouva dans le livre
d’adresse : Clara Sœllner, Schwabing, telle rue, tel numéro. Il annonça sa
visite, et se mit en route. Une femme élancée l’accueillit dans une chambre
pleine de lumière et de bonté.
— Georg, et vous vous souvenez encore de moi ?
Le docteur s’étonna. Puis il dit :
— C’est donc vous, Clara, c’est bien vous ?
Elle tint sa figure calme au front pur tout à fait immobile, comme pour
lui donner le temps de la reconnaître. Cela dura longtemps. Enfin le docteur
sembla avoir trouvé quelque chose qui lui prouvait que son ancienne
compagne de jeux était vraiment devant lui. Il chercha encore une fois sa
main et la serra ; puis il l’abandonna lentement et regarda autour de lui dans
la chambre. Elle ne semblait rien contenir de superflu. A la fenêtre, une
table, garnie de livres et de manuscrits, à laquelle Clara avait dû travailler.
La chaise était encore déplacée.
— Vous avez écrit ? et le docteur sentit combien absurde était cette
question.
Mais Clara répondit, sans gêne aucune :
— Oui, je traduis.
— Pour l’impression ?
— Oui, dit Clara, simplement, pour un éditeur.
Georg aperçut au mur quelques reproductions d’œuvres italiennes.
L’une d’elles était le Concert de Giorgione.
— Vous aimez ceci ?
Il s’approcha de l’image.
— Et vous ?
— Je n’ai jamais vu l’original ; il est à Florence, n’est-ce pas ?
— Au palais Pitti. Il faut que vous y alliez.
— Tout exprès ?
— Tout exprès.
Une libre et simple gaieté planait sur eux. Le docteur leva des yeux
pensifs.
— Qu’avez-vous, Georg, ne voulez-vous pas vous asseoir ?
— Je suis triste, hésita-t-il. Je croyais… mais vous n’êtes pas du tout
dans le besoin.
Clara sourit.
— Vous avez entendu mon histoire ?
— Oui, c’est-à-dire…
— Oh, l’interrompit-elle vite, ce n’est pas la faute des hommes, s’ils en
parlent autrement. Les choses que nous vivons, ne peuvent souvent
s’exprimer, et quiconque les raconte quand même, doit nécessairement
commettre des erreurs.
Silence. Puis le docteur :
— Qu’est-ce qui vous a rendue si bonne ?
— Tout, dit-elle avec une chaleur douce.
— Mais pourquoi demandez-vous cela ?
— Parce que… parce que vous auriez dû devenir au contraire dure.
Vous étiez une enfant si faible, si abandonnée ; de telles enfants deviennent
plus tard, ou endurcies, ou…
— Ou meurent, voulez-vous dire. Eh bien donc, moi aussi je suis morte.
Oh, j’ai été morte pendant de longues années. Depuis que je vous avais vu
pour la dernière fois, chez nous, jusqu’à…
Elle prit un objet sur la table.
— Tenez, voici son portrait. Il est un peu flatté. Sa figure n’est pas aussi
claire, mais plus… chère, plus simple. Dans un instant, je vais vous montrer
notre enfant qui dort à côté. C’est un garçon. Il s’appelle Angelo, comme
son père, qui est en voyage à présent, très loin.
— Et vous êtes toute seule ? demanda le docteur distraitement, toujours
encore penché sur le portrait.
— Oui, moi et l’enfant. N’est-ce pas assez ? Je vais vous raconter
pourquoi. Angelo est peintre. Son nom n’est pas très connu. Vous ne l’avez
sans doute pas entendu. Jusqu’à ces derniers temps il a lutté, avec le monde,
avec ses projets, avec lui-même, avec moi. Oui, avec moi aussi. Car depuis
un an, je le suppliais : pars en voyage. Je sentais combien cela lui était
nécessaire. Un jour il dit en plaisantant : « Moi, ou un enfant ». « Un
enfant », dis-je, et il est parti.
— Et quand reviendra-t-il ?
— Quand l’enfant saura prononcer son nom, c’est ce que nous avons
convenu.
Le docteur voulut faire une remarque. Mais Clara rit :
— Et comme c’est un nom difficile, nous devrons attendre quelque
temps encore. Angelino n’aura deux ans que cet été.
— Étrange, dit le docteur.
— Quoi, Georg ?
— Que vous compreniez si bien la vie. Comme vous êtes grande,
comme vous êtes jeune ! Qu’avez-vous donc fait de votre enfance ? Nous
étions cependant tous deux, des enfants si dénués de tout. On ne peut
pourtant pas changer, ou faire en sorte que cela n’ait pas été.
— Vous voulez dire que si les choses suivaient leur cours naturel, nous
aurions dû souffrir de notre enfance ?
— Oui, c’est justement cela que je veux dire. De ces lourdes ténèbres,
derrière nous, avec lesquelles nous entretenons des relations si faibles et si
incertaines. Voilà un temps auquel nous avons confié nos primeurs, tout
notre commencement, toute notre confiance, les germes de tout ce qui,
peut-être, devait un jour devenir… Et soudain nous savons : tout cela a
sombré dans une mer, et nous ne savons même pas exactement quand. Nous
ne nous en étions même pas aperçus. C’est comme si quelqu’un avait réuni
tout son argent pour s’acheter une plume et la piquer sur son chapeau : le
premier souffle venu la lui emportera. Naturellement, il rentre chez lui sans
plume, et il ne lui reste plus qu’à se demander où elle pourrait bien s’être
envolée.
— Vous vous demandez cela, Georg ?
— Non, j’y ai déjà renoncé. Je commence quelque part, après ma
dixième année, là où j’ai cessé de prier, le reste ne m’appartient pas.
— Et comment se fait-il que vous vous soyez souvenu de moi ?
— C’est pourquoi je viens chez vous. Vous êtes le seul témoin de ce
temps-là. Je croyais que je pourrais retrouver en vous… ce que je ne puis
plus trouver en moi. Un geste quelconque, un mot, un nom, qui aurait gardé
quelque chose… une explication.
Le docteur reposa la tête entre ses mains froides et agitées.
Mme Clara réfléchit :
— Je me rappelle de mon enfance si peu de chose qu’il me semble que
mille vies sont intercalées entre elle et moi. Mais maintenant que vous m’y
faites songer, un souvenir me revient : un soir. Vous arriviez chez nous, on
ne vous attendait pas. Vos parents, sans doute, étaient au théâtre, ou ailleurs.
Tout était éclairé chez nous. Mon père attendait une visite, un parent, un
parent éloigné et riche, si je me souviens bien. Il devait venir de… de… je
ne sais plus d’où, de très loin en tout cas. Nous l’attendions déjà depuis
deux heures. Les portes étaient ouvertes, les lampes brûlaient, ma mère, de
temps en temps, allait lisser une housse sur le sopha, mon père était debout
à la fenêtre. Personne n’osait s’asseoir ni déplacer une chaise. Comme vous
arriviez justement, vous attendîtes avec nous. Nous enfants, écoutions à la
porte. Et plus le temps passait, plus l’hôte que nous attendions se faisait
merveilleux. Oui, nous tremblions même qu’il ne pût arriver, avant d’avoir
atteint ce dernier degré de splendeur dont chaque minute de retard le faisait
approcher davantage. Nous ne craignions point qu’il ne vînt pas du tout. Il
viendra, mais laissons-lui le temps de devenir grand et puissant.
Soudain le docteur leva la tête et dit avec tristesse :
— Mais nous savons, tous deux, une chose, c’est qu’il ne vint pas. Je ne
l’avais pas non plus oublié.
— Non, confirma Clara, il ne vint pas.
Et après un silence :
— Mais ce soir-là fut si beau.
— Quoi ?
— Eh bien… l’attente, toutes ces lampes… le silence… la solennité de
tout cela.
Quelque chose bougea dans la chambre voisine. Mme Clara s’excusa
pour une minute ; et, lorsqu’elle reparut, gaie et souriante, elle dit :
— Nous pourrons y aller tout à l’heure. Il s’est éveillé et il sourit. Mais
que disiez-vous à l’instant ?
— Je me demandais justement ce qui pouvait vous avoir aidé à parvenir
à… vous-même, à cette tranquille possession de vous. La vie pourtant ne
vous a pas été facile. Sans doute, avez-vous été aidée par quelque chose qui
me manque ?
— Que serait-ce, Georg ?
Clara s’assit à côté de lui.
— C’est étrange ; lorsque, pour la première fois, je me souvins de
nouveau de vous, voici trois semaines, au milieu de la nuit, en rentrant chez
moi, je pensai : une enfant pieuse. Et maintenant que je vous ai vue, bien
que vous soyez si différente de celle que j’attendais, — et même, serais-je
presque tenté de dire : à plus forte raison, — je sens que ce qui vous a
dirigée au milieu de tous les dangers, c’est votre… oui, votre piété.
— Qu’appelez-vous piété ?
— Votre relation avec Dieu, votre amour pour lui, votre foi.
Mme Clara ferma les yeux.
— Amour pour Dieu ? Laissez-moi réfléchir.
Le docteur la considéra avec attention. Elle semblait formuler ses
pensées, lentement, à mesure qu’elles lui venaient :
— Comme enfant… ai-je aimé Dieu ? Je ne crois pas. Non, je n’ai
même pas… c’eût été, me semblait-il, une présomption folle… ce n’est pas
le mot juste : un véritable, le plus grand péché, de penser qu’il est. Comme
si par là je l’eusse forcé à être en moi, à être dans cette fillette débile, aux
bras ridiculement longs, dans notre pauvre logement, où tout était faux et
mensonger, depuis les imitations d’assiettes de bronze en carton, jusqu’au
vin dans les bouteilles qui portaient des étiquettes si coûteuses.
» Et plus tard — Mme Clara eut un geste des mains, comme pour se
défendre, et ses yeux se fermèrent plus étroitement, comme s’ils avaient à
voir sous les paupières quelque chose d’effrayant — j’aurais dû le chasser,
si, en ce temps-là, il avait habité en moi. Je ne savais plus rien de lui. Je
l’avais complètement oublié. J’avais tout oublié. A Florence seulement :
lorsque pour la première fois dans mon existence, je vis, j’entendis, je
sentis, je reconnus, et que j’appris en même temps à exprimer ma
reconnaissance pour tout cela, alors je songeai de nouveau à lui. Partout je
rencontrais ses traces. Sur tous les tableaux je trouvais des traces de son
sourire, les cloches vivaient encore de sa voix, et sur les statues je
reconnaissais les empreintes de ses mains. »
— Et vous l’avez trouvé là-bas ?
Clara regarda le docteur avec de grands yeux, pleins de bonheur :
— Je sentis qu’il était, qu’il avait été une fois, quelque part… Pourquoi
aurais-je senti davantage ? C’était déjà presque trop.
Le docteur se leva et s’approcha de la fenêtre. On voyait un morceau de
champ, la vieille petite église de Schwabing, et, au-dessus, du ciel, avec
déjà un peu de soir. Soudain le docteur Lassmann demanda sans se
retourner :
— Et maintenant ?
Comme aucune réponse ne venait, il revint doucement sur ses pas.
— Maintenant, hésita Clara, lorsqu’il fut debout en face d’elle, et elle
leva sur lui des yeux largement ouverts. Maintenant je pense quelquefois : il
sera.
Le docteur prit sa main et la retint pendant quelque temps. Il regardait
dans le vague.
— A quoi songez-vous, Georg ?
— Je songe que c’est de nouveau comme ce soir d’autrefois. Vous
attendez de nouveau le merveilleux, vous attendez Dieu, et vous savez qu’il
viendra. Et j’arrive par hasard, en témoin.
Mme Clara se leva, légère et souriante. Elle paraissait très jeune :
— Mais cette fois nous attendrons bien jusqu’au bout.
Elle dit cela si joyeusement et simplement, que le docteur dut sourire. Et
elle le conduisit alors dans la chambre voisine, chez son enfant.

Il n’y a rien dans cette histoire que les enfants ne puissent savoir.
Cependant les enfants ne l’ont pas apprise. Je ne l’ai racontée qu’à
l’obscurité. Et les enfants ont peur de l’obscurité, ils s’enfuient à son
approche, et lorsque, par hasard, ils doivent y rester, ils ferment les yeux et
se bouchent les oreilles. Mais pour eux aussi viendra le temps où ils
aimeront l’obscurité. Ils apprendront d’elle mon histoire et sans doute alors
la comprendront-ils mieux.
TABLE

E ’ :
Le conte des mains de Dieu 1
H B D :
L’étranger 23
Pourquoi le bon Dieu veut qu’il y ait des pauvres 31
Comment la trahison vint en Russie 41
Comment le vieux Timofei mourut en chantant 53
La chanson de la Justice 67
Une scène du ghetto de Venise 87
Celui qui écoutait les pierres 101
Comment le dé à coudre devint le bon Dieu 109
Un conte sur la mort et un épilogue d’une main étrangère 121
Une association née d’un besoin impérieux 137
Le mendiant et la fière demoiselle 155
Une histoire racontée à l’obscurité 167
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