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UNIVERSITE DE LUBUMBASHI

FACULTE DES LETTRES ET SCIENCES HUMAINES


Département de Philosophie
B.P. 1825
LUBUMBASHI

LA PART DE L’HUMAIN DANS LES


PROBLÈMES ÉCOLOGIQUES SELON
Michel SERRES

Par
MBUYU FAUSTIN Gallon
Mémoire présenté et défendu en vue de
l’obtention du grade de licencié en
Philosophie
Option : Philosophie des sciences

Directeur : Gilbert RUBONEKA


Professeur associé

Année Académique 2022-2023


I

EPIGRAPHES

« Le monde ne se réduit pas à un objet devant nous, disponible,


dont on peut faire n’importe quoi »

Michel Serres.1

« Nous devons apprendre et enseigner autour de nous l’amour du


monde, ou de notre Terre »

Michel Serres2

1
Michel SERRES, Pantopie : de l’Hermès à petite poucette, entretien avec Martin Legros et Sven Ortali, Paris,
Éd. Le pommier, 2014, p. 246.
2
IDEM, Le contrat naturel, Paris, Éd. Flammarion, 1992, p. 83.

2
II

DEDICACE

À vous mes parents Ngoy Lucien et Mwamba Jeannette

À vous mes frères et sœurs de la famille Ngoy

Au révérend abbé Jean-Claude Fwela

À vous cher (re) lecteur (trice) !

3
III

IN MEMORIAM

Nous ne pouvons pas passer sans dire un mot à vous chère maman Fena Kabange et
tous les défunts de la famille Lambert Mukena. Vous aurez bien voulu lire ce mémoire, mais
vous êtes partis dans l’au-delà. Votre départ a laissé un vide dans notre cœur. Dans
l’espérance de la résurrection que, notre Dieu vous donne un repos éternel.

4
IV

REMERCIEMENTS

Au début de notre rédaction, nous nous sommes fixé l’objectif de travailler en


philosophie de la nature et spécialement en écologie sur la question de la crise écologique. La
problématique de la crise écologique n’est pas aussi simple. Elle fait intervenir plusieurs
disciplines scientifiques dont notre orientation est plus rendue claire par ce travail de
Mémoire. Pour arriver à ce stade, il y a eu beaucoup de gens qui nous ont aidé et à qui on
peut adresser quelques mots de remerciements.

Nous rendons grâce à notre Dieu maître de temps et des circonstances. Par son amour,
Il nous a donné le souffle de la vie et le courage de mettre terme à ce cursus académique.

Nous disons merci à l’université de Lubumbashi (personnels scientifiques et


académiques) pour nous avoir accueilli, formé durant notre parcours académique. À la
faculté des lettres et sciences humaines, au département de philosophie nous disons
également merci. Un très grand merci au professeur associé Gilbert Ruboneka d’avoir
accepté de diriger ce mémoire. Au-delà de ses nombreuses activités il a été là pour nous
orienter et diriger tout au long de ce Mémoire. Pour son amour et son sens d’humanisme, il
nous a non seulement dirigé mais aidé dans la vie sociale. Nous ne pouvons que dire merci. A
tous les professeurs du département de philosophie, spécialement au professeur Jean-Pierre
Mayele Ilo, Louis Mpala, Sylvain Kambala, Emmanuel Banywesize, Joseph Mabika, nous
disons également merci pour le sacrifice et dévouement.

Merci aux parents : papa Ngoy Bilonda Lucien et maman Mwamba Kayuwa
Jeannette, pour leur sacrifice et souci à notre égard. A vous mes consanguins frères et sœurs :
Ngoy wa Maloba Laurianne, Ngoy wa Mulongo Françine, Ngoy wa Bilonda Trésor, Ngoy wa
Kayuwa Jeancie, Ngoy wa Mwamba Eliezer, Ngoy wa Ngoy Bénédicte, Alphonse Mashinda,
merci pour votre amour indispensable.

Au révérend abbé Jean-Claude Fwela, à qui nous disons merci pour son amour,
accompagnement spirituel et matériel. Que notre Dieu vous protège durant votre mission
sacerdotale. Le mot nous manque pour exprimer cette aide indispensable pour notre
formation intellectuelle et spirituelle.

5
Aux amis et camarades de promotion : Jean-Claude Mulanda, Félicien Mulongoy,
Raymond Nungu, Benoit Nvita, Rodriguez Kyamusale, Stanis Mayunga, la route a été longue
et merveilleuse. Par ce mémoire nous exprimons notre gratitude de nous avoir accompagné et
encouragé tout au long de notre parcours académique.

Aux amis et connaissances : Léon Martin Cibamba, Floribert Kankaj, Plamédie


Ndaya, Félicien Kabongo, Arthur Khoji, Emmanuel Lenge, Nanan Nanga, Cyrille Kishala,
Sylvain Kabombo et vous tous qui nous sont chers ; nous disons merci pour votre amour à
notre égard.

6
0. INTRODUCTION GÉNÉRALE

0.1. OBJET D’ETUDE


Notre mémoire s’intitule « La part de l’humain dans les problèmes écologiques selon
Michel Serres ». Nous voudrions dans cette investigation, qui s’inscrit dans le domaine
philosophique, nous assigner comme tâche, d’étudier philosophiquement la question de la
part de l’humain dans les problèmes écologiques dans la multidisciplinarité épistémologique
de la pensée serrésienne, afin de critiquer, c’est-à-dire d’argumenter à propos de la légitimité,
l’originalité, l’apport de la pensée encyclopédique de notre maître à penser du point de vue
actuel d’une théorie du sujet.

La question de la connaissance est un présupposé anthropologique. Il est de notre part


de pouvoir évoquer cette quintessence réflexive avec notre réflecteur : Michel Serres. Il est de
prime à bord que l’humain dans son humanité s’humanise en tant que question de
connaissance. Il est toujours à la recherche de son bonheur, de son devenir, de son
épanouissement, etc.

Autrement dit, nous cherchons à expliquer dans ce travail ; quelle est la part et la
responsabilité de l’humain face aux problèmes écologiques. Certes, nous connaissons
d’emblée, que les problèmes écologiques sont liés à la fois à la notion de la survivance des
espèces sur terre et leurs relations au monde. Il n’est pas étonnant de constater actuellement,
que cette survivance et relation se dégradent à petit feu. Tout le monde en parle aujourd’hui
sur la crise écologique. Cette crise qui prend un visage assez complexe sur multiples
phénomènes. Dans le même ordre d’idées, Henry David Thoreau souline que, « bientôt, ça ne
fait aucun doute, nous assisterons à une époque où la volonté de l’homme sera la loi pour le
monde physique… »3.

La question écologique est plus vaste, que ce que nous prévoyons étudier et mener
comme des recherches. Voilà pourquoi, l’objectif de notre étude n’est pas d’envisager
épingler toutes les facettes du domaine de l’écologie, notamment : l’écologie politique,
économique, environnementale, etc. Par ailleurs, il sera question de statuer sur ce qui lie et
engage l’humain face à la préoccupation écologique de manière philosophique. Lui permettre
d’être consciencieux, responsable et concerné. Les conséquences pratiques du non-respect de
la nature sont plus dramatiques qu’on le croit. À cet effet, il est de la responsabilité de tout

3
Henry David THOREAU, « Le Paradis à (re)conquérir », in La pensée écologique. Une anthologie, Paris, Éd.
P.U.F, 2014, p. 31.

7
humain d’essayer à consolider le lien qui l’unit aux autres êtres sur terre. En tant que question
majeure, la nature fait l’objet de la nouvelle réflexion en philosophie. Cette réflexion se veut
une piste de solution que l’humanité veut avoir.

0.2. CHOIX ET INTERET DU SUJET

La question de la part de l’humain dans les problèmes écologiques de Michel Serres


est reconstituée et critiquée en fonction de sa perspective épistémologique qui implique une
transdisciplinarité, une transnationalité et une universalité des sciences physicobiologiques,
humaines et sociales pour pouvoir penser l’humain dans les problèmes écologiques.

De ce fait, notre choix et intérêt sont orientés dans le domaine de l’écologie. Pour
ainsi dire, le monde dans lequel nous vivons, traverse une période critique de son histoire.
Cette période créée et fissurée par des clivages entre les humains et leurs relations aux objets
du monde. En choisissant ce sujet au regard de Michel Serres, notre intérêt est de montrer,
que l’humain n’est pas le seul être de la nature. Il n’est qu’un élément parmi tant d’autres, et
c'est pourquoi il doit être conscient du danger naturel et prendre conscience. Il a une part de
responsabilité qui le concerne.

De plus, la planète terre enregistre beaucoup de phénomènes inhabituels. Ceci par le


fait que les humains la considèrent comme un objet de sans valeur. En tant qu’objet, la terre
est devenue un jouet des humains. C’est pourquoi, notre mission sur ce sujet, s’inscrit dans la
logique selon laquelle, tous les êtres vivants sur terre sont de sujets à part entière. L’intérêt est
celui d’aider l’humain à prendre conscience de tous ces enjeux afin qu’il ne soit pas la
première victime de ses désastres. En plus de cela, le choix et l’intérêt portés à ce sujet
s’articulent à trois niveaux :

Primo, sur le plan individuel : nous voulons faire comprendre au public ; pourquoi
l’action humaine dans les problèmes écologiques s’avère un enjeu important. Même si celle-
ci (action) d’une certaine manière posée consciencieusement et éthiquement est de nos jours
une question personnelle, chaque individu a une part pour sauver cette humanité. L’intérêt est
animé par les inquiétudes qui sont questionnées de part et d’autres dans les grands débats qui
cadrent avec l’avenir de l’humanité. La question de la vie sur terre est une urgence collective.

Secundo, sur le plan scientifique : sachant que notre travail s’inscrit dans un monde
universitaire, notre intérêt et choix portés sur ce sujet sont ceux de présenter la face
écologique de Michel Serres aux dépens de sa casquette d’épistémologue. Notre intérêt est

8
celui de voir le lieu privilégié où l’humain intervient dans le débat écologique. Car,
l’entreprise écologique à laquelle nous nous intéressons présente une autre manière de
concevoir la relation Humain-nature.

Tertio, sur le plan social : le choix et intérêt sur ce sujet tiennent place dans la société
où nous vivons. Aujourd’hui, notre société fait face à de nombreuses crises. Notamment la
crise financière, économique, politique, écologique. L’intérêt vise à aider l’humain à prendre
conscience des actes qu’il ne cesse de poser à l’égard de ses semblables dans la nature. Aider
notre société à être responsable vis-à-vis de son environnement, sa biodiversité : sa nature.

0.3. ETAT DE LA QUESTION

Cette étude s’inscrit dans un espace des textes par rapport auxquels nous nous
efforçons de déployer une double stratégie épistémologique, à savoir la différenciation et la
distanciation.

Nous énonçons notre hypothèse par rapport à quelques travaux réalisés sur Michel
Serres et sur la théorie écologique. L’état de la question proposé renseigne donc sur l’état des
connaissances par rapport à notre objet d’étude.

Notre étude relève de la philosophie anthropologique, voire écologique de Michel


Serres. Plusieurs travaux ont été réalisés sur cet auteur dans différents domaines, tels que la
littérature, la philosophie de la nature, l’épistémologie, la théorie de la connaissance, la
sociologie, la méthodologie des sciences, etc. Parmi ceux qui ont travaillé sur lui au sein de
notre Faculté, voire au département, il faut citer : Bruno Ciey, L’alliance homme-nature dans
« le contrat naturel » de Michel Serres. Travail de Fin de Cycle présenté et défendu durant
l’année académique 2013-2014. Ce travail a été dirigé par le Chef de Travaux Jean-Hilaire
Ilunga. Dans ce travail, Bruno Ciey analyse le contrat naturel comme une implication
responsable de l’homme et maintien de l’équilibre entre l’homme et la nature. Avant d’arriver
à une telle conclusion, il part de l’analyse du concept nature dans différentes conceptions
pour aboutir à l’idée du contrat comme terme d’alliance entre l’homme et la nature.
Cependant, cette alliance a pour finalité un écodéveloppement intrigant les valeurs humaines
et celles du monde. Dans ce travail, le contrat est synonyme de la réconciliation. Bruno Ciey
développe la notion du contrat naturel dans un angle purement écologique.

Jean Kamonde Namumba, La sauvegarde de la nature dans le contrat naturel de


Michel Serres. Travail de Fin de Cycle présenté et défendu durant l’année académique 2020-

9
2021. Dirigé par le Chef de Travaux Gilbert Ruboneka. Dans ce travail, il est question du
contrat naturel en tant que réponse aux conséquences écologiques. Le contrat est principe de
sauvegarde de la nature. L’auteur met l’hypothèse selon laquelle le contrat est le seul moyen
pour que la nature soit sauvegardée. Cette hypothèse signifie en d’autre terme que la
résolution des conflits entre l’homme et la nature est faite grâce au contrat. Ainsi, le contrat
est centre de tout. Dans ce travail, l’homme est le seul être dévastateur de la nature. Et il est
aussi le seul à passer ce contrat.

Jean-Pierre Songolo Kiwelewele, Contrat naturel chez Michel Serres. mémoire de


l’année académique 2008-2009. Dirigé par le professeur Joseph Mabika. Jean-Pierre Songolo
pour sa part analyse le contrat dans son ensemble. Il part d’abord de l’idée d’un contrat
juridique, social et naturel. Il soulève les théories du contrat telles que la dimension
métaphysique du contrat, la conscience et la reconnaissance. L’ensemble de son travail
montre comment le philosophe Français arrive à proposer le contrat naturel dans le domaine
de l’écologie. Il est parti de l’hypothèse selon laquelle, le contrat est un principe fondamental
unissant l’homme et la nature, mais celui-ci relève d’abord de la conscience des individus.

Par ailleurs, notre étude, tout en partageant quelques similitudes avec celles de ces
derniers, s’en démarque, dans la mesure où elle vise à enrichir et analyser dans le cadre de
l’écologie, la part qui revient à l’humain lorsqu’il s’agit des problèmes écologiques. La
démarcation de notre mémoire par rapport aux trois autres est que, nous n’analysons pas
seulement dans notre travail la notion du contrat naturel, mais bien plus la pensée écologique
de Michel Serres. Autrement dit, le contrat naturel est un des éléments qui sera traité dans la
mesure où celui-ci répond en fait à notre problématique. Notre part d’orientation se focalise
sur les théories de notre auteur sur la question de l’écologie. L’originalité en premier lieu de
ce mémoire est celle d’attribuer à l’humain sa part de responsabilité lorsqu’il s’agit des
problèmes écologiques tels que le réchauffement ou changement climatique. En second lieu,
c’est conscientiser l’humain dans ses actions en lui montrant l’origine des évènements
écologiques dans l’histoire afin qu’il trouve une solution adéquate. Notre étude se veut aussi
différente de ceux de nos prédécesseurs, en ceci que la critique de la part de l’humain dans les
problèmes écologiques chez Michel Serres, qui se pense à l’horizon de l’« épistémologie »4

4
Ce lexique décrit le projet global de Michel SERRES en ce qu’il donne à voir, dans son épistémologie, la
volonté de considérer l’encyclopédie ou la totalité des savoirs comme un ensemble non référé mais
communicant avec « le monde des choses et le monde des hommes ». Or on retrouve là les trois transcendantaux
qui sont, pour l’auteur, la totalité du réel, les trois champs à connaître pour philosopher, la condition à l’exercice
épistémologique. Exercice qui vise d’abord à débusquer les formes de pensée archaïques dans les philosophies

10
promue par Michel Serres, nous servira de prétexte pour penser le devenir de l’humain dans
le contexte de la mondialité.

0.4. PROBLEMATIQUE

Quelle est la part de l’humain dans les problèmes écologiques selon Michel Serres ?
Cette question en apparence simple ne peut recevoir une réponse claire et rapide. D’entrée de
jeu, dans sa randonnée existentielle, l’humain est une entité consciente ; un être conscient qui
se rapporte à l’espèce comme à sa propre nature comme un être sociable et social. L’animal
produit aussi, entre autres, la construction de son habitation, mais la production animale est
seulement immédiate. Tandis que l’humain, bien qu’animal, son produit est universel. Libéré
du produit physique, il ne produit que lorsqu’il est en liberté, il produit toute la nature.
L’humain se dresse librement face à son produit, il ne crée qu’à la mesure de toutes les
espèces et non pas selon les besoins de son espèce comme c’est le cas de l’animal privé de
liberté.

Ce faisant, la crise écologique globale qui frappe la planète Terre depuis le XXe siècle
jusqu’aujourd’hui s’est rapidement accompagnée de deux discours : d’une part l’injonction à
protéger notre environnement. Et d’autre part, des constats apocalyptiques ou triomphants
sur, au contraire, la dégradation de la nature. Cette crise fait en sorte que, le réchauffement
climatique mondial modifie la manière de vivre dans la société actuelle.

Cependant, c’est vers la deuxième moitié XXe siècle qu’on peut à proprement évoquer
d’une conscience écologique générale dans le monde. Et celle-là suite aux effets inattendus
enregistrés dans le monde (l’accélération de la désertification, les pluies acidiques, le
réchauffement climatique, etc.). Le fait d’agir de l’humain sur la nature a en retour modifié
les écosystèmes. Selon ce que pense Georges Perkins : « l’action humaine a été ou pourrait
être le plus préjudiciable ou le plus profitable dans son influence sur les conditions physiques
de la terre que nous habitons5 ».

La question élucidée ci-haut en apparence simple ne peut recevoir une réponse claire
et rapide. En effet, de nos jours, sur les réseaux sociaux, dans les chaînes de télévision ou

et les savoirs, et qui le mènera à écrire qu’ « il n’y a de mythe pur que le savoir pur de tout mythe » Michel
SERRES, Hermès III. La traduction, Paris, Éditions de Minuit, 1974, p. 259. Or, si cela tient à la structure du
point fixe, alors il devient bel et bien urgent, aux yeux du philosophe, d’élaborer une pensée décentrée, que l’on
retrouvera aussi bien dans son épistémologie que dans son éthique, et, plus largement, dans la tâche qu’il
[Michel SERRES] assigne au philosophe.
5
George Perkins MARSH, « l’homme et la nature, ou la géographie physique telle modifiée par l’action de
l’homme 1864 », in La pensée écologique. Une anthologie, Paris, Éd. P.U.F, 2014, p. 67.

11
dans les débats mondiaux, il ne se passe pas une journée sans qu’on évoque la question de la
crise écologique, de la crise environnementale, du réchauffement climatique, des érosions, de
l’extinction des espèces, l’effet de serre, de l’acidification des océans, etc., Ces phénomènes
inquiètent l’humanité en général et l’humain en particulier. Ces situations d’inquiétudes
obligent à repenser la question écologique autrement. Repenser le lien qui unit l’humain au
reste de la nature, ses actions et activités, sa relation et son avenir. Sans doute, l’humain est
produit de la terre, sans elle sa vie est en danger. C’est pourquoi, il ne peut que bien gérer la
nature. Sa mauvaise gestion est l’élément accélérateur de toutes les crises qu’il subit
aujourd’hui. D’où la responsabilité lui est imputée d’être le prédateur. Il doit pouvoir arriver à
comprendre et briser son opposition avec les restes du monde. Le conserver, le protéger et
entrainer de bonne relation, parce que sans ceux-ci, il est condamné à disparaitre.

Par ailleurs, depuis, le progrès de la science et technique, l’humanité est en péril. Ceci
suscite plusieurs inquiétudes et place l’humain devant une problématique incessante. Cette
problématique est liée à sa survie. Par soif d’être maitre et possesseur, d’être le centre du
monde, par la croissance de son économie, il se crée de problèmes très aigus. Ainsi, la
question pendante et dominante reste celle de savoir : que doit-il faire pour atténuer tous ces
problèmes ?

De plus, nous vivons une période critique et incertaine. Période fissurée par les
idéologies capitalistes, technophiles et politiques. Cet ensemble provoque de nombreux
problèmes, des crises au point où il est difficile de voir les perspectives et alternatives
qu’elles présentent. Cependant, tous ceux-ci constituent ce qu’on appelle : problèmes
écologiques. Ces problèmes s’articulent entre l’humain et la nature, la relation qu’ils
entretiennent n’est plus celle d’avant où l’humain se sentait fils de la terre. Autrement dit,
l’humain et son rapport au monde. Delà se pose une question : comment l’humain entretient-
il sa relation avec la nature ?

La soif d’être puissant dans la nature engendre en l’humain le désir de tout saisir au
point où il veut créer sa propre tombe parce qu’une fois détruire la nature, les êtres vivants
dépendent d’elle disparaitront avec elle. Chose que l’humain doit pouvoir éviter. Michel
Serres propose dans le contrat naturel que l’humain pour survivre doit pouvoir passer un
accord, un contrat. Sur ce, nous nous posons de questions suivantes : Quelles sont les causes
des problèmes écologiques ? Quelles sont les conséquences qui en découlent et comment les

12
éviter ? Telles sont les questions qui nous serviront de balise et étayeront le reste de notre
investigation.

0.5. HYPOTHESE DU TRAVAIL

Notre première préoccupation consiste à nous interroger sur la part de l’humain dans
les problèmes écologiques. Il appert que les différentes crises qui s’annoncent un peu partout
dans le monde montrent que l’humain n’est pas en bonne relation avec la nature en général et
l’environnement en particulier. Sur ce, il est important de repenser notre relation avec les
autres êtres de la nature. Bien plus, étant donné que l’humain est victime de ses propres
actions cela signifie qu’il est à l’origine de sa propre destruction, alors il lui revient de
prendre conscience de ses actes. Sans cette conscience, il sera toujours en difficulté ou
danger. Les conséquences écologiques n’épargnent aucun vivant. Tous sont cernés, voilà
pourquoi il serait important d’être conscient de la réaction de la nature. La conscience est le
mobile de la responsabilité vis-à-vis de nous-mêmes et de l’autre.

Du coup, il serait important de préconiser des mécanismes permettant à l’humain


d’être en bonne relation avec la nature. Bien des auteurs ont proposé des théories quant à
cela. Il apparaît que dans la postérité hansienne la théorie pour sauver la nature et les vivants
serait celle du principe responsabilité, cette expression permet à notre auteur de penser et de
donner à comprendre la dimension complexe de l’humain la théorie qui permettrait d’atténuer
les problèmes écologiques serait le contrat naturel. Par contrat naturel, les humains sont
partenaires avec le reste de la nature. Ce contrat permettrait à l’humain d’entretenir un
nouveau rapport avec la nature. Ce rapport portrait à l’humain de sauver son espèce et celle
des autres. Ainsi, les problèmes écologiques seraient résolus. Mais si les rapports entre
l’humain et la nature restent tendus, alors les différentes catastrophes ou conséquences
écologiques continueraient. C’est pourquoi, il est important que les humains sachent quoi
faire pour être en sécurité.

En par rapport à notre problématique, voici comment se formule notre hypothèse : Si


l’humain est la solution par laquelle la crise écologique pourrait s’atténuer, alors, il doit
être conscient et responsable des actes qu’il pose vis-à-vis de cette la planète. Pour
sauver la nature, l’humain doit la considérer comme un sujet ayant des droits. Et face à
ces effets inhabituels que nous enregistrons partout dans le monde ; le contrat avec la
nature est notre chance pour survivre, quoi qu’il reste vrai que la part de l’humain est de
revenir vers la nature comme partenaire fiable.

13
0.6. DELIMITATION DU SUJET
Le présent travail est orienté en philosophie des sciences, mais spécialement en
écologie. A cet effet, la part de l’humain dans les problèmes de la crise écologique selon
Michel Serres ne se limite pas seulement en philosophie, mais aussi dans les domaines des
sciences de l’environnement comme l’agronomie, zoologie, la géologie, etc. Pour le
délimiter, le nôtre s’inscrit dans la perspective épistémologique, c’est-à-dire discourir sur
l’écologie, mais au second degré ou langage. Ce qui veut dire réfléchir et discourir autrement
sur ce que les autres ont dit en matière de la protection de notre maison commune (nature).

Cependant, en ce qui nous concerne le nôtre se démarque des autres travaux en ce


sens qu’il analyse la partie assignée à l’humain dans les problèmes écologiques. Autrement
dit, il reproche l’humain en tant que responsable, à l’instar des autres actions non-humaines
considérées parfois naturelles. Cette démarcation, nous la tirons dans les ouvrages de notre
maître à penser.

0.7. METHODES DE RECHERCHE

Pour mener à bon port nos recherches dans ce domaine, et au regard des exigences de
celle-ci, nous optons pour la méthode herméneutique assortie d’une approche critique. La
nature de notre objet d’étude détermine en fait la méthode à utiliser. Surtout comment
pouvons-nous arriver à comprendre, sans herméneutique, une œuvre reconnue pour son
caractère ostentatoirement cryptique ? L’herméneutique et la critique nous permettent de
saisir et d’articuler des considérations critiques sur l’idée serrésienne de la part de l’humain
dans les problèmes écologiques, d’en montrer la portée et les limites philosophiques.

Par recours à la méthode herméneutique comme « Corinthe », où se rencontrent des


énigmes complexes, des articulations et positions aussi bien contradictoires que
complémentaires, nous pensons entrer dans la pensée de Jean Greisch par le triple arsenal
herméneutique, lequel est composé de lire, interpréter et comprendre6. Nous ne pouvons pas
lire, interpréter et comprendre sans ce regard critique. Aussi faut-il emprunter la plume de
Hans-Georg Gadamer qui épingle qu’« il se produit […], en toute lecture, une application, si

6
Jean GREISCH, Entendre d’une autre oreille. Les enjeux philosophiques de l’herméneutique biblique, Éd.
Bayard, 2006.

14
bien que quiconque lit un texte est lui-même intégré au sens appréhendé. Il appartient lui-
même au texte qu’il comprend »7.

0.8. DIVISION DU TRAVAIL


Hormis l’introduction et la conclusion générales, notre étude est divisée en quatre
chapitres. Le premier présente les causes profondes à l’origine des problèmes écologiques. Il
est question d’enquêter sur les origines qui ont causées la crise écologique en général. Le
deuxième traite la problématique du progrès technique, capitalisme et leurs conséquences
écologiques. Dans ce chapitre, il est question d’énumérer les différentes conséquences de la
crise écologique émanant du progrès technique et développement économique. Le troisième
nous permet de connaitre l’écologie du contrat ou du sujet de droit. Dans ce chapitre, il est
question de l’introduction de la notion du contrat naturel comme acteur principal capable de
réconcilier l’humain et la nature. Le quatrième et dernier chapitre intitulé : approche critique
de l’écologie du sujet de droit présente des analyses critiques de la pensée de Michel Serres.
Ces analyses sont faites de deux manières : positive et négative. Ce chapitre présente notre
compréhension du travail.

0.9. NOTICE BIOGRAPHIQUE8


Michel Serres est né le 1er septembre en 1930 à Agen (Lot-et-Garonne, France).
D’origine française, il est le fils de Jean, dit Valmy Serres, batelier sur la Garonne. Il reçoit
une éducation catholique et pratique le scoutisme en France qui le totémisent Renard
enthousiaste. Il est reçu en 1949 à l’École navale, dont il démissionne peu après, pour
préparer dans un lycée parisien le concours de l’École normale supérieure, où il est reçu en
1952. Il soutient un Diplôme D’études Supérieures au sujet des structures algébriques et
topologiques avec Gaston Bachelard, puis est admis 2e ex aequo à l’agrégation de
philosophie en 1955. De 1956 à 1958, il fait son service militaire comme officier dans la
Marine nationale. Il est le père de quatre enfants, dont Jean-François Serres, un temps
délégué général de l'association Petits Frères des pauvres.

Michel Serres réalise une carrière universitaire, d'abord à l'université Blaise-Pascal,


où il fréquente Michel Foucault et Jules Vuillemin. Ils confrontent alors régulièrement leurs
idées et points de vue sur des thèmes qui prendront corps dans le livre Les Mots et les Choses.

7
Hans-Georg GADAMER, Vérité et méthode. Les grandes lignes d’une herméneutique philosophique, Ed.
Seuil, 1996, p. 362.
8
[Enligne] https://fr.m.kikipédia.org/biographie-Michel-Serres (Page consultée le 10/03/2023 à 14h07’).

15
Il est ensuite nommé à l'université Paris-VIII, où il participe brièvement à l’« expérience de
Vincennes ». En 1968, il soutient une thèse de doctorat de lettres, intitulée Le Système de
Leibniz et ses modèles mathématiques, et est nommé en 1969, professeur d’histoire des
sciences à l’université Paris 1 Panthéon-Sorbonne. Il enseigne également aux États-Unis,
d'abord à l'université Johns-Hopkins, à Baltimore, à l'invitation de René Girard, puis il suit ce
dernier à l’université Stanford, où il est nommé professeur en 1984.
Ses œuvres :
Serres Michel, Morales espiègles, Paris, Éd. Pommier, 2019.
IDEM, C’était mieux avant, Paris, Éd. Le Pommier 2017.
IDEM, Le temps des crises, Éd. Pommier, 2009.
IDEM, Hominescence, Paris, Éd. Le Pommier, 2001.
IDEM, La légende des anges, Paris, Éd. Flammarion, 1993.
IDEM, Le tiers-instruit, Paris, Éd. François Bourin, 1991.
IDEM, Contrat naturel, Paris, Éd. François Bourin, 1990.
IDEM, Les cinq sens, Paris, Éd. Grasset, 1985.
IDEM, Hermès I. La communication, Paris, Éd. Minuit, 1984.
IDEM, Genèse, Paris, Éd. Grasset, 1982.
IDEM, Le parasite, Paris, Éd. Grasset, 1980. etc.

0.10. DIFFICULTES RENCONTREES


Les recherches et la rédaction de ce mémoire n’ont pas été aussi simples. En général,
nous avons été confrontés à des difficultés. La première difficulté est liée aux ouvrages de
l’auteur. Nous n’avons pas pu accéder à tous les livres de notre auteur parce que les
bibliothèques que nous avons fréquentées n’en possèdent pas assez. Il n’était pas facile de
trouver certains livres de notre auteur où il développe davantage les idées sur l’écologie. La
deuxième difficulté est en rapport avec la langue, il y a des livres de notre auteur qui sont en
anglais. Notre auteur a longtemps enseigné dans le monde anglophone que francophone.
Beaucoup de ses idées sont bien comprises dans le contexte anglophone. De notre côté, par
manque de n’est pas asseoir convenablement la langue anglaise, il nous a été difficile de bien
comprendre certains termes d’origine anglaise. La troisième difficulté est liée au style
qu’emploi l’auteur. Michel Serres a un style poétique, sa manière d’écrire oblige au lecteur
d’être suffisamment instruit sur la poésie et autres genres littéraires. Ses textes ont par
moment un langage historique, c’est-à-dire il faut savoir un peu d’histoire, de la mythologie,
etc.

16
CHAPITRE PREMIER : LES CAUSES PROFONDES DES
PROBLEMES ÉCOLOGIQUES

II.0. INTRODUCTION

De nos jours, il est impossible de passer sous silence les problèmes écologiques entre
autres : réchauffement climatique, déglaciation, extinctions des espèces vivantes, l’émission
des gaz toxiques, etc. connaissent une crise. La plupart des gens discutent là-dessus et à un
certain niveau. Les problèmes écologiques sont devenus une urgence humanitaire. Cette
urgence exigence un comportement responsable, le retour à un retournement aux choses
monde. Ainsi, pour bien orienter le débat, il est impérieux de connaitre les causes profondes
de ces problèmes, puisqu’elles sont à l’origine de nombreuses catastrophes écologiques. La
question reste à savoir par où devrions-nous commencer ?

Il s’avère que les problèmes écologiques ont une origine assez lointaine par rapport à
notre époque. Cette origine est liée non seulement de manière directe aux activités humaines,
mais aussi de manière indirecte aux évènements naturels de la terre. Pour ce qui concerne les
activités humaines, nous voyons au préalable les pensées et croyances humaines produites par
certains humains dans l’histoire. Leurs influences ont fini par se construire en des idéologies.
Ces idéologies sont précurseures de la nouvelle conception de la nature. Cette conception
engendre de nos jours des conséquences inédites. Voilà pourquoi, face à ces conséquences
inédites, il est important de décrypter ces activités et idéologies depuis la source pour
chercher comment atténuer ou stopper les dégâts. Au courant de l’histoire, il y a eu
différentes visions du monde telles qu’elles émergent. Ces visions ont influencé la manière de
considérer la nature, d’agir ou de penser sur elle. Elles ont fait de la nature une propriété
privée de l’humain dans laquelle, celui-ci est maître de tout.

Nonobstant, nous sommes sans ignorer que la planète terre dans son fonctionnement
et organisation est à l’origine des perturbations chez les vivants. Ces dernières sont à faible
pourcentage des problèmes écologiques. Tous ces phénomènes épinglés constituent notre
objet d’étude dans ce chapitre. C’est pourquoi, nous analyserons les causes profondes à
l’origine de la crise écologique.

Précisons ici que ce chapitre traite et analyse certaines données historiques de la


philosophie, de la science et des évènements pour desceller quelques racines et idées qui ont
servi de soubassement à la crise écologique et dont nous subissons les conséquences

17
aujourd’hui. La mission du chapitre est de découvrir les socles de cette tragédie humanitaire
que les vivants traversent pendant ce siècle. Ajoutons à ceci que, pour arriver à réduire cette
crise globale, il est toujours important d’examiner avec finesse la perspective historique
lointaine des évènements de la terre et les présupposées qui ont fondé de ladite crise.

C’est pourquoi, en premier lieu, nous analyserons les phénomènes naturels de la terre.
En second moment, il sera question des visions du monde à l’origine de la crise écologique.
Ainsi, la première démarche du chapitre consiste à analyser les phénomènes naturels de la
terre. Ceci parce qu’au-delà des activités humaines (conception et visions), la terre est à
l’origine de certains bouleversements qui engendrent des crises çà et là. Ces bouleversements
sont des faits à ne pas banaliser. Dans le second moment, nous analyserons les idées de
certains auteurs philosophes et scientifiques qui ont contribué à la dépréciation de la nature
comme objet (chose), que nous qualifions de mal ou racine lointaine de la crise écologique :
l’anthropocentrisme moderne comme socle du développement technique et économique.
Signalons que dans la conclusion partielle, il y aura l’analyse critique du chapitre.

En outre, avant de commencer la première section du chapitre, définissons trois


concepts fondamentaux selon Michel Serres à savoir : nature, écologie et problème ou crise
écologique. Le premier est la nature. Étant un ensemble d’un tout contenant divers éléments
et dont les éléments sont en interdépendances les uns des autres. Il le dit en ces termes :
« aujourd’hui la nature se définit par un ensemble de relations, dont le réseau unifie la terre
entière ; le contrat naturel connecte en un réseau le second au premier 9». Sa définition inclut
les êtres animés et inanimés : « l’eau, le feu, la terre, flore et faune, l’ensemble des espèces
vivantes […] ce pays archaïque et nouveau, inerte et vivant10 ». Il considère la nature comme
un sujet de droit, une mère porteuse. Qu’il désigne par moment comme : monde, nature et
Terre.

Le second concept est l’écologie11. Michel Serres définit l’écologie comme la science
qui : « s’occupe des choses du monde12 ». Cette science « parle des choses du monde et les
sociétés des sociétés13», autrement dit l’écologie s’occupe de discourir sur les êtres vivants et
leurs habitats. En d’autres termes, l’écologie dit « le monde, non plus comme des choses

9
Michel SERRES, Le contrat naturel, Paris, Éd. Flammarion, 1992, p.72.
10
IDEM, Temps des crises, Paris, Éd. Le Pommier, 2009, p. 39.
11
Le terme écologie créé en 1866 le biologiste allemand du nom d’Ernest Haeckel (1834-1919). Du grec :
« oïkos- οικοζ : habitat, maison, etc. et « logos : discours, science, étude, etc. Sans doute, l’écologie se définit
comme étant la science de l’habitat.
12
Michel SERRES, Op. Cit., p. 47.
13
Ibidem, p. 46.

18
locales, mais comme partenaire globale… [Elle dit] aussi que le monde dit14 ». A cet effet,
l’écologie est la science de la vie et de la terre15 (SciViTe16) : vie comme vivant et terre
comme habitat. Science qui dit des choses du monde et dit ce que ces choses veulent nous
dire en retour. Pour Ernest Haeckel l’écologie est « la totalité de la science des relations de
l'organisme avec l'environnement, comprenant au sens large toutes les conditions
d'existence17 ».

Le troisième terme, il s’agit de la Biogée. Michel Serre l’avait introduit pour


expliquer l’institution à la lettre mondiale : eau, air, feu, terre et vivants. Ces éléments sont le
représentant de la biogée en tant qu’institution. Il s’agit de la vie et de la terre. Ce concept
signifie la symbiose entre les humains et le monde.18L’auteur affirme :

La biogée comprend, en effet, le monde et les humains, sujets ensemble et


objets de cette science et exprimant, dans une langue commune, leurs
soucis communs en la WAFEL.19
Il se conçoit en quelque sorte comme un concept démocratique, parce qu’en lui il y a
aucune maîtrise, ni domination n’existe. C’est de l’interconnexion et interdépendance. Une
égalité démocratique. La biogée à comme science la SciViTe (sciences de la vie et de la
terre). Le quatrième concept, c’est la crise ou problème écologique. Le mot crise d’après
Michel Serres, « vient du grec, crinô, justement, signifie juger20». Il est cette appréciation de
jugement. Appréciation qui dit si l’idée est bonne ou mauvaise. Cela dit, le terme crise dans la
philosophie serrésienne désigne une critique à l’égard d’un fait, situation, etc. Au fond avec
notre auteur la racine du terme crise désigne un tribunal du jugement. C’est pourquoi, « le mot
crise laisse voir son origine juridique […] il s’agit d’une décision prise par un jury et par son
président21 ». De la racine latine, la crise est comprise comme la décision provenant du jury.
Cette décision qui a coupé court et en deux un problème survenu. Dans le cas qui nous
concerne où nous présentons la crise écologique, celle-ci (la crise), désigne « l’état d’un
organise [espèces] confronté à la croissance d’une maladie… 22», ou autre situation que la
maladie, mais qui rend un jugement désagréable et calamiteux. La crise écologique est la

14
Michel SERRES, Temps des crises, Paris, Éd. Le Pommier, 2009, p. 47.
15
Ibidem, p. 62.
16
SciViTe veut dire selon Michel Serres : science de la vie et de la terre.
17
Ernest HAECHEL, cité par Patrick MATAGNE, « aux origines de l’écologie », in Innovation, Paris, De
Boeck, N°18, 2003, pp. 31-32.
18
Michel SERRES, Op. Cit., p. 42.
19
Ibidem, p. 62.
20
Ibidem, p. 7.
21
Ibidem, p. 7.
22
Ibidem, p. 8.

19
dégradation de la nature sous toutes ses formes : la pollution, le réchauffement climatique, la
déforestation, etc. Tous ceux-ci constituent et expliquent les problèmes écologiques.

Les problèmes écologiques sont des questionnements, des inquiétudes qui se posent à
l’ère actuelle au sujet de la nature comprise comme cadre de vie. Ils sont multiples. Il y a
ceux qui sont liés à l’environnement : la pollution de l’air, la crise de l’eau, le changement
climatique, l’épuisement des ressources, etc. Il y a aussi ceux qui sont liés aux espèces
vivantes : la disparition massive des espèces végétales et animales, l’épuisement de la
biodiversité, etc. Pour notre auteur, les problèmes écologiques se résument en une idée ou
conception ; celle qui considère la nature comme un objet ou une chose de sans valeur, avec
laquelle nous n’avons pas de compte à rendre.

I.1. LES PHENOMENES NATURELS DE LA TERRE

Tout au long de cette première section, nous discourons sur les phénomènes naturels
de la terre pour analyser les enjeux et effets que ces derniers ont eus sur la terre. Signifions
que les phénomènes naturels de la terre sont des événements qui ont une origine un peu plus
lointaine, que la crise actuelle. Mais, leur rythme était moins accéléré. C’est pourquoi, pour
les retracer il nous faut recourir dans le passé de la terre afin d’en examiner les conséquences.

Ce faisant, dans l’histoire de la terre il y a eu des évènements et phénomènes qui ont


causé d’énormes dégâts, extinction des espèces, des crises, etc. Selon Michel Serres, nous
devons remonter les décennies archivées ou des millénaires sans mémoire pour les
découvrir.23 Néanmoins, ces évènements, semblent-ils se produire de manière naturelle sans
qu’il y ait l’intervention de l’action humaine. De quoi s’agit-il ? D’un hasard produit dans la
nature ? Ont-ils eu des effets sur les vivants ?

Eu égard à ce qui précède, Alain Pavé explique que « les systèmes vivants sur terre
subissent des aléas environnementaux, qui peuvent les altérer et même qui risquent de le faire
disparaitre24 ». Ces évènements surgissent sur la terre, mais de manière aléatoire. Autrement
dit, il n’y a aucune réglementions et régularité qui les gèrent. Néanmoins, le grand danger est
qu’ils peuvent provoquer de perte et disparition dans le vivant. Cette disparition contribue
d’une certaine manière à la perte de certaines espèces vivantes sur terre. Ces dernières
(espèces) sont une richesse pour la planète.

23
Michel SERRES, Le contrat naturel, Paris, Éd. Flammarion, 1992, p. 10.
24
Alain PAVE, La nécessité du hasard. Vers une théorie synthétique de la biodiversité, Paris, Éd. EDP-
Sciences, 2007, p. 19.

20
En effet, dans le fonctionnement de la nature, il arrive des fois qu’un évènement se
produise sans qu’il y ait l’intervention de l’action humaine. Ces évènements sont qualifiés de
naturel, parce qu’il s’agit de l’auto-organisation de la nature. Néanmoins, cette explication a
été approuvée par le GIEC25 en date du mois d’août 2021 notant que l’humanité s’expose à de
multiples aléas climatiques inévitables26. Ces aléas sont une organisation du système de la
planète et de ses incidents.

Ajoutons à ce sujet l’idée du Pape François dans l’encyclique Laudato si’. Celui-ci
souligne que le changement de la nature fait partie de la dynamique des systèmes complexes
de la nature et dont la dynamique est un fait normal.27Ce fait ou changement se réalise de
manière lente. Le Saint-Père énumère dans les pages qui suivent les facteurs qui ne sont pas
liés directement à l’action humaine, mais sont à la base de certaines perturbations. Ces
facteurs sont tels que : le volcanisme, les variations de l’orbite et de l’axe de la terre, le cycle
solaire.28 Ainsi, soulignons qu’avant les deux dernières décennies ces facteurs sont connus et
sont causés par le phénomène dynamique de la terre.

De ce qui précède, nous avons affirmé, il sied maintenant de le démontrer. Pour ce qui
est du changement climatique par exemple, les scientifiques discutent beaucoup sur ce sujet.
Ils reconnaissent que le changement climatique a un double aspect : le premier est d’ordre
naturel et le second de l’action humaine. Certes, le premier aspect nous intéresse pour
l’instant. Cependant, Alain Grandjean atteste dans son article publié dans la revue Lumen
Vitae que « dans l’histoire de la planète, le climat n’a cessé de changer sous l’influence de
multiples déterminants29 ». Ces influences, ajoute-t-il, proviennent de l’organisation et du
fonctionnement de la terre : l’irradiance solaire, la distance de la terre-soleil, variation de
l’orbite terrestre, inclination de la terre sur son axe de rotation, dérive des continents,
volcanisme, émissions de méthane et oxygène par le vivant, capacité d’absorption des océans,

25
GIEC : groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat. Ce groupe est chargé d’évaluer
l’ampleur, les causes et les conséquences du changement climatique. Crée en 1988 par Bert Bolin et son siège
est à Genève. [Enligne]
https://fr.wikipedia.org/wiki/Groupe_d%27experts_intergouvernemental_sur_l%27%C3%A9volution_du_clima
t. (Page consultée le 02/09/2023’).
26
[en ligne] : https://news.un.org/fr/story/2022/02/1115262 (page consultée le 30/04/ 2023 à 07h50’).
27
PAPE FRANCOIS, Laudato si’. Sur la sauvegarde de la maison commune. Vatican, Éd. Liberia Vaticana,
2015, § 18, p. 17.
28
Ibidem, § 23, p. 20-21.
29
Alain GRANDJEAN, « les enjeux écologiques et leurs représentations », in Revue Lumen, Vol. LXXIII, N°4,
Bruxelles, Éd. UCL, 2018, p. 370.

21
etc.30 Tous ceux-ci prouvent à suffisance que la nature dans son fonctionnement provoque des
crises qu’on ne peut jusque-là mettre sous la responsabilité de l’humain.

En liaison avec ce qui vient d’être dit, Trinh Xuan Thuan dans un livre publié aux
éditions Fayard en 1998 « Le chaos et l’harmonie. La fabrication du réel » nous explique de
manière scientifique la question de l’histoire de la terre et ses évènements parfois drastiques
et hasardeux. Il dit : pour arriver à « expliquer les phénomènes naturels, il nous faut à la fois
découvrir les lois qui régissent le nécessaire et reconstruire les évènements fortuits31 ».

À cet effet, si nous rentrons à la racine de ces évènements, nous trouvons, que ceux-là
sont aléatoires, de la contingence. C’est par exemple, la problématique de l’inclination de la
terre. Nous savons qu’avec les données de la physique et de l’astronomie, la terre ne se tient
pas tout droit. Elle se pense d’un côté, tournant au plan zodiaque avec ces deux mouvements :
la rotation et la translation. Ces deux mouvements sont responsables du changement des
saisons et à la base du climat. Certes, l’axe de la terre par rapport au plan zodiaque s’incline
de 23,5°.32 Cette inclination a pour conséquence le changement de climat sur la terre, le
déplacement de certaines espèces. Comment cela est-il arrivé que l’axe de la planète soit
incliné ?

A cette question Trinh Xuan Thuan montre qu’il y a eu des collisions violentes entre
les planètes et les astéroïdes. Ceux-ci percutent une planète une fois sur son chemin.
Conséquence ; reversement et inclination d’un côté.33 Ce renversement et inclination causent
d’énormes dégâts sur la planète. C’est ce que d’ailleurs Alain Pavé note dans son livre au
sujet de la disparition de certaines espèces et les grandes extinctions, en l’occurrence les
dinosaures.34 Ces phénomènes sont des évènements très catastrophiques et leurs présences
ont comme conséquence sur les variations brusques dans la biodiversité. Une des premières
grandes extinctions enregistrées sur la terre est la disparition de dinosaures. Quant à la
variation de l’orbite terrestre, celle-ci est un fait important sur notre planète. D’ailleurs, c’est
Johannes Kepler en 1609 qui nous a éveillés à ce sujet. La distance qu’à la terre-soleil varie et

30
Alain GRANDJEAN, « les enjeux écologiques et leurs représentations », in Revue Lumen, Vol. LXXIII, N°4,
Bruxelles, Éd. UCL, 2018, p. 370.
31
Trinh XUAN THUAN, Le chaos et l’harmonie. La fabrication du réel. Paris, Éd. Fayard, 1998, p. 45.
32
Ibidem, pp. 44-45.
33
Ibidem, p. 47.
34
Alain. PAVÉ, Op. Cit., p. 27.

22
influe sur les vivants. Cette variation est d’un peu de moins de 1%35. Elle facilite la variation
de la température sur terre.

Qu’est-ce qui justifie tout ce mécanisme ? A cette question, Alain Pavé affirme : « les
aléas naturels sont engendrés par les dynamiques et les circumplanétaires physico-chimiques
[…] ou biologiques36 ». Il revient à l’humain d’en tirer conséquence à ce sujet. Si la terre
dans son fonctionnement est capable de lui faire du mal, il doit certainement éviter de
précipiter les événements naturels.

Que dit notre auteur à ce sujet ? Notons également qu’il ne rejette pas l’idée selon
laquelle, il existe des phénomènes naturels sur la terre qui ont causé des dégâts sur les choses
du monde (nature). Dans Le contrat naturel, celui-ci souligne que la nature (monde) est un
« système physique âgé de millions d’années, fluctuant et cependant relativement stable par
variations rapides, aléatoires et multiséculaires…37 ». Michel Serres reconnait les évènements
naturels catastrophiques et ceux-ci ont pour origine l’achèvement d’un cycle ou
l’organisation naturelle du monde. Sur ce point, le changement climatique, il pense que c’est
un phénomène rare avant l’ère où l’humain a commencé la chasse à la nature. Ce changement
ne doit pas nous inquiéter, parce que nous ne pouvons cependant rien faire à ces événements.
« Le système climatique varie de façon forte, mais cependant assez peu relativement invariant
par variations brèves ou lentes catastrophiques et douces, régulières, chaotiques. Donc les
phénomènes rares y frappent, mais ne doivent pas nous étonner38 », parce que c’est un
phénomène naturel.

Pourquoi ces évènements ne doivent pas nous étonner ? A ce sujet, Michel Serres
affirme : « Rien dans cet exemple que de naturel et nous ne pouvons rien39 ». Ce sont les lois
de la physique. La particularité avec ces évènements, ils sont rares. Mais ils créent des
perturbations dans la nature. De ce point de vue, nous ne pouvons pas imputer la
responsabilité à l’humain, car il ne s’agit pas de lui comme antécédent à ces évènements,
mais comme un agent sur une scène de crime qui constate les dégâts causés. Voilà pourquoi,
à un certain égard, renchérit l’auteur : « Il en est ainsi et cela dépend moins de nous que notre
héritage d’histoire40 ». C’est à l’histoire de la terre que revient cette responsabilité. Et c’est

35
Trinh XUAN THUAN, Le chaos et l’harmonie. La fabrication du réel. Paris, Éd. Fayard, 1998, p. 53.
36
Ibidem, p. 26.
37
Michel SERRES., Op. Cit., p. 55.
38
Ibidem, p. 17.
39
Ibidem, p. 7.
40
Ibidem, p. 19.

23
toujours à elle de nous informer ce que nous devons éviter pour ne pas tomber dans les
mêmes erreurs qui vont précipiter les vivants sur terre comme il y en a eu depuis le cambrien.
Pour Michel Serres, nous vivons et habitons « dans un monde livré aux aléas des évènements-
accidents, contingents et dangereux41 ».

Pourquoi les conséquences climatiques sont attribuées uniquement à l’humain alors


que nous venons de montrer qu’il y a des évènements naturels de la terre qui sont aussi à la
base de ces problèmes ? En effet, pour arriver à conclure que l’humain est le seul auteur
principal des problèmes écologiques, il faudrait en premier lieu comprendre que les
phénomènes naturels de la terre n’ont pas pour responsable les humains. Comme en témoigne
Alain Pavé, « les événements qui conduisent à des risques sont d’origine naturelle […]. On
connait leur existence, mais ils sont imprévisibles42 ». Sur ce point de vue, la responsabilité
de l’humain devient partagée. Il a une part qui lui ait réservée, puisque c’est difficile de les
prédire. Nous sommes gérés par la loi de la contingence.

Retenons que, les phénomènes naturels de la terre sont des évènements du hasard,
aléatoires causés par le fonctionnement et l’organisation de la nature (Terre). Néanmoins, ces
évènements sont à l’origine de certains problèmes écologiques, voire la disparition de
certaines espèces non encore connues par les spécialistes. Michel Serres ajoute à ce sujet que
ces phénomènes fussent rares car, ils sont liés à un moment au cycle de la terre ou du système
physique de la planète. Ils ne sont pas non à négliger, parce que leurs présences créent
d’énormes dégâts et sont aussi à la base de la destruction de la nature. Ici, la part et la
responsabilité reviennent à la nature elle-même, l’humain n’est qu’un agent qui constate le
fait. Est-il innocent ? Difficile de répondre directement à cette question. Voyons d’abord ce
que l’histoire de la philosophie et celle de la science racontent à ce sujet.

I.2. LES IDEOLOGIES PHILOSOPHICO-SCIENTIFIQUES DE LA NATURE


Le point précédant a fait l’objet des phénomènes naturels de la terre. Il résulte de
notre recherche que les problèmes écologiques n’ont pour antécédent l’humain. Il n’est pas le
seul acteur détracteur de la nature. Autrement dit, l’Univers dans son fonctionnement est
aussi à l’origine de certaines perturbations, qu’il y a des évènements et phénomènes
destructifs provenant de l’organisation et fonctionnement de la nature elle-même. Ces
phénomènes ne sont pas liés de près à l’activité humaine. Ce qui veut dire que, d’une part

41
Michel SERRES, Rameaux, Paris, Éd. Le Pommier, 2007, p. 33.
42
Alain PAVÉ, Op. Cit., p. 26.

24
l’humain est innocent de certains phénomènes qu’arrivent dans la nature. Et d’autre part, il
doit assumer sa responsabilité. Et Michel Serres souligne que face à ces phénomènes, nous
n’y pouvons rien parce que ça ne dépend pas de nous. A ce niveau la responsabilité revient au
fonctionnement et caractère dynamique de la terre.

Quelle est alors la part qui revient à l’humain par rapport aux problèmes écologiques ?
Michel Serres affirme que les grands bouleversements dont l’humanité fait face proviennent
des « recherches scientifiques et de ses applications43 ». Pourquoi ? s’interroge l’auteur.
« Les scientifiques ont donc déjà manifesté le pouvoir de transformer la face du monde et la
maison des hommes44 ». Quelle est cette responsabilité que l’humain scientifique doit-il
assumer ?

Pour arriver à montrer la responsabilité qui lui revient, revenons à l’histoire de la


philosophie et celle de la science pour découvrir les idées défendues par certains auteurs et
dont les idées ont amené les humains à concevoir les choses du monde (nature) autrement.
L’objet de ce présent point est de montrer comment certaines idées et conceptions des auteurs
ont contribué et constituent un point de départ de ce que nous appelons crise écologique.
Leurs pensées et idées ont fini par devenir une idéologie. L’idéologie qui sépare le sujet et
l’objet.

En effet, par leurs écrits, nous découvrirons leur manière de penser et concevoir la
nature. Pour ce qui est de la procédure, nous la présenterons en deux points : le premier est
celui des philosophes et le second pour les scientifiques.

I.2.1.1. Les idéologies philosophiques : l’empirisme et le rationalisme

Les philosophes depuis l’Antiquité cherchent à expliquer trois concepts


fondamentaux : Dieu, humain et monde. Parmi ces concepts, le dernier nous intéresse dans
notre travail. La question que les philosophes de l’Antiquité se sont posées, était celle de
savoir d’où vient le monde (nature) ? A cette question plusieurs philosophes ont essayé de
donner leur point de vue. A la période antique, l’origine de la nature est à chercher dans les
principes premiers (eau, air, feu, nombre, infini, etc.). Avec Platon dans Timé, la nature est le
produit d’un démurge créant le monde en référence du vrai monde idéel. Le statut de la
nature est renvoyé à la transcendance. Comme conséquence ; l’humain ne peut que voir une

43
Michel SERRES, Rameaux, Paris, Éd. Le Pommier, 2007, p. 57.
44
Ibidem, p. 58.

25
copie et non le contraire parce que son âme est prisonnière du corps. Aristote dira même que
la nature est cette chose à sa fin.

De plus, le Moyen-âge va rendre la nature un produit de Dieu, c’est-à-dire que, tout ce


qui existe dans la nature est le produit de sa création. La période médiévale va rendre la
nature en un élément dépendant de Dieu. Tout ce que l’humain doit expliquer, doit
correspondre à l’explication d’une nature créée par Dieu. Cependant, c’est à la renaissance
que les choses vont devoir être changées. Ici, on recherche la méthode qui conduit l’esprit
humain, à la connaissance du monde. Un renouvellement de la connaissance humaine pour
son bien. Cette méthode sera orientée vers les sciences de la nature. On expliquait alors la
nature partant du principe mathématique. C’est ce qui explique les grandes découvertes de
cette époque. Et c’est grâce à la physique que les temps modernes ont changé la perception de
la nature. Celle-ci va devenir une matière, une chose que l’humain doit soumettre et maîtriser
grâce à sa raison. Ne sachant pas ce qu’implique l’usage de la raison, les philosophes des
lumières ont fait de la raison une idée centrale ayant pour mission l’exploration de la nature
pour trouver toutes les réponses posées par l’Antiquité. Michel Serres dans Rameaux souligne
que les Lumières nous apprirent à respecter les lois de la nature. Françis Bacon va l’inaugurer
par l’empirisme et Descartes avec le rationalisme.

I.2.1.1.1. L’empirisme baconien

Francis Bacon hérite une culture selon laquelle le monde est un cosmos idéel, et
produit de la création de Dieu. Celui-ci évite de continuer une telle conception et épouse la
culture d’un monde ayant un ordre visible dans son ensemble, accessible de connaitre par
intuition. Grâce aux découvertes de la physique, les sciences commencent à s’émanciper des
explications métaphysiques. La tâche sera celle de découvrir les lois de la nature. De ce fait,
les sciences de la nature n’ont pas toutes uniquement le mouvement de la pensée orienté vers
le monde mais le milieu au sein duquel l’esprit acquiert la connaissance. Néanmoins, cette
connaissance est le fruit de l’intuition. Il s’agit alors de l’invention de la science
expérimentale qui doit être tournée vers le monde

De ce qui précède, Francis Bacon cherche dans sa philosophie à résoudre les erreurs
qu’il appelle Idole. Dans sa réflexion, il distingue quatre espèces d’idoles : la première est
celle qu’il appelle les idoles de la tribu. Autrement dit il les erreurs communes à tous. Cette
première espèce est commune à tout le monde par le fait qu’elle vient des défauts naturels liés
à notre esprit humain. La deuxième espèce est les idoles de la caverne. Ces idoles sont

26
particulières à chaque intelligence par le fait qu’elles tirent leurs origines dans les goûts, des
dispositions, de la tournure d’esprit propre à chaque humain. La troisième espèce d’idoles est
les idoles de forum. Cette espèce vient de l’emploi du langage. La dernière espèce ou la
quatrième est les idoles du théâtre. Elles viennent des erreurs inculquées à l’esprit par le faux
système des philosophes.45

Par la méthode inductive comme moyen pour arriver à la connaissance, il cherche à


les éliminer. C’est le travail qu’il expose dans la première partie de son livre : Novum
organon. La deuxième partie de son livre est consacrée à l’explication de cette méthode.
Cependant, celui-ci a été confronté à une alternative. D’un côté, il y a la science théorique et
de l’autre côté, il y a l’art qui est en effet la pratique. Son combat sera alors celui de vouloir
unifier la théorie à la pratique à travers une méthode scientifique. Raymond Matand explique
que, pour Francis Bacon, « la vraie science unit la théorie à la pratique46 ». La question de
fond sera celle de savoir pour quelle finalité ?

A cette question, Francis Bacon répond en ce sens : « le but de la science est double :
théoriquement c’est la découverte des lois de la nature ; pratiquement le développement de
l’industrie humaine47 ». Francis Bacon renvoie la réponse de la pratique dans la nature où
l’esprit humain doit découvrir les lois. En introduisant l’induction comme méthode en science
avec l’expérience comme base, celle-ci permet à l’esprit humain de questionner la nature. Un
renversement dans l’ordre de la pensée. La nature devient alors l’objet de toute connaissance
avec laquelle l’esprit humain doit trouver toutes les réponses. De quelle manière ? L’humain,
grâce à la science « doit apprendre à donner aux choses des propriétés nouvelles, et à
transformer les substances les unes dans les autres48 ». Par l’expérience, l’humain doit arriver
à maîtriser la nature afin d’être maître de cette dernière. Ce que la nature doit faire ; c’est
d’obéir.

De ce fait, pour l’esprit humain, la maîtrise de la nature est sa finalité. Conséquence ;


la nature devient l’objet à découvrir laquelle toutes les investigations sont autorisées. En
affirmant ainsi, Francis Bacon soumît la nature à l’esprit humain ou à l’humain. Comme en
témoigne Christophe Giolito, pour Francis Bacon, la connaissance ne vise plus la restitution

45
Francis BACON, Novum organum, Paris, Éd. Hachette, 1857, p. VII.
46
Raymond MATAND MAKASHUNG, l’homme et la nature. Perspectives africaines de l’écologie profonde.
Paris, Éd. L’Harmattan, 2019, p. 55.
47
Francis BACON, Op. Cit., p. VIII.
48
Ibidem, p. VIII.

27
d’une réalité disponible, mais elle est ordonnée à la production de résultats novateurs. 49Ainsi,
l’application de la science sur la nature devient une forme de domptions.

Quant à l’expérience qu’évoque Francis Bacon dans sa méthode, celle-ci se base sur
des faits à étudier. Ces faits proviennent de la nature que l’esprit humain doit explorer. Ceci
fait de l’expérience le tribunal de la nature. Elle questionne la nature et celle-ci doit donner
des réponses en rapport avec la question posée. C’est pourquoi, pour Francis Bacon, l’humain
en dehors de la nature « [il] ne sait et ne peut plus rien50 ». Il doit apprendre auprès d’elle
pour la soumettre afin de ne pas être ignorant. La démarche sera celle d’obéir à la nature en
premier afin de la triompher en second. C’est ce que lui-même dira par la suite : « on ne
triomphe de la nature qu’en lui obéissant51 ». Dans l’aphorisme 18, Francis Bacon attribue à
la science grâce à l’esprit humain de pénétrer les entrailles de la nature.

Soulignons le fait que l’expérience que propose Francis Bacon dans son livre est une
idéologie véhiculant un esprit de domination parce qu’elle n’est pas expérience pour savoir
ou connaitre, mais expérience-savoir ou connaissance pour agir sur la nature, pour se servir
d’elle, la conquérir et la transformer. Bref, pour rendre à l’humain un pouvoir. C’est
pourquoi, pour Francis Bacon, le vrai pouvoir est la connaissance de la nature. Une fois
connaitre ce que sont les lois de la nature, l’esprit humain acquiert le pouvoir sur elle et la
triomphe. A ce sujet Francis Bacon écrit :

Maintenant, nous devons en venir aux auxiliaires et aux rectifications de l’induction, puis
ensuite, aux natures concrètes, aux progrès latents, aux constitutions cachées et à tous les
autres sujets que nous avons proposés dans le vingt et unième aphorisme, pour que nous
puissions enfin (comme des curateurs probes et fidèles) confier aux hommes leur fortune,
après que leur intelligence aura été émancipée et sera en quelque façon devenue majeure ;
d’où résultera nécessairement une amélioration de la condition humaine et un accroissement
de son pouvoir sur la nature52 .
Pour ce faire, nous retenons que la nature est le lieu où l’humain doit tirer les faits
utiles pour son bonheur et le grandissement de son pourvoir sur elle. Apprendre de la nature
pour en faire d’elle la chose à dominer plus tard. Tel est l’objectif de la philosophie
baconienne ; inciter l’humain à connaitre pour agir et transformer. Hans Jonas le nomme par
programme baconien dans le sens où le savoir est orienté dans la nature. Ce dernier selon
Hans Jonas, consiste à « orienter le savoir vers la domination de la nature et utiliser la

49
Christophe GIOLITO, Comprendre l’histoire de la philosophie, Paris, Éd. Armand Colin, 2008, p. 20.
50
Francis BACON, Op. Cit., p. 7.
51
Ibidem, p. 7.
52
Ibidem, p. 215.

28
domination sur la nature pour l'amélioration du sort humain53 » Cette philosophie sera plus
tard récupérée par d’autres philosophes. Adrien Lentiampa souligne que Francis Bacon
promeut un monde où l’humain est le centre et il n’a qu’un seul objectif, celui de connaitre les
causes, les mouvements et les vertus secrètes que la nature renferme en elle-même.54

Le fait de triompher de la nature, donne à l’humain le pouvoir de la destruction, de la


domination et de l’objectivation de la nature. Par « la croissance de nos moyens rationnels
nous entraîne, à une vitesse difficile à estimer, dans la direction de la destruction du
monde55 ». Le vouloir connaître entraîne la destruction du monde. Dans ce contexte, la
connaissance n’est plus connaissance mais, moyen d’appréhender les choses du monde par
l’agir transformateur. Le problème que pose Francis Bacon pour Michel Serres est celui de
droit de propriété. Francis Bacon a fait de la nature une propriété privée de l’esprit humain et
de la science. Seul l’humain décide du sort de la nature, après avoir appris de cette nature tout
ce qu’il avait besoin, il s’érige en pouvoir.

De plus, Michel Serres ajoute dans Le contrat naturel que la recommandation de cette
philosophie est celle de « dominer, mais aussi posséder56 » les choses du monde. Cette
recommandation constitue un mal dont il faut briser le cordon et libérer la nature de ces
présupposés dévastateurs. Du fait que l’humain imite la nature par l’apprentissage des lois, en
revanche la finalité de cet apprentissage, lui conduit à la domination qui l’emporte sur la
nature jusqu’à la destruction. Notre maître à penser ajoute que le souci de la domination de la
nature depuis Francis Bacon est conduit par la libido sciendi. Cette libido est le plaisir du
savoir et fonde la libido dominadi ; c’est-à-dire le plaisir de la domination. Une domination
dévastatrice des choses du monde.57Le vouloir connaitre conditionne le monde à la
soumission et octroie le pouvoir à l’humain.

Notons que la tâche de l’applicabilité recommandée par Francis Bacon dans son livre
n’a pas été effective. Il souligne en toute honnêteté que « notre méthode […] est aussi facile
de l’indiquer que facile de la pratiquer58 ». Comme le dit aussi Raymond Matand : « Bacon a
eu clairement conscience de sa vocation […] il était armé d’une méthode qu’il croyait capable

53
Hans JONAS, Principe responsabilité. Une éthique pour la civilisation technologique, Paris, Éd. Cerf, 1990,
p. 192.
54
Adrien LENTIAMPA, « écologie et vie. Une lecture de Laudato si’ dans le perspective africaine », in revue
Congo-Afrique, Kinshasa, Éd. C.E.P.A.S, N° 569, Novembre, 2022, p. 1126.
55
Michel SERRES, Op. Cit., p. 32.
56
Ibidem, p. 59.
57
Ibidem, p. 96.
58
Francis BACON, Op. Cit., p. 2.

29
de rénover la science, même s’il n’a fait lui-même aucune découverte, et que les règles de son
induction étaient stériles59 ». Pourquoi cet échec, nous répond Michel Serres, « après lui avoir
ainsi obéi, comme le dit Bacon, […] elle falsifiera seulement la théorie60 ». La nature a un
caractère indéterministe, elle varie toutes les fois qu’elle en a besoin. Voilà pourquoi, les
sciences expérimentales font de détour.

Retenons que Francis Bacon a réfléchi et a donné la voie à toutes les sciences
expérimentales d’investiguer la nature. À ce propos, Donald Worster ajoute, que nous
sommes en face d’une « inéluctabilité de la domination de la nature par la raison [humaine, la
science et] sa désacralisation et sa matérialisation, jusqu’à l’industrialisation récente de la vie
elle-même61 ». Son héritage scientifique est devenu à un moment donné une voie à suivre
pour agir et transformer le monde. C’est pour cette raison que nous avons intitulé ce sous
point : l’idéologie baconienne. Les sciences modernes vont faire de la nature un objet
d’expérience et d’interprétation malgré les maux causés à partir de la pensée de Francis
Bacon. Celui-ci a laissé un credo pour ses descendants sur la nature à savoir : la connaissance
scientifique est pouvoir technique sur le monde. A la suite de sa réflexion, vient s’inscrire
l’idéologie cartésienne, avec René Descartes. Dans l’introduction écrite par Alfred Lorquet,
souligne qu’il est important de rapprocher la Novum organon de Bacon au discours de la
méthode de Descartes.

I.2.1.1.2. Le rationalisme cartésien

A la suite de Francis Bacon, René Descartes écrit Le discours de la méthode. Celui-ci


dans sa philosophie va plus loin que le précédant. A lire Raymond Matand, ce dernier
souhaite que René Descartes soit considéré comme l’initiateur et le représentent du dualisme
moderne qui a conduit à la dépréciation, exploitation et domination de la nature par
l’homme.62 Si nous interrogeons Raymond Matand à ce sujet, la raison est simple : René
Descartes a séparé l’humain et la nature ; il a fait de l’humain un sujet pensant et le reste un
objet pensé, l’âme du corps, l’humain de la nature.63 Lui-même le dit clairement : « j'avais
déjà connu en moi très clairement que la nature intelligente est distincte de la corporelle 64 ».
Ce dualisme esprit-corps est à l’origine de la méprise sur la nature. En rendant la nature

59
Raymond MATAND MAKASHUNG, l’homme et la nature. Perspectives africaines de l’écologie profonde.
Paris, Éd. L’Harmattan, 2019., p. 56.
60
Michel SERRES, Op. Cit., p. 41.
61
Adrien LENTIAMPA, Art. Cit., p. 1126.
62
Raymond MATAND MAKASHING, Op. Cit., p. 57.
63
Ibidem, p. 61.
64
René DESCARTES, Discours de la méthode, Paris, Éd. Aubier-Montaigne, 1951, p. 54.

30
comme objet pensé, celle-ci devient une machine de la fabrique pour les sciences
expérimentales. A ce propos, Descartes écrit :

Je connus de là que j'étais une substance dont toute l'essence ou la nature n'est que
de penser, et qui, pour être, n'a besoin d'aucun lieu, ni ne dépend d'aucune chose
matérielle.65
Pourtant, séparer l’humain de la nature c’est lui couper en deux morceaux. C’est
pratiquement l’isoler de la nature comme source de sa provenance. Raymond Matand
souligne que le dualisme qui sépare et oppose l’humain à la nature conduit directement à la
dévalorisation et exploitation de la nature66. Cette déduction du dualisme qui conduit à
l’objectivation, dévalorisation et exploitation de la nature donne au sujet (humain) un pouvoir
de manipulation sur les choses du monde.

Que dit René Descartes par rapport à la nature dans ses écrits ? A lire Le discours de
la méthode dans la sixième partie, René Descartes recommande une nouvelle pratique de la
science. Cette pratique doit quitter la spéculation vers la pratique. Il faut que les sciences
puissent d’abord chercher autant que possible la procuration du bien général de tous les
humains. Et pour y arriver, elles doivent construire des connaissances qui soient fort utiles à
la vie des humains.67 Soulignons, son souci premier est de rendre l’humain heureux. En
d’autres termes ; procurer à l’humain le bonheur peu importe le moyen. La question reste à
savoir de quelle manière va-t-il y arriver ?

René Descartes répond à cette question de manière empiriste. Pour lui, les sciences
doivent quitter les spéculations pour trouver une pratique, « par laquelle connaissant la force
et les actions du feu, de l’eau, de l’air, des astres, des cieux et tous les autres corps qui nous
environnent, […] nous rendre comme maîtres et possesseurs de la nature68 ». Par ses dires, il
a donné la voie à la science de se marier avec la technique pour rendre l’humain le maître et
possesseur des éléments de la nature en général. A partir cette situation, nous le considérons
comme une source à l’origine de la crise écologique. Ses idées ont servi de modèle dans les
laboratoires de scientifiques et techniciens modernes ; faire de l’humain maître et possesseur
pour son bonheur. A la lumière de ce que dit René Descartes, la nature se voit prisonnière de
la raison humaine. Raison qui dans sa finalité est de donner à l’humain le pouvoir.

65
René DESCARTES, Discours de la méthode, Paris, Éd. Aubier-Montaigne, 1951, p. 52.
66
Raymond MATAND MAKASHING, Op. Cit., p. 62.
67
René DESCARTES, Op. Cit., p. 74.
68
Ibidem, p. 74.

31
En lui offrant le pouvoir, celui-ci devient le centre de toutes les préoccupations de la
philosophie, science et de la technique. René Descartes ne s’arrête pas par-là, il ajoute que,
devenir maître et possesseur n’est pas seulement à désirer mais aussi à inventer qui ferait
l’objet d’une jouissance.69Celle-ci est l’objectif de l’humain sur la nature. La considération de
la nature chez René Descartes est autre que celle de Francis Bacon. Pour le premier la nature
fonctionne de manière mécanique et c’est à la raison humaine d’expliquer le fonctionnement
mécanique de la nature. C’est d’ailleurs pour cette raison qu’il dira que toute la nature
fonctionne comme une mécanique réglée : automate.

En raison de ce qui précède, pour Michel Serres, René Descartes a tracé effectivement
le chemin qu’avait commencé Francis Bacon. Celui où la raison humaine est maîtresse de la
nature. Dans Le contrat naturel, le philosophe Français souligne que :

Le maître mot lancé par Descartes, à l’aurore de l’âge scientifique et technique,


quand notre raison occidentale partit à la conquête de l’univers. [Conséquence] ;
nous le dominons et nous l’approprions70.
Ce maître mot cartésien a fait de la science moderne maîtresse de la nature. Ce
pouvoir qu’à la science de nos jours rend la nature objet de toute utilisation et
expérimentation. C’est pour cette raison, la philosophie cartésienne aux yeux de Michel
Serres est dangereuse. Car elle crée un nouveau rapport entre l’humain et les choses du
monde. Et ce rapport est celui de « dominer, mais aussi posséder71 ». Il s’agit en effet de droit
de propriété. En d’autres termes, l’humain s’approprie les choses du monde comme si elles
étaient une propriété privée dont il a tout le pouvoir de faire ce qu’il veut. De ce credo,
Michel Serres ajoute que «la maîtrise cartésienne redresse la violence objective de la science
en stratégie bien réglée le maître mot de René Descartes revient à l’application à la
connaissance scientifique72 » sur les choses du monde. Cette recommandation cartésienne
considère la nature comme un objet de l’humain.

Retenons que ces conséquences qui dérivent des idées de René Descartes, souligne
Bernard Feltz sont « l’objectivité, externalité, domination73 » de la nature. Pour être maître et
possesseur, l’humain doit découvrir les lois de la nature. René Descartes rejoint en effet
Francis Bacon, mais seulement que chez lui l’humain ne doit pas être humble pour apprendre

69
René DESCARTES, Discours de la méthode, Paris, Éd. Aubier-Montaigne, 1951, p. 74.
70
Michel SERRES, Op. Cit., p. 58.
71
Ibidem, p. 59.
72
Ibidem, p. 59.
73
Bernard FELTZ, La science et le vivant. Philosophie des sciences et modernité critique, Paris, Éd. De Boeck,
2014, p. 97.

32
de cette nature, il doit par ces choses qui l’environnent devenir maître. La mission est de
dompter la nature en un agresseur pour la soumettre aux caprices, jouissance et besoins de
l’humain. Nous soulignons en effet, que ce cordon ombilical qui considère la nature en un
objet de jouissance et de sans valeurs est visible même dans la philosophie cartésienne. Celle
d’appliquer la science par l’expérience des faits dans la nature pour la maîtriser en retour.
Cette attitude constitue comme nous avons souligné pour Francis Bacon aussi un mal capital
qui nous a conduits à la crise écologique que nous sommes en train de subir aujourd’hui. Par
leurs idées, le monde scientifique a soumis la nature au crible de la raison humaine et a fait
d’elle un champ d’expérimentation. C’est ce que dira Roger Bacon que, « sans expérience
rien ne peut être connu de manière suffisante74 ». Ce que nous reprochons à René Descartes
est le fait de placer l’humain au centre de toute pensée sur la nature. Le rendre maître et
possesseur. Par ces affirmations selon lesquelles l’être est celui qui pense sur la nature ;
l’humain est exalté et mis à un haut niveau comme un dieu sur terre. La pensée cartésienne
est d’une part la racine à l’idéologie anthropocentriste. Et d’autre part à l’exaltation de
l’humain comme maître de la Terre. Ainsi, toute la science moderne aura comme mobile :
utiliser la nature pour le plus grand bonheur de l’être humain.75Et ce credo sera qui se
constituera en une seconde idéologie dite scientifique

I.2.1.2. L’idéologie scientifique : déterminisme et scientisme

Il faut d’abord rappeler que la première idéologie dite philosophique nous a montré
comment certaines affirmations et recommandations de philosophes sur la nature, ont été
départagées d’après la compréhension et la méthode de chacun. Mais de leurs affirmations et
recommandations, notre rapport avec les choses du monde a changé. Premièrement, elles
demandent aux humains de triompher sur la nature par la connaissance des lois.
Deuxièmement d’en être maîtres et possesseurs. Pour y arriver, ils questionnent la nature et
cherchent de réponse en elle. Par ailleurs, ce que voulaient les savants philosophes, ce n’était
pas la connaissance passive sur la nature, mais plutôt celle agissante et transformatrice de la
nature. Cette connaissance agissante et transformatrice est le socle de l’idéologie scientifique.
Cette idéologie dite scientifique souligne Michel Serres, « quitte la mathématique à la
grecque où la déduction commande, pour une méthode plus inductive qui ne peut pas réussir.

74
Roger BACON cite par Dario ANTISERI, L’actualité de la pensée franciscaine. Réponses aux questions
présentes. Italie-Soveria, Éd. Rubbettino, 2008, p. 78.
75
Bernard FELTZ, Op. Cit., p. XII.

33
Laissant la maîtrise pour la soumission76 » de la nature à l’humain. Une soumission qui
plonge l’humanité dans le chaos.

De plus, l’idéologie dite scientifique est tributaire du rationalisme cartésien ; celui de


vouloir rendre l’humain maître et possesseur de la nature. En effet, Descartes étant à la
recherche d’un principe fondateur de toute connaissance, aboutit à des résultats qui l’amènent
à ne concevoir clairement que l'étendue figurée et mobile, et aussitôt il néglige la réalité de
tout le reste. Il fait de l'univers matériel un mécanisme infini où tout se produit selon les lois
de la mécanique et de la géométrie.77 Le fait que René Descartes néglige la réalité par la
connaissance claire et distincte, celui-ci ouvre la porte aux sciences afin de s’intéresser
uniquement du savoir scientifique en oubliant ce qui fonde la vie. En revanche, par les lois de
la mécanique et de la géométrie, René Descartes introduit le déterminisme dans la nature
avec comme base les lois mathématiques.

Relativement avec René Descartes, l’objectif de la science est de conduire l’humain à


la certitude et cela grâce au recours à la mathématique. C’est par la mathématique qu’on
arrive à la certitude. En effet, la philosophie cartésienne a légué à la science moderne la
logique mathématique comme fondement. Cette logique a pour mission d’amener l’humain à
la certitude. Ainsi, même certaines sciences comme les sciences de la nature pour arriver à la
certitude doivent l’utiliser. Et donc l’étude de la logique mathématique entre dans la
compréhension de la nature. Raison pour laquelle, nous pensons que cette logique est en effet
un réalisme. Une logique dont la réalité est indépendante de la nature, mais que l’humain peut
connaitre. Ce réalisme est antécédent du déterminisme de la nature comme conséquence.
Finalement, l’étude de la physique entre aussi dans la nature et ainsi commence aussi l’idée
mécanique et déterministe de la nature. Cette idée développée par la physique classique,
interprète la nature partant des théories mathématiques où l’humain est centré.

En plus, la tendance déterministe et mécanique pose un problème fondamental dans la


nature ; celui dans laquelle les conséquences que subit l’humanité aujourd’hui sont sous la
détermination comme antécédents partant des idées énoncées par Francis Bacon et René
Descartes. Et aussi l’exaltation de la réalité par les sciences modernes. En fait, l’interprétation
de la nature défendue aujourd’hui a comme référence dans les sciences dures : des données
d’Isaac Newton et de la physique classique par la démarche mécanique et déterministe de la
nature. Ce déterminisme s’est constitué en un réductionnisme de la nature qui ne voit en elle

76
Michel SERRES, Rameaux, Paris, Éd. Le Pommier, 2007, p. 41.
77
Léon NOËL, « Le principe du déterminisme », In Revue néo-scolastique, 12ᵉ année, n°45, 1905. p. 9.

34
qu’une seule facette sans tenir compte de sa diversité ou complexité. Raison pour laquelle,
nous critiquons l’idéologie scientifique parce qu’elle est un mal écologique. Son mal vient du
fait que la nature est le lieu où les lois scientifiques s’appliquent et cela grâce à la technique.

De plus, à lire l’article de Noël Léon, « Aux yeux du savant, le déterminisme, c'est la
relation nécessaire d'un phénomène avec ses antécédents, c'est la base de la loi naturelle, […]
il suppose une nécessité soumise à quelque règle rationnelle, accessible à l'intelligence 78 ».
Avec le déterminisme, la nature est interprétée par la science (raison scientifique) de façon
unidimensionnelle, fixiste, immobile, unique et réduite la capacité de l’humain L’idée liée à
la question du déterminisme de la nature est d’ordre global déterminé par les lois. Elle a fait
de la nature une chose soumise inéluctablement à la nécessité de l’humain selon sa
rationalité. C’est pour cette raison que les scientifiques évoquent le déterminisme dans les
actes humains. Ceci pour montrer que, tous les actes que l’humain posent sont déterminés
d’avance. Qu’ils soient posés sur la nature, ceux-ci sont déterminés. Le déterminisme veut
que l'acte soit le résultat de ses antécédents, qu'il soit rattaché à certaines conséquences qu’il
implique.79Ici les antécédents sont les idées baconienne et cartésienne de la science.

En outre, une autre tendance s’inscrit dans l’idéologie scientifique. Il s’agit du


scientisme. Par scientisme, on entend cette idéologie qui pense tout expliquer du monde par
les données de la science moderne. Son maître mot est que « la science est notre jugement
dernier80 ». Il pose le problème de la réductibilité, de la logique, voire aussi de la réalité. Tout
ceci explique en quoi René Descartes a influencé la manière de pratiquer la science. Son
influence dans l’interprétation de la nature est celle « de la raison, réduite à n’être qu’une
raison instrumentale fabricante d’outils, de machines81 », etc. Ceci étant, le scientisme a fait
de la raison la décideuse des choses du monde. Ces choses sont en d’autres termes comme un
ensemble de faits sur lesquels la science donne les lois à la technique, et cette dernière les met
en pratique. Ainsi, la science devient alors un savoir sur la nature et la technique un pouvoir
sur la nature. Adrien Lentiampa ajoute que « la science a abandonné sa mission explicative
du monde phénoménal pour s’adonner à la recherche effrénée de l’efficacité à travers
l’omniprésence de la technique82 ». L’expression actuelle de la science est l’élaboration

78
Léon NOËL, « Le principe du déterminisme », In Revue néo-scolastique, 12ᵉ année, n°45, 1905, p. 7.
79
Ibidem, p. 6.
80
Michel SERRES, Op. Cit., p. 135.
81
Raymond MATAND MAKASHING, Op. Cit., p. 77.
82
Adrien. LENTIAMPA, Art. Cit., p. 1127.

35
technique de mesure applicable par la technique actuelle au besoin de l’humain peu importe
le moyen.

De ce qui précède, les conséquences qui en découlent font que les sciences actuelles
sont à la conquête de la réalité dans la nature pour le bonheur de l’humain. Pour reprendre
l’expression de Bernard Feltz : « la science est perçue comme un facteur d’amélioration de la
condition humaine83 ». L’idée est celle de vouloir connaitre les choses du monde telles
qu’elles se présentent, partant des investigations de la science et la technique. Rendre la
raison humaine une nécessité imposée dans la nature. Cela va sans dire, c’est s’exposer au
danger. Le scientisme a inauguré l’anthropocentrisme qu’avaient commencé les lumières.

En ce qui regarde notre maître à penser, la place de la science aujourd’hui est devenue
décisive. Elle peut contrôler ou violenter le monde. La connaissance scientifique résulte de
l’idéologie qui a « fait de la cause une chose, […] où un fait devient un droit et
inversement84 ». Avec l’idéologie cartésienne nous savons que la science au XXIème siècle a
reçu une mission, celle de posséder la nature. Cette mission est devenue pour la science un
droit avec lequel l’humain transforme la nature puisque c’est sous prétexte des données
scientifiques. En ce sens et paraphrasant Michel Serres dans Le contrat naturel, l’on voit dans
toutes les théories spéculatives et scientifiques une objectivation fidèle et exacte fondant toute
application de la science et la technique dans les choses du monde.85

De plus, analysant les dommages collatéraux que la nature subit aujourd’hui, ceux-ci
ont aussi pour racines et se trouvent dans la connaissance appliquée dérivée du scientisme.
Les expressions du savoir « ne font pas la paix avec le monde86 » c’est pourquoi, l’idéologie
scientifique, plaide de nos jours « contradictoirement des bienfaits ou des méfaits d’une
connaissance » des choses de la nature. Michel Serres ne partage pas la visée de la science
actuelle, parce que cette dernière ne tient pas compte des choses du monde. La place décisive
que l’humain a maintenant dans les sciences de la nature n’échappe pas au contrôle et à la
violence de la nature. Cette place réduit la nature à une réalité sans valeur. Réduire la nature
à la simple compréhension de l’humain a fait de lui malheureusement le centre de la Terre
(nature). La conséquence qui découle de cette vision anthropocentrique, nous avertit que, « la

83
Bernard FELTZ, La science et le vivant. Philosophie des sciences et modernité critique, Paris, Éd. De Boeck,
2014, p. IX.
84
Michel SERRES, Op. Cit., p. 43.
85
Ibidem, p. 43.
86
Ibidem, p. 43.

36
nature se réduit à la nature humaine qui se réduit soit à l’histoire, soit à la raison : le monde a
disparu87 ».

Dans un même ordre d’idées, pour Michel Serres, cette conséquence réductionniste de
la nature enracinée dans le programme scientifique venant du rationalisme critique, ouvre la
voie à la victoire de la raison humaine sur les restes de la nature, « dans un combat qui dure
depuis la préhistoire88 ». Il s’agit bel et bien de la science et du droit ; le savoir et la loi. A en
croire l’article de Adrien Lentiampa, la domination de la nature a dorénavant pris racine dans
l’esprit humain moderne suite aux avancées de la science qui la considèrent comme la seule
manière d’appréhender la réalité.89

A ce propos, Michel Serres souligne que, l’autre problème de l’idéologie scientifique


est celui de coupler la science et le droit. Pourtant, questionnant l’histoire ; la science et le
droit sont deux domaines qui généralement sont en opposition. Pour cette raison, la science a
le projet et le droit à la loi. Inversement, la science moderne s’érige en une idéologie
contractant la science et le droit. Le savoir se fait passer pour une loi. Voilà pourquoi, les
désirs du savoir sont les ordres de la loi. Ainsi, nous imitons pour dominer et nous emportons
pour détruire.90 Ce mariage a donné le droit aux sciences modernes de manipuler la nature
selon leur mode opératoire. Aujourd’hui par exemple il y a accélération sévère de la
révolution industrielle comme cause majeure à la crise écologique. Par le vouloir mettre en
pratique ce que les savants disent, la science domine la nature et la détruit aussi. Car il s’agit
du savoir pour appliquer. C’est pour cette raison que Michel Serres affirme : « le maître mot
de Descartes revient à l’application à la connaissance scientifique et aux interventions
techniciennes du droit de propriété91 ».

Ce qu’il faut retenir à ce sujet c’est que, les idéologies philosophico-scientifiques


inaugurent l’âge moderne de la science, celles recommandées par Francis Bacon, René
Descartes et aux sciences modernes d’avoir le pouvoir d’être maître et possesseur de la
nature. De ces recommandations, la nature a été vue comme une chose, un objet de la science,
c’est-à-dire de la rationalité humaine. Celles-là ont engendré l’idée déterministe et scientiste
de la nature. Dès lors, de plus en plus la nature et ses éléments dépendent de l’humain. Ces
idéologies ont fait de l’humain le centre de tous les éléments de la nature (Terre). A cet effet,

87
Michel SERRES, Le contrat naturel, Paris, Éd. Flammarion, 1992, p. 44.
88
Ibidem, p. 63.
89
Adrien LENTIAMPA, Art. Cit., p. 1127.
90
Michel SERRES, Op. Cit., p. 96.
91
Ibidem, p. 59.

37
l’humain a mis les éléments de la nature dans une prison réductrice et fixiste. Il a cependant
oublié qu’il est dépendant de cette collectivité des choses d’où il tire les origines. La science
moderne quant à elle, a mis la nature au premier plan de son projet et de son agenda. Tout
ceci par pire vouloir connaitre et dominer. Michel Serres condamne cette philosophie parce
que « le savoir se confond avec la domination92 ». Les scientifiques ont confondu ce qu’est le
savoir par rapport au pouvoir. Pour eux savoir veut dire pouvoir. C’est de leurs propos que
l’humain se construit un pouvoir absolu sur les choses du monde. Étant convaincu en esprit
qu’il est absolu, il ne peut que se considérer fort sur la nature. Ainsi, l’humain moderne
devient par voie de conséquence grâce à la science et la technique le centre de la nature ; c’est
de l’anthropocentrisme.

I.3. L’ANTHROPOCENTRISME

Au point précédant, nous avons évoqué les idéologies philosophico-scientifiques de la


nature comme mal et sources de la crise écologique. Dans un premier moment, nous avons
décrit l’idéologie philosophique où nous avons vu que celle-ci a pris son envol grâce aux
philosophes du temps moderne (Francis Bacon, René Descartes, etc.) et aussi avec les
philosophes des lumières. Ceux-ci, par souci de rompre avec la tradition médiévale, ont
renversé la manière de penser en science et en philosophie. Pour eux, l’humain n’est pas celui
qui doit attendre les réponses venir d’une réalité divine. Il doit par contre questionner la
nature par l’expérience de faits pour avoir les réponses par rapport à ses inquiétudes. C’est
avec eux encore que la nature devient le lieu d’investigation de la pensée qui conduit
l’humain à la connaissance et possession du pouvoir.

Dans un second moment, nous avons évoqué l’idéologie scientifique. Ici nous avons
montré, qu’elle est l’héritière directe de la rationalité cartésienne. Rationalité qui veut que les
sciences aboutissent à une connaissance claire et distincte, c’est-à-dire certaine. Etant dans le
schéma cartésien, la nature est interprétée de manière déterministe et mécanique grâce au
recours de la mathématique. Cette interprétation vient de l’humain partant de sa propre
logique. Toutefois, dans cette idéologie dite scientifique, il y a une deuxième tendance. Il
s’agit du scientisme. Le scientisme se veut une religion qui prêche la nécessité de la science
comme solution dans le problème que l’humain fait face.

A la suite de ces constatations, nous sommes arrivés à la conclusion selon laquelle,


ces idéologies ont donné à l’humain une place et un rôle central dans le monde. Celui-ci,

92
Michel SERRES, Le contrat naturel, Paris, Éd. Flammarion, 1992, p. 43.

38
conscient, pense qu’il est le centre du monde, se croit fort et se prend pour un être universel,
un élément plus important que les autres. Cette attitude est dite anthropocentrique.
L’anthropocentrisme est l’objet de ce présent point. Notre objectif est d’analyser en quoi
l’anthropocentrisme est une des sources de la crise écologique actuelle. Mais, avant d’aller
plus loin avec l’analyse, dissipons d’abord tout malentendu autour de ce concept.

Qu’est-ce que l’anthropocentrisme ? D’après l’encyclopédie philosophique


universelle, tome 1, « l’anthropocentrisme désigne une doctrine qui place l’homme au centre
du monde93 ». La même définition, nous la trouvons aussi chez André Lalande pour qui,
l’anthropocentrique est cette tendance « qui fait de l’homme le centre du monde, et considère
le bien de l’humanité comme la cause finale du reste des choses94 ». Partant de ces
définitions, on peut dire autrement que, l’humain est l’intersection où convergent tous les
éléments du monde et dont lui seul est capable de décider sur ce qu’il veut, aime et souhaite,
car il est le sommet. Cette tendance a de répercussion sur la nature. Elle fait de tous les
éléments de la nature une entité privée et trouvent sens que dans la logique humaine. En ce
sens, les choses du monde (êtres vivants, inertes, etc.) lui sont subordonnées, c’est-à-dire
dépendantes de lui.

Si nous l’analysons très bien, au cours de l’histoire et par rapport à certaine


conception, nous découvrons que cette doctrine émane de trois sources lointaines : d’abord de
la thèse mytho-judéo-chrétienne de l’interprétation cosmologique de la Bible à laquelle
l’humain est au centre du jardin Eden avec mission et ordre divins de soumettre et assujettir
les autres êtres de la terre95. Dieu a octroyé à l’humain le pouvoir en tant qu’être supérieur
aux autres de dominer sur la terre. Cette thèse pour certains auteurs chrétiens émane d’une
mauvaise interprétation de la bible. Ensuite, la deuxième source est présente dans la thèse
mythologique énoncée par Platon. Le mythe de Prométhée et Epiméthée qu’il raconte dans
Protagoras. Ici, l’humain eut le privilège de recevoir lui seul le feu contrairement aux autres
êtres. Ce privilège lui donne la force et le pouvoir sur les autres êtres de la nature qui ne l’ont
pas eu. Platon raconte :

Quand l’homme fut en possession de son lot divin, d’abord à cause de son affinité avec les
dieux, il crut à leur existence, privilège qu’il a seul de tous les animaux, et il se mit à leur

93
Sylvain AUROUX, et André JACOB, Les notions philosophiques. Encyclopédie philosophique Universelle,
Tome 1, Paris, Éd. P.U.F., 1990, p. 105.
94
André LALANDE, Vocabulaire technique et critique de la philosophie, Paris, Éd P.U.F., 1926, p. 62.
95
Pour avoir plus d’explication, à lire dans la Bible de Jérusalem, Éd. Cerf, 2001, p. 19. Ou, Gn. 1, 28-30. Ici il
est écrit que Dieu les bénit et leur dit : « soyez féconds multipliez-vous, emplissez la terre et soumettez-là ;
dominez sur les poissons de la mer, les oiseaux du ciel et tous les animaux qui rampent sur la terre. », …

39
dresser des autels et des statues ; ensuite, il eut bientôt fait, grâce à la science qu’il avait,
d’articuler sa voix et de former les noms des choses, d’inventer les maisons, les habits, les
chaussures, les lits, et de tirer les aliments du sol96
Les dieux ont donné la liberté, la force, la raison et l’autonomie à l’être humain par
rapport aux autres êtres de la création. Par la suite, il devient un être exceptionnel du fait que
lui seul a le langage. Les thèses partagent une chose en commun ; le privilège de l’humain sur
la nature provient d’une réalité divine. Enfin, la troisième est moderne, énoncée au XVIIème
siècle. L’anthropocentrisme moderne tire sa source dans la science moderne (savoir-pouvoir),
qui a octroyé à l’être humain un pouvoir central sur les autres éléments de la nature. D’après
Bernard Feltz, « Descartes considère que l’homme est un être supérieur aux animaux et aux
choses naturelles97 ». De ce fait, l’humain pense exercer un pouvoir autoritaire sur le monde.
Parlant de l’origine moderne de l’anthropocentrisme, Luc Ferry ajoute à la suite de Bernard
Feltz que « Descartes, [est le] père fondateur de l’anthropocentrisme moderne98 ». Ce
philosophe français (Luc Ferry) pense que cette doctrine est une philosophie utilitaire ne
prônant que l’intérêt de l’humain. René Descartes a proclamé sans doute la supériorité de cet
être (humain) face à la nature. Pour lui, il est supérieur aux animaux parce qu’il a la raison.

Cependant, cette doctrine place l’humain au centre de tout comme décideur dont tous
les éléments du monde dépendent de lui. Cette théorie pour qui, « les êtres humains possèdent
certaines caractéristiques en commun avec les animaux, mais sont les seuls à posséder une
âme spirituelle et à être doués de raison [où] les animaux ne sont que des automates dont les
mouvements sont entièrement réductibles à des principes mécaniques99 » est à l’origine de la
crise écologique. Ceci dit, prendre l’humain comme centre du monde est un danger. Dans sa
rationalité, l’humain est prêt à tout faire de la nature, oubliant même qu’il est un élément
fragile et faible par rapport à la nature. L’écologie profonde est contre une telle conception et
la qualifie de spécéiste. Lisant le livre de Jean Onaotsho Kawende, celui-ci souligne que « la
pensée moderne, est essentiellement anthropocentrique, considère le monde comme une
donnée disponible, manipulable, exploitable pour la satisfaction des besoins de l’homme100 ».
Autrement dit, tout n’a de sens que dans et pour l’humain.

96
PLATON, Protagoras, Paris, Éd. Garnier, 1958, p. 50.
97
Bernard FELTZ, Op. Cit., p. 96.
98
Luc FERRY, Le nouvel ordre écologique. L’arbre, l’animal et l’homme, Paris, Éd. Grasset, 1992, p. 121.
99
Franck CEZILLY, « histoire de l’écologie comportementale »in écologie comportementale. Cours et
question, Paris, Éd. Dunod, 2005, p. 4.
100
Jean ONAOTSHO KAWENDE, Démocratie, technoscience et écologie. Champs pragmatiques de la
rationalité pluraliste, Louvain, Éd. Academia-Harmattan, 2017, p. 180.

40
En plus de cela, il y a des thèses qui soutiennent que l’anthropocentrisme tire ses
arguments dans la philosophie prêchant le triomphe de la raison humaine sur la nature. Cette
philosophie fait de l’humain un être exceptionnel des autres, raison pour laquelle il est le
centre de tout. Il joue un rôle de référence. Le problème avec l’anthropocentrisme est
question de la fonction et du rôle que joue l’être humain dans la nature. Depuis Aristote,
l’interprétation qui vient de l’humain sur les choses de la nature est qu’elles sont animées par
un principe de causes finales. De façon différente, toutes les choses de la nature ont une fin et
celle-ci est dans l’être humain. En d’autres termes, c’est pour lui que ces choses ont été créées
ou sont là parce qu’il est là. Et donc les choses du monde n’ont un sens que dans lui.

De ce qui vient d’être dit, il sied de noter encore que, l’anthropocentrisme est aussi
une lecture sur la relation : humain et nature. Cette lecture fait croire au premier qu’il est
supérieur à la nature et à un privilège. Par ailleurs, si nous analysons de près, cette doctrine
est beaucoup plus un état d’esprit. Esprit selon lequel l’être humain se voit à un plus haut
niveau sur le reste de la nature. À ce sujet, André Jacob dans l’encyclopédie souligne sur la
structure fondamentale et inconsciente de notre esprit qui conditionne notre vision du monde.
Cette vision, à en croire Raoul Delbove, fait de cet être le centre de l’univers parce que c’est
vers lui que tende un univers personnalisant.101

La question sera celle savoir : qui élit l’humain et le place au centre ? Pour répondre à
la question, l’élection ne vient de lui-même. L’humain reçoit un pouvoir par lui-même pour
se construire une autorité dont lui seul est la première victime potentielle. Néanmoins, cette
attitude a modifié l’environnement en fonction du besoin et des caprices humains. Soulignons
que cette pensée est un mal écologique. Elle a fait des choses de la nature une entité humaine.
Ce qui signifie que, les choses de la nature sont attentives aux besoins de l’humain. Pape
François dans son encyclique Laudato’si ajoute à ce sujet que l’anthropocentrisme moderne a
fini par mettre la raison technique (humaine) au-dessus de la réalité102. La question que nous
devons nous poser à ce sujet est celle de savoir : qu’est-ce qui donne à l’être humain ce
pouvoir ?

Pour répondre à la question, l’être humain ne sait pas exactement où est sa place et
son rôle dans la nature. Cette méconnaissance nuit à la relation qu’il a avec la nature en
général. Il a le sentiment de vivre en un être autonome, universel et indépendant dans le
monde. Autrement dit, il veut vivre sans rendre compte à personne parce qu’il se sent plus

101
Raoul DELBOVE, L’humanisme énergétique de Teilhard, Bruxelles, Éd. Bloud et Gay, 1966, p. 87.
102
PAPE FRANCOIS, Op. Cit., N°115.

41
important que les autres êtres. A ce qu’il parait, Hans Jonas estime que le sentiment
anthropocentrique vient de l’intérêt de l’humain qui se réduit à lui seul au détriment de tout le
reste de la nature.103 L’intérêt est le mobile premier qui le pousse à vivre comme un être
totalement complet. Son attitude supprime et nie la valeur des autres êtres de la nature.

Cela dit, venons-en maintenant à la question de l’anthropocentrisme avec notre maître


à penser. D’après Michel Serres, la nature est une totalité dans laquelle tous les éléments sont
liés et en relation d’interdépendance. En fait, l’être humain est un élément de la nature liée à
elle et prend naissance dans la nature. Cependant, par la soif, la raison d’être chef et maître, il
se considère comme un gros animal, un Léviathan vivant.104 Conséquence, il devient un loup
pour le monde dans lequel il vit. L’anthropocentrisme dans la philosophie serresienne est « la
lutte de l’homme pour la vie contre les autres espèces de flore et de faune que, parvenus à un
seuil105 » central. Ceci explique pourquoi Michel Serres refuse d’employer le terme
environnement, car dit-il, celui-ci signifie que l’humain siège au centre du monde et le reste
gravite autour de lui.

De plus, notre auteur pense quant à lui que l’anthropocentrisme moderne est un
« humanisme qui […] promeut [l’homme] au milieu des choses ou à leur achèvement
excellent106 ». Sur ce, l’humain considère le monde comme une réserve dans laquelle lui seul
a le droit de statuer. Etant conscient d’être le seul sujet de droit, le monde n’est que l’objet de
satisfaction des besoins. Avec évidence, l’anthropocentrisme vient du droit naturel. Celui-ci a
fait de la nature un particulier (objet) et l’être humain (sujet) un universel. Ceci explique en
quoi, « la nature se réduit à la nature humaine qui se réduit à l’histoire, soit à la raison107 ».
Discourir sur la question de l’anthropocentrisme en écologie chez Michel Serres c’est
évoquer la notion du subjectivisme et racisme de l’esprit. Par le contrat social, au nom du
droit naturel, l’être humain reçoit seul le statut d’être sujet ayant des droits. Et les autres êtres
ne sont que des objets. Il s’agit là d’un renversement où « le local (humain) envahit le global
(nature) et devient totalité ou intégriste108 ». L’universalité de l’être humain dans le monde ou
sa centralité se réduit à la notion du subjectivisme juridique. Depuis Jean-Jacques Rousseau,

103
Hans JONAS, Le principe responsabilité. Une éthique pour la civilisation technologique, Paris, Éd. Cerf,
1991, p. 188.
104
Michel SERRES, Op. Cit., p. 39.
105
Ibidem, p. 39.
106
Ibidem, p. 60.
107
Ibidem, p. 62.
108
Ibidem, p. 125.

42
l’humain est le privilégié du droit. C’est de lui qu’il reçoit le statut d’être seul sujet du droit.
En tant que tel, le monde se trouve écarter du droit, considérer comme un inconnu.

En dehors du droit naturel, la déclaration des droits de l’homme fait la même chose.
Celui-ci promeut l’être humain au rang du sujet ayant des droits. A en croire Michel Serres, la
déclaration droits de l’homme « ignore et passe sous silence le monde109 ». N’est-ce pas une
humiliation de la nature réduite au néant, à quelque chose qui ne parle pas et dont on ne peut
même pas se préoccuper ? En réponse à cette question, soulignons que la réduction de la
nature au statut d’objet a occasionné la crise écologique. Cette réduction est venue suite à
l’esprit anthropocentrique considérant la nature comme un objet passif, propriété privée de
l’humain.

La crise s’articule dans la relation d’universalité et de particularité où la relation est


verticale. L’être humain est dans cette relation ; « sujet-roi-soleil des objets110 ». Michel
Serres appelle cette relation et croyance mettant uniquement l’être humain au centre comme
un couplage asymétrique. En d’autres termes une relation verticale et imposante, car nous
nous « croyions naguère sujet, individuels ou collectifs, d’un objet passif, le monde111 ».

En outre, nous savons que l’anthropocentrisme constitue un mal écologique, puisqu’il


a fait croire à l’humain qu’il est le tout puissant, sa place n’est qu’être le centre du monde.
Ainsi, les autres êtres dépendent de lui. Cependant, il y a tout lieu de croire que cet esprit
anthropocentrique est révolu avec la notion de la physique quantique où tout est lié. Il n’y a ni
centre, ni environnement, ni sujet seul ou objet seul. Le tout forme la compréhension totale
du réel. Dans Rameaux, Michel Serres dit en substance que « le père est trôné au centre du
monde, détenteur des forces et de la raison112 » est détrôné de son rôle et fonction.
« Désormais, il n’y a plus de centre113 » ; ceci nous fait penser à la triple humiliation de
l’humain qu’explique Sigmund Freud.114 Il n’est plus au centre du monde. Il doit être avec le
reste du monde dans une relation traversable et symétrique.

109
Michel SERRES, Le contrat naturel, Paris, Éd. Flammarion, 1992, p. 63.
110
IDEM, Op. Cit., p. 64.
111
Ibidem, p. 54.
112
IDEM, Op. Cit., p. 43.
113
Ibidem, p. 43.
114
André Comte-sponville dans son dictionnaire cite Sigmund Freud et explique les triples humiliations de
l’homme : « Dans un passage fameux de ses Essais de psychanalyse appliquée, il évoque les trois blessures
narcissiques que l’humanité, du fait des progrès scientifiques, a subies : la révolution copernicienne, la vraie,
celle de Copernic, qui chasse l’homme du centre de l’univers (c’est l’humiliation cosmologique) ;
l’évolutionnisme de Darwin, qui le réintroduit dans le règne animal (c’est l’humiliation biologique) ; enfin, la

43
I.3. CONCLUSION
Les problèmes écologiques actuels touchent l’ensemble de l’humanité. Evoquer ces
derniers reviennent à proposer des stratégies adéquates pour la sauvegarde de la nature d’un
côté et du comportement à adopter de l’autre côté. Cependant, avant d’arriver à proposer des
stratégies pour les limiter, il est toujours important de connaitre leurs origines, c’est-à-dire le
point de départ qui les a déclenchés. C’est pourquoi, à la lumière de Michel Serres nous
avons analysé certains points de départ ayant un lien direct ou indirect avec ce que nous
appelons crise écologique ou problèmes écologiques.

Cependant, en se constituant en un juge qui tranche et veut donner la part de l’humain


dans les problèmes écologiques, notre raisonnement sur la question des problèmes
écologiques est parti à la suite de Michel Serres questionner l’histoire pour savoirs ce qu’elle
a déjà enregistré à propos des bouleversements écologiques ou de la nature avant de
condamner l’action humaine. Ainsi, les faits trouvaient sont que, la nature dans son
fonctionnement et son caractère dynamique s’auto-organise pour son bon fonctionnement. Et
donc les grandes extinctions et bouleversements écologiques viennent d’abord des faits
naturels sans interventions de l’être humain. Ceci fait qu’il n’est pas le premier à perturber le
système naturel des choses du monde. Ensuite, au-delà des phénomènes naturels de la terre,
l’humain est acteur des perturbations des écosystèmes. Ceux-ci ont commencé par les
pensées des auteurs (Parménide, Francis Bacon, René Descartes, etc.). Ceux derniers ont fait
de la nature une chose sans valeurs, un non-être pour le premier, une chose à connaitre pour
dominer après pour le second, une chose que l’être humain doit être maître et possesseur pour
le troisième, une chose vide de sens pour le dernier. Cette manière de penser est noyau à la
science moderne qui considère la nature comme une sorte des données dans lesquelles il faut
exploiter.

La science résultante de ces auteurs, déterministes et scientistes a enfoncé les clous


dans la plaie, car la nature était devenue réellement cette chose de sans importance. Fin, leurs
pensées ont changé l’état d’esprit pour l’humain contemporain, celui-ci se considère maître le
centre de tout, possesseur de la vie et dont le reste est non-être. Centre de l’univers avant, de
la terre ensuite, du monde maintenant. Ainsi, par soif de pouvoir, du gain considère la nature
comme capital avec lequel, il a un pouvoir. Tout ceci est exactement le décombre de la
culture. Celle-ci est au niveau de l’intellect.

psychanalyse elle-même, qui montre que « le moi n’est pas maître dans sa propre maison » (c’est l’humiliation
psychologique) ». André COMTE-SPONVILLE, Dictionnaire philosophique, Paris, Éd. P.U.F., 2001, p. 76.

44
De plus, de cette culture conçue par différentes conceptions et visions sur la nature à
son tour se matérialise par des techniques. Son pouvoir le conduit à développer davantage des
techniques pour manipuler cette nature dont il dépend. L’humain contemporain crée une sorte
de symbiose entre science moderne et technique moderne pour faire sortir une technoscience
laquelle nous plonge aujourd’hui dans un chaos inédit où lui-même est victime à travers les
conséquences il subit actuellement que nous allons développer dans le deuxième chapitre. Le
développement des techniques et croissance économique proviennent de la soif accumulatrice
des productions capitaliste. Ajoutons aussi que notre auteur a la limite, celui de ne pas
marteler avec forces ces origines qui ont été à la base de problèmes écologiques.

45
CHAPITRE DEUXIEME : LA PROBLEMATIQUE DU PROGRÈS
TECHNIQUE

II.O. INTRODUCTION

En préambule, le changement climatique, la pollution de l’air, la dégradation de la


nature, la concentration de gaz à effet de serre, la crise de l’eau, la perte de la biodiversité,
l’extinction des espèces animales et végétales, etc., sont les résultats et conséquences d’une
nature menacée. Cette menace vient des antécédents que nous avons évoqués au premier
chapitre où les humains sont maîtres et possesseurs. Sans doute, la gravité de ce changement
paraît actuellement une affaire de tous. Etant donné que les transformations de cette crise sont
radicales, notre rapport au monde a changé jusqu’à bouleverser notre habitat. Par le droit
naturel moderne, l’humain est maître et sujet de droit. La révolution technique et industrielle
accentue les répercussions écologiques. Ces dernières, tributaires du progrès technique,
menacent l’ensemble des êtres vivants.

Au chapitre précèdent, nous avons montré les causes profondes à l’origine de la crise
écologique. Nous avons souligné que les caractères essentiels des problèmes écologiques
décriés aujourd’hui prennent sources d’abord dans les phénomènes naturels, ensuite de la
mauvaise philosophie et tendance sur la nature : des auteurs philosophes et scientistes. Et
enfin dans l’anthropocentrisme. Ces éléments sont en effet à l’origine de la problématique
actuelle des conséquences écologiques par le fait qu’ils ont donné à l’être humain un pouvoir
sur la nature. Les problèmes écologiques modernes émanent de tous ces phénomènes-là et
tous sont réunis autour du vocable développement technique et croissance économique. De
nos jours, ceux-ci se regroupent autour d’un concept clé et fondamental : action humaine.
Cette action se comprend dans les progrès technologiques et l’accumulation des biens. Ceux-
ci sont en effet un problème impliquant des conséquences que ce chapitre se propose
d’analyser dans les textes de Michel Serres. De ce fait, dans ce chapitre, nous présenterons la
problématique du développement des techniques, capitaliste et leurs effets dans la nature.

46
II.1. ANALYSE DES DEUX ORDRES : PROGRES TECHNIQUES ET
DEVELOPPEMENT ECONOMIQUE

II.1.1. LES PROGRÈS TECHNIQUES

La technique est une vocation humaine, voire de l’humanité en général. L’être humain
est technique (homo faber : fabricant, technicien à son genre) et en même temps sage (homo
sapiens : intelligent). Cette dualité (technique et sagesse) s’articule en lui, l’intellect
influence, le technè et le technè l’influence également. Cette articulation de ce couple le
définit complétement. Raison pour laquelle la culture et technique s’associent. Par ailleurs, de
nos jours, la technè agit et transforme les objets du monde. Elle est aujourd’hui un problème
fondamental. Le développement technique comme dit ci-haut est devenu un problème majeur
en écologie, et cela, depuis l’ère dite industrielle où l’humain est parvenu à inventer la
machine à vapeur, les usines industrielles, etc. Ce développement est beaucoup plus accentué
par les nouvelles techniques, c’est-à-dire association entre les scientifiques et les techniques.
Cette association est actuellement une menace pour la vie des êtres vivants sur la planète. Car
toutes ces techniques finissent leur course dans la nature et la transforment en retour. Le
développement des sciences de la nature produit de manière efficace permet aux techniques
actuelles d’être à la hauteur et d’émerger dans tous les domaines de la vie. Elles sont comme
un moyen permettant à briser tout limite et difficulté que les humains font face.

Toutefois, pour Michel Serres, la technologie est la nouvelle culture, une nouvelle
politique que les humains de cette décennie épousent. Car, tout devient technique au point où
la nature veut être technicité. En ce sens, le philosophe français déclare que, « les
technologies […] ont mille fois plus d’influence sur la société […] aux conséquences
surévaluées, en comparaison115 ». Ceci atteste en quoi le développement des techniques est
une affaire qui se questionne à tout le niveau de la vie, voire dans la relation entre l’humain et
le non-humain. Selon lui, le développement technique dans le processus de la nature est une
violence, une crise pure et déchainement sans arrêt possible.116 La crise vient de la nouvelle
culture.

115
Michel SERRES, Michel SERRES, Temps des crises, Paris, Éd. Le Pommier, 2009, pp. 24-25.
116
Ibidem, p. 31.

47
II.1.1.1. Culture et technique

La culture est cet ensemble des connaissances et savoirs acquises propre à un individu
vivant en société. Ces connaissances et savoirs deviennent communautaires lorsqu’il y a un
ensemble d’individus vivent, les transmettant et pratiquent ensemble en vue de former et
transformer la vie en société. Les connaissances et savoirs sont vécus et appris par cette
même communauté comme héritage historique. A son tour, la communauté vivante s’en
charge de les transmettre aux générations futures comme symbole. De ce fait, la culture
devient ce « lieu de production des symboles117 » pour une communauté. En outre, la
technique est « la procédure par laquelle on peut obtenir un résultat déterminé118 ». Une mise
en pratique d’une structure théorique pour une finalité matérielle. Inversement, la relation
qu’à la culture et la technique, est une relation d’actualisation et de matérialisation. En ce
sens, la culture se vit et se matérialise par les techniques et pratiques. Les savoirs culturels
comme reproductions symboliques s’appliquent dans la technique produite par la
communauté.

En d’autres termes, la technique est la matérialisation de la culture. Et donc tout


développement culturel engendre un développement de la technique. C’est pourquoi, la
technique est en fait le développement matériel de la culture. Comme l’a si bien dit Jean
Onaotsho Kawende :

« Les techniques […] sont des traits culturels matériels dotés d’une certaine efficacité dans
la lutte pour la plénitude sociobiologique de l’homme […] elles se présentent à leur tour
comme des facteurs générateurs des valeurs culturelles et des habitudes
comportementales119 ».
Dans ce contexte, la culture se pratique dans le vécu quotidien. Il y a une
inséparabilité entre culture et technique. Les deux « sont en constante interaction. La culture
est une condition de possibilité de la technologie. Pas de technologies sans culture 120 ». Sous
ce rapport culture et technique, le développement des techniques est une nécessité de la
culture cherchant à briser les limites anthropologiques. Ainsi, pour Michel Serres, à vouloir
surmonter ces limites, aujourd’hui « les techniques […] touchent toutes les espèces sauvages,
placés entre extinction et protection121 ». Au reste, la visée de la technique est la réalisation

117
Bernard FELTZ, La science et le vivant. Philosophie des sciences et modernité critique, Paris, Éd. De Boeck,
2014, p. 62.
118
Ibidem, p. 69.
119
Jean ONAOTSHO KAWENDE, Op. Cit., p. 110.
120
Ibidem, p. 114.
121
Michel SERRES, Hominescence, Paris, Éd. Le Pommier, 2001, p. 115.

48
de l’activité théorique comme la culture. C’est là que le problème commence ; vouloir
matérialiser un esprit par une technique transformatrice.

Par ailleurs, dans le livre Temps des crises, l’auteur affirme que, « nous assistons à
des crises locales et partielles, dues, en effet, aux nouvelles technologies et qui touchent tous
les secteurs122 ». Son affirmation vient du fait que de nos jours, il y a émergence des
nouvelles techniques produites de la culture contemporaine. Cette culture préfère briser les
limites ou faiblisses de l’être humain. En revanche, l’idée des progrès techniques et de la
culture contemporaine est le point central qui a poussé Michel Serres à écrire Le contrat
naturel, Temps des crises, et bien d’autres livres sur l’écologie. Car d’après lui, tous les
problèmes écologiques commencent par deux maux fondamentaux : la culture et la politique
(technique). Par culture comme socle de l’agir, l’humain est compris dans l’action, le savoir-
faire et la relation interpersonnelle. Pour sa part, le philosophe français pense que la culture
« commence par la nature, [et] elle est la nature même123 ». Cet ensemble des us et coutumes
qui se dessine dans la communauté. Si la relation culture-nature est brisée ; là commence les
crises en général. Sur ce, pour être en harmonie, il n’est pas bon de couper cette relation, mais
la nouer davantage.

De ce qui précède, parlant de la culture contemporaine qui sont à la base des


problèmes écologiques, produit par les techniques transformatrices de la nature, Michel
Serres sous-entend celle de moderne, héritée de tout ce que nous avons énoncé dans le
premier chapitre comme sources lointaines de la crise écologique à savoir : l’empirisme
baconien et le rationalisme cartésien qui ont conduit à l’humanisme moderne. Cependant, les
développements des sciences de la nature ont contribué à l’accroissement des techniques pour
atteindre le rêve prométhéen. Celui de « l’ingéniosité humaine sur la nature ». Il affirme que
nous sommes en face des deux cultures : la première est celle de « l’ancienne maison où le
vivant était plus technique qu’on ne croit [la deuxième] ; nouvelle où la technique est plus
vivante qu’on ne dit124 ».

Toutes les causes précitées dans le premier chapitre sont aujourd’hui le socle du
progrès technique comme dit ci-haut. Et par politique comme mal écologique selon Michel
Serres, c’est justement la manière dont l’humain gère et gouverne les choses du monde. Une
gouvernance qui n’est pas encore ancrée dans l’esprit humain, surtout dans sa relation avec le

122
Michel SERRES, Temps des crises, Paris, Éd. Le Pommier, 2009, p. 25.
123
IDEM, Op. Cit., p. 46.
124
Ibidem, p. 106.

49
reste de la nature. Dans un autre langage, cette politique est exactement l’agir humain. En
outre, il est vrai que l’humain actuel est héritier d’une culture selon laquelle ; il est maître et
possesseur, cet héritage aujourd’hui est antécédent à une conception transformatrice de la
nature.

Cependant, les deux maux dont souligne Michel Serres, à savoir : culture et politique
ont horreur du monde parce que la nature a une langue que la culture et la politique ne
comprennent pas. Celles-ci nous mettent dans une bataille dans laquelle nous nous battons
tous contre un adversaire physiquement faible, mais capable de nous détruire tous.
L’invention de la technique ne date pas d’aujourd’hui. Elle est d’ores et déjà dans l’humain.
Dès son apparition sur terre, l’être humain emploie les techniques pour appréhender la chose.
Mais seulement que depuis l’ère industrielle, les techniques créent le moulin à vent et à eau,
vaisseaux spatiaux, grues, palans, fusée, les molécules avec le temps contemporain, la chimie
et l’électromécanique, la biologie cellulaire, l’épigénétique, la technomédecine, les
techniques médicales, etc. Toutes ces techniques sont en réalité une association entre science
et technique. Aujourd’hui, elles sont promotrices d’une culture qui n’a aucun sens du respect
de la nature. L’ampleur de toutes ces techniques a fait que la nature se trouve prise au piège
des techniques dévastatrices parce que « la nature est perçue comme adversaire de
l’homme125 ».

La crise écologique, aujourd’hui, « vient de ce que meurent nos cultures et nos


politiques sans monde126 » et dépend de l’agressivité de l’humain face aux choses de la
nature, lui qui pense avoir un pouvoir. Autrement dit, l’humain par son agressivité est le seul
à décider sur son sort et celui de son avenir. Par le développement des techniques, celui-ci est
en train de l’accélérer. Nous entrons dans ce que Michel Serres appelle : la guerre mondiale.
Cette guerre n’est pas celle des nations, mais de tous contre la nature. A force de lutter, les
humains enfoncent les « genoux dans la boue [et] chaque mouvement, [crée] un trou
visqueux127 » creusé pour les avaler ou l’avaler. Cette explication est peinte par un tableau de
Gaya à la couverture du livre. Tout est né de cette violence guerrière qui finit par une
surexploitation de la nature en rendant ce bien public en conditions de propriété.
Conséquence ; souillure et pollution.128

125
Jean ONAOTSHO KAWENDE, Démocratie, technoscience et écologie. Champs pragmatiques de la
rationalité pluraliste, Louvain, Éd. Academia-Harmattan, 2017, p. 181.
126
Michel SERRES, Op. Cit., p. 55.
127
IDEM, Op. Cit., p. 15.
128
IDEM, Op. Cit., p. 42.

50
De plus, l’époque contemporaine est beaucoup plus traversée par l’émergence des
techniques mortifères qui mettent la vie des êtres de la nature en danger. Depuis l’ère de
l’industrialisation, l’humain oriente toutes les sciences vers l’application des techniques. Les
lois scientifiques sont maintenant servantes des techniques. Cette culture, souligne Michel
Serres, à « horreur du monde129 », elle n’a aucune admiration pour les choses du monde.
Raison pour laquelle elle menace la nature. Personne dans la culture technoscientifique ne
s’intéresse vraiment au cri de larme que lancent les autres êtres vivants de la nature. En fait,
les actes humains ont changé la face du monde ; « l’air varie dans sa composition chimique,
et donc ses propriétés physiques et chimiques » ont été modifiées par les techniques mise au
point par l’homo-faber actuel. En effet, le monde en général entre dans la nouvelle ère qui
embarque science et technique de manière irréversible. Cette ère a pour source l’héritage
historique reçue des idées baconiennes et cartésiennes, qui nous ont plongé dans un
anthropocentrisme dans lequel les actions humaines sont de nos jours sources de crises
écologiques. Ceci par le vouloir apprendre pour appliquer à travers les différentes techniques
dans la nature.

Dans Le contrat naturel, l’auteur illustre au début du livre un combat entre deux
sujets (Etat ou humain). Ces deux sujets utilisent des coups dans leur combat. Chacun à son
niveau change de technique et mécanisme pour pouvoir anéantir l’adversaire. Cependant, non
seulement que chaque belligérant est touché par les techniques de son adversaire, mais tous
développent des techniques pour riposter. Le problème dans cette illustration est que, ce
combat se passe dans un sable émouvant que Michel Serres représente par la nature. Et toutes
les techniques employées par les deux duellistes non seulement les touchent, mais affecte en
grande partie à la nature (sable émouvant). Ces techniques font que, les deux sujets
« inventent le fer, épées, curasses et bouclier, découvrent la poudre […] s’assemblent en
armées géantes, multiplient leur front de bataille, en mer, sur terre et dans les airs 130 ». De ce
fait, toutes ces techniques que les duellistes usent du jour au lendemain s’abattent sur la
nature. Les effets sont néfastes et les conséquences sont dangereuses pour les duellistes. Ceci
pour dire, l’humain aujourd’hui est à l’origine de son propre malheur. Par des guerres et
combats multiplient, l’arsenal nucléaire est inventé pour sa propre destruction. Résultat ; nous
entrons dans une guerre globale et développons des techniques contre la nature.

129
Michel SERRES, Le contrat naturel, Paris, Éd. Flammarion, 1992, p. 16.
130
Ibidem, p. 25.

51
A ce propos, le philosophe français souligne que nous détruisons le monde à nouveau
chaque fois que nous nous battons et entrons en guerre entre nous. Car chaque guerre
développe davantage les techniques : les flottes de pétroliers, les sous-marins atomiques, les
bombes thermonucléaires. Ceux-ci sont des techniques des guerres que Michel Serres taxe de
guerre subjective et dont la victoire est subjective. Cependant, puisque tous emploient des
techniques, le monde devient victime de ces techniques (les armes nucléaires, bombes
atomiques, déforestation, acidification, etc.). Le monde devient par conséquent l’ennemie de
l’humain inventeur de ces techniques. La gestion de l’humain devient synonyme de
l’agressivité au monde. Ainsi, s’annonce la guerre et violence. Cette guerre, comme nous
l’avons souligné, n’est rien d’autre qu’une domination temporaire de l’humain sur les choses
du monde, que notre maître appelle « guerre subjective, nucléaire ou classique ».
Contrairement à la violence objective, celle-ci est le fait que tous les humains de la terre
s’associent pour être ennemies à la nature (objet) afin de la transformer.

Nous sommes tous en guerre contre un ennemi fort, invisiblement, mais faible
physiquement (nature). Cette guerre dont l’humain est actionnaire à un bilan désastreux et
très grave au point d’être lui-même victime potentielle. Cependant, nous ne nous battons plus
Etat contre Etat ou nation, mais, tous « nous nous retournons, tous ensembles contre le
monde131 », parce que nous pensons que ce dernier est une chose sans valeur. Pourtant, c’est
une âme qui respire et agit. Sa réaction est plus globale qu’on ne peut estimer. Lorsque
l’humain salit la nature, il se salit lui-même. Cette souillure en provenance de la marque
technoscientifique est une cause moderne qui creuse la tombe de l’être humain. Soulignons,
qu’il est difficile de vivre dans un monde couvert des immondices, d’un air pollué, d’une eau
toxique. L’être humain a détruit l’habit et abrite des autres êtres par ses diverses techniques.
Ainsi, conclut Michel Serres, que le monde est Sali et court un danger par notre culture
exclusive de l’appropriation des choses.

Les progrès techniques détruisent la nature par son action transformatrice et par la
surexploitation avec des mécanismes sophistiqués. La nature se voit victime de tous ces
mécanismes employés par l’être humain. Pourtant, l’humain oublie que la nature est le socle
de toute vie sur terre. Le fait que ces techniques opèrent ce changement, celui-ci transforme
sa toute-puissance en précarité et la rende fragile. Cette fragilité vient du savoir-faire
industriel132 des progrès techniques. Cette agressivité vient aussi du fait que nous avons cru

131
Michel SERRES, Le contrat naturel, Paris, Éd. Flammarion, 1992, p. 59.
132
Ibidem, p. 49.

52
que les choses du monde dépendaient de nous, néanmoins, atteste Michel Serres, « nous
dépendons [d’elles], pour notre vie, de ce système atmosphérique, mouvant, inconstant133».
Nous sommes les résidus d’une culture à langage agressif. Nous vivons dans un monde dont
nous ne tenons pas compte de valeurs. Tout ceci parce que, « notre culture et notre histoire
[…] naquirent, peu à peu, de tenir de moins en moins compte du monde. Nous passions notre
vie, nous consacrions nos pensées à quitter la Biogée. Même nos sciences, en l’objectivant, la
placent à distance134 ».

Par ailleurs, comme il venait d’être dit plus haut, la source de la crise ou des
problèmes écologiques modernes selon Michel Serres vient des progrès techniques et de la
culture comprise comme anthropocentrisme moderne. En ce sens, il déclare que les
déséquilibres du changement climatique par exemple, viennent de l’activité industrielles,
c’est-à-dire de la croissance technique de gaz dans l’atmosphère et les milieux auxquels
vivent les êtres vivants. Ce changement est global, car il affecte tout le monde sans exception.
Le changement fait que « nous ne savons pas, pour le moment estimer les transformations
générales sur une telle échelle de grandeur et de complexité, […] penser les rapports entre le
temps qui se passe et le temps qu’il fait135 ». En fait, l’humain actuel, par le développement
des techniques (chimiques, industrielles, physique, etc.) occasionne et accélère la
concentration du gaz à effet de serre, pollue son entourage et les conséquences sont inédites.

Ces accusations se fondent sur la nouvelle culture qui salit et pollue le cadre de vie
par les ordures, fumée toxique provenant des automobiles et industries. Pour reprendre l’idée
de notre auteur, « nous avons même muré les fenêtres pour mieux nous entendre ou plus
aisément nous disputait136 ». Eu égard à ce qui précède, Gilles Billen et Georges Thill nous
avertissent que si la pollution « continue avec ces industries, ces déchets chimiques déversés
dans les rivières et l’atmosphère, ces expériences nucléaires et tous les engins qui sont en
l’air, on en crèvera tous !137 ». L’être humain vit comme si ce monde ne l’intéressait pas. Et
comme si c’est lui qui l’a créé. Il veut faire de ce monde un enfer invivable par des
techniques qui ne prennent pas en compte les valeurs que possède ce monde. L’intérêt
technoscientifique a fait des choses du monde des marchandises. Toutefois, ceci atteste en
quoi l’hostilité du monde chez l’être humain est une affaire de culture, de croyance.

133
Michel SERRES, Le contrat naturel, Paris, Éd. Flammarion, 1992, p. 49.
134
IDEM, Op. Cit., p. 48
135
IDEM, Op. Cit., p. 52.
136
Ibidem, p. 54.
137
Gilles BILLEN, et Georges THIL, « La planète en danger : (in)validité des bilans à l’échelle mondiale », in
la revue nouvelle. Ecologies des mouvements en mouvement, Bruxelles, N°5, p. 281.

53
L’humain pense que le premier milieu d’investigation et de transformation est l’habitat des
êtres animaux, végétaux, etc. Ainsi, les problèmes de notre civilisation sont les atrocités et
dommages infligés aux choses du monde (mer, rivière, océan, arbre, animal, air, etc.).

En outre, à lire Hans Jonas dans Principe responsabilité, celui-ci souligne le fait que
la technique est une vocation de l’humanité. Car, pour sa part, elle est une concession
adéquate à la nécessité comme moyen avec un degré fini. Aujourd’hui, cette vocation
humanitaire se présente comme une route vers le but électif de l’humanité. La technique
moderne, c’est-à-dire actuelle, « s’est transformée en poussée en avant infini de l’espèce et en
son emprise la plus importante138 ». La technique occupe une place centrale dans le choix de
la vie de l’humain. Ceci dit, « l’homme est maintenant, de plus en plus, le producteur de ce
qu’il a produit et le faiseur de ce qu’il sait faire, et plus encore le préparateur de ce qu’il sera
bientôt capable de faire139 ». Ce changement ou renversement affecte de plus en plus son
environnement si l’impératif ne lui est pas donné. Car son essence technicienne transforme
l’essence fondamentale du monde.

Dans le même ordre d’idées, le développement des techniques que la nouvelle


civilisation inflige sur le reste de la nature issue de la mentalité et mauvaise culture selon
laquelle la nature est cette chose à travers laquelle les techniques trouvent place. Par héritage
des idées dévastatrices, l’humain aujourd’hui est responsable de cette grande accélération
bouleversante sur terre. Il ne vise plus la politique à long terme comme le marin, le paysan et
l’agriculteur. Il est cependant à l’origine d’une pollution culturelle qui en retour l’affecte :
une pollution culturelle grave et dangereuse. Cette pollution, Michel Serres l’appelle
l’infrastructure. Le credo avec lequel le progrès des techniques professes est celui de
connaitre pour appliquer, appliquer sans connaitre les effets ou conséquences et dominer afin
de transformer.

De plus, la relation humain-nature est brisée par le droit de propriété. Ce droit est
centré sur la science, l’économie capitaliste et les techniques accélérées par la révolution
industrielle. Cette ère révolutionnaire et dangereuse touche l’ensemble de la planète. Au point
où « les blessures qu’elles lui infligent retentissent en retour sur l’ensemble des hommes 140 ».
L’être humain est victime de ses propres actes. Les progrès techniques viennent du fait que
les techniques appliquent aveuglément les lois scientifiques et cette application se répercute
138
Hans JONAS, Principe responsabilité. Une éthique pour la civilisation technologique, Paris, Éd. Cerf, 1990,
p. 27.
139
Ibidem, p. 28.
140
Michel SERRES, Op. Cit., p. 73.

54
sur l’ensemble de la terre. Au philosophe français d’ajouter : « les six grands
bouleversements [Agriculture, transport, santé, démographie, connexion et conflits]
proviennent tous, sans aucune exception, de la recherche scientifique et de ses
applications141 ». Cependant, chaque fois que l’humain par son action technique invente une
technique et l’essaye dans la nature, celle-ci a aussi un aspect négatif au-delà de l’aspect
positif. Par l’émergence des sciences exactes, la terre est bouleversée d’une manière à une
autre. Car ces sciences bougent l’état de fait naturel. Cet état est déplacé par les scientifiques,
puisque la biochimie, physique nucléaire, la médecine, ont transformé le monde et même la
face de l’homme et sa maison142.

De ce fait, par manque d’une culture responsable, l’humain pense se détacher du


système qui le maintien en vie. Ses inventions techniques et sa mauvaise politique associées,
le fait croire comme s’il n’appartient pas au monde. Ainsi, atteste Michel Serres, il vit distant
et découpler aux réalités qui le maintien en vit. Raison pour laquelle, il continue de se venger
sur les choses du monde, « air, mer, climat et espèces, moins passives » qu’il le pense. Le
progrès des techniques prolonge l’être humain dans une relation asymétrique avec le reste des
vivants. Cette relation asymétrique émane d’une culture qui n’a aucune morale et éthique des
autres êtres. Partenaire de la philosophie selon laquelle l’enfer, c’est l’autre, l’humain
considère l’autre être (arbre, animal, mer, air) de la nature « comme un rival, un adversaire,
un ennemi même143 ». Tout ceci pour dire, l’être humain actuel est encore à la vieille culture
centrée sur une humanité seulement.

Dans un autre ordre d’idées, pour Michel Serres, le fait que nous développons
rapidement les techniques dures à une vitesse exponentielle, et célébrons la louange de ces
techniques, qui détruisent davantage notre habitat collectif depuis la révolution industrielle et
même à l’âge de pierre, nous bouleversons l’histoire, les conduites de vie de manière
fondamentale que cela nous empêche de créer une bonne relation entre nous les vivants.144

La culture et technique sont liées l’une à l’autre. Celles-ci se traduisent de manière


complémentaire. Le progrès technique renvoi aussi au progrès de la culture. De nos jours, les
techniques deviennent une voie élective pour briser tout limite humaine. Par les techniques,
l’être humain se sent fort et capable de manipuler son entourage. Cela va jusqu’à le
transformer.
141
Michel SERRES, Temps des crises, Paris, Éd. Le Pommier, 2009, p. 57.
142
Ibidem, p. 58.
143
Ibidem, p. 66.
144
Ibidem, p. 77.

55
II.1.1.2. Techniques et technologies

Les sociétés au monde depuis l’Antiquité, essayent d’expliquer le savoir scientifique


d’après leur mode de vie et leur niveau de connaissance. Chacune développe se savoir et
donne sens au monde d’après leur culture. La technique est le moyen par lequel les
explications du savoir scientifique tentent de donner forme et réponse aux réalités de la vie.
Ces réalités passent de génération en génération. Elles sont partagées d’une société à une
autre et ainsi de suite. Cependant, pour matérialiser cela, il appartient à chaque société
d’utiliser des techniques adéquates pour mettre sur pied l’idée (savoir) vers la réalité
physique à laquelle tout le monde peut user.

De nos jours, il y a une association entre science et technique. Cette association est
tout simplement la soutenance réciproque entre les idées scientifiques et les savoir-faire
techniques. Ce mariage s’accentue de plus en plus, toutes les sciences à partir du XXième
siècle ne se limiteront pas seulement à produire les théories scientifiques plutôt à s’en servir
pour créer un pouvoir sur les choses de la nature. Cet effort aujourd’hui a donné naissance à
ce que nous désignons par la suite : technoscience ou technologie.

La technologie comme études des techniques, « vise la procédure technique en tant


qu’elle est mise en œuvre dans une société donnée [c’est-à-dire] c’est la technique dans la
société145 » Ainsi donc, la technologie n’est rien d’autres que la contraction entre science et
technique. Science en tant produit de l’esprit humain et procédé. Et technique en tant que
mécanisme mettant en pratique une structure théorique. C’est là qu’entre en jeu ce
néologisme : technoscience. La technologie est par ailleurs joueur des causes, mais sans
jamais prendre en comptes les effets. Il y a cependant un déploiement et recrutement entre
science et technique. En plus de cela, souligne Michel Serres, « l’évolution de la science
moderne se répercute sur l’amélioration des moyens techniques qui assure la domination de
l’ordre des choses, des biens, des êtres qui entourent l’humain ; bref la nature146 ». Cette
perturbation des techniques coupe les liens qui unissent le vivant entre eux. Les techniques
réduisent les vivants à un animal-machine.147

En effet, depuis l’ère de l’industrialisation, la technique rend service à la science. Et


vice-versa. Ce service fait naitre dans la société actuelle les nouvelles inquiétudes sur le sort

145
Bernard FELTZ, La science et le vivant. Philosophie des sciences et modernité critique, Paris, Éd. De Boeck,
2014, p. 69.
146
J. ONAOTSHO KAWENDE, Op. Cit., p. 184.
147
Michel SERRES, Op. Cit., p. 61.

56
du monde. Où toutes les sciences tendent vers les techniques. Celles-ci sont de nos jours à
l’origine de progrès dans tous les domaines de la vie. La technique est présente partout et
dans tous les domaines scientifiques. Sa présence est favorisée par l’informatique. Ainsi, les
nouvelles technologies sont nourries par les sciences de la nature.148 Ces dernières offrent les
savoirs sur les lois de la nature aux techniques et celles-ci en dernier les perfectionnent et le
transforment par une technique. Le pouvoir qu’à toutes ces technologies fait de la nature la
première victime potentielle. Ces sont-elles (les sciences) qui facilitent ces progrès parce
qu’après avoir découvert les lois, les inventeurs techniciens les mettent dans leurs
laboratoires, usines, espace de travail sans jamais se questionner sur les enjeux que peuvent
engendrer ces lois dans la nature. En fait, il s’agit ici de la continuité baconienne. Michel
Serres atteste : « de la théorie suit la pratique […] le vieil adage baconien qu’il faut obéir la
nature pour commander149 ».

Parlant de la technologie comme association entre science et technique, Michel Serres


évoque la biotechnologie (biologie technisée) une des technologies qui influent sur
l’agriculture comme activité pilote de l’humanité et d’état corporel. La technologie manipule
les êtres de la nature en ce sens qu’elle maîtrise la reproduction des espèces, et cela, grâce à la
modification des gènes qu’on nomme par OGM (Organisme Génétiquement Modifié).150 En
effet, selon le philosophe français, « la montée en puissance de ces nouvelles biotechnologies
pose une série de questions dont la plus importante151 » est l’avenir des espèces si elles sont
modifiées pour un objectif de destruction. Cette montée en puissance des sciences dites dures
bouleverse l’état des choses dans notre habitat.

Par modification de génie génétique, les technologies qu’usent l’humain actuel créent
une nouvelle espèce dans un monde aussi nouveau. Le corps modifié, notre environnement,
notre avenir aussi touché. Ces technologies biologiques touchent la nature en sa profondeur,
sans doute, l’humain aussi est touché. L’impératif serait ici celui d’atténuer et règlementer
toutes ces technologies destructrices. Car la nature en en général est exposée au danger de
toutes ces technologies.

D’après notre auteur, cette croyance qui fait que toute machine sorte d’une application
à partir d’une théorie est fausse, du fait que les théories et pratiques sont universelles. Quand

148
Roger. MAWEJA, « L’herméneutique théologique à l’ère du défi écologique », In Science et esprit,
Montréal, Collège universitaire dominicain, Vol. 73, N° 6, 2021, p. 402.
149
Michel SERRES, Op. Cit., p. 168.
150
Ibidem, p. 91
151
Ibidem, p. 92.

57
elles se mêlent, c’est-à-dire associent le symbole et la technologie en ce moment-là, les
vivants sont beaucoup plus en danger. Cependant, les nouvelles technologies ont pour
mission de supprimer toutes limites humaines. Ceci fait qu’en conséquence, l’utilité de ces
technologies n’est pas fixée par les producteurs, mais par les consommateurs peu importe la
transformation qui en résulte. Ceci étant, les finalités technologiques ne sont pas directement
connues, mais indirectement inconnues. Ainsi, c’est la question majeure que se posent les
écologistes sur les finalités des technologies dans la nature. Car à observer de près, les
prouesses et inventions technologiques finissent leurs courses dans la nature, et cela, jusqu’à
transformer l’environnement.152

Bien plus, les technologies produisent des cultures variées « où la vie se plie à nos
expertises153 ». Elle devient selon Michel Serres prisonnières de technologies. Les
technologies actuelles nous modifient à un rythme que nous ne savons pas dire jusque-là. Par
diverses techniques comme la biotechnologie, le transhumanisme, les nanotechnologies,
l’espèce humaine, animale et végétale se voit être manipulée par toutes ces formes de
technologie. Mais seulement ajoute-t-il : « notre existence occupe désormais une autre maison,
que nos connaissances élargirent lentement de la basse-cour à la planète, et où, par un nouveau tour,
nous élaborons d’autres connaissances. Nous croyons avoir ainsi perdu le vivant parce que des
techniques raffinées nous amènent à ce deuxième état en construisant ce deuxième habitat154 ».
L’émergence des sciences exactes bouleverse la nature. L’efficacité avec laquelle elles
arrivent à produire des actes par les techniques nous met tous en difficulté et rompt notre
relation avec le monde.

Que retenir des progrès techniques ? Selon Michel Serres, les conséquences
écologiques découlent de la culture contemporaine héritée de notre passé et de la politique de
la guerre au point où ; « nous avons tellement gagné la lutte pour la vie [par des techniques et
technologies] contre les autres espèces de flore et de faune que, parvenus à un seuil, nous
redoutons que la victoire soudain, ne se retourne en défaite155 ». La problématique des
progrès techniques situe ces conséquences dans la nature. Toute technique n’est pas
dévastatrice et mauvaise si elle tient compte des éléments et /objets de la nature. Mais elle
devient un problème sérieux lorsque celle-ci a pour finalité de transformer négativement la
nature. Le progrès technique n’a fait opérer un schéma de quatre pôles : imiter, dominer,

152
Michel SERRES, Hominescence, Paris, Éd. Le Pommier, 2001, p. 79.
153
Ibidem, p. 105.
154
Ibidem, p. 106.
155
IDEM, Op. Cit., p. 39.

58
emporter et détruire. En effet, nous n’avons qu’a remarqué ce que pose ce progrès comme
acte par nos techniques et technologies actuelles. Pour en savoir plus, analysons quelques
conséquences et crises écologiques.

II.1.2. LE DEVELOPPEMENT ECONOMIQUE : LE CAPITALISME

Au point précédant, nous avons décrit le progrès technique et son impact dans la
nature. Cependant, signifions que certains problèmes écologiques ont pour source dans la
croissance économique due au système capitaliste. Certains chercheurs proposent d’atténuer
ou stopper ce système qui met en péril l’avenir de l’humanité en général. C’est pourquoi, le
capitalisme comme système économique sera analysé ici pour voir comment celui-ci
objective, privatise, instrumentalise la nature et constitue un mal écologique. Ainsi, il importe
de bien préciser le sens du terme usité ici. Qu’est-ce que le capitalisme ? Quelle est son
origine et en quoi il est un problème écologique ?

Dans le dictionnaire Larousse, le capitalisme est défini comme un « système


économique et social fondé sur la propriété privée de moyens de production et d’échange 156 »
où les fondements sont l’entreprise privée et la liberté du marché. Ce système est beaucoup
plus connu en économie que dans d’autres domaines de la vie. Il y des auteurs philosophes
(Karl Marx, Frédéric Engels, etc.) qui ont condamné et critiqué le capitalisme sous toutes ces
formes, puisqu’il s’agit d’une idéologie basée sur l’intérêt individuel. C’est une conception de
l’humain basée sur les mécanismes et systèmes économiques de la production. Ce système
domine le monde aujourd’hui surtout dans le domaine des affaires. Il faut signaler que tout
part du travail. Autrement dit, le travail est le point de départ du capitalisme. Car c’est lui qui
enrichit et rend indépendant l’individu.

Le livre de Michel Beaud157 trace l’histoire du capitalisme de 1500 à nos jours. A le


lire, celui-ci souligne que l’histoire du capitalisme commence déjà avec la société féodale où
s’effectue l’organisation de la production et l’extorsion du capital que bénéficiait le seigneur,
qui par ailleurs est propriétaire éminent et détenteur des prérogatives politiques et
juridictionnelles158. En fait, l’époque féodale a donnée naissance au système capitaliste dans
un aspect de conservation des intérêts mercantiles. De plus, après celle-là (la société féodale)
vient ensuite le « siècle des trois révolutions » (les lumières, l’esprit français, le despotisme
éclairé). Ce siècle a permis « l’élargissement des échanges marchands, notamment du
156
Dictionnaire LAROUSSE, Le Larousse illustré, Paris, Éd. Larousse, 2009, p. 157.
157
Michel BEAUD, Histoire du capitalisme. De 1500 à nos jours, Paris, Éd. Seuil, 1981.
158
Ibidem, p. 16.

59
commerce mondial159 ». D’après cet auteur, ce siècle est une période de renforcement du
capitalisme, mais surtout celui des Anglais, puisqu’il s’agit déjà de l’émergence de
l’industrialisation. Enfin, l’histoire s’achève sur l’impérialisme où il y a une explosion du
capitalisme du fait, il y a maintenant « ni une personne ni une institution, [le capitalisme] est
une logique aveugle, obstinée, d’accumulation160 ». C’est cette dernière forme qui se vit
aujourd’hui.

En s’interrogeant sur la question du capitalisme, Adrien Lentiampa souligne que le


capitalisme est « un système économique dans lequel les moyens de production sont propriété
privée, et donc, individuelle161 » qu’on pourrait dire en termes de mode de vie par son
caractère de vouloir privatiser certaines choses. Parlant de son origine, Frédéric London
estime que le « capitalisme commence par l’argent162 ». Et à ce sujet, pour Karl Marx,
l’argent est « la première forme d’apparition du capital… [il est par ailleurs] le produit final
de la circulation163 » capitaliste. En d’autres termes, le commencement et la fin du
capitalisme est l’argent. Voilà pourquoi il aboutit à la théorie selon laquelle : A-M-A : tout
part de l’argent vers la marchandise et de la marchandise vers l’argent. Sur ce, nous
comprenons qu’en tant que système économique, le capitalisme est lié au gain, c’est-à-dire à
la croissance économique. Le marché, le commerce, l’économie sont des ordres que l’humain
capitaliste ne peut pas s’en passer. Poursuivant l’article d’Adrien Lentiampa, souligne que le
capitalisme est une conséquence politico-économique de la nature même de l’homme.164 Par
la mauvaise gestion des ressources et de politique, ce système a pris naissance.

Pour sa part, Karl Marx dans son livre Le capital a essayé d’étudier le mode de
production du capitalisme et le rapport qu’a cette production. Sur ce, il souligne
que « l’histoire moderne du capital date de la création du commerce et du marché des deux
mondes au XVIème siècle165 ». La création du commerce a donné le coup d’envoi au progrès
économique. Par l’échange des marchandises, on voit apparaitre une sorte d’économie qui
vise la régulation du commerce sur la politique du commerce. Cela étant, dans le régime
capitaliste, il y a deux classes sociales qu’il faudrait souligner : des prolétaires et des
bourgeois. La première est considérée comme une classe de machine d’exploitation, des

159
Michel BEAUD, Histoire du capitalisme. De 1500 à nos jours, Paris, Éd. Seuil, p. 57.
160
Ibidem, p. 171.
161
Adrien LENTIAMPA, « De l’ère de l’individu à l’ère de la personne. Pour une économie à visage humain »,
in Gregorianum, Roma, Éd. P.U.G, 2013, N° 94/4, p. 833.
162
Frédéric LONDON, Capitalisme, désir et servitude. Marx et Spinoza, Paris, Éd. La fabrique, 2010, p. 24.
163
Karl MARX, Le capital, Paris, Éd. Garnier-Flammarion, 1969, p. 115.
164
Adrien LENTIAMPA, Art. Cit., p. 832.
165
Karl MARX, Op. Cit., p. 115.

60
moyens de production. Autrement dit, une classe de ressource, de matière de production
(instrument du travail). La seconde, (la classe des bourgeois) celle qui tisse les ficelles de la
société. Par leur moyen et pouvoir financier les bourgeois vendent leur force au prolétaire.
Une politique qui envisage la valeur d’usage. C’est pour cette raison que Karl Marx évoque la
notion du profit et de la plus-value.166

De plus, le capitalisme est devenu presque une nouvelle religion du monde que Karl
Marx combattait déjà à son époque. Celle qui voulait en fait le profit du bourgeois à l’égard
du prolétaire et aujourd’hui, il s’étend même dans la relation humain-nature. En d’autres
termes, il est fondé sur l’individualité comme valeur suprême dans le domaine économique.
Soulignons que le système capitaliste est fils de l’anthropocentrisme. Dans le contexte où
l’individualisme, philosophie qui met l’intérêt individuel au centre est devenue une valeur.
Relativement, l’être humain se prend pour un bourgeois et considère la nature comme
inférieure, sans valeur et qu’il peut acheter, c’est-à-dire un prolétaire. Il sied de noter que
c’est l’exploitation qui s’annonce parce que l’être l’individu pense être dominant par rapport
à la nature. C’est pour cette raison d’ailleurs, Karl Marx estimait que le capitalisme n’était
rien d’autre qu’une domination des forces du capital sur les forces du travail.167

En d’autres termes, la nature travaille sous le contrôle du capitaliste. Celui-ci en


retour surveille la nature. La nature est surveillée par le capitaliste dans le seul but que la
production poursuivit « soit proprement fait et les moyens de production employée » suivent
son intérêt. En ce sens, la nature est la marchandise, puisse qu’elle procure la richesse. Raison
pour laquelle la marchandise est l’élément fondamental du système capitaliste. Karl Marx
définissait la marchandise comme « un objet extérieur, une chose qui par ses propriétés
satisfait des besoins humains de n’importe quelle espèce168 ». Pourtant, prendre les éléments
de la nature comme des marchandises, c’est-à-dire des objets ou choses extérieures au
vendeur destinées uniquement à satisfaire des besoins est en danger dans la relation
qu’entretiennent l’humain et le monde. L’esprit capitaliste qui pense que la nature est une
marchandise pousse aux humains de maltraiter la nature et de la surexploiter dans l’objectif
d’accumuler beaucoup d’argent.

166
Sylvain AUROUX, et André JACOB, Les notions philosophiques. Encyclopédie philosophique Universelle,
Tome 1, Paris, Éd. P.U.F., 1990, p. 263.
167
[En ligne] https://www.larousse.fr/encyclopédie/images/Rosa_Luxemburg_en_1912/1310796 (page consulté
le 10/06/2023 à 12h 21).
168
Karl MARX, Op. Cit., p. 41.

61
Selon, Friedrich Engels, le capital(isme) est ce travail emmagasiné 169. Il est une
source de toute richesse. Cette dernière provient de la multiplication des productions selon la
force du travail appliqué pour la réclamation du profit ou gain. Engels soulève le problème du
déséquilibre. Pour lui, ce système crée en effet un déséquilibre entre les possesseurs du
capital et les producteurs. Ce déséquilibre fait en sorte que « les profits du travail mort
emmagasiné deviennent toujours plus immenses, les capitaux des capitalistes toujours plus
énormes tandis que le salaire du travail vivant devient toujours plus petit, la masse des
travailleurs vivant uniquement de leur salaire toujours plus nombreuse et plus pauvre170 ».
Une telle attitude appauvrisse davantage les prolétaires parce qu’ils doivent vivre sur base de
ce qu’il produit. Leurs vies dépendent de leurs forces de travail. C’est que Joseph
Schumpeter défend lorsqu’il dit que le mal du capitalisme est le « fait que les riches
deviendraient toujours plus riches et les pauvres toujours plus pauvres171 ». Ceci, c’est dans le
sens où les plus fort pense anéantir les faibles.

Le deuxième aspect a relevé comme problème du capitalisme et comme source de la


crise écologique est l’intérêt. Ce dernier est le mobile qui alimente et fonde la toile du
système économique capitaliste. Il est le saut qui active la politique capitaliste. Pour le dire
autrement, pour un capitaliste, l’intérêt est la chose qui le motive. Sans celui-ci, il y n’y a pas
de système capitaliste. C’est pourquoi, Adrien Lentiampa souligne à ce sujet que « le
capitaliste voit d’abord en l’autre le client ou partenaire potentiel, donc une source de
profit172 ». Ce profit est la base même de sa motivation. Ainsi, placé l’intérêt dans la nature
revient à supprimer sa valeur en tant que lieu et cadre de vie. L’intérêt du capital dans la
nature, réduit cette dernière à une entreprise de production dans laquelle l’humain producteur
et se croit propriétaire, et est guidé par la recherche du profit peu importe les moyens. En un
mot, la finalité du système capitaliste dans le monde est la recherche du profit qui conduit à
l’accumulation des gains. La recherche de ce qui est intéressant dans l’individu ou l’objet,
d’autant plus que, celui-ci peut rapporter une production, un gain. Ce qui amène à vouloir
produire davantage sans tenir compte des conséquences que cela peut engendrer. Dans ce
système, le capital n’appartient pas à celui qui rend la production effective par le son travail,

169
Frédéric ENGELS, « Le capital », in le Demokratisches wochenblantt (LEIPZIG des 21 et 28 Mars). Article
qu’on peut trouver annexer dans le livre de Karl MARX, Op. Cit., p. 697.
170
Ibidem, p. 697.
171
Joseph SCHUMPETER, Capitalisme, Socialisme et Démocratie, La doctrine marxiste. Le capitalisme peut-il
survivre ? socialisme et démocratie, Paris, Éd. Payot, 1963, p. 98.
172
Adrien LENTIAMPA, Art. Cit., p. 838.

62
mais à celui qui profite de l’effort de l’autre par intérêt. L’objectif est « la recherche effrénée
du profit et dont le but se trouve dans la consommation173 ».

La logique de l’intérêt est celle où le capitaliste analyse la relation qu’a l’individu par
rapport à son environnement. La relation entre les besoins de l’humain et ce que son
environnement peut lui fournir comme service pour satisfaire ses besoins. C’est pour cette
raison, il y a une transformation de la nature pour aider l’humain à satisfaire ses besoins
ultimes. Aussi la vie économique s’écoule dans un cadre social et naturel qui finit par une
transformation incessamment et dont les transformations que ce système amène modifie les
données de la nature.174 Mais, les conséquences de cette transformation de la nature
produisent des effets tels que : les rejets toxiques, la surexploitation, etc. Tout ceci parce qu’il
y a la non-insertion du capitalisme comme solution aux problèmes écologiques mais, comme
perturbateur du fonctionnement de la nature par le souci de prélèvements de matières
premières considérées comme marchandises extérieures à l’être humain. L’humain capitaliste
se fait l’idée selon laquelle les ressources naturelles prises comme marchandises, « se
présentent comme une quantité maximale de matières que l’on peut utiliser175 » sans fin.

En plus, l’utilité que vise le capitalisme conduit à la production ou surproduction de la


nature. Cette production est une transformation la nature. Or, la question de l’écologie est liée
à la gestion du stock, c’est-à-dire de l’épuisement, de la sauvegarde de ce qui nous reste.
Pourtant, le capitalisme moderne produit sans tenir compte de cet aspect. Le capitalisme
semble franchir la barre, c’est-à-dire les limites écologiques. Ces limites sont les mécanismes
de protection au niveau global et local que le capitaliste n’essaye pas d’observer. Son seul
souci est de produire pour amasser plus de capital. C’est pourquoi Karl Marx affirme que « la
production capitaliste engendre elle-même sa propre négation avec la fatalité qui préside aux
métamorphoses de la nature176 ».

Un autre fait à relever comme la source et le mal écologique est la propriété privée au
sein de l’idéologie capitaliste. Selon Karl Marx : « la première condition de la production
capitaliste, c'est que la propriété du sol soit déjà arrachée d'entre les mains de la masse 177 ».
D’après lui, cette condition était une mauvaise politique car, affirme-t-il : « l'essence de toute

173
Raymond MATAND MAKASHUNG, l’homme et la nature. Perspectives africaines de l’écologie profonde.
Paris, Éd. L’Harmattan, 2019, p. 87.
174
Joseph SCHUMPETER, Op. Cit., p. 121.
175
Antonin POTTIER, « Le capitalisme est-il compatible avec les limites écologiques ? », in Centre d’économie
de la Sorbonne Université Paris 1, Paris, Éd. CNRS, 2O17, p. 2.
176
Karl MARX, Op. Cit., p. 567.
177
Ibidem, p. 570.

63
colonie libre consiste, au contraire, en ce que la masse du sol y est encore la propriété du
peuple178 ». La nature n’est pas une propriété privée de l’être humain, car ce dernier l’a
trouvée, et peut la laisser. Il n’appartient pas aux humains de croire que la nature dépend
d’eux, mais le contraire. Nous vivons d’après les révélations de la physique quantique une co-
dépendance, une corrélation où tout est lié. L’erreur capitaliste serait celle de vouloir
privatiser la nature à la seule jouissance de l’humain et pour ses besoins économiques sans
tenir compte des phénomènes écologiques ou naturelles des choses. Il est vrai que la
recherche sans cesse et accumulation de capital est le point central de la mise en œuvre par le
système économique capitaliste pour maintenir l’équilibre. Mais il en va de la survie de tout
le monde.

Cela dit, Gael Giraud considère ce système comme une utopie mortifère qui veut
plonger le monde dans une société des propriétés privées, comme une finalité à laquelle tout
le monde veut tendre en termes d’une « eschatologie ». Le système « nous enferme dans une
dichotomie qui parait tellement aller de soi qu’elle est rarement interrogée [puisqu’il y a]
d’un côté, les biens privés, qui relèveraient de la sphère marchande, de l’autre, les biens
publics179 ». Pourtant, la nature est un bien public qui règle la santé de l’humanité. La
privation de ce bien public est une utopie mortifère. En effet, pour la cause commune, le
mieux serait de prendre soin des biens que nous avons tous en commun pour le bien de toute
l’humanité. Cependant, soulignions aussi que le mal capitaliste serait celui de vouloir rendre
la nature esclave de l’économie. Or, nous connaissons bien qu’être esclave, c’est justement
être la propriété privée de quelqu’un. L’esclave est privé de sa liberté et dépend de son
maître. Celui-ci le considère comme une personne n’ayant pas ses droits. A l’époque de
l’esclavagisme en Afrique par exemple, l’africain esclave était marchandé de la même
manière qu’on peut marchander du cuivre. Ceci pour dire l’économie a rendu la nature en un
objet n’ayant pas des droits.

En outre, pour Michel Serres, l’humanité est embarquée dans un nouveau navire. Ce
dernier est l’économie moderne qui associe l’argent. C’est pourquoi, selon notre maître à
penser, le système économique nous précipite dans une fin collective qui contraint le
fonctionnement de la nature. L’auteur ne souligne pas seulement le capitalisme, plutôt tout
système économique qui se mettrait au centre avec comme intérêt l’exploitation du monde.

178
Karl MARX, Le capital, Paris, Éd. Garnier-Flammarion, 1969, p. 570.
179
Gael GIRAUD, « le capitalisme financiarisé et transition écologique. De la "société de propriétaire" vers une
"société des communs" ? », in Gregorianum, Roma, Éd. P.U.G, 2013, 94/1, N° 695-706, p. 695.

64
Car exploiter irrationnellement le monde renvoi à l’extinction des êtres. Exploiter les êtres du
monde est une source de la crise et une idée mortifère. Par capitalisme, notre auteur emploi le
terme Quirinus180. Il s’agit du dieu de l’économie qui nous écarte de toutes les lois dictées par
Jupiter, par soif d’accumulation des gains. Ce terme signifie, pour lui, une économie à visage
capitaliste qui a « séparé les humains en des classes181 ». Séparer les humains en des classes
sociales n’a qu’une mission. D’après lui, la mission est celle d’exploiter de manière
rationnelle et technique la nature.182

Par ailleurs, ce système né de la liberté de l’humain le met en danger. Michel Serres le


considère comme une idée mortifère pour notre avenir. Nous critiquons aujourd’hui la
politique capitalise et la considérons comme un mal écologique, c’est parce que celle-ci veut
rendre le monde (nature) comme un bien privé dépendant seulement à l’humain qui a le
pouvoir de le transformer. En revanche, le monde est un ensemble, un bien public qui
appartient à tout être vivant dont les relations sont symétriques. Il n’appartient pas
uniquement à l’« homo-economicus », lequel humain est susceptible à le transformer et
accaparer comme une entité privée. En analysant ce point, l’objet est celui de fonder avec la
nature une symbiose et non un utilitarisme avec elle.

De plus, le secteur de l’économie, souligne Michel Serres, est destructeur de ce


monde contemporain et laisse les humains affamés. Il ne s’intéresse que de l’intérêt
particulier. Dans le contrat naturel, le philosophe français souligne que « dans l’économie
[…] gisent des raisons immédiates que tout le monde connaît sans pour autant pouvoir
agir183 ». Autrement dit, le système économique vise le court terme. Ayant la politique du
court terme, il renforce les causes des problèmes écologiques. Raymond Matand souligne
que la terre est considérée « comme gisement de ressources minérales, végétales et animales
qu’il fit piller sans modération184 ». C’est pourquoi Michel Serres défend cette pratique
économique qui considéré comme socle du développement des techniques.

A la suite de ce que nous venons de dire sur le capitalisme, il sied de noter que la
production capitalise s’accompagne du développement des techniques appropriées pour
maximiser le rendement. En retour, celui-ci réalise les soucis de la limite humaine en termes

180
Dans le contrat naturel Michel Serres parle de Quirinus : dieu de l’économie, p. 31. Il a emprunté ce terme
dans la mythologie grec.
181
Michel SERRES, Op. Cit., p. 32.
182
Ibidem, p. 32.
183
IDEM, Op. Cit, p. 20.
184
Raymond MATAND, Op. Cit., p. 90.

65
des besoins. Sans technique, il n’aurait aucune productivité rentable. Ceci nous permet de
dire que la montée du capitalisme a également provoqué le progrès technique qui,
aujourd’hui, est la cause majeure de la crise et des problèmes écologiques qui s’abattent un
peu partout dans le monde. Par le seul souci d’un profit abusif qui engendre la surexploitation
de la nature. Cette dernière se voit être détruite par une civilisation mercantile. Le système
capitaliste crée en effet une certaine dépendance entre l’économie et la technique. Le
capitalisme par son vouloir, privatise, surexploite et transforme le monde, rend notre planète
pauvre et plonge l’humanité en général dans une dépendance totale. Avec sa philosophie de
l’intérêt, tout devient argent, objet de production. Les choses du monde sont surexploitées par
la technique dans le seul profit du capitaliste.

En somme, nous sommes en face de deux ordres : l’un est l’association entre science
et technique et l’autre est marchand. Ceux-ci transforment notre manière de vivre dans le
monde et face au rapport que nous avons avec les choses du monde. Ils révolutionnent et
transforment le monde en introduisant des ruptures entre humain et le non-humain. Au point
où les choses de la nature comme dit Michel Serres se voient transformées et aujourd’hui sont
en réaction contre les actes humains accumulés. La symbiose entre capitalisme et
technologies est une nouvelle manière d’interpréter le monde. Malheureusement, cette
interprétation est à l’origine de beaucoup de problèmes écologiques où l’humain est lui-même
esclave de sa propre invention ou création. Le progrès technique et le développement
économique sont devenus chefs du monde et de la nature. Leurs résultats décident sur
l’humain et son avenir. La symbiose de l’accumulation des biens et le consumérisme
technoscientifiques imposent une nouvelle loi qui nous plonge dans une guerre et une
violence.

II.2. LA NATURE VIOLENTÉE


Dans Le contrat naturel, Michel Serres souligne la question de la violence objective.
Celle-ci vient de tous les humains sur terre et provient de la guerre que les sujets humains
entre eux se livrent. Cette dernière (guerre) est déclenchée par soif de domination et de
pouvoir, et nous fait créer des techniques dévastatrices. Selon lui, la guerre subjective est une
guerre dans laquelle les humains, voire les nations se livrent et s’opposent entre eux dans
l’objectif d’une domination à court terme. Cette guerre ne va pas loin puisqu’elle est liée au
sujet temporaire et par le fait que les vaincus ne restent pas un long moment vaincu. Il
souligne qu’« ils dominent aujourd’hui l’univers » demain, c’est quelqu’un d’autre. Cette

66
guerre ; nous la livrons juste pour être premier par sentimentaliste et cupidité. Ainsi tout le
monde est ennemi de tous.

Cependant, dans cette hostilité tous les ennemis utilisent chacun des techniques, des
stratégies pour vaincre la guerre. Inconscient sommes-nous, toutes ces techniques
développées retombent sur les choses du monde : air, plante, animal, eau, etc. ces choses en
retour menacent tout le monde. De ce fait, sa menace devient une préoccupation pour tout
sujet et toute nation. C’est dans ce sens que la violence devient objective puisqu’elle nous
touche sans exception. En fait, « la violence objective celle qui oppose tous les ennemis
inconscients associés à ce monde objectif185 ». Associés par la menace violente qui risque de
les anéantir tous. Signifions une chose, si la guerre était particulière, c’est-à-dire ne
concernant que quelques individus, a contrario la violence objective est universelle, elle
concerne le monde en général. C’est que se pose les problèmes, puisque personne n’est
épargné.

De plus, on trouve dans l’histoire des humains différentes guerres subjectives selon
les époques. Ces guerres (première et deuxième guerre mondiale par exemple) sont livrées
entre les humains au sujet des intérêts privés. Mais depuis un temps ces derniers se tournent
maintenant vers le monde et le violente. Cette violence faite au monde se retourne de nos
jours vers les humains et sont devant l’impasse d’un monde qui réagis. La terminologie que
Michel Serres utilise ici (objective), ne tient compte du fait de droit, mais plutôt de choses qui
existent par elles-mêmes. Au préalable, il n’y avait nul contrat. La violence est justement le
résultat de l’inconscience de l’être humain. C’est pourquoi aujourd’hui celle-ci devient
visible, causés par une inconscience invisible. De ce fait, le monde mondial (terre) devient
cependant l’objet de préoccupation pour tout sujet humain aux réalités universelles. Face à
cette menace où les rivaux n’ont que le choix de s’associer puisque la violence pèse et les
effets de leurs actions sont incontrôlés aujourd’hui. Ainsi, tous nous courons vers une crise et
conséquence écologique.

185
Michel SERRES, Le contrat naturel, Paris, Éd. Flammarion, 1992, p. 27.

67
II.3. LES CRISES ET CONSÉQUENCES ÉCOLOGIQUES
Michel Serres s’inquiète des résultats des actions humaines sur la nature. Ces résultats
sont catastrophiques. À cet effet, écrit-il « aujourd’hui, se tournant donc notre expertise et nos
inquiétudes, parce que notre savoir-faire industrieux intervient peut-être catastrophiquement
dans cette nature globale que les mêmes anciens pensaient qu’elle ne dépendait pas de
nous186 ». Nos techniques à portée globalisante, pratiquées sur la nature retentissent
maintenant sur le monde, qui aujourd’hui se trouve blessé, réagit en retour sur l’ensemble du
globe.
Au point précèdent, nous avons parlé du progrès technique dans la nature. Nous avons
souligné le fait que les techniques sont en ce jour un nouveau langage de l’être humain, c’est-
à-dire que la culture est matérialisée par les techniques et celle-ci, grâce aux données de la
science, nous avons réussi à transformer la face du monde. De ce fait, « nous voici
aujourd’hui inquiets de catastrophes dans le tissu aérien de protection qui garantit non plus le
temps qui coule mais le temps qu’il fait187 ».
Les actions humaines contemporaines sont présentement des actions liées en majeure
partie aux technologies. Ces technologies plongent l’humanité à un autre niveau où la vie est
menacée. Cette menace est une réaction aux actions qu’a dû subir la nature courant de
l’histoire, voire actuellement. Les causes des problèmes écologiques résultent des
conséquences fâcheuses qui mettent en péril l’avenir des êtres vivants et de la vie en général
sur la planète. En ce jour, notre monde souffre de douleurs reçues de la part de l’humain par
sa conception qui dévalorise la nature, sa science et sa technique. En d’autres termes, la
nature, en tant qu’ensemble des êtres vivants, inertes, visible et invisible, récent les actions
humaines (déforestation, la pollution, l’acidification des eaux, etc.) en une douleur. Ces
actions modifient les écosystèmes. Cette modification le touche dans ses structures
fondamentales. Ainsi, elle se met à réagir contre ces actions. L’objet que ce présent point se
fixe d’étudier est les conséquences écologiques. Les résultats des actions posées sur
l’ensemble du globe et dont les effets nous secouent terriblement. Selon la vision serresienne,
ces réactions sont une forme de communication qui nous alerte pour prendre position, car
elles sont dangereuses si nous ne les prenons pas en compte. Le schéma reste simple : « nous

186
Michel SERRES, Michel SERRES, Le contrat naturel, Paris, Éd. Flammarion, 1992, p. 51.
187
Ibidem, p. 81.

68
recevons des dons du monde et nous lui infligeons des dommages qu’il nous renvoie sous
forme de nouvelles données188 ».
Selon Michel Serres, tous les vivants de la nature effectuent quatre opérations dans
leur fonctionnement. Tous reçoivent l’information, stockent, traitent, et émettent cette
information.189 Ces opérations sont universelles et caractéristiques de tous les vivants.
Autrement, ces opérations sont la manière dont les vivants agissent et réagissent face à une
chose extérieure comme l’information ou l’agression. Ainsi, l’humain, l’animal, l’arbre,
l’eau, l’air, etc., opèrent la même chose. Lorsqu’un élément de ces opérations est menacé,
Ceux-ci réagissent ou informent selon un langage spécifique. Quand il s’agit d’une agression,
ils gèrent et réagissent face à cela. En effet, dire de la conséquence écologique, c’est
souligner autrement comment la nature nous communique et transmet un message. En tant
qu’âme, elle a réagi comme tout vivant et de sa manière. Nous l’avons mutilé, et « offre
aujourd’hui le visage douloureux de la beauté mutilé190 »

A ce qu’il parait, Michel Serres affirme que nous avons tant oublié ce que disent les
choses du monde, de telle sorte que le pouvoir de l’humain a oublié « une nature dont on
pourrait qu’elle se venge mais plutôt, se rappelle à nous qui vivons […] nous avons oublié le
monde : nous avons transformé les choses en fétiches ou marchandises, enjeux de nos
stratégies ; et nos philosophies, acosmistes, sans cosmos191 ». C’est notre ignorance qui est à
la base de cette interférence pour comprendre le langage qu’utilise la nature. Notre ignorance
a fait de nous de premières victimes. Car nous sommes, aujourd’hui, « responsable du
changement global du temps192 ».

Le message que la nature nous transmet, passe par les conséquences qui s’accumulent
tous les jours. Ces faits et évènements de la nature, comme le dit Michel Serres, « la rivière,
le feu et la boue se rappellent à nous193 ». Souligner les conséquences écologiques, c’est être
à l’écoute du message que la nature nous transmet sous formes des catastrophes. Toutes les
actions que l’humain a dû poser dans le passé et le présent aussi se mettent désormais à le
rappeler et à la réaction devient de plus en plus grave. Les effets écologiques font irruption
dans la vie de l’être humain à une vitesse accélérée. C’est par ses actes que son avenir est
menacé. Donc, la nature a et parle un langage que l’humain n’arrive pas à comprendre. « Elle

188
Michel SERRES, Le contrat naturel, Paris, Éd. Flammarion, 1992, p. 74.
189
IDEM, Op. Cit., p. 42.
190
IDEM, Op. Cit., p. 46.
191
Ibidem, p. 54.
192
Ibidem, p. 56
193
Ibidem, p. 15.

69
réagit globalement à nos actions locales194 ». En d’autres termes, nos actes ne touchent
qu’une partie de la nature, pourtant sa réaction est générale.

D’après Michel Serres, il y a problème écologique du fait qu’il y a eu une


contradiction entre l’humain et la nature. Les deux ne s’entendaient pas ; l’humain n’a pas
compris le langage de la nature ; contrairement à la nature qui a compris comment celui-ci
fonctionnait. Ainsi, « l’une parlait un langage que l’autre n’entendait pas 195 ». En d’autres
termes, si aujourd’hui les conséquences sont présentes, c’est parce que les antécédents
(activités humaines) n’ont pas au préalable compris comment les choses du monde
fonctionnent. Conséquences ; tous deux ne parlent pas le même langage et « dans les mêmes
circonstances196 ». Ceci fait que, les dommages infligés au monde sont répliqués par le
réchauffement, changement climatique, la dégradation de l’air, la déglaciation, les
inondations, etc. Nous avons oublié que « nous, les humains, sommes beaucoup, beaucoup
plus fragiles. Notre survie dépendra des conditions futures à la surface de le planète197 ».

II. 3.1. LE RÉCHAUFFEMENT ET CHANGEMENT CLIMATIQUE

De plus en plus la terre (nature) est victime d’un changement global. Ce changement
la transforme en une chose sans forces, impuissant et précaire. Aujourd’hui sa passivité est
changée en une force agressive et menace le globe. La nature a réagi, « vaincu, le monde
nous vainc enfin. Sa faiblesse force, la force à s’exténuer, donc la nôtre à s’adoucir198 », écrit
Michel Serres. Le changement climatique est devenu un problème majeur à l’ère actuelle.
Beaucoup de pays au monde s’inquiètent à ce sujet. Il perturbe plusieurs choses dans le
fonctionnement du vivant. La nature enfin réagit contre les coups reçus. Comment expliquer
ce changement et phénomène brusque dans la nature ?

II.3.1.1. Réchauffement climatique

Tout d’abord commencerons par comprendre comment nous fonctionnons. La vie sur
terre est maintenue par les rayons solaires. Lorsque ces rayons arrivent sur terre, 30% réfléchi
vers l’espace et les nuages absorbes 20%, les autres couches atmosphériques absorbent 6% et
la surface de la terre récupère 4%. Ce qui reste de pourcentage sont absorbés par le sol les
océans, l’atmosphère) ceci se réémit vers l’espace en forme de rayon infrarouge. En effet, la

194
Michel SERRES, Le contrat naturel, Paris, Éd. Flammarion, 1992, p. 61.
195
Ibidem, p. 22.
196
Ibidem, p. 25.
197
Hubert REEVES, et Fréderic LENOIR, Mal de terre, Paris, Éd. Seuil, 2003, p. 11.
198
Michel SERRES, Op. Cit., p. 28.

70
surface de la terre et l’atmosphère se mettent à chauffer quand il se trouve à la lumière
lorsque qu’ils captent sa propre énergie. Lorsqu’ils n’émettent pas son énergie, il y a blocage.
Le blocage de son énergie provient de ce qu’on appelle le gaz à effet de serre. Ainsi
commence le réchauffement climatique ou planétaire qui occasionne les autres éléments
macabres. L’on enregistre de multiples changements. A en croire Hubert Reeves, « nous
vivons aujourd’hui des bouleversements dont les effets risquent d’être comparables à ceux
qui conduisirent à ces changements d’ère. D’où le nom de ‘sixième extinction’ souvent donné
à la crise contemporaine199 ». Qu’est-ce qu’on entend par gaz à effet de serre ?

Pour comprendre ce gaz expliquons ce qu’on entend par serre. Une serre est un objet,
enclos vitré destiné à protéger contre le froid. Cet objet vitré laisse sur lui passer la lumière
du soleil. La serre empêche que la chaleur qui se transforme à l’intérieur ne se dissipe très
vite vers l’extérieur. Cet objet empêche tout simplement que l’air chaud ne part ailleurs. Il
s’agit d’un effet purement mécanique. En effet, pour notre planète, l’effet de serre est une
couche qui fait office de plaque de verre composé de gaz carbonique, de la vapeur d’eau, du
méthane. Ce phénomène a favorisé l’apparition de la vie sur terre. Les gaz à effet de serre
sont présents dans l’atmosphère, ils n’empêchent pas la lumière du soleil arriver jusqu’à nous
sur terre puisqu’ils sont transparent à la lumière du soleil. Mais en retour, ils empêchent le
rayon infrarouge émis par le sol à atteindre l’espace. Ainsi donc, sans l’effet de serre, la
température de la planète serait de 15°C. Il résulte de cette couche et plaque une
augmentation de la température au niveau de la terre. Au dire d’Hubert Reeves, l’effet de
serre est un phénomène important pour la régulation de la planète. Sans l’effet de serre l’eau
serait restée gelée200. Mais pourquoi aujourd’hui le gaz à effet de serre devient un événement
capable de nuire la vie des êtres vivants ?

Nous savons que la chaleur du soleil est source de la vie sur terre. « Le gaz
carbonique emprisonne la chaleur solaire et crée un énorme effet de serre ». S’il y a absence
du gaz carbonique, la concentration de l’effet de serre est l’annonce de la disparition de la vie
sur terre. Cette concentration a t en retour pour conséquence ; la disparition de la vie sur terre.
Donc, aucun n’être vivant ne peut vivre sans la chaleur du soleil. Ce qui est dangereux n'est
pas le phénomène lui-même, parfaitement naturel et essentiel à notre existence, mais sa
modification rapide par le progrès technique. Cette modification est porteuse de graves
dangers potentiels. La modification provient des gaz provenant de nos industries, des fumées

199
Hubert REEVES, et Fréderic LENOIR, Mal de terre, Paris, Éd. Seuil, 2003, p. 13.
200
Ibidem, pp. 33-35

71
qui se propagent dans l’atmosphère, des automobiles, etc., ceux-ci constituent une opacité
dans l’atmosphère, empêchent la lumière du soleil d’atteindre la terre et réchauffe le climat.

De plus, de nos jours, la planète se réchauffe à tout niveau et cela inquiète tout le
monde puisqu’il s’agit de l’avenir de l’humanité. Le réchauffement vient du fait que la terre
émet de rayonnement sous forme d’infrarouge et elle reçoit aussi le rayonnement solaire. Ces
gaz deviennent opaques aux infrarouges sans qu’ils soient émis dans l’espace. Ainsi, la
conséquence est que les infrarouges retenus prisonniers vont réchauffer les systèmes
atmosphériques et la surface de la terre et la planète se met en réchauffé. Ceci fait que le
réchauffement climatique commence. Au fur et à mesure l’humain continuera ces activités, la
planète se réchauffera chaque jour jusqu’à faire disparaitre l’humain disparait. A ne pas
perdre de vue, que les conséquences des gaz à effet de serre mettent en danger l’ensemble du
globe et le soumet en sa dépendance.

En plus, du réchauffement climatique, l’on remarque la diminution de l’extension de


la couche neigeuse de 10% depuis la fin des années 1960.201 A ce sujet le philosophe français
rajoute que « la circulation des eaux, la chaleur moyenne et la formation des nuages ou des
vents, pour tout dire les éléments, plus le nombre et l’évolution des espèces vivants202 » sont
en emprise par le réchauffement climatique. Il suffit d’observer la planète par un satellite la
nuit pour y reconnaitre ces grandes taches et blessures. Les conséquences accroissent parce
que le monde chauffe davantage. Pour Michel Serres ces conséquences « avancent et pèsent
sur la planète, pour le pire et le meilleur203 »

Le réchauffement climatique engendre multiples évènements sur la planète. Ces


évènements climatiques ont une violence exceptionnelle. On peut citer ici le cas des
inondations, des tempêtes, sécheresse, etc. ces événements proviennent à en croire James
Hansen cité par Hubert Reeves, de « l’émission de CO2 et d’autres gaz par la combustion du
pétrole, du charbon et du gaz naturel augmentent effectivement la température du globe 204 ».
Bien plus, les événements dramatiques liés au réchauffement climatique ne s’accentuent
chaque jour. La température moyenne de la mer, des océans a atteint un record absolu. La
chaleur augmente tout le jour. Ainsi, la terre menace la vie. Tous ceux-ci sont dus aux
activités humaines, activités produites par les techniques qui progressent chaque jour. Selon
l’article de Jean-Claude Batebua dans la revue Congo-Afrique, « les activités de l’homme se
201
Hubert REEVES, et Fréderic LENOIR, Mal de terre, Paris, Éd. Seuil, 2003, p. 15.
202
Michel SERRES, Op. Cit., p. 35
203
Ibidem, p. 36.
204
Hubert REEVES, et Fréderic LENOIR, Op. Cit., p. 16.

72
sont développées très rapidement à telle enseigne qu’elles acceptent des risques potentiels
dont l’importance ne peut-être ni preuve ni évaluée ou même pas pleinement connue
d’avance205 ». Ceci vient de l’hostilité du monde. L’être humain pense être un être en dehors
du monde. Le problème avec le réchauffement climatique, il engendre un autre problème la
pollution de l’atmosphère, la désertification, etc.

II.2.1.2. La pollution de l’air, de l’espace, atmosphérique

Pour évoquer la pollution de l’air, de l’espace ou de l’atmosphère comme une des


conséquences de la crise écologique, il est important de savoir de quoi ceux-ci sont composés
et quand est-ce qu’on peut dire qu’il y a la pollution et quel est l’agent causal. Selon
l’écologiste Robert Barbault le terme pollution peut être défini comme « une modification
défavorable du milieu naturel en totalité ou en partie de l’action humaine, au travers d’effets
directs ou indirects altérant les critères de répartition des flux d’énergie des niveaux de
radiation, de la constitution physico-chimique du milieu naturel et de l’abondance des
espèces vivantes206 ». Par cette définition, nous pouvons maintenant analyser la question de la
pollution comme conséquence écologie résultante du réchauffement climatique.

Au demeurant, notre air que nous respirons est dans l’atmosphère et cette dernière
dans l’espace. D’après les données recueillies de la chimie, de l’astronomie ; elle est
composée d’un mélange de différents gaz ou vapeurs classés en deux catégories : les
constituants permanentes qui sont présents dans l’air et les constituants variables qui sont
variables avec le temps et le lieu. Les constituants permanents sont composés de : l’azote,
oxygène, l’argon, néon, hélium, hydrogène, méthane, xénon, krypton et monoxyde. Le
pourcentage pour chaque élément est bien spécifique. Les constituants variables sont
composés de : l’eau, le dioxyde de carbone, le dioxyde de soufre, l’ozone et le dioxyde
d’azote. De ce fait, chaque élément à un taux spécifique dans l’air ; le problème ou la
conséquence survient lorsqu’il y a augmentation de pourcentage d’un élément, celui-ci
engendre un problème dans la composition et dans les systèmes. Ou lorsqu’il y a d’autres
éléments en dehors des composants bouleverse ces deux compositions comme : les ordures
chimiques et toxique, les déchets, la fumée des combustibles, etc. De nos jours, il y a

205
Jean-Claude BATEBUA, « Protection de l’environnement dans le cadre de la mise en œuvre de la reforme
minière », in revue Congo-Afrique, Kinshasa, Éd. C.E.P.A.S, N° 549, Novembre, 2020, p. 1038.
206
Robert BARBAULT, Ecologie générale. Structure et fonctionnement de la biosphère, Paris, Éd. Dunod,
2008, p. 273.

73
pollution c’est-à-dire perturbation de ce système. D’après Michel Serres : « Il y’a deux
fonctions de la pollution. Une centripète de propriété. L’autre centrifuge d’exclusion207 ».

Il y a trois types de pollution : le premier est la pollution physique, Celle-ci est dû aux
radionucléides ; le deuxième est chimique provenant des produits naturels minéraux et
autres ; le dernier type de pollution est biologique dû aux différentes contaminations
microbiologiques. Ces trois pollution Michel Serres le regroupe une pollution qu’il appelle :
la pollution matérielle, technique et industrielle qui nous expose à des risques concevables
venues des industries.208 Une autre pollution qu’il appelle culturelle. D’après lui, elle est
invisible ; elle « met en danger le temps qui passe et coule209 ». Nous l’avons fait passé de
génération en génération. Ainsi, reste maintenant à savoir qui en est l’agent et le responsable.

L’humain contemporain est méfiant de savoir comment fonctionne son milieu, selon
Michel Serres, il verse le pétrole en mer, l’oxyde carbonique évaporé dans l’air par millions
de tonnes, ces produits acides et toxiques revenus avec la pluie a comme conséquence
l’asthme que souffre les enfants, vient de la philosophie qui cherche toujours à maîtriser et
posséder la nature.210 Sans le savoir, l’humain a empiété le droit de la nature. Par la mauvaise
culture, il a souillé le monde par sa marque d’humanité avec « le sceau ordurier de leur prise
et de leur appropriation211 ».

Selon Michel Serres, la pollution vient du fait que l’humain a fait une rupture avec sa
raison. Cependant, « si notre rationnel épousait le réel, et le réel notre rationnel, [ajoute-t-il]
nos entreprises raisonnées ne laisseraient pas de résidu ; or si l’ordure foisonne dans l’écart
qui les sépare, c’est que celui-ci produit la pollution212 ». La pollution de l’espace et
d’atmosphère est un danger pour le corps des vivants. Telle que dit Michel Serres, elle est un
problème de tête lorsqu’il y a séparation entre le rationnel et le réel. Ce divorce provoque
cette méconnaissance et cette sympathie envers les choses du monde. Notre auteur le
surnomme le mal propre, une équipollence ; cette rupture entre rationnel et réel.

Le fait que le rationnel a divorcé avec le réel ceci engendre de dégâts énormes. Cette
distanciation entre les deux s’aggrave selon notre auteur il y a alors : la laideur s’ensuit de la

207
Michel SERRES, « Le droit peut sauver la nature », in Pouvoirs, Paris, Éd. Seuil, 2008/4, N° 127, p. 7.
208
IDEM, Le contrat naturel, p. 57.
209
Ibidem, p. 57.
210
Ibidem, p. 58.
211
Ibidem, p. 60.
212
Ibidem, p. 47.

74
dysharmonie et réciproquement213. A cet effet, Michel Serres conclu que la pollution est une
violence de la raison humaine contre les choses du monde. Du fait que, celle de l’air, de
l’espace vient à cause de nos interventions technologiques qui varie dans sa composition, et
donc ses propriétés physiques et chimiques ont changé214. Ceci explique la présence des
pluies acidiques. Ces dernières ont comme source les centrales électriques, les aérosols acides
émis par leurs cheminées se combinent avec la vapeur d’eau pour former des précipitations
acides. Les conséquences sont que ; les forêts et plantes sont touchées et deviennent
jaunâtres. L’eau change des compositions chimiques. La pollution de l’eau est causée par les
rejets des égouts et de nombreux effluents industriels.215 Le résultat est que la pollution de
l’eau provoque et accélère un phénomène dangereux sur l’ensemble des vivants :
l’eutrophisation.

En plus, dans Hominescence, Michel Serres présente la pollution comme une perte
d’un profit que les esclaves doivent rentabiliser par le rendement du travail. Par la fabrique de
la machine, il y a production la chaleur qui entre dans le travail mécanique. Cette chaleur n’a
jamais été calculée, elle se volatilise dans l’atmosphère sur des objets exclus de toutes
valeurs. Pourtant, la pollution est composée des résidus, des ordures, de la boue et de la
crasse qui n’ont jamais été connus. En conséquence ; « le prix devient commensurable à une
dimension du monde : et par exemple la mer monte216 ». Cependant, la pollution est la perte
de nos profits dont on n’arrive pas à mesurer son ampleur ou impact dans la nature. Au
paragraphe précédant, nous avons évoqué le problème du divorce entre le rationnel et le réel.
Ici, Michel Serres dit entre autres, que la conséquence de la pollution provient aussi de nos
rivalités entre nous les humains. Cette rivalité, « peut mettre en danger la planète et la vie en
leur totalité217 ». Plus il y a pollution, plus, nous allons dépendre des choses dont nous
croyons dépendre de nous.

Par ailleurs, parlant de la montée de la mer, Michel Serres a donné comme exemple
au sujet de la pollution, Hubert Reeves souligne que, l’avant l’ère industrielle, il y avait un
quasi-équilibre entre les quantités de CO2 absorbé et rejeté par la mer et la terre.218 Cet
équilibre atmosphérique était maintenu par un espace sain. Mais pour le philosophe français,
depuis la dispersion de l’ordure matérielle et sensorielle, nous recouvrons et effaçons la

213
Michel SERRES, Le contrat naturel, Paris, Éd Flammarion, 1992, p. 47.
214
Ibidem, p. 18.
215
Robert BARBAULT, Op. Cit., p. 281.
216
Michel SERRES, Op. Cit., p. 185.
217
Ibidem, p. 186.
218
Hubert REEVES, et Fréderic LENOIR, Op. Cit., p. 43.

75
beauté du monde et réduisons la prolifération luxueuse de ses multiplicités à l’unicités
désertiques219 ». S’il y a augmentation concentrant le CO2 par effet de serre, cette
concentration entrainerait l’augmentation de la température moyenne et la vie sera
compliquée. Il y aura comme conséquence ; les modifications profondes sur l’ensemble du
climat : relèvement des niveaux des mers, la fonte des glaces polaires.220 La présence des
ordures dans l’air, dans l’espace, etc., augmente de plus en plus de 25% le gaz carbonique.
Pour reprendre l’expression de notre maître à penser, nous sommes une espèce qui laisse
tomber les ordures parce que nous n’habitons pas l’espace, et donc partout où, nous passons,
laissons, en conséquence la souillure de l’espace.221

La question écologique soulevée là-dessus se pose sur l’accélération des phénomènes


naturels. L’émission du gaz à effet de serre devient plus en plus accéléré qu’au paravent.
Soulignons à cet effet, les conséquences sont dangereuses, provoquent des perturbations dans
la nature et les régulateurs (terre, océan, mer, etc.) absorbent une moitié de ce gaz. Les restes
vont dans l’espace, perforent la serre et laisse le trou dans la couche d’ozone. Hubert Reeves,
écrit à ce propos que la liste des pollutions de l’air est hélas très longue. Mais ce qui nous
inquiète davantage est la question du changement climatique qui détraque de plus en plus les
écosystèmes dont les dommages sont irréversibles. A force de polluer, l’humain augmente la
concentration des toxiques dans son milieu d’habitat par le phénomène du stock. Michel
Serres dit à ce sujet que « l’homme est un stock, le plus fort et connecté de la nature222 ». Il
est plus dangereux s’il stock les toxines dans son organisme par diverse sorte de pollution :
l’usage d’engrais chimiques, nucléaire, les pesticides, etc.

II.2.1.3. Le trou dans la couche d’ozone

La problématique des trous dans la couche d’ozone comme conséquence ont de point
commun avec le précédant point (la pollution) ; c’est pour cette raison, elle prête confusion
pour certains. La destruction d’ozone provient du gaz à effet de serre produit par les activités
humaines. Ce gaz à une longue duré dans l’atmosphère et petit à petit, il perce de trou dans la
couche d’ozone. La couche d’ozone à lire l’astrophysicien Hubert Reeves, c’est un type de
d’oxygène constitué de trois atomes contrairement à celui dont nous respirons qui n’a que
deux atomes. Cette couche est dans l’atmosphère à deux niveaux d’altitudes. Selon toujours
Reeves, il y a d’abord la couche d’ozone situé entre 20 à 50 kilomètres au-dessus de nous ;
219
Michel SERRES, Le contrat naturel, Paris, Éd Flammarion, 1992, p. 46.
220
Gilles BILLEN, et Georges THIL, Art. Cit., p. 282
221
Michel SERRES, Op. Cit, p. 53.
222
Ibidem, p. 37.

76
c’est qu’on appelle le bon ozone. Son rôle est celui d’intercepter les rayons ultraviolets du
soleil qui menacerait la vie une fois sur terre. Car une fois sur terre la vie des vivants serait
impossible. Cependant, cette couche dès le début de la planète n’existait pas encore. Sa
présence a été effective au même moment que l’oxygène atmosphérique.223

Quant à la pollution atmosphérique, elle provient des dioxydes de souffre, des oxydes
d’azote, du mercure. L’humain en emploi les combustibles fossiles, les incinérations des
déchets, l’usage des plastiques incinérés, etc. Il est effet à la base de la forte quantité de la
pollution atmosphérique. Conséquence, presque tous les pays au monde se trouvent pollué,
car l’air n’a pas de frontière. C’est ici où les pays pauvres réclament sont concernés malgré
leur faible pourcentage de pollution. Sans doute, la pollution est maintenant presque partout
dans le monde malgré la différence de degré. Les courants aériens transportent cette pollution
à des milliers de kilomètres.

Tout cela, souligne Michel Serres, c’est par notre capacité technique, croissantes,
celle qui verse dans l’atmosphère des milliers de tonnes d’oxyde de carbone et même d’autres
déchets toxiques, nous ne savons même pas estimer les transformations générales sur une
échelle de grandeur et de complexité que cela implique224. Notre activité technologique a fait
qu’il y ait une diminution de la couche d’ozone. Ensuite, cette diminution a un impact néfaste
sur les êtres que nous sommes. Conséquence ; il y a augmentation du taux de cancer, la
détérioration de la vie végétale et animale, l’air, la menace de la chaine alimentaire. Le
progrès technique produit des gaz toxiques et, est responsable de ces trous. Ceci explique
pourquoi, il y a des inondations, précipitation, etc., parce que « il suffit de toucher à un
élément pour que tout l’ensemble soit perturbé225 ».

En outre, d’après Michel Serres, nous sommes arrivés au point où les catastrophes
nous inquiètent davantage parce que « dans le tissu aérien de protection qui garantit non plus
le temps qui coule, mais le temps qu’il fait226 » est détruit par notre mauvaise culture. La
mauvaise couche d’ozone est produite de manière naturelle par les orages, les oxydes d’azote
et les hydrocarbures émis par les voitures automobiles, les industries chimiques, nucléaires,
etc. Elle est une mauvaise couche parce qu’elle provient des activités humaines et provoque
des effets nocifs sur l’ensemble des vivants. Reeves souligne que par son pouvoir oxydant, il

223
Hubert REEVES, et Fréderic LENOIR, Mal de terre, Paris, Éd. Seuil, 2003., pp. 50-54.
224
Michel SERRES, Op. Cit., p. 52.
225
Hubert REEVES, et Fréderic LENOIR, Op. Cit., p. 55.
226
Michel SERRES, Op. Cit., p. 81.

77
modifie la perméabilité des membranes cellulaires et perturbe la photosynthèse, et la
respiration.227Elle est en majeure partie responsable des trous.

II.3.1.2. Changement climatique


Il est cependant vrai, que le climat peu varié de son propre gré par le fait que la
quantité de l’énergie émise par le sol varie de temps en temps et aussi avec la dérive des
continents, mais il est aussi évident que ce changement provient de l’intervention de l’action
humaine. Comment expliquer ? Le réchauffement climatique que nous venons de présenter et
analyser précédemment, engendre aussi la perturbation climatique. On appelle dans un
langage courant par changement climatique. Notons que, le changement climatique résulte
des émissions de gaz à effet de serre. Une fois que le gaz à effet de serre réchauffe la surface
de la terre, celle-ci en retour refroidit les hautes couches de l’atmosphère. En retour, il y a
changement dans le fonctionnement du climat. Lorsqu’il y a changement climatique par le
gaz, la conséquence est que la couche d’ozone tarde à se reconstituer car, les énergies sont
perturbées dans l’atmosphère. De ce fait, si aujourd’hui, le monde en général s’inquiète de ce
changement, c’est tout simplement que l’humain accélère le processus et le changement
devient fort du fait qu’il y a augmentation des gaz à effet de serre.

De plus, ce changement provient aussi du cycle du carbone depuis que l’ère


industrielle a commencé avec l’incinération des combustibles fossiles ; la constante du cycle
de carbone est perturbée et ne cesse de croitre. Cette croissance est venue de la conséquence
d’accumulation des masses de gaz carbonique dans l’atmosphère dû aux différentes
combustions de carbone fossile comme les carburants fossiles. Ensuite, par l’augmentation de
la température qui modifie les régimes des précipitations.228 Le changement climatique selon
Michel Serres vient de notre ignorance de l’importance du climat. Nous avons
été « indifférents au climat229 ». Cependant, le changement climatique est un enjeu
écologique qui bouge l’ensemble du globe. Parce qu’il se traduit par des nombreuses
variations qui aujourd’hui porte atteinte à la survie des êtres vivants. Par ces variations
observées par-ci-et-là le phénomène vie devient de plus en plus une question délicate, voire
difficile à appréhender.

227
Michel SERRES, Le contrat naturel, Paris, Éd Flammarion, 1992, p. 56.
228
Robert BARBAULT, Op. Cit., p. 283.
229
Michel SERRES, Op. Cit., p. 53.

78
II.3.2. EXTINCTION DES ESPECES

La menace sur la biodiversité provient de la tendance anthropocentrique qui se


déverse dans les technologies. Cette vision de la nature retire le droit aux choses de la nature
comme celui d’exister. Comme dit dans le premier chapitre, l’être humain a cru être le seul
être vivant qui a droit à la vie. Oubliant qu’en réalité il est « une espèce parmi tant
d’autres 230». La conséquence est que, pense être plus important que les autres espèces de la
nature ; il se met à les tuer jusqu’à les faire disparaitre : extinction des espèces. En dehors de
cela, le changement climatique est à la base du non adaptions des espèces dans la nature. Ce
changement provoque même la perte des certaines espèces. En effet, l’extinction d’une
espèce est une perte irréparable, un des désastres navrant qui se produit dans la nature. 231 A
lire Michel Serres, celui-ci souligne le fait que, tout vivant sur terre nait et après meurt. Sa
disparition est un phénomène naturel au préalable. Les scientifiques estiment selon eux
qu’une espèce ne dure « autour de 5 millions d’années232 », une extinction naturelle sans
l’intervention de l’humain. Il y a un processus qui détermine sa vie et sa mort. Ce processus a
un temps déterminé. Un risque peut advenir et ce processus peut être interrompu si l’on se
souvient de ce que nous avons souligné au premier chapitre sur les phénomènes naturels de la
terre où nous avons évoqué les grandes extinctions. Néanmoins, aujourd’hui les
astrophysiciens alerte sur la sixième extinction des espèces, une des grandes conséquences
des actions humaines. Cette sixième extinction a pour cause les activités humaines : la
déforestation, la fragmentation de l’habitat, la pollution, la surexploitation, etc.

Selon l’astrophysicien Hubert Reeves, le développement de l’agriculture et de


l’élevage serait aussi à la base de nombreuses disparitions. L’humain est responsable d’une
telle conséquence. Mais cela avec l’ère industrielle. Cette ère est responsable de
l’accélération du taux d’extinction. Les causes sont nombreuses qui occasionnent l’extinction
des espèces. Mais toutes ces causes se ramènent à l’activité humaine sur les choses du
monde. Lorsque cette activité bouge et détruit les milieux naturels, elle renvoi les espèces
dans leur habitat. Le problème écologique est que toutes les choses la nature sont liées les
unes aux autres en signe d’écosystème, la disparition d’une espèce peut engendre celle des
autres dépendantes d’elle et ainsi de suite. Nous vivons dans une sorte des liens
interdépendants.

230
Hubert REEVES, et Fréderic LENOIR, Mal de terre, Paris, Éd. Seuil, 2003., p. 168.
231
Ibidem, p. 168.
232
Roger BARBAULT, Op. Cit., p. 287.

79
Menacé la biodiversité, c’est créer son propre départ. L’activité humaine menace la
biodiversité en majeure partie ; cette menace entraine des changements et le change aussi. Cet
arrachement contre les être non-humains de la nature se transforme en une bataille contre tous
nous plonge dans une embuscade qui « menace d’extinction de la population qui s’y
donne233 », prétend Michel Serres. Par force de justification rationnelle et par nos moyens
technologiques les humains détruisent l’ensemble de la nature. La conséquence de cette
philosophie de l’épuisement, « peut nous conduire tous ensemble, et non plus par localité, à
l’extinction automatique234 ».

II.4. LES SIX ÉVÉNEMENTS EN CRISE


Dans le livre temps des crises, Michel Serres consacre tout un chapitre où il souligne
la crise globale produite par les six évènements. La crise globale provient des actions
humaines posées au préalable. Cependant, dans une décennie tout a été transformé. Aucun
rapport de l’humain au monde et la nature à l’humain. Cette rupture de ce couple provient
d’une histoire qui date de très longtemps. Elle a été renchérie et occasionnée par les
technologies parce qu’elles touchent une poignée de la population à une vitesse lente, mais
lourde. C’est une nouvelle condition de vie pour l’homme et pour le reste du monde.235

En plus, la gravité dit d’un événement souligne Michel Serres se mesure à la longueur
de l’ère qu’elle traverse et les dommages qu’elle crée. Le premier évènement est la chute de
l’agriculture. Selon ce qu’analyse notre auteur, l’agriculture est l’activité de pâturage et
labourage. Elle a connu une chute au XXe siècle de 2%, parce que l’intérêt a diminué
constamment suite à rupture de l’être humain avec les choses du monde. C’est qui explique la
fin du Néolithique. C’est une situation délicate, une ignorance où le monde est perdu et
instable. Il s’agit en effet d’un double coup : le premier celui d’être citoyens, c’est-à-dire
vivre dans le monde et pensé à long terme. Etre à l’intérieur du monde pour penser au
monde ; le second coup est menaçant et venge les humains puisque le monde est ignoré et
elle réplique en retour.236

De plus, le deuxième évènement, c’est le transport. Le déplacement est un problème


accès complexe dans la crise, car nous ne savons pas si tout ce qui se dégage des automobiles
est nuisibles au système immuable des humains pour n’est pas être exposé aux différentes

233
Michel SERRES, Le contrat naturel, Paris, Éd Flammarion, 1992, p. 31.
234
Ibidem, p. 32.
235
Michel SERRES, Op. Cit., p. 11.
236
Ibidem, pp. 12-15.

80
maladies.237 Ensuite la santé est le troisième évènement de la crise. La santé est un aspect très
significatif pour la population. Jadis, c’était la maladie qui inquiétait le plus. Mais, de nos
jours, c’est la question de la santé des êtres vivants qui est à la table de tous parce que, au dire
de Michel Serres, nous avons ignoré les liens qui nous lient au monde, à la nature. Ce monde
que notre ignorance a fait maître et possesseur. Ce rapport a été rompu avec notre nature, en
retour, la rupture a engendré les nombreuses conséquences.238Le quatrième événement, est la
démographie. Selon Michel Serres, il y a explosion démographique de deux à sept milliards
humains qui n’ont pas une vie stable et peu confortable. En fait le changement et
réchauffement climatique influent.239

En plus, le cinquième événement qu’évoque l’auteur en crise, c’est la connexion.


D’après lui, nous avons coupé notre relation au monde parce que les technologies ont changé
nos liens de voisinages avec les choses du monde. Ces technologies ont transporté notre
habitat dans un autre espace. Conséquence ; « nous ne vivons plus dans le même gîte que nos
pères240 ». Enfin, le sixième événement, c’est les conflits. Selon le philosophe français, le
conflit commence quand l’humain a réussi à tuer ses semblables, c’est-à-dire les autres êtres
non-humains de la nature. La guerre emporte sur la vie. Selon Michel Serres, Darwin
signifiait que, l’humain avant d’arriver au stade où il se trouve à dû lutter (sélection et
évolution). Jusqu’au point où « les hommes devinrent, en ce temps, plus dangereux pour les
hommes que le monde241 ». Par les conflits, le monde est déséquilibré, transformé par une
crise de puissance. La crise de ces évènements est globale par le fait qu’elle quitte le
particulier, le local pour toucher tous les secteurs de la vie242.

Si aujourd’hui nous subissons les conséquences écologiques, c’est tout simplement


que nous avons créé un écart entre les fonctionnements de la nature et celle de la société
humaine. Ce rapport dissout aux choses du monde s’accroit davantage et crée des
conséquences inédites. Nous sommes ainsi à la finitude du monde parce que, ajoute le
philosophe français « nous pensions, courageux, que toute notre histoire consistait à lutter
sans cesse contre une force toujours plus haute et profonde que la nôtre243 ».

237
Michel SERRES, Le contrat naturel, Paris, Éd Flammarion, 1992, p. 15.
238
Ibidem, pp. 16-18.
239
IDEM, Op. Cit., pp. 18-20.
240
Ibidem, p. 21.
241
Ibidem, p. 23.
242
Ibidem, 25.
243
Ibidem, p. 32.

81
Que conclure sur les conséquences écologiques ? Les conséquences écologiques selon
Michel Serres est un message que les choses du monde nous transmettent. Ce message est
simplement le retour au monde. Les humains par leur intervention dans le monde, font subir
au monde une sorte de dérèglement et dysfonctionnement qui compromettent la stabilité et
l’équilibre des choses du monde. Ainsi, pour l’intérêt de tout le monde l’être humain doit
faire un retour vers ses origines afin de vivre autant que possible. Car les actions qu’ils posent
à la nature, sont des armes en retour de défense de la nature. L’académicien français nous
exhorte en disant : « il ne fallait pas que l’univers s’armât pour l’écraser : une vapeur, une
goutte d’eau suffisait pour le tuer244 ». La raison humaine véhiculée dans les techniques et
technologies à l’apex d’une puissance non contrôlée se transcrit aujourd’hui par un danger de
mort du collectif. Si le contrat naturel n’intervient pas, la nature se décidera de se sauvegarder
elle-même ; et là commence le danger que l’humain ne voit pas encore.

II.5. CONCLUSION
Pour conclure, tout au long de ce chapitre, nous avons évoqué la problématique du
progrès technique et ses conséquences. En effet, la problématique du progrès technique est
l’aspect central de la pensée serrésienne de l’écologie. Le progrès technique vient de ce que
produisent la culture et la politique. Culture héritée de l’histoire dualiste qui sépare l’humain
et la nature : sujet et objet. Cette culture se réalise dans la technique, pour transformer cet
objet qui est le monde (nature). Et la politique, cet art de gouverner. L’humain gouverne le
monde de la manière l’assujettir puisque son intérêt est de le maîtriser et le posséder.

L’être humain départ ses techniques crée une rupture avec la nature. Cette rupture a
coupé la communication avec les choses du monde. Ce dernier n’a que de termes techniques
et scientifiques. La science et la technique modifient le système et fonctionnement de la
nature sans s’en rendre compte. Pourtant, l’humain producteur de la science et technique est
lié à ce système et en tant que tel, il se met en danger. La nature se rappelle à lui, c’est-à-dire
le communique des blessures qu’elle a dû subir des actions technoscientifiques. Ces actions
viennent du fait que, la modernité est négligente au langage de la nature. Cette modernité ne
sait ni ne pense, n’agit en faveur de la nature. Elle est cependant une modernité qui nie la
valeur de l’autre. Par esprit et croyance anthropocentrique venu déjà avec le contrat social,
nous avons carrément abandonné et coupé le lien qui nous lie au monde.

244
Michel SERRES, Le contrat naturel, Paris, Éd Flammarion, 1992, p. 36.

82
Face ces obligations qu’imposent les conséquences écologiques, celle-ci ont impliqué
dans la pensée serresienne un contrat naturel avec lequel nous pouvons espérer vivre à long
terme. Tout a commencé par le résultat du premier chapitre où nous avons découvert en fait
comment est constituée la culture narcissique sur la nature. Cette culture ne tient compte que
de l’être humain. Nous sommons parti de l’idée selon laquelle, la culture a horreur du monde
dans cette situation, elle ne voit la nature à travers une grille de lecture qui n’a aucune chance
de nous sauver. Ainsi cette culture s’est matérialisée dans la technique comme finalité. De
cette finalité, le monde devient une transformation à la guise de l’être humain. Ces
techniques, par association à la science deviennent la technologie qui se progresse à une
vitesse, mais sans tenir compte du monde dans lequel elle produit. Et aujourd’hui toutes les
sciences deviennent techniques de pointe qu’on appelle nouvelles technologies ; puisqu’elles
sont manipulatrices. Tout ceci sans tenir compte des choses qui nous portent et donnent vie.
Et maintenant aujourd’hui, elles se mettent à nous rappeler qui nous sommes et parfois de
manière dangereuse car nos vies en dépendent. Les conséquences écologiques sont un
message que la nature nous envoi, à nous de prendre conscience à cela. Dans cette peur de
mourir, Michel Serres nous propose de passer un contrat. Ceci fait l’objet du chapitre qui suit.

83
CHAPITRE TROISIEME : L’ECOLOGIE DU CONTRAT ET DU SUJET
DE DROIT

III.O. INTRODUCTION

Le chapitre précédant nous a permis de saisir la problématique de l’écologie dans la


pensée serresienne. Depuis la révolution industrielle, la nature ne cesse de crier des douleurs
d’enfantement causées par le progrès technique qui ne tient pas compte parfois des choses de
la nature. Polluer et infecter sont les deux verbes qui mettent en danger le monde, y compris
l’humain. Nous héritière d’une culture a horreur du monde, nous avons inventé des
techniques qui transforment le monde. Aujourd’hui, ces techniques associées aux sciences
dures sont justement le mal écologique à la base d’une violence objective. Cette violence à de
nos jours des conséquences fâcheuses qui mettent en péril l’ensemble du globe. Certes, ces
conséquences sont par ailleurs une communication et interpellation adressées à l’humain pour
stopper sa violence et recourir au vivre ensemble. Car les conséquences ou réactions sont
dangereuses que les actions posées.

Ainsi, pour vivre ensemble et en harmonie, « nous devons décider la paix entre nous
pour sauvegarder le monde et la paix avec le monde afin de nous sauvegarder » et cela par un
contrat naturel. Le contrat naturel est la théorie de sauvetage que préconise Michel Serres en
écologie. Car selon lui sans contrat naturel, les humains et les choses du monde continueront
à se livrer la guerre jusqu’à l’extinction du plus faible. Alors, les humains ne doivent pas
courir ce risque. D’entrée de jeu, définissons le concept « contrat naturel » tel que l’entend
notre maître à penser. Selon lui, le contrat naturel est

D’abord la reconnaissance, exactement métaphysique, par chaque collectivité, qu’elle vit et


travaille dans le même monde global que toutes les autres ; non seulement que chaque
collectivité politique associée par un contrat social, mais aussi chaque collectif quelconque,
militaire, commercial, religieux, industriel…, associé par un contrat de droit, mais encore le
collectif expert associé par un contrat scientifique245
Cependant, l’objet de ce chapitre est de présenter, d’analyser, mais aussi de réfléchir
sur la question du contrat en droit. La thèse écologique serresienne prend source dans le droit
naturel et défend l’idée d’une nature : sujet de droit. Raison pour laquelle le titre du chapitre
cerne l’écologie du contrat, c’est-à-dire écologie prenant source dans le droit afin de voir
pourquoi et comment passer le contrat avec la nature. C’est une écologie plaidant une nature
objectivée.

245
Michel SERRES, Le contrat naturel, Paris, Éd Flammarion, 1992, p. 78.

84
III.1. DROIT DE L’ETRE HUMAIN ET NON DE LA NATURE

La crise écologique vient du fait que notre culture contemporaine, héritée de


l’histoire, a horreur de la nature. Cet héritage historique nous a fait croire que nous ne
dépendons pas de la nature, et ce, depuis les trois droits qui fondent notre relation à nos
semblables. Ceux-ci (droits) ont exclu de manière délibérée la nature au rang du sujet de
droit. Pourtant, l’être humain ne vit pas seul dans son milieu. Il est autour des bêtes, plantes,
eau, air, tous les inertes, etc. Mais notre héritage juridique a fait abstraction aux autres êtres
qui vivent avec l’humain. Et élève celui-ci au rang supérieur. Comme conséquence ; seul
l’être humain est sujet. Cette déclaration anthropocentrique est à l’origine du malheur de la
nature. C’est pourquoi, Michel Serres dans Le contrat naturel explique ce fait en analysant la
question de trois droits fondamentaux qui nous gouvernent tous.

Le premier confère à l’humain le statut du sujet et écarte la nature du rang du sujet.


D’après Michel Serres, par le contrat social, l’humain passe de l’état de nature vers l’état
social, où il forme une société avec ses semblables. Ce contrat a fait de l’humain un être
vivant dans la société avec des lois, droits et devoirs. L’objectif de ce contrat, comme le
souligne Jean-Jacques Rousseau, est que : « Chacun de nous met en commun sa personne et
toute sa puissance sous la suprême direction de la volonté générale ; et nous recevons en
corps chaque membre comme partie indivisible du tout246 ». Les liens sont noués, la violence
interdite, le droit de chacun est respecté. Cependant, le contrat, tacitement et virtuellement
signé par les humains, ne parle que d’eux et exclut de manière délibérée les autres choses de
la nature. Il relate en effet l’origine de la sociabilité qui mît les hommes ensemble dans un
collectif de force.247

De ce qui précède, pour l’académicien français, le contrat social fait entrer l’humain
dans l’histoire du monde en lui conférant un droit auquel le pouvoir lui a été donné. De ce
fait, l’être humain a oublié la nature à partir de ce contrat. Par conséquent, la nature devient
antérieure à l’humain, muette devant ce droit, inerte et objet sans valeur, etc. Ainsi, la notion
juridique qui octroie à l’être humain comme seul sujet de droit commence par le contrat
social, et même le droit naturel moderne fera de la nature seulement ce qui est dans l’humain.
Les autres êtres de la nature sont rejetés du droit. Vu qu’il n’y a sinon il n’y a aucun droit de

246
Jean-Jacques ROUSSEAU, Du contrat social. Ecrits politiques, œuvres complètes, Paris, Éd. Gallimard,
1964, p. 360.
247
Ibidem, p. 62.

85
la nature, celui-ci sera vu par l’humain comme un objet à service. Pourtant, la nature est un
sujet ayant ses droits.

De plus, le second droit qui viendra renforcer la visée du contrat social, est le droit
naturel. Selon Michel Serres, la définition qu’on donne au droit naturel signifie tout
simplement : « un ensemble de règles qui existeraient en dehors de toute formulation ; parce
que universelle, il découlerait de la nature humaine ; source des lois positives248 ». A ce qu’il
parait, ce droit disqualifie la nature en général ; et prend en compte seulement la nature
humaine. Autrement dit, il prend la nature comme l’humain et le reste ne fait pas partie de la
nature. De ce fait, le droit naturel compris par le moderne confère à l’être humain le droit, et
les autres choses de la nature n’ont aucun droit. Elles sont rangées aux oubliettes parce
qu’elles sont sans aucun droit qui le protège. A ce propos, notre auteur souligne que « la
nature se réduit à la nature humaine qui se réduit à l’histoire, sait à la raison249 ». Ainsi, les
humains requièrent le statut de sujet de droit. Et donc, le monde disparait du droit.

Enfin, le droit que Michel Serres analyse en dernière position induisant le monde en
erreur est la déclaration des droits de l’homme. Qui dit droits de l’homme voit uniquement
l’être humain seulement dans ce qui lui est confié par ce droit : sa liberté, son droit, son
devoir. Signifions en passant que la déclaration de droit de l’homme émane du droit naturel.
Celle-ci atteste Michel Serres, « elle ignore et passe sous silence le monde250 ». Cette
déclaration ne prend en compte que les valeurs de la nature humaine. Elle rejette cependant la
nature dans sa totalité. Et donc la victime dans cette déclaration reste la nature en général.
Pourtant, si on analyse bien l’affaire, l’essence du droit de cette déclaration, elle est celle de
vouloir défendre le pauvre, le faible, le plus démunis, les misérables, etc. Alors ses propos ne
voient que la nature humaine, oubliant les êtres du monde : l’eau, l’air, l’arbre, la terre, etc.
Cette déclaration les exclut.

En outre, les trois droits ont une chose en commun. Ils réduisent les choses de la
nature comme des objets qui ne peuvent pas concerner le contrat des humains, ces objets sont
donc passifs et il n’y a que l’humain qui est concerné par ce projet du droit. Et ce droit,
l’humain s’en approprie à leur insu. Par conséquent ; « le sujet de la connaissance et l’action
jouit de tous les droits et ses objets aucun. Ils n’ont encore accédé à aucune dignité

248
Michel SERRES, Le contrat naturel, Paris, Éd Flammarion, 1992, p. 62.
249
Ibidem, p. 62.
250
Ibidem, p. 63.

86
juridique251 », c’est la raison pour laquelle nous les détruisons. Le contrat social devient ainsi
mortifère et dépassé conclu Michel Serres. Ainsi, reste de revoir le droit naturel pour accorder
à la nature le statut d’être sujet de droit.

III.1.1. L’IDEE DU DROIT NATUREL ET SUJET DE DROIT


La nature est constituée des choses connues et inconnues : êtres vivants, inertes,
objets animés et inanimés, etc. Ces choses sont organisées dans une relation
d’interdépendance. Edgar Morin dit même que, « le tout est à la fois plus et moins que la
somme des parties, que le tout est plus et moins que le tout, que le tout, que les parties sont
plus et moins que les parties252 ». Elles sont constituées en effet en écosystème. Ce qui veut
dire autrement, l’une entraine l’autre et vice versa. Cependant, aucune de ces choses n’est
sujets sans que les autres ne le soient. Elles sont tous sujets ensembles et tous objets
ensembles. Toutes sont régies par un principe de dualité (visible-invisible, universelle-
particulier, etc.). Pour les vivants, tous ont le droit de vivre et tous ont le devoir l’un envers
l’autre. Ils constituent un ensemble et forment un système ; ont tous droit à la vie. La
question reste celle de savoir de quel droit sont tous soumis ?

De ce qui précède, le droit posé vient d’un fondement que les philosophes classiques
appellent droit naturel. Ce droit a fait longtemps objet de discussion. La question du droit
naturel et sujet de droit a posé un problème durant l’histoire de la philosophie. Car pour
certains philosophes, il y a de droit que celui qui est posé. Et pour d’autres, le droit posé à un
fondement sur la nature. De ce fait, lorsqu’il s’agit du droit naturel, celui-ci fait référence à
un droit « qui ne peut naître de l’exercice d’un pouvoir, d’une volonté, d’une décision 253 »
des individus prisent comme tels. C’est un droit qui se découvre et se constate dans la
manière d’être. Il se découvre dans la nature des choses. Les classiques soulignent que le
droit naturel est un droit de nature, d’un ordre d’ensemble. Partant de cette affirmation des
classiques, il résulte que le droit naturel signifie tout simplement que, toutes choses dans
l’univers possèdent un droit. Etant ainsi, ils sont sujets de droit. Posséder un droit, à lire
Jacques Leclercq veut dire, avoir « un pouvoir, […] une liberté morale254 ».

Beaucoup de philosophes ont ramené le droit à la nature humaine. Ainsi, l’humain


devient comme premier à vouloir naître de l’exercice du pouvoir. Partant de cette optique, le

251
Michel SERRES, Le contrat naturel, Paris, Éd Flammarion, 1992, p. 64.
252
Edgar MORIN, La méthode 2. La vie de la vie, Paris, Éd. Seuil, 1980, p. 20.
253
Christian ATIAS, Philosophie du droit, Paris, Éd. P.U.F., 1999, p. 150.
254
Jacques LECLERQ, Leçons de droit naturel I. Fondement du droit et de la société, Louvain, Éd. Namur,
1947, p. 12.

87
droit naturel fait naître une confusion totale dans la compréhension. Cette confusion, à en
croire Christian Atias a fait que, « le droit naturel […] a ouvert la voie aux droits
naturels255 ». La réalité du droit naturel devient en effet dénaturée du fait qu’elle est attachée
au réalisme qui s’oppose à la théorie. Conséquence ; il y a d’un côté le droit en tant que
réalité subjective et de l’autre côté comme un idéal. Ceci par le pire vouloir isoler l’être
humain du reste de la réalité monde.

De ce qui précède, le droit naturel renvoi de ce fait à deux choses : nature comme
reflet de l’Être parfait et nature comme réalisme humain. Cependant, le droit naturel « évoque
un ordre d’ensemble. Il s’apparente au cosmos. Ce monde hiérarchisé où chacun avait sa
place256 ». De ce fait, tous êtres de la nature sont par le fait même sujet de droit, parce qu’ils
sont gérés par la loi de la nature avec laquelle tout le monde a droit : la vie. Michel Serres
souligne, à ce propos, que c’est ce droit classique qui est justement le fondement du contrat
naturel. Ce droit tient compte des généralités du cosmos, son contenu est par ailleurs
déterminé par l’ensemble des choses de la nature. C’est dans ce sens que la théorie du droit
naturel ne doit pas être une création d’une volonté humaine à la manière du contrat social.
Plutôt qu’au-delà du contrat social.

A cet effet, signifions que, la question du droit naturel se pose avec beaucoup plus
d’inquiétude, puisqu’elle est une question sans réponse, d’autant plus qu’elle est recherchée
dans l’application. La querelle qui tourne autour du droit naturel se fonde sur l’application du
droit. Pour Christian Atias, le droit naturel classique fait de la question du droit une recherche
de la connaissance.257 Si tel en est le cas, la connaissance et la conscience sont de ce fait le
critère de ce droit sur lequel le contrat naturel trouve place. Il y a alors la problématique du
droit et devoir. Le droit comme conscience et devoir comme connaissance. Dans cet ordre
d’idée, le droit, pouvoir moral et devoir comme nécessité morale, s’articulent entre les choses
du monde. D’après Michel Serres, jadis était sujet de droit les citoyens romains ou les
citoyens athéniens. Les restes n’étaient pas considérés comme sujet de droit par
conséquence ; le droit ne leur conféré pas un droit et personne n’avait un devoir envers eux.
Ils étaient en effet « ceux pour qui il fallait se porter aval258 ». Avec cette notion, toute chose
de la nature devient sujet. En ce sens, dire que j’ai le droit de faire tel acte ou tel autre ; cela
suppose que c’est affirmer en même temps l’autre a le devoir de me laisser faire et vice versa.

255
Christian ATIAS, Philosophie du droit, Paris, Éd. P.U.F., 1999, p. 151.
256
Ibidem, p. 152.
257
Ibidem, p. 164.
258
Michel SERRES, Art. Cit., p. 5.

88
Le droit et le devoir sont corrélatifs. Leclercq soulignait dans son livre cité en bas de
page que, « Seul sur terre l’homme est un sujet de droit parce qu’il est susceptible d’affecter
ses actes de ce caractère spécial qu’on appelle le caractère moral 259 ». Cette affirmation
contredit, en effet, la corrélation entre droit et devoir. Pourtant, nous savons bien que, le droit
naturel est fondé sur la nature en sa totalité, non seulement que l’humain a droit à la vie, pour
supposer en retour que la nature a le devoir de lui procurer la vie ; corrélativement la nature a
droit et l’humain a le devoir de respecter le droit de la nature. Entre d’autres termes, si
l’humain a un devoir envers la nature, cela suppose que la nature dans sa totalité a un droit
face à l’humain et ce droit, c’est la vie de tous. La nature est sujet de droit veut dire pour
Michel Serres, un bien qui n’appartient à personne, une valeur autonome et universel où une
chose est un quasi-sujet de droit. La question est celle de savoir de quel droit devons-nous
fonder l’argument selon lequel, la nature est un sujet de droit ? Il répond que c’est le « droit
de propriété260 », celui qui considérait la nature comme un objet privé de l’humain que nous
devons combattre et se factoriser sur le droit naturel classique incluant la nature extérieure de
l’humain.

En outre, à lire le nouvel ordre écologique de Luc Ferry, celui-ci souligne un fait qui
doit pousser l’humain à considérer la nature comme sujet de droit. Celui-ci dit : « dès lors ce
monde que nous avions traité comme un objet redevient sujet, capable de se venger : abimé,
pollué, maltraité, c’est lui qui nous menace aujourd’hui de nous dominer à son tour261 ». La
question du sujet de droit, partant de ce qui vient d’être dit ci-haut et des affirmations de Luc
Ferry, il y a lieu de donner à la nature le statut de sujet de droit. Car, selon la philosophie
serresienne, les réactions de la nature sont contraignantes de globalisation renaissante,
d’extinction collective. La nature donne logement et habitat à l’humain, la chauffe et la
nourrit. Elle a la capacité de le détruire dans un laps de temps quand il abuse, elle conditionne
la nature de l’être humain, le fait vivre. Elle se conduit comme un sujet, une âme par
excellence, capable de recevoir, traiter, conserver et transmettre.262 La nature est l’hôtesse qui
nous accueille, nous met au monde, nous nourrit et fait de nous ce que nous sommes.

Cependant, si l’humain ose d’abuser, la nature le détruit sans qu’il ne se rende


compte. Michel Serres appel ce comportement destructif de l’humain comme parasite. La

259
Jacques LECLERQ, Leçons de droit naturel I. Fondement du droit et de la société, Louvain, Éd. Namur,
1947, p. 13.
260
Michel SERRES, Art. Cit., p. 6.
261
Luc. FERRY, Op. Cit., p. 122.
262
Michel SERRES. Op. Cit., p. 64.

89
justice face ce problème est d’être contre aux abus parasitaires et revoir la question de qui
peut être appelé un sujet de droit. Déjà le droit naturel classique bannit cette justice
anthropocentrique héritée du contrat social qui considère l’humain comme seul sujet de droit
avec ses déclarations anthropocentriques : « tout homme [ou] seuls les hommes ou les
hommes seuls263 » ont droit. A lire Hans Jonas dans Principe responsabilité, celui-souligne
que la question de la subjectivité de la nature doit être une autre éthique qui doit aller au-delà
du seul intérêt de l’humain. Ceci parce que « non seulement pour notre bien, mais également
pour son propre bien et de son propre droit264 ». Ainsi, le philosophe allemand Hans Jonas
demande la révision des fondements de l’éthique humaine et universelle. Celle-ci doit
cependant être extrahumaine, c’est-à-dire qu’elle doit être d’abord un droit pour la nature,
ensuite l’éthique doit aller au-delà « de la reconnaissance de fin en soi de la sphère de
l’homme265 ». L’enjeu est celui de fonder le droit et l’éthique partant de la doctrine de l’être
(métaphysique).

De ce qui précède, la nature est sujet de droit, cela ne revient pas à l’humain de lui
confier ce statut parce qu’elle est de fait même sujet qui produit d’autrui sujet y compris
l’humain. Les objets de la nature eux-mêmes sont « sujets de droit et non plus simples
supports passifs de l’appropriation266 ». Michel Serres, en voulant octroyer à la nature le
statut de sujet de droit, cherche à maintenir l’équilibre entre l’humain et nature. Cet équilibre
est que tous (humain-nature) sujets ensemble et tous objets ensemble. Cet équilibre vient de
la revendication des objets de la nature par le fait que l’humain les rend victimes de tout le
temps, partant du Contrat social. Ces objets de nos jours se vengent à nous humains et
réclament leurs statuts, des sujets de droit. Il ajoute qu’« il nous reste à penser une nouvelle
balance, délicate, entre ces deux ensembles de balances267 ». Cette balance met d’un côté
l’humain sujet de droit et de l’autre côté, la nature sujet de droit. Ainsi, le droit traite
maintenant les causes et reconnaissent l’existence des choses de la nature comme partie
intégrante de la société dans laquelle l’humain existe avec d’autres sujets. De ce fait, il y a
une relation équilibrée entre l’humain et la nature où « les hommes passent par les choses [et]
aux choses passent par les hommes268 ». Le rapport est celui de sujet-sujet. Si tel est alors le
nouveau rapport reste alors de savoir comment quitter la violence objective pour arriver à un

263
Michel SERRES, Le contrat naturel, Paris, Éd. Flammarion, 1992, p. 65.
264
Hans JONAS, Op. Cit., p. 26.
265
Ibidem, p. 27.
266
Michel SERRES, Op. Cit., p. 66.
267
Ibidem, p. 66.
268
Ibidem, p. 78.

90
autre compromis. Certes, nous analysons l’objet et les conséquences de la violence objective
pour aboutir à la théorie du contrat.

III.1.2. DE LA VIOLENCE SUR LA NATURE AU CONTRAT

Plus haut, nous avons évoqué la violence objective où nous avons souligné que
l’histoire est constituée des guerres et des conflits. Ces guerres opposent les nations entre
elles ; les humains entre eux, etc. Elles sont subjectives parce qu’elles ne concernent que les
intérêts des sujets et « elles ne commencent qu’avec l’histoire et l’histoire commence avec
elles269 ». Elles ne concernent que les problèmes des sujets, des puissances et dominations
subjectives. Néanmoins, la nature aujourd’hui nous alerte face à ce que nous posons comme
action (le gaz à effet de serre, la déforestation, l’usage des engrais chimiques appauvrissant le
sol, etc.). Cette alerte est une menace de mort pour le vivant. Celle-ci réussit à unir tous les
belligérants de la guerre subjective autour d’une violence commune. Résultat : c’est la
mobilisation générale. Les belligérants se regroupent en bloc commun pour se battre contre le
troisième ennemi concurrentiel. Cependant, le troisième ennemi n’est rien d’autres que les
catastrophes, conséquences ou crises écologiques qui menacent l’ensemble de la planète. Ces
conséquences écologiques sont pour Michel Serres, un ennemi commun, fort et puissant de
tous les humains, peuples et nations, que nous devons avoir peur parce qu’il est très puissant,
très armé pour nous anéantir. Si rien ne fait ; nous allons disparaitre sans lui.

De plus, devant les menaces écologiques, les humains se sentent interpeller par la
puissance de la nature (le réchauffement et changement climatique, les pandémies et autres
maladies, etc.), ils s’orientent tous vers elle pour stopper, atténuer ou réfléchir autrement pour
trouver une solution contre celles-là. Pour dire, les humains laissent leurs intérêts privés pour
un intérêt commun. Cet intérêt les unifie puisque leurs vies sont en danger. Nous n’avons
qu’avoir les informations sur le feu qui brule certaine forêt suit au réchauffement climatique.
Les humains commencent à dépendre des choses de la nature qu’ils ignoraient. Avec ces
catastrophes écologiques, nous ne savons pas où nous abriter ; l’humanité en général est dans
l’impasse des conséquences écologiques qui nous demandent une autre manière de vivre.

La brutalité des actions humaines contre la nature est en fait à l’origine de la réaction
de cette dernière. Cette brutalité que se livrent les humains, notre auteur l’appelle par
violence objective par le fait que tout le monde se donne à violenter la nature. Mais le
problème maintenant est qu’elle commence à répliquer de manière violente à tout le monde

269
Michel SERRES, Le contrat naturel, Paris, Éd. Flammarion, 1992, p. 32.

91
sans exception. Cependant, les choses auxquelles que les humains se livre de combattre sont
parfois invisibles dans le monde mondial : la terre. Le danger est que « le monde ne passait pas
pour fragile ; au contraire menaçant, il triomphait aisément des hommes, de ceux qui gagnent les
batailles et des guerres elles-mêmes. Le sable mouvant absorbe ensemble les deux combattants
[subjectifs]270 ». Donc, la nature plus forte, vain les humains et ces derniers sont vaincus en
dernier après avoir longuement violenté celle-là. Michel Serres explique en effet les
préalables de son contrat naturel, les conditions dans lesquelles il a écrit Le contrat naturel.
Ce dernier fut écrit, comme dit Luc Ferry, lorsque « les problèmes posés par la dévastation de
la terre sont devenus globaux271 » dans notre histoire humaine.

Cependant, la conception qu’à notre auteur au sujet de la guerre, tient une racine
juridique du contrat. Il prend les notions des droits pour expliquer qu’est une guerre. C’est en
ce sens que qu’il dit que la guerre est un de fait de droit, car il y a une relation entre deux
personnes. Ceci veut dire autrement que, il y a un contrat entre les deux. Ce contrat est de
manière virtuelle, il s’appuie sur les convictions personnelles, avec lesquelles « deux groupes
décident, d’un commun accord sur lequel ils statuent, de s’adonner à des batailles, rangées ou
autres272 » ; ainsi, la violence commence. Ensuite, il y a conflit, c’est-à-dire association du
contrat et de la violence. Michel Serres le décrit sur le tableau de Goya dans lequel il présente
deux combattants sur un sable émouvant.

La métaphore de ce destin est le message qu’il transmet. Ce tableau que l’auteur


remet sur la couverture du livre (Le contrat naturel) représente le rapport des humains face au
monde actuellement. La lutte entre les deux belligérants représente les conflits et guerre que
les humains se font entre eux. Celles-ci ont atteint la nature dans ses dimensions. Le sable
émouvant est la nature. Cette dernière a une force d’en porter les belligérants, peu importe la
victoire ou la défaite. Les réactions écologiques sont en faits l’émouvante sable qui engloutit
les humains.

De ce fait, il y a violence quand tous les humains se battent tous avec la nature comme
ennemi. Malheureusement, à entendre Michel Serres : « il n’en existe aucun [droit] pour la
violence objective, sans limite ni règle273 ». En ce sens, pour sauver l’ensemble de tous les
humains contre un ennemi puissant et sans menace de mort collective ; il dit : « il nous faut
inventer un droit pour la violence objective ; [un] nouveau pacte, nouvel accord préalable,

270
Michel SERRES, Le contrat naturel, Paris, Éd. Flammarion, 1992, p. 28.
271
Luc FERRY, Op. Cit., p. 122.
272
Michel SERRES, Op. Cit., p. 30
273
Ibidem, p. 32.

92
que nous devons passer avec l’ennemi du monde humain274 ». Ainsi, l’auteur propose un
contrat pour garantir notre survie face à cette violence objective. Le vouloir stopper la
violence objective a fait naitre le contrat naturel. Le contrat avec la nature, « équivaut en fait
à un traité de paix signé, non pas entre les nations, mais entre l’espèce humaine et la nature
extérieure275 », souligne Jean Onaotsho Kawende.

De ce qui précède, l’humain doit chercher à garder le calme, briser toute violence et
guerre pour mieux vivre. Le contrat est le seul espoir afin de renouer avec la relation datant
avant le contrat social, pour que notre histoire humaine puisse avoir un fondement. Précepte
qui nous lie au monde en général. Pour ce qui concerne la visée du contrat, celle-ci a pour
horizon le long terme ; un pacte avec le monde des choses. Le contrat naturel nait pour
croiser les deux droits (naturel classique et contrat social). La question pendante est celle de
savoir : avec quel droit et sujet que ce contrat sera effectif ? Il s’agit du droit de propriété.
Ainsi, se forme les thèses du contrat naturel partant des thèses du contrat social.

III.2. LE CONTRAT NATUREL


Le dualisme séparant l’humain de la nature et la recommandation cartésienne (devenir
maître et possesseur de la nature) ont fait croire à l’humain qu’il était un être fort, puissant et
indépendant de la nature. De cette force et indépendance, l’humain s’est mis à polluer son
milieu d’habitat, tuer les autres espèces animales que végétales, transformer les matières
premières selon son plein gré. A l’ère actuelle, ces actions ont fini par avoir des conséquences
en retour. Ces dernières montrent à l’humain sa faiblesse, ses limites et ce qu’il risque s’il
n’arrête pas, car sa vie en dépend. Le monde se rappelle à nous et nous invite à faire un
retour, car « l’irresponsabilité ne dure que pendant l’enfance276 ». Nous sommes déjà adultes,
nous devons penser à conclure un pacte, un contrat qui doit reconnaitre la conduite de la
nature comme sujet. Pas n’importe lequel, mais un sujet de droit.

Avant d’avancer avec les arguments, nous devons comprendre ce que notre auteur
entend par contrat naturel. D’après Michel Serres, le contrat naturel est avant tout une
reconnaissance de l’humain et du droit de manière métaphysique par la totalité des choses de
la nature, associée par un contrat au-delà, et universelle à toutes ces choses. Fondé sur le droit
naturel classique incluant la nature extérieure de l’humain :

274
Michel SERRES, Le contrat naturel, Paris, Éd. Flammarion, 1992, p. 33.
275
Jean ONAOTSHO KAWENDE, Op. Cit., p. 191.
276
Michel SERRES, Op. Cit., p. 69.

93
« J’entends par contrat naturel d’abord la reconnaissance, exclusivement métaphysique, par
chaque collectivité, qu’elle vit et travaille dans le même global que toutes les autres, non
seulement chaque collectivité politique associée par un contrat social, mais aussi chaque
collectif, militaire, commercial, religieux et industrielle… associé par un contrat de droit,
mais encore le collectif expert associé par le contrat scientifique277 ».
Si l’on essaye de bien comprendre, le contrat vient abolir la séparation faite entre
l’humain et la nature. Cette absolution permet à l’humain de n’est plus considéré la nature
comme un objet, mais comme sujet à part entier. Par la signature du contrat, il y a alors un
rapport qui nait entre les deux. Ce rapport envisage une compréhension entre les deux
opposés. Il y a alors, si nous comprenons l’enjeu de contrat, une obligation. Cette dernière est
l’octroi des droits aux choses de la nature. Sur ce, le contrat met et crée un réseau de survie.

Par ailleurs, l’idée du contrat naturel va dans un angle opposé à celui de Jean-Jacques
Rousseau. Le contrat naturel se fonde sur l’idée d’un droit naturel classique et le contrat
social se fonde sur un droit naturel moderne. L’idée de notre auteur est de ne pas considérer
l’humain particulier comme un universel statuant toutes les choses de la nature. Logiquement
parlant, c’est une erreur. L’enjeu est d’être dans une logique où toutes les choses de la nature,
comprise l’humain sont unies par un intérêt commun.

Nous sommes maintenant forcés de faire entrer toutes les choses de la nature en tiers
dans le droit, la politique, la société, l’éducation, etc. D’après le philosophe français, nous
avons eu un jeu à deux dans lequel le monde était mis à l’écart parce que considéré comme
objet sans valeurs ; voici maintenant arrive le nouveau jeu à trois qui remplace la triade
(prêtre, soldats et producteurs de richesse) dans chaque fonction où nous devons maintenant
jouer autrement.278 Le contrat avec la nature ou le monde, il est question de l’attribution et de
la propriété. Lorsque les deux belligérants jadis signèrent ce contrat, les deux de nos jours
partenaire, le signent, le juge leur attribue ce que chacun lui appartient de faire pour garder le
calme et l’harmonie entre eux. Dans le cas sous examen, l’attribution n’est que la
recommandation de la paix, de l’amour et de la vie en symbiose où chaque partenaire en
symbiose avec l’autre doit nécessairement rendre de droit à l’autre. Aucun droit de propriété
n’est accepté puisque chacun vit en ayant conscience de l’autre.

Ceci étant, le contrat naturel envisagé en écologique par Michel Serres est un contrat
qui a pour fondement dans le droit naturel à la manière de classique qui intègre toute la nature
extérieure et intérieure à l’humain. Scientifiquement, il associe les doctes et les littéraires à

277
Michel SERRES, Le contrat naturel, Paris, Éd. Flammarion, 1992, p. 78.
278
IDEM, Op. Cit., p. 40.

94
intégrer les choses du monde dans leur réflexion comme symbiote. Où il y a en effet un traité
entre l’humain et le reste du monde. Comme l’a souligné aussi Jean Onaotsho que « ce traité
équivaut en effet à un traité de paix, signé, non pas entre les nations, mais entre l’espèce
humaine et la nature extérieure279 » Il est cependant un retour à la nature générale des choses
du monde. Un retour de conscience du danger qui frappe à la porte et entre sans dire mot.

S’il en est ainsi, lorsque le contrat est signé, toute domination de l’humain sur la
nature est alors exclue, car le contrat est signé par amour et par éducation symbiotique avec le
monde. Ainsi, le savoir scientifique ou la connaissance n’est plus synonyme de propriété
privée ou l’action de maîtriser quoique ce soit. Il est symbiotique, parce qu’il admet le droit
de la nature et de l’humain dans les deux significations. Si avant le contrat avec la nature,
l’humain était méconnaissance des biens et services que la nature lui a rendus, par le fait de le
piller, polluer sans prendre conscience de son caractère parasitaire où il s’est lui-même
condamné à mort ; le contrat naturel lui offre une chance de survie.

Le contrat naturel ou contrat avec la nature est la théorie serresienne de l’écologie ;


théorie qui se fonde sur le droit naturel classique pour briser le droit de propriété énoncé par
les philosophes des lumières avec l’idée du droit naturel moderne. Dans Le contrat social,
l’être humain nait comme le seul sujet ayant des droits, seul capable à pouvoir passer le pacte
avec ses semblables. Par analyse, ce contrat comme dit ci-haut ne tient pas compte des autres
êtres du monde avec lesquels l’humain est en communication. Il devient ainsi exclusif du fait
que, le reste du monde n’est pas invité à passer ce contrat. Le souci qu’a Michel Serres, à en
croire Jean Onaotsho est « de supplanter aux insuffisances du contrat social et de prendre en
compte les droits de tous les délaissés280 ». Faire sortir la nature du droit de propriété dans
lequel l’humain l’a placé.

Cependant, la théorie du Contrat naturel introduite par notre auteur répond à la


question de la crise écologique et vient supplanter celle dite sociale. Elle est universelle et
inclut toutes les autres choses de la nature sans exception. D’après Michel, une fois les
humains entrent dans la nature pour se considérer un de la nature parmi tant d’autres, le droit
entre aussi dans la nature. Ceci fait que, le particulier entre dans l’universel, le simple dans le
collectif, tous, nous devenons sujets dans la nature, le local dans le global et notre « rapport
renouvelé que nous entretenons désormais avec le monde, notre maître jadis naguère notre

279
Jean ONAOTSHO KAWENDE, Démocratie, technoscience et écologie. Champs pragmatiques de la
rationalité pluraliste, Louvain, Éd. Academia-Harmattan, 2017, p. 191.
280
Ibidem, p. 191.

95
esclave, toujours notre hôte en tout cas maintenant notre symbiote281 » sera renoué où tout le
monde veillera sur l’autre. La théorie écologique du contrat naturel ou contrat avec la nature
est une théorie qui envisage la symbiose entre tous les êtres vivant sans aucune exclusivité
quelconque.

L’écologie du contrat signifie un retour à la nature, une exclusivité au contrat social,


mais passation du contrat avec la nature en symbiote et réciprocité entre les êtres de la
nature : « où notre rapport aux choses laisserait maîtrise et possession pour l’écoute
admirative, la réciprocité, la contemplation et le respect […] contrat de symbiose282 ». Ainsi,
pour dire, en d’autres termes, un contrat qui va au-delà des philosophes théoriciens du droit
de propriété. Au-delà dans la mesure où aucun n’être vivant ou composant de la nature est
exclu. Cela dit, dans ce contrat, les symbiotes ou contractants sont régis par des relations
symétriques, dialogique et dialogale où la communication est réciproque.

Dans le Contrat social selon Jean-Jacques Rousseau, l’objectif était celui de trouver
une forme d’association commune qui défendrait et protègerait toute la force commune des
personnes associées et leurs biens, où chaque contractant s’unit à tous les autres, obéit à lui-
même et reste libre. Le contrat naturel unit l’humain à la nature et la nature à l’humain.
Quand bien même l’humain a un caractère parasitaire accumulé par son droit de possession et
maîtrise où il prenait tout sans rien donnait à la nature alors que, la nature qui l’accueille
victime donne tout sans rien recevoir de l’humain. L’écologie du sujet de droit ou du contrat
modifie cette trajectoire parasitaire, malveillante. Plus universel et global que les anciens
contrats, le monde est sujet de droit. Dans un monde mondial, le savant dit ce qu’est le monde
et dans l’histoire283 en équilibrant la puissance faible de l’humain et la faiblesse force de la
nature.

Par ailleurs, les clauses du contrat sont que toutes les choses de la nature sont sujettes
de droit. Elles sont considérées comme être vivant susceptible d’un droit en cas de violence.
Ce statut d’être sujet de droit condamne en effet souligne Michel Serres à « mort celui qu’il
pille et qu’il habite sans prendre conscience qu’à terme, il se condamne lui-même à
disparaitre284 ». Ceci de fait le credo du contrat naturel. Et donc ne fais pas à autrui ce que tu
ne veux pas qu’on fasse de toi. La réciprocité symbiotique signifie dans ce cas ; autant que la

281
Michel SERRES, Le contrat naturel, Paris, Éd. Flammarion, 1992, p. 67.
282
Ibidem, p. 67.
283
Ibidem, p. 78.
284
Ibidem, p. 67.

96
nature donne à l’homme, autant l’homme doit rendre à celle-là, devenue sujet de droit285. Si
nous réfléchissons sur cette problématique, nous rendons compte que l’idée est
anthropomorphisée dans le sens où nous donnons le caractère humain à la nature. C’est vrai
qu’à première vue, telle peut être l’argument. Mais, l’enjeu ici était celui de changer le statut
de la nature de l’objet sans droit vers le sujet du droit, partant des biens et services que celle-
ci nous rend, plus l’humain. Ces services et biens sont donnés gratuitement à l’humain qui
prétend être seul sujet de droit, par conséquence ; ils méritent un respect et un comportement
amoureux.

L’amour devient une des conditions sine qua none. Il faut qu’il ait de l’amour entre
les deux parties. D’après Michel Serres, « sans amour, pas de lien ni d’alliance286 ». Cet
amour de s’aimer l’un envers l’autre est une loi globale qui supprime l’agressivité et la
violence. La nature entre dans l’histoire. Et l’humain entre dans le monde. La loi de l’amour
résulte du contrat naturel dans lequel l’humain et la nature légifère les lois pour briser la
haine qui a amené cette séparation entre les deux depuis les origines de notre histoire
moderne.

De plus, le pacte social que Michel Serres appelle pacte de courtoisie où qui a
engendré toutes ces considérations narcissiques jusqu’aux guerres subjectives et à la violence
objective, les contractants sont liés par aliénation. Le contrat avec la nature averti la totalité
de la nature et des humains que « le collectif, s’il se déchire, immédiatement, se livre, sans
recul ni recours possible, à la destruction de sa niche fragile, d’un habitat privé de
supplément287 ». L’équilibre et l’harmonie se jouent sur le collectif de toutes les choses du
monde. L’enjeu du pacte naturel est de garder cet équilibre symbiotique. A ce propos, la
différence entre ces deux contrats, réside dans l’applicabilité extensive, dans le statut et la
finalité. Le premier contrat dit social ne s’étend que sur les humains, alors que le second est
extensif, il va jusqu’à la totalité des choses du monde. Le premier ne considère que l’humain
comme sujet de droit, mais le contrat avec la nature fait de toutes les choses de la nature des
sujets de droit. Le contrat social est pour nous sociologique, en revanche le contrat naturel est
biologique et juridique. Tous deux se fondent et ont pour origine la peur. A la différence, le
contrat naturel n’aura lieu que par une éducation politique et sociale inouïe et longue qu’il
appelle la tierce instruction.288 Ainsi donc, c’est l’éducation qui est à la solution du contrat.

285
Michel SERRES, Le contrat naturel, Paris, Éd. Flammarion, 1992, p. 68.
286
Ibidem, p. 82.
287
Ibidem, pp. 70-71.
288
IDEM, Op. Cit., p. 252.

97
Sans éducation, les maux continueront toujours à se répercuter sur les choses du monde. Et
celles-ci en retour vont répliquer jusqu’à faire disparaitre l’humain comme dans l’histoire des
vivants.

La question reste de savoir où et quand signer ce contrat comme Jean jacques


Rousseau, pour Michel Serres ce contrat naturel est métaphysique, c’est-à-dire, au-delà de ce
que nous pouvons imaginer, parce que, ajoute Michel Serre, « il va au-delà des limitations
ordinaires des diverses spécialités locales, et en particulier, de la physique289 ». Il n’est signé
nulle part à la manière du contrat social, puisqu’il relève de l’entendement. Il devient et est
par conséquent virtuel, car selon le philosophe français, « les grands contrats fondamentaux
demeurent tacites290 ». Chercher une copie du contrat naturel reste une lettre morte. Il est de
la conscience de chacun de pouvoir garder à l’esprit l’engagement passé avec le monde. Cette
conscience nait de notre relation réciproque. Il harmonise la force de l’humain et la puissance
du monde tout en reconnaissance l’égalité entre nous et notre partenaire. Nous ne pouvons
que le définir du point de vue juridique et physique où le pont de vue du monde influence nos
décisions et notre agir. Nous passons ce pacte avec la nature grâce aux liens canonisés par les
relations que celle-là nous envoie. Ces liens nous unissent ensemble à la terre, notre cadre de
vie. Le contrat nous met en réseau de survie.291Reste alors de savoir pour quelle finalité et
avec quelle justice.

La finalité du contrat est de permettre à deux individus ou personnes acharnées à se


contredire, aussi violent ou pas, de « parler une langue commune, pour que le dialogue ait
lieu292 ». Par analogie, selon la pensée écologique de Michel Serres, les actions humaines et
les conséquences écologiques sont synonymes d’une dispute et contradiction acharnée entre
l’humain et la nature, et cela nécessite un même dialogue, une même langue pour qu’il y ait
le calme et la vie de tous maintenant et à l’avenir. Tous les êtres de la nature compris doivent
avoir un même langage à celui de la terre.

De plus, l’objet serait de permettre que les humains et les restes de la nature « usent
des mêmes mots dans un sens au moins voisin, au mieux identique293 ». L’enjeu de l’écologie
du contrat chez Michel Serres est de briser l’incompréhension, le malentendu qui est à la base
des problèmes écologiques. Pour supposer un accord qui mettrait fin à la violence des

289
Michel SERRES, Le contrat naturel, Paris, Éd. Flammarion, 1992, p. 78.
290
Ibidem, p. 78.
291
Ibidem, p. 79.
292
Ibidem, p. 22.
293
Ibidem, p. 22.

98
conflits. Cet accord va permettre à ce que « nos industries ne travailleront ni ne
transformeront la face et les entrailles pacifiques du monde, comme nous fîmes294 » avant le
contrat naturel. Le contrat naturel cherche à redonner la valeur juridique à la nature en
général. Sa finalité est de faire rassembler le type d’association globale et collective. La
seconde finalité est celle de nous amener à prendre et considérer le monde dans sa totalité.
L’objectif est de recréer les liens avec lesquels les relations sont plus importantes.

A cet effet, souligne le philosophe français, le contrat avec la nature connecte en


réseau le contrat social au contrat de savant pour forme un ensemble de relations dans le
monde en sa totalité. Ainsi donc, sans le droit, le rapport de l’humain et la nature reste
comme à l’époque baconienne ou cartésienne. Il faut donc envisager, avoir un droit, une
politique et un juge pour que notre rapport au monde soit équilibré. Ainsi la justice sera
établie.

La justice contractuelle réside en ce que chacun le droit lui confère de faire en ayant
chacun conscience du danger de l’autre. Au sens où « chacun des partenaires en symbiote
doit donc, de droit, à l’autre sous peine de mort295 ». La justice du contrat naturel est de
donner chacun sa valeur. Elle est distributive dans le sens où la valeur de chaque partenaire
est objective indépendamment de le lui. Grand ou petit, tous au même pied d’égalité. A cet
effet, sujet ensemble, objet ensemble. Pour juger ce contrat, il n’est signé nulle part puisqu’il
est « virtuel ». Autrement dit, signifions que ce contrat relève de la conscience des humains
face à leur responsabilité et aux actions posées dans la nature. Et donc, il est tacite. De plus,
dans cette recherche de l’équilibre entre le pouvoir de l’humain et la force de la nature, la
justice du contrat naturel, « reconnait d’abord l’égalité nouvelle entre la force de nos
interventions globales et la globalité du monde296 ». De ce fait, il n’y a ni hauteur ni
profondeur, mais équilibre et égalité dans le monde comme totalité.

Cependant, la nature réclame justice du fait qu’elle a été oubliée du rang du sujet de
droit. Une nature « sans règle, vérité sans jugement, chose sans cause, objet sans sujet, loi
sans roi […] l’effort historique de la science consiste […] à inventer une justice nouvelle en
cette terre sans contrat297 ». Ceux-ci sont les défis traités par Michel Serres dans le contrat
naturel. En outre Michel Serres spécifie dans ces écrits que le contrat avec la nature serait

294
Michel SERRES, Le contrat naturel, Paris, Éd. Flammarion, 1992, p. 23.
295
Ibidem, p. 69.
296
Ibidem, p. 79.
297
Ibidem, p. 108.

99
une peine perdue si nous n’inventons pas une politique et un nouveau politique pour garantir
le contrat.

III.2.1. LA NOUVELLE POLITIQUE ISSUE DU CONTRAT

La nouvelle politique est celle issue du contrat, c’est-à-dire le comportement a adopté


dans la manière de nous gérer et gouverner dans cette nouvelle politique. Il y a cependant
urgence dans le monde et celle-ci nous, ne pouvons que la résoudre par un contrat de
symbiose. Car les choses de la nature se rappellent à nous violemment pour que nous
puissions faire référence à elles. Nous devons inventer une nouvelle politique, celle qui sera
capable de comprendre maintenant la langue que ces choses ont. Si cela n’a pas raison en
politique, notre contrat n’a pas alors de sens. C’est la raison pour laquelle Michel Serres
dit : « tout cela resterait lettre morte si on inventait un nouvel homme politique298 ».

Dans les théories du Contrat social, Jean-Jacques Rousseau soulignait que le


souverain était un législateur, au pouvoir reçu par le consentement de tous les contractants.
Celui-ci devait cependant établir l’ordre partant de la convention faite. Et c’est le législateur,
c’est d’abord le peuple à qui le droit lui revient par la volonté générale. Bien entendu, Michel
Serres dans Le contrat naturel préconise une politique permettant à gouverner cette nouvelle
relation politique en créant un nouveau politique pour un tel partenariat. Une politique qui
exclut le local comme centre de toute réflexion globale. Inventer un nouvel humain local pour
des problèmes généraux, il y a ce qu’il appelle la « mort subite ». En effet, il faut inventer un
nouvel humain global pour une société globale. Cet humain est/a une personnalité juridique
dans la nouvelle politique symbiotique où : « occupant toute la terre, solidaire comme un
bloc, par ses interrelations croisées, elle ne dispose d’un reste recul ni de recours 299 ». En
dehors de cette nouvelle société des symbiotes et nouvelle politique, le nouvel humain « sait,
d’autre part, construire et utiliser des moyens techniques aux dimensions spatiales,
temporelles, énergétique des phénomènes du monde [pour] ressembler à la terre 300 ».
L’urgence est de résoudre la faim, garantir l’eau et permettre qu’à ce que l’air soit respirable,
arrêté les industries et produits qui accentuent et permettent la perturbation globale. 301 Ainsi,
le tiers instruit aura pour mission de répondre à cette urgence écologique dans la politique où
il y a d’un côté les scientifiques et les littéraires. Son rôle est d’unir et garantir à cet équilibre.

298
Michel SERRES, Le contrat naturel, Paris, Éd. Flammarion, 1992, p. 69.
299
Ibidem, p. 72.
300
Ibidem, p. 72.
301
IDEM, Op. Cit., pp. 252-253.

100
De ce fait, nous sommes embarqués dans une nouvelle barque du contrat naturel où
nous sommes tous unifiés comme un seul corps humain. Parvenu aux limites strictes des
forces objectives. Telle est l’urgence de la nouvelle politique. Cette politique rajoute Michel
Serres, « a désormais pour objets ces trois totalités connectées302 » : l’humain, le monde et la
technologie. Par le contrat avec la nature, la politique change. Si avant, elle ne se réfère à la
cité et aux humains de la cité (citoyen) sans connaitre rien du monde, dorénavant le
gouvernement issu du nouveau contrat fait sortir les symbiotes des sciences humaines, fruit
du contrat social, vers la totalité des sciences inventé par ce nouveau contrat : « les sciences
de la vie et de la terre prennent, désormais, le relais […] vive l’égalité démocratique 303 ». Il
redonne au cadre-nature son véritable sens originel, les conditions dans lesquelles est née. La
nouvelle politique est symbiote et naturaliste, légifère les lois globales.

De ce qui précède, cette politique sort de l’ancienne politique où le roi gouverneur de


la cité use son influence humaine sur les choses du monde. Sa nouvelle mission est d’user sa
raison-responsable, son éducation naturaliste et son éthique responsable. Cette symbiose
implique le politique dans la géopolitique au sens de la nature réelle, la physio-politique au
sens où les institutions dépendront dorénavant du nouveau contrat passé avec le monde.304La
question est celle de savoir qui est ce nouvel humain et cette nouvelle politique.

III.3. NOUVEAU RAPPORT ENTRE L’HUMAIN ET LA NATURE


Nous avons réussi à passer un contrat, et celui-ci nous a tous (humain-nature) conféré
le nouveau statut de sujet de droit. Nous sommes en effet obligés de vivre d’une autre façon
et selon les conventions issues du contrat. Ces conventions nous permettent en effet de
réduire l’agressivité, la domination, la maîtrise, le triomphe, mais la symbiose, le dialogue,
l’harmonie, le retour à nos origines. La convention est de vivre en symbiose. Cette symbiose
est le résultat du contrat. Cela que l’auteur utilise terme Biogée, nom même de la signature du
contrat. Son rôle est de permettre à ce que les humains disent ce qu’est le monde et le monde
donne vie aux humains. En fait, le résultat du contrat naturel nous ramène au principe de la
physique quantique où tout est lié, « les sciences de la vie et de la terre, placées désormais au
centre de la cognition, prennent le relais305 ». L’auteur a offert la valeur à la nature en partant
du contrat avec la nature, celle-ci est aujourd’hui notre prochain, composant la Biogée. Par

302
Michel SERRES, Le contrat naturel, Paris, Éd. Flammarion, 1992, p. 73.
303
IDEM, Op. Cit., p. 62.
304
IDEM, Op. Cit., p. 76.
305
IDEM, Biogée, Paris, Éd. Le Pommier, 2010, p. 43.

101
Biogée, l’auteur entend l’association qui comprend le monde (nature) et les humains, sujets
ensemble et objet de cette science (scivite) et expriment, dans une langue commune, leurs
soucis communs en la WEFEL.306

La Biogée ou vit symbiotique est une tierce place. Un troisième personnage du jeu à
deux. Ce concept dans le contexte écologique concerne et représente la nouvelle alliance
issue du contrat entre l’humain et la nature. Une alliance qui implique une nouvelle forme de
vie et relation par rapport à l’ancienne forme où l’humain était devenu maître de la nature.
Ladite alliance ne concerne pas seulement la relation humain-nature, mais aussi les humains
entre eux. Une nouvelle habitation du monde et dans le monde. « La Biogée est notre habitat,
ce dans quoi nous vivons, notre monde307 ».

Dans le livre Temps des crises, Michel Serres rappelle et soutient l’idée de
reconsidérer le statut respectif des choses de la nature, devenues sujets actifs et les rôles que
ceux-ci jouent dans notre vie ; par le lien d’interdépendance, de synchronisation où nous
avons en nous la nature et celle-ci nous possède aussi ; c’est-à-dire un jeu de partenariat. Cet
esprit de jeu à deux où il y a que le maître contre l’esclave, disparait du moment que nous
avons inventé le tiers instruit : « le monde soi-même […] l’eau, l’air, le feu, la terre, flore et
faune, l’ensemble des espèces vivantes […] et inertes308 ». Ce tiers instruit est fruit du contrat
symbiotique. Une nouvelle institution juridique, un ambassadeur des symbiotes qui défend la
nature muette, que l’auteur appelle : WAFEL.309 Nous nous sentons frères, au-delà de nos
limites, cette nouvelle dialectique nous rend tous sujets à pied égal.

De plus, WAFEL est une institution au sein de la Biogée issue des initiales des choses
de la nature. Elle représente ces choses et prend la parole pour elles. En d’autres termes, « un
représentant directe, de l’eau, de l’air, du feu, de la terre et des vivants310 ». Sur ce,
personnellement, Michel Serres réfléchit en terme humain. Il confère aux choses du monde
toutes les caractéristiques humaines. Nous pensons, que la nature, quant à lui, est un être, un
sujet qui agit et réagit, se défend et peut-être défendue. C’est d’ailleurs en ce sens que nous
parlons de l’écologie du sujet de droit. Dans cette nouvelle relation transversale et

306
Michel SERRES, Temps des crises, Paris, Éd. Le Pommier, 2009, p. 62.
307
IDEM, Op. Cit., p. 257.
308
Ibidem, p. 39.
309
WAFEL est un concept venant de notre auteur. Ce concept est l’appellation autre de la Biogée avec les
initiales anglaises des quatre éléments fondamentaux de la matière et des vifs Il s’agit d’une abréviation des
initiales provenant de : eau, air, feu, terre et vivant, mais en anglais (water, air, fire, living).
310
Michel SERRES, Op. Cit., p. 40.

102
symétrique, nous habitions le monde, nous l’intégrons de nouveau et celui-ci nous accueille
en fils prodigue qui rentre à la maison. Cette dernière, souligne l’auteur, « où naissent les
vivants, humains compris » jouit le droit de l’autre et la protection générale. Il n’y a ni
violence ni guerre parce que achevé par le pacte naturel. Par ce pacte, l’humain quitte
l’exploitation, le droit de propriété vers l’instauration d’un droit public et bien commun.

La réflexion serresienne de l’écologie sur la nouvelle société issue du contrat avec la


nature part de l’idée que, dans le monde, il n’y a aucune société qui ne soit fondée sans aucun
droit à la base ou au préalable. De même, le contrat naturel en est un droit qui fait entrer
l’humain et la nature dans une nouvelle société. Dans cette dernière, les deux « vivent en
symbiose, les humains et le monde, l’on ne parle pas seulement une langue universelle, celle
des lois, […] mais on y utilise divers code, toutes choses, nous comprit, s’y trouvant et
conduites et codée. Car nous tous, choses inertes, vivant et humain, émettons, recevons,
stockons et traitons de l’information311 ». Telle est la description et mécanisme de la nouvelle
vie symbiotique signifié par le philosophe français une fois le contrat signé. En plus, dans
cette nouvelle vie, tous, nous sommes régis par ce qu’il appelle le carré d’opération qui nous
permet ensemble de nous maintenir dans cette nouvelle relation de symbiote. Ce carré est
structuré de : l’émission, la réception, le stock et la transmission de l’information. Ces
opérations nous sont communes.

Par ailleurs, il est question de savoir comment ces choses communiquent ou qui va
communiquer à leur nom. En tant que Sujet, elles ont le droit de parler et de se défendre. Pour
répondre à la préoccupation, Michel Serres évoque la troisième révolution sur terre, celle où
la nature dit ce qu’elle est et comment elle fonctionne sa personne, son être, son droit, etc. La
révolution est en fait ce jeu à trois (sciences, monde, société) où les sciences se regroupent
autour de deux bouts d’extrémités ; d’un côté la vie et de l’autre côté la terre. Ces sciences,
Michel Serres les appelle : les sciences de la vie et de la terre (SCVITES). Celles-ci ne disent
que les choses du monde et leurs habitats dans la société. En ce sens, signifions que Michel
Serres définit l’écologie en une science de la vie et de la terre. En effet, la nouvelle politique
des symbiotes dans ce jeu à trois où tous ensemble d’une seule voix, lié à des relations d’éco-
communication, ne disons que ; ce que dit le monde, les sciences comprises aussi.
Néanmoins, cette fois-ci, non plus de manière locale, mais « comme un partenaire global »
avec lequel nos vies sont liées. Et donc nous formons un système complexe. Comme l’a si
bien souligné Edgar Morin, nous sommes dans une co-organisation, co-communication, dans
311
Michel SERRES, Temps des crises, Paris, Éd. Le Pommier, 2009, p. 42.

103
laquelle « un être vivant devient une exigence existentielle pour un autre312 ». Cette manière
de vivre est une exigence pour tout symbiote : complémentarité et réciprocité.

Celui qui dit maintenant des choses de la nature est la Biogée. Cet ensemble des
vivants, associé par le contrat naturel. Ce monde global additionné aux sciences qui forment
ce grand tout où siège le triangle écologique pour la vie : sciences, société, Biogée. Voilà ce
jeu à trois régis par trois relations avec lesquelles au sommet, « les sciences, désormais,
disent le dit du monde ; la société […] produit les choses de monde et où elle ne reçoit, en
retour, l’effet global sur la tête313 ». Face à une nouvelle menace, WEFEL communique pour
la biogée, cette institution capable de défendre le droit des choses de la nature. En effet, le
philosophe français organise la nature comme un être vivant dans une société ayant ses droits
et devoirs, avec un ambassadeur (WEFEL) en cas de menace, une politique dans le cadre des
relations. C’est à ce sens qu’il évoque la troisième révolution.

En plus, la révolution que souligne Michel Serres vient du fait que, la Biogée est sujet
puisque dans le jeu à deux (humain et esclaves), la nature n’était qu’un objet sans importance.
Maintenant, dans ce nouveau jeu, celle-ci est sujet face à l’humain. Ce sujet est global dans
une nouvelle société où il joue présentement « les premiers coups plus fortement que
nous314 ». Ce renversement est le seul espoir de l’humanité si elle veut survivre. Nous
sommes en quelle sorte l’objet de la nature. En conséquence ; nous sommes en face d’une
nouvelle relation au rapport comme un double lien croisé en feedback ; nous, sujets,
objectivons le monde, lui sujet, nous objective.315 Reste d’inventer un dialogue avec ce
nouveau partenaire avec une nouvelle science, nouvelle conduite pour une nouvelle société.
D’une manière descriptive, notre auteur essaye de décrire cette nouvelle façon de nous de
conduire en symbiote.

Dans le troisième chapitre du Temps des crises, Michel Serres évoque la conduite des
sciences et du politique symbiote. La conduite de ceux qui connaissent la Biogée et parlent
d’elle. La mission est de se détacher de l’ancien triangle mortifère (prêtre, soldat et
capitaliste) pour développer à long terme suite au nouveau triangle écologique notre rapport à
la nature. Que les savants disent et communiquent, au nom de la nature, la parole au nom de
la Biogée, représentés la WAFEL. Qu’ils disent non contre la pollution, contre le droit de
propriété privée, mais en soutenant le bien commun. Qu’ils écrivent les nouvelles lois pour
312
Edgar MORIN, La méthode 2. La vie de la vie, Paris, Éd. Seuil, 1980, p. 46.
313
Michel SERRES, Op. Cit., p. 50.
314
Ibidem, p. 52.
315
Ibidem, p. 54.

104
détruire le capitalisme et les technologies dévastatrices qui affament la Biogée. De quel
savant s’agit-il et quelle science ?

A ces questions, il s’agit des savants des sciences de la vie et de la terre. Les scivites
prennent en effet le relais, prônent pour la démocratie comme nouvel régime de la Biogée. Ils
ont la langue propre à la Biogée. Elles sont démocratiques parce qu’elles sont
pluridisciplinaires et sont « fédérées autour d’elles ». La politique pour Michel Serres est
alors remplacée par les scivites. Politique à laquelle « nous vivons, disent-elles comme des
vivants dont la vie, liée à la terre, reste conditionnée, voire déterminée par les lois de la terre
et celles de la vie316 ». Dans cette perspective, la politique scivite brise l’ancien rapport
asymétrique pour un autre symétrique où « tout sujet devient objet ; tout objet devient
sujet317 ». Attestons que c’est en cela consiste la démocratie du contrat de symbiose si nous
analysons la théorie de l’auteur. Et donc, il n’y a aucun être au centre ; seule la vie et la terre.
C’est pour quoi Michel Serres est taxé de biocentrique par le fait de mettre la vie au centre de
tout. S’il en est ainsi, quelle éthique l’humaine doit-il développer face aux choses de la nature
devenue sujet ?

Michel Serres n’est pas resté silencieux par rapport au comportement que l’humain
doit afficher dans la nature. Bien évidemment, nous les avons toujours considérées comme
des choses sans importance, qui n’ont aucune liberté et valeur parce que, nous sommes le
partisan de Jean-Paul Sartre nous a dit que l’enfer, c’est l’autre. D’ailleurs, Sartre aurait à
questionner Emmanuel Levinas sur « soi-même comme un autre ». L’idéologie sartrienne
n’est pas éthique. Cette idéologie s’est répandue même sur les choses de la nature, considérée
comme enfer, dans le sens où « nous les considérons au mieux comme des objets, au pis
comme des ennemis, oui, des autres absolument parlant318 ».

Si nous réfléchissons bien, nous nous rendons compte que l’autre est plus intervenant
quand le moi (humain) est plus en difficulté ou dans le besoin. Ces autres font ce qu’on peut
appeler la compassion, dans laquelle ils nous ont entendus, vus, et viennent nous secourir. En
d’autres termes, « nous vivons, échangeons et parlions comme eux319 ». Cela revient à terme
et en définitive, à nous détruire320 ». Telle est même l’éthique et l’évidence du contrat
naturel : tuer, c’est se détruire. Cette éthique est fondée sur la conscience de l’autre et du moi.

316
Michel SERRES, Temps des crises, Paris, Éd. Le Pommier, 2009, p. 64.
317
Ibidem, p. 65.
318
Ibidem, p. 66.
319
Ibidem, p. 67.
320
Ibidem, p. 67.

105
Il est évident parce que détruire, c’est se détruire soi-même. Dans l’ensemble, il est en fait
une conscience. Mais cette dernière se matérialise aujourd’hui dans le centre du savoir-être
des sciences. Tous, sommes habitants de la Biogée les sciences humaines comprise. Et cela
grâce au serment prononcé le jour de la signature du contrat avec la nature que les deux
partenaires disent en serment, je cite :

Pour ce qui dépend de moi, je jure : de ne point faire servir mes connaissances, mes
inventions et les applications que je pourrais tirer de celles-ci à la violence, à la destruction
ou à la mort, à la croissance de la misère ou de l’ignorance, à l’asservissement ou à
l’inégalité, mais de les dévouer, contraire à l’égalité entre les hommes, à leur survie, à leur
élévation et à leur liberté321

III.4. CONCLUSION

A travers ce chapitre, nous avons développé la théorie du contrat naturel comme


résolution aux problèmes écologiques. Cette théorie a pris naissance dans le droit pour
aboutir à des conclusions d’ordre éthique, moral et éducatif en nous proposant une nouvelle
société et politique dans laquelle tous, sommes en symbiose. L’humain est dans la nature
comme fils de la nature et la nature est en lui comme socle de vie. Le contrat avec la nature
est une version exclusive du contrat social. Il prend le côté non-dit du contrat social, pour
essayer d’intégrer le monde dans l’ordre juridique et avec un nouveau statut. Grâce au
combat du contrat naturel, la nature n’est plus cette chose sans valeur, mais un sujet de droit ;
il est recommandé à l’humain d’avoir de nouveau rapport avec ce nouveau sujet. Ce rapport
devra tenir compte du pacte.

Dans la première section de ce chapitre, il s’est posé la question du droit de l’humain


qui excluait celui de la nature. Nous avons souligné qu’au début de la société, le pacte que les
humains ont dû passer n’était rien d’autre exclusive à la nature. Le droit qui fonde le contrat
social où les choses de la nature sont réduites au silence parce qu’elles sont considérées
comme des objets. En tant qu’objet, aucun droit ne peut faire référence à ça. Ce droit venait
d’être solidifié par les théoriciens du droit naturel moderne. Ceux-ci ont compris qu’il n’y
avait de droit que du positif, c’est-à-dire de ce qui est posé par l’humain puisqu’il relève d’un
fait moral. Et même le droit de l’humain va prendre cela en compte en disant que tout humain
est un sujet de droit. Ceci veut autrement, en dehors de cet humain, personne ne peut se
déclarer sujet de droit. Toutes ces formes de droit a poussé l’humain dans la dépréciation
avec la nature. Conséquence ; il y a eu transformation et dévastation.

321
Michel SERRES, Temps des crises, Paris, Éd. Le Pommier, 2009, p. 71.

106
Dans la deuxième section, avons analysé l’idée de la violence contre la nature. Cette
dernière provient de la guerre entre nous, sujet humain, nous battons pour des causes de
pouvoir, domination et supériorité. Aujourd’hui, la nature nous violente pour rappeler notre
fragilité et les choses que nous lui avons infligées. Maintenant que sa violence est
pantopique, à savoir sans partout, lieu et endroit ciblé, nous sommes tous touchés par sa
violence qui devient objective puisque personne n’est épargnée.

Le contrat nature a constitué dans ce chapitre le deuxième point majeur et important.


Il est en effet la base même de notre travail et du chapitre. Vu que la violence devient
imminente, l’humanité en risque de disparition ne peut qu’être sauvée par contrat. Ce contrat
est une association entre l’espèce humaine et le reste de la nature. Un accord sur la survie
entre ces deux. Cela va sans dire que par contrat l’humain rentre dans la nature comme fils de
la nature et la nature est en lui comme socle de la survie. Fondé sur le droit naturel classique,
le contrat prend en compte la nature intérieure et extérieure à l’humain. Malheureusement
signé nulle part, il reste virtuel et dans la conscience des individus signataire du contrat. Ces
conclusions nous plongent dans une nouvelle culture, politique et éducation que Michel
Serres appelle le tiers-instruit.

Le tiers-instruit dans le contexte de la logique formelle vient s’opposer au tiers exclu.


Ce dernier est l’un des principes de la logique formelle ou binaire fondée sur deux valeurs : la
véracité d’une proposition ou la fausseté. Il exclut la possibilité d’une tierce place. La logique
formelle est fondée sur trois principes fondamentaux : principe d’identité, principe de non-
contradiction et principe du tiers-exclu. Ce principe dans la compréhension de notre auteur
divise le monde en deux, soit si l’humain plutôt qu’autre chose. Dans le domaine de
l’écologie, de l’éducation, le tiers-instruit est une reconnaissance d’une tierce place issue de
deux valeurs en opposition. Une manière de penser sur la chose qui existe et n’existe pas
encore. « Un tiers non exclu entre l’équilibre et le déséquilibre, entre l’être et le néant322 ». Le
tiers instruit est aussi une intersection entre deux ensembles. Et dans l’écologie, c’est la
symbiose entre l’humain et la nature.

Dans la troisième section, nous avons évoqué de la vie en symbiose, une vie qui vient
après signature du contrat. Etant donné que l’humain et la nature sont en symbiose, ils ont un
rapport de complémentarité, de réciprocité, de contemplation l’un envers l’autre. Cette
nouvelle vie, que le philosophe français appelle la Biogée, est une sommation entre les

322
Michel SERRES, Pantopie : De l’Hermès à petite poucette, entretien avec Martin Legros et Sven Ortali,
Paris, Éd. Le Pommier, 2010, p. 196.

107
individus signataires du contrat. Où tout le monde est sujet de droit. La nature Une nouvelle
institution juridique, un ambassadeur des symbiotes qui défend la nature muette. WAFEL
institution qui représente les choses de la nature dans les instances juridiques. Les sciences
dans cette institution ne soulignent que les choses de la nature et ce que disent ces choses
nous communiquent. Devenues sciences de la vie et de la terre, elles jouent la politique de
tout mettre en relation de complémentarité et de réciprocité.

108
CHAPITRE QUATRIEME : APPROCHE CRITIQUE DE L’ECOLOGIE
DU SUJET DE DROIT

IV. 0. INTRODUCTION

En préambule, les trois précédant chapitres ont présenté en effet chacun pour sa part
les bases de la conception écologique de Michel Serres. Il résulte de ces chapitres le sens
d’une écologie juridique, subjective et objective qui tient compte des droits, de la place et du
rôle de la nature, même si celle-ci dans l’histoire et même aujourd’hui est devenue une chose
de transformation et de déformation. Celles-ci partent de la majorité des activités humaines.
Ce contexte est le point de départ qui l’a poussé à écrire plusieurs livres et théories sur
l’écologie. Le mobile est que, l’humain est de nos jours victime de ses propres actions. Ces
actes dévastent la nature et lorsque celle-ci réagit, l’humain est le premier à être touché.

Le troisième chapitre a présenté la théorie du contrat naturel comme solution que


préconise Michel Serres au sujet du débat sur l’écologie. Cependant, puisque nous sommes
dans le domaine scientifique, lequel domaine se nourrit par conjoncture et réfutation. Pour ce
qui nous concerne, il nous est nécessairement recommandé, en tant que chercheur dans un
domaine de dresser une critique sur les recherches que nous avons effectuées dans ses écrits.

Dans ce chapitre, nous allons présenter nos analyses issues de la philosophie


serresienne que nous avons jugé être les mérites pour nous, par rapport à sa façon de
réfléchir. Après ceci, nous allons présenter un deuxième aspect de ladite philosophie, que
nous considérerons pour notre part dit comme une limite ou faillibilité. En d’autres termes,
adresser une critique présentant une certaine faille si nous voulons le contextualiser avec
l’époque à laquelle nous rédigions ce travail.

IV.1. ASPECT POSITIF DE L’ECOLOGIE SERRESIENNE

En préambule, chaque auteur a une manière de réfléchir et de présenter son mode de


penser. Le nôtre est parti des faits observés dans le monde pour arriver à la proposition d’un
contrat naturel qui répond en effet aux questions de l’écologie. En fait, les chapitres précédant
ont discouru là-dessus. Dans ce chapitre, nous présenterons les mérites de notre auteur. Les
premiers (mérites) sont en effet l’originalité de notre auteur lorsqu’il aborde les questions
écologiques. Dans l’aspect positif, nous aborderons quatre mérites : le premier, c'est la
question de l’unité entre l’humain et la nature ; le deuxième, c'est l’idée du contrat comme
réponse aux problèmes écologiques : nouvelle relation humain-nature ; le troisième, c'est la

109
relation politique-droit et enfin le quatrième, c'est sur l’idée sur la question de l’éthique
serrésienne.

Pour ce qui concerne le premier mérite, tout est parti de l’idée selon laquelle, il y a
d’une part l’humain et de l’autre part la nature ; d’un côté un sujet et de l’autre côté un objet.
L’histoire globale de l’humanité, de la science, de la philosophie ou du droit, a divisé le
monde en deux. On ne réfléchit qu’en termes de la dualité. Et cela depuis les premiers savants
(Égyptiens, grecs et romains). Parménide parla de l’être et du non-être ; Platon évoque le
monde idéel et sensible. Le droit sépare d’un côté le sujet humain avec sa nature et de l’autre
côté l’objet, nature extérieure à l’être humain. Francis Bacon conditionna l’esprit humain a
triomphé sur la nature dans la logique selon laquelle l’esprit humain est supérieur aux choses
de la nature. René Descartes vient avec la séparation de la substance. À ce propos, les travaux
de notre auteur en écologie ont consisté en fait à militer pour la non-séparation entre l’humain
et la nature. Et c’est ici que nous louons son effort, voire son originalité.

Dans la logique de notre auteur, la meilleure façon de résoudre le problème


écologique est de ne pas séparer d’un côté l’humain et de l’autre côté la nature. Il faut donc
faire une écologie où « les hommes partagent avec les animaux la même niche323 ». Cette
niche est le lieu où commence la connaissance entre tous les vivants qui la partagent dans la
réciprocité et la symbiose. En d’autres termes, tous partagent un rapport global à la nature
mère nourricière. L’objectif de cette nouvelle vision écologique que propose Michel Serres
est de créer une vie collective, interspécifique qui doit combattre l’ancienne domestication,
où l’humain est loup pour l’autre ; les techniques transforment les espèces et l’habitat ;
l’économie marchande les choses de la nature.

En effet, si la nature devint séparée de la culture, cette séparation est le problème


fondamental de l’humain et de tous les discours écologiques, car l’humain, séparé des autres
êtres de la nature, pense et croit être en dehors des choses du monde qui n’ont rien avoir avec
lui. Tout compte fait, les problèmes écologiques, au-delà de diverses conceptions évoquées
dans les deux premiers chapitres, viennent de la dualité insérée dans la logique du
comportement humain pour qui, son « esprit a horreur du mélange324 ». Ce principe fonde
l’ensemble des travaux de notre auteur. Son souhait est celui de ne pas séparer d’abord la
nature, ensuite, la culture, la nature et l’humain et enfin l’objet du sujet. Bruno Latour ajoute

323
Michel SERRES, Pantopie : De l’Hermès à petite poucette, entretien avec Martin Legros et Sven Ortali,
Paris, Éd. Le Pommier, 2010, p. 114.
324
Ibidem, p. 114.

110
à ce sujet que, « le travail de médiation devient le centre même du double pouvoir naturel et
social. Les réseaux sortent de leur clandestinité. L’empire du milieu est représenté. Le tiers
état qui n’était rien devient tout325 ». En analysant les concepts contrat, symbiose ou tiers-
instruit, ils ont une signification d’intersection. Ceci pour dire, le mérite de l’auteur est de
montrer à l’ensemble des savants le danger de la dualité dans l’écologie.

Cette dualité qui a permis à l’humain de se croire au-dessus et supérieure à la nature.


La science et la philosophie seront fondées sur ce principe de séparation. Si nous analysons
l’affirmation de notre auteur quand il dit : « nous ne sommes pas un, mais deux326 ». Cette
affirmation veut dire que nous sommes séparés sans le savoir. Pour ainsi dire, au début, nous
étions d’abord un et maintenant, nous sommes deux. Humain et choses de la nature, nous
étions frères. La dualité est le point de départ avec lesquels nous analysons l’aspect positif de
la pensée écologique de Michel Serres. Tout son effort ou mérité sera de combattre pour
l’unicité de tout ce qui a été séparé pour construire une pensée écologique. La pensée
écologique développée dans ce travail avec notre auteur a pour originalité l’introduire d’une
nouvelle logique qui va au-delà du principe de deux valeurs ou principe de non-contradiction.
La critique positive est celui de réconcilier l’amitié de l’être humain et des autres êtres de la
nature à la manière du cerveau où la paralysie de l’une entraine la défaillance d’une partie
contraire du corps. Comme lui-même le dit en ce mot : « Il me semble meilleur de vivre,
parler ou penser avec tous ses organes qu’en retranchant de leur ensemble une moitié
noir327 ». Le sens du contrat est synonyme de l’unification après séparation.

Au demeurant, chaque philosophe ou écrivain est fils de son temps. Le nôtre aussi, ses
écrits transmettent son époque et même celle du futur. Le contexte dans lequel il a écrit sa
pensée sur les problèmes écologiques véhicule cependant le souci qui a traversé son époque.
Mais sa pensée reste encore d’actualité pour notre époque. En parlant des problèmes
écologiques comme problèmes globaux, Michel Serres remmène le débat à un autre niveau
où les humains doivent s’unir et conjuguer leur force pour résoudre ces problèmes au niveau
planétaire en tant que préoccupation qui touche l’humanité en général. Il est donc impératif
que cette force donne solution à ces problèmes ; force unique incluant toutes les choses de la
nature pour créer l’équilibre et l’harmonie. Ainsi, il introduit la troisième valeur, celle qui
met en symbiose les deux autres : vrai et faux. Cette troisième valeur signifie que, la présence

325
Bruno LATOUR, Nous n’avons jamais été modernes. Essai d’anthropologie symétrique, Paris, Éd. La
Découverte, 1991, p. 191.
326
Michel SERRES, Le tiers-instruit, Paris, Éd. François Bourin, 1991, p. 22.
327
Ibidem, p. 23.

111
de l’autre est une des conséquences de l’antécédent. Cette réflexion de Michel Serres met
aussi en difficulté le naturalisme ontologique pour qui l’univers est ce qu’il est, immuable,
éternelle et stable. Conséquence ; il est régi par une logique binaire. Pourtant, quand nous
observons dans la nature, tous les êtres font une mobilité et un mécanisme systématique :
naissance, croissance et mort.

D’après notre analyse, aux origines, l’humain et la nature ne faisaient qu’un,


puisqu’ils sont mêlés. L’humain représente la nature et la nature lui confère toutes ses
caractéristiques. Au troisième chapitre, nous avons souligné avec Michel Serres du retour à la
nature comme une des objectifs du contrat. En fait, il s’agit d’un retour au point de départ où
tout était une même nature. Le sens du contrat avec notre auteur est de former un seul corps,
esprit, une union, une interpénétration et interférence. C’est le concept même de symbiose qui
résume l’unicité et nouveau rapport.

Par ailleurs, son idée unifie ce qui a été séparé par l’histoire en articulant le savoir et
le droit est une originalité. Car, son effort est celui de conditionner les deux dans une relation
d’interdépendance pour résoudre la question de l’humain dans son nouveau rapport face au
monde. Cette relation devient ainsi la condition de possibilité pour une vérité prépondérante
et l’équivalence juridique pour statuer ce nouveau partenariat entre les êtres vivants.

A ce sujet, ce que nous constatons comme mérite, en plus de ce que nous avons dit,
l’auteur veut montrer en général qu’il n’y a pas de dualité en science, écologie ou droit. C’est
dans ce sens qu’il revient toujours à la notion du contrat. Celui-ci essaye simplement de faire
abstraction à la logique du principe d’identité en essayant de souligner le tiers-instruit comme
une nouvelle forme de logique avec laquelle on peut arriver à décrypter les problèmes
scientifiques, écologiques et juridiques. Comme dit avant, la réunification de la conception
dualiste ou la suppression de toute dualité dans ces trois domaines, c’est ce qui a permis à
notre auteur un centrage de sa réflexion sur la proposition des sciences de la vie et de la terre
comme objet nouveau de ces trois disciplines. Ceci étant, le centre de préoccupation de toutes
les sciences ne rient d’autre que la vie et la terre commune unification du sujet-objet. Sur ce
point de vue, le savoir, la loi, les vivants reposent sur le nouveau centre unique exempt de
toute dualité.

Le deuxième mérite est celui centré sur l’idée du contrat comme réponse aux
problèmes écologiques en termes d’un nouveau rapport entre humain et nature. D’un point de
vue, Michel Serres ouvre une nouvelle approche de l’écologie sur l’essentielle de la politique,

112
du droit, de la science et la philosophie. Une approche selon laquelle notre rapport au monde
est structuré par des liens d’interdépendances. Il montre dans l’ensemble de sa réflexion
l’effort de respecter la nature comme sujet de droit, avec lequel, l’humain est partenaire
équitable. Son approche part de l’histoire de la philosophie, du droit et des sciences pour
situer les problèmes écologiques à toute l’histoire du vivant. Il montre et met en relation la
société et le savoir pour repenser autrement la question du sujet et de l’objet de l’écologie.

Par substitution au contrat social, Michel Serres introduit l’idée du contrat naturel.
Son concept à une origine juridique et en tant que telle, toutes les choses de la nature sont
ipso facto de sujets de droit, mais cette fois-ci le droit naturel classique parce que la signature
exige un équilibre des partenaires (sujet-sujet). C’est dans ce sens que, « La nature globale, la
planète-Terre en sa totalité, […] est le nouveau corrélat de ces nouvelles plaques d’hommes, sièges
d’interrelations réciproques et croisées entre les individus et les sous-groupes, leurs outils, leurs
objets-monde et leurs savoirs, rassemblements qui peu à peu perdent les rapports avec le lieu, la
localité, le voisinage ou la proximité328». Ceci veut dire, la planète dans son ensemble est sujet
de droit ; aucun autre sujet ne peut s’approprier comme un bien privé. Le nouveau sujet de
droit enjoint à l’humain un nouveau rapport puisqu’il est bien commun. Il est une originalité
pour notre auteur dans la mesure où les problèmes écologiques trouvent fondement dans le
domaine du droit.

Le philosophe français, au-delà du domaine scientifique et politique, ramène les


débats écologiques au niveau de la sphère juridique où la plupart de scientifiques semblent
ignorés. En offrant de la matière aux juristes et aujourd’hui, nous pouvons affirmer avec
honneur que, le droit de l’environnement ou de la nature a un soubassement dans le contrat
naturel. La nature telle mise en valeur par Michel Serres est intrinsèque à elle-même. Les
travaux de notre maître ont intéressé non seulement les scientifiques, mais aussi l’historien
des sciences. Pour ainsi dire, les problèmes ou les débats sur les problèmes écologiques n’ont
aucune limite en ce qui concerne le domaine.

En plus, à son époque déjà, l’académicien envisageait les droits liés à la nature. Même
si pour les uns cette idée était absurde pour la plupart de penseurs, aujourd’hui cette idée a
servi des bases au droit de l’environnement. Dans un de ces entretiens, il souligne que
« Aujourd’hui, quand on dit pacte écologique, on ne dit guère plus que contrat naturel. Donc,
effectivement, j’avais déjà confiance dans le droit329 ». Son mérite ou aspect positif est celui

328
Michel SERRES, Le contrat naturel, Paris, Éd. Flammarion, 1992, p. 40.
329
IDEM, Art. Cit., p. 5.

113
de faire insérer les problèmes écologiques dans le domaine du droit. La charte de
l’environnement serait issue de l’influence du contrat naturel. L’objectif, comme dit Mathieu
Blesson, est celui « accorder à la nature comme aux hommes le droit à la liberté, le droit à
l’égalité, le droit à la fraternité330 ». L’effort ou le mérite de notre auteur est celui de libérer la
nature à l’emprise de l’humain par l’intermédiaire du droit.

De ce qui précède, nous avons constaté que notre auteur a renversé la notion du sujet
de droit. Si pour Jacques Leclercq un sujet de droit est seul la personne humaine qui a un
pouvoir et une liberté morale, Michel Serres va étendre cette notion même aux choses de la
nature. Celles-ci ne sont pas vues comme objet, mais plutôt comme sujet parce qu’elles ont
un pouvoir intrinsèque à elles plus que celui de l’humain. Sachant aussi qu’elles rendent
d’énormes services et biens à l’humain. Selon lui, « il serait bon de faire un pas de plus et de
dire que la nature serait ce sujet de droit avec lequel on passerait ce fameux contrat 331 ». Par
rapport à sa théorie du contrat, tout acte dévastateur à la nature implique une condamnation
juridique à son acteur. En rendant la nature un sujet de droit, celui permet à l’humain de se
remettre en question et envisager un contrat de partenariat avec son semblable. Ainsi, le droit
n’a plus seulement à légiférer les lois pour l’humain mais, les droits de la nature aussi. Et
donc il confère aux choses de la nature des droits que le contrat social n’avait pas pu penser.
Son grand effort est celui d’accorder une dignité juridique en partant des thèses issues du
contrat social pour briser le droit de propriété.

A ce propos, Le contrat naturel, Le Temps des crises, véhiculent la grande partie de la


pensée écologique de notre auteur. Ils partent de l’histoire de la terre, du droit, de l’humanité
et de la science, pour présenter une nouvelle forme de penser les relations de l’humain et la
nature. Le fait de présenter cette histoire sous forme de lutte, violence et guerre est une
originalité. Ceci explique la présence des vocabulaires issus de l’expérience de la deuxième
guerre mondiale et autres. Le premier livre par exemple est plus juridique, écologique. Mais
son travail sur l’écologie a rompu l’ordre qu’imposait l’humain sur la nature et sa prétention
de l’esprit universel. De même qu’avec l’ordre épistémologique d’un savoir transformateur
de la nature provenant toujours de cet humain.

Notre auteur repense autrement le lien entre notre habitat et notre mode de
connaissance. Sa curiosité scientifique l’amène a creusé profondément la question des
330
Mathieu BLESSON, « Pour une démocratie écologique » in Topique, Paris, Éd. A2IP, 2013/1 (n° 122), p. 80.
Article disponible en ligne à l’adresse https://www.cairn.info/revue-topique-2013-1-page-71.htm (page
consultée le 10/Août/ 2023 à 15H 30’).
331
Ibidem

114
problèmes écologiques et leurs mutations dans notre société. Partant de l’ordre
épistémologique et physique, il trace le schéma de la pensée pour aborder les questions
écologiques dans le domaine du droit. Ainsi, lorsque nous essayons de tracer son schéma, il
commence par condamner cet esprit de se croire un universel dans la nature. Esprit que
l’humain a pu développer au courant de l’histoire et qui justifie en effet toutes ces
turbulences, puisqu’il exclut une partie de la nature. Le mérite est le fait de lutter contre cette
prétention de l’universel. La question fondamentale qu’il se pose, est celle de savoir :
pourquoi seulement l’humain serait le seul sujet de droit. Cette question traverse l’ensemble
du contrat naturel. La réponse à la question est que, l’humain et la nature doivent coexister
ensemble.

En élaborant sa théorie du contrat avec la nature, Michel Serres inclus d’une par les
théories du contrat social, mais en faisant un dépassement. Alors que le contrat social de
Rousseau fait abstraction aux réalités extérieures à l’humain, celui naturel tient compte
d’elles. Raison pour laquelle, Le contrat naturel a le mérite de prendre en considération la
nature oubliée ou négligée par les penseurs modernes du droit. Car pour eux, le doit, c’est de
la positivité humaine, alors que pour Michel Serres, le droit, c’est d’abord ce domaine
incluant la nature intérieure et extérieure à l’humain. Puisqu’il recourut au droit naturel
classique. Celui qui tient compte de l’humain ainsi des aux choses extérieures à lui. Son
mérite est de prendre en compte les choses de la nature et faire d’elles une préoccupation
juridique.

Déjà dans l’écologie politique, il défend cette prétention et l’esprit de l’immédiateté.


Pour lui, le politique doit s’inspirer de l’agriculteur, doit développer l’esprit qui vise loi.
Michel Serres incite aux dirigeants politiques d’avoir une politique accès clairvoyants qui
pensent au long terme à la manière des marins et paysans. Ceci : « pour sauvegarder la Terre
ou respecter le temps, au sens de la pluie et du vent, il faudrait penser vers le long terme, […]
soucieux de se maintenir332 ». Il suggère à la nouvelle politique d’avoir un projet visant loin,
pensant aux générations futures.

De ce qui précède, la théorie serresienne de l’écologie mérite par le fait qu’il simplifie
le concept de nature partant de son origine gréco-latine. De cette origine, la nature veut dire
ce qui nait. Et Michel Serres se pose la question de savoir : qu’est-ce-qui nait ? Sa réponse
simplifie la compréhension du concept nature comme cet ensemble des objets qui naissent et

332
Michel SERRES, Le contrat naturel, Paris, Éd. Flammarion, 1992, p. 54.

115
se transforment après. Le langage que notre auteur utilise pour exploiter ces textes est simple
dans le sens où il recourt à l’histoire du concept. Ceci étant, la nature telle qu’entend Michel
Serres est cette réalité contenant un ensemble d’objets, entités réelles. Contraire à la
conception médiévale où elle est l’œuvre du Dieu créateur, c’est-à-dire, elle « est tout ce qui
est, a été et sera […] sans au-delà, sans mystère, sans altérité constituante333 ». Au contraire
une réalité aux choses qui sont dans l’histoire du monde en général. Histoire où ces choses
sont à la fois un tout et sujet global. Son mérite est celui de n’est pas exclu un des éléments
de la nature dans le processus de la protection et du rapport humaine-nature.

L’usage de mot est significatif pour lui. Si avant, tel que nous venons de le dire au
paragraphe précèdent, la nature était une idée, produit d’un démurge, sans références ; en fait,
notre auteur concrétise cela par une représentation des choses que nous pouvons prendre en
considérations, que nous savons. Il précise ce qu’est la nature : notre terre, monde mondial ;
dans lequel il y a des choses et nous habitons avec ces choses : arbre, animal, air, feu, eau,
etc. Raymond Matand en parlant de l’originalité de Michel Serres en écologie précise que
celui-ci dit que la terre donne logement et nourriture à l’homme, donne tout. Mais par le
caractère parasitaire de l’homme, il se comporte comme un parasite.334

En outre, lorsque nous analysons la pensée serrienne, celle-ci aborde les problèmes
écologiques de manière transversale en dégageant les grandes structures qui fondent notre
manière de réfléchir et pour proposer les solutions adéquates. Michel Serres l’énonce dans Le
contrat naturel, de René Descartes, de Jean-Jacques Rousseau, d’Emmanuel Kant, d’Auguste
Comte, de Jean-Paul Sartre et la déclaration universelle de droit de l’homme. Ces structures
sont des structures qui renferment la pensée dans une sorte de case. Il souhaite, souligne
Bernadette Bensaude étudier les sciences en se tournant vers le monde, penser la terre où Il
ancre les sciences dans une philosophie de la nature qui embrasse tout ensemble le subjectif,
l’objectif et le collectif, sans pour autant les réduire l’un à l’autre.335 Il fonde la nouvelle
alliance. Celle-ci est une symétrie de rapport à égalité en tant que sujet de droit. Au troisième
chapitre, nous avons souligné avec Michel Serres l’exigence du contrat : « autant que la

333
François EUVÉ, « Pour un naturalisme modéré » in le naturalisme et ses critiques, Théophilyon (Revue des
facultés catholiques de théologie et de philosophie de Lyon), Paris, Éd. Théophilyon, Tome XXVI-Vol. 1, 2021,
p. 94.
334
Raymond MATAND MAKASHING, Michel Serres, Hans Jonas, Edgar Morin et l’écologie profonde, Paris,
Éd. L’Harmattan, 2020, p. 81.
335
Bernadette. BENSAUDE, « Michel Serres », in Revue philosophique de la France et de l'étranger, Tome
145, Paris, Éd. P.U.F, 2020/1, p. 127.

116
nature donne à l’homme, autant l’homme doit rendre à celle-là, devenu sujet de droit336 », une
inclusivité des droits et devoirs de tous.

D’un autre point de vue, nous trouvons que Michel Serres emprunte, dans la théorie
de la communication, les systèmes de communication. Celui des quatre opérations : recevoir,
traiter, concevoir et transmettre. De cette notion, il l’applique à son système de penser dans
écologique où il souligne que les êtres de la nature tous appliquent le même mécanisme. Son
mérite est celui de repenser les vivants comme des systèmes communicationnels effectuant
les quatre opérations. Ceci pour justifier en effet l’équivalence entre l’humain et nature en
tant que sujet d’un même monde. À le lire, il se rappelle à la conscience de l’humain, pour
monter la place qu’il occupe en tant qu’un élément parmi tant d’autres. Et il nous offre une
autre voie de l’écologie où tout est sujet, tout est objet. Il ne place ni l’homme ni l’animal au
centre, mais la vie, la terre centre de toute la réflexion écologique. C’est dans ce sens qu’il
évoque des sciences de la vie et de la Terre. Michel Serres, dans le Temps des crises, convient
le monde à un intérêt mondial où tous, nous statuons pour notre bien.

Le troisième mérite est en fait la relation politique-droit. Dans l’ensemble des travaux
sur lesquels il aborde la question de l’écologie, il associe la politique et le droit. Dans Le
contrat naturel, il souligne le fait que le contrat est vain et vide si on n’invente pas une
politique capable de soutenir le contrat. C’est une nouvelle alliance qu’on retrouve dans les
réflexions de notre auteur, au-delà de la première : humain et nature. Ici l’originalité est celle
de trouver la médiation juridique dans les problèmes qu’opposent l’humain et la nature. Cette
médiation intègre l’intérêt général et particulier pour créer un ordre symbiotique. Celui-ci
exclut en effet le droit de la propriété émanant du contrat entre les humains.

Cependant, les arguments de Michel Serres plaident pour la nature en tant que bien
appartiennent à la communauté, chose publique ayant un droit commun à tous. Tout le monde
peut en faire usage dans la mesure où les intérêts des autres et de la société ne soient pas
violés. C’est en cela que la médiation juridique chez Michel Serres est une originalité. Cette
médiation, Serge Gutwirth l’appelle dans son article, l’érosion juridique de la chose
commune.337 Du principe de non-séparabilité, Michel Serres défend le principe de non-
appropriablité. Ce principe est tributaire de la médiation politico-juridique. Au troisième
chapitre, nous avons parlé avec notre auteur l’exclusion du droit d’appropriation comme droit

336
Michel SERRES, Le contrat naturel, Paris, Éd. Flammarion, 1992, p. 68.
337
Serge GUTWIRTH, « Autour du contrat naturel », in images et usages de la nature, Bruxelles, Éd. Presses
de l’université des Saint-Louis, 1993, N°36.

117
à l’origine de la pollution. Si nous analysons en fait les thèses du Contrat naturel : « au
contrat exclusivement social ajouter la passation d’un contrat naturel de symbiose et de
réciprocité où notre rapport aux choses laisserait maîtrise et possession pour l’écoute
admirative, la réciprocité, la contemplation et le respect, où la connaissance ne supposerait
plus la propriété, ni l’action la maîtrise, ni celles-ci leurs résultats ou conditions
stercoraires338 », nous trouvons ce principe. La non appropriation est en fait un principe de
l’exclusion fondamentale de la prise de possession totale de la nature339. Par ce principe,
notre auteur essaye d’équilibrer la technique, l’économie, l’industrie, dans la mesure où
celles-ci par leur production, ne s’approprient pas les choses du monde. Si avant la médiation
juridique l’humain pense ou pensait être le propriétaire privé du monde, maintenant Michel
Serres donne un principe pour structurer la relation humain-nature.

Le quatrième mérite est du point de vue de l’éthique. Pour Michel Serres, l’éthique et
la morale sont un retour « des hommes vers les choses » de la nature dans laquelle le devoir
moral est engendrement de fait, par le fait que, « le fait demeure et puisse engendre un
fait340 ». Ceci veut dire autrement, selon la pensée de Michel Serres, le devoir équivaut le fait.
Car « les conséquences de nos actes rejoignent leurs conditions341 ». Dans ce sens, l’éthique
serresienne la nature comme culture et la morale est les lois objectives. Celles-ci prennent
d’abord source dans l’ordre épistémologique. Cet ordre qui part de l’analyse du rapport au
monde en tenant compte de la puissance que le savoir offre. L’enjeu ici est de comprendre les
bouleversements technologiques et capitalistes qui modifient notre mode de vie. Son génie
scientifique est celui de penser à une éthique non pas à la manière jonasienne, mais plutôt à la
manière des amoureux où il y a une conscience mondiale soutenue par « une morale à la fois
subjective et objective342 » de l’écologie du sujet de droit. En fait, si nous essayons d’analyser
ce deuxième ordre, il associe connaissance et justice ou science et droit. Ceci permît à notre
auteur a associé humain et nature, sujet et objet. En parlant de la symbiose, notre auteur brise
la dualité créée par l’histoire de la philosophie laquelle l’humain était séparé de la nature.
L’éthique serresienne est celle où il n’y a pas séparation entre la loi subjective et celle
objective.

338
Michel SERRES, Le contrat naturel, Paris, Éd. Flammarion, 1992, p. 67.
339
Serge GUTWIRTH, Art. Cit., N°40.
340
Michel SERRES, Op. Cit., p. 255.
341
Ibidem, p. 256.
342
Raymond MATAND, Op. Cit., p. 19

118
Contrairement à Hans Jonas pour qui, l’éthique du futur est « une éthique conçue
aujourd’hui pour nos descendants futurs, […] une éthique d’aujourd’hui qui se soucie de
l’avenir et entend le protéger pour nos descendants des conséquences de notre action
présente343 » ; la nouvelle éthique serresienne se fonde sur la double compréhension entre
sujet et objet. « Le sujet se connaît dès qu’il reconnaît sa sujétion pendant que l’autre admet
son propre assujettissement344 ». L’éthique et même la morale de Michel Serres se résume
dans la conscience de soi et de l’autre en tant que sujet équivalent.

En effet, cette éthique s’applique par une morale au sens objectif. Lorsque nous lisons
l’analyse critique de Raymond Matand, celui-ci souligne que, « aujourd’hui émerge une
nouvelle ère où les objets sont des enjeux345 » de la morale et de l’éthique. Michel Serres
ouvre une nouvelle approche de l’éthique. Une éthique qui quitte la sphère uniquement
subjective vers l’objective qui nait de la nouvelle domestication dite réciproque. Cette
nouvelle éthique et morale objective tient compte du mal que l’objet subit : la violence
objective contre les choses de la nature. Celle-ci rappelle à l’humain ce qu’il est. L’éthique
serresienne vient du contrat avec la nature. Cette éthique est fondée sur le principe de
l’équilibre de la terreur, c’est-à-dire une éthique qui doit tenir compte de l’autre. Ce n’est pas
causé du tort à l’autre parce qu’en retour, nous ne savons pas de quoi, il est capable. Ça
signifie tout simplement que protéger l’humain du danger, c’est avant tout protéger la nature
de laquelle il tire sa survie.

En sommes, dans l’aspect positif de l’écologie serresienne nous avons découvert une
certaine originalité. Cette originalité se situe à Quatre niveaux. Premièrement, c’est sur l’idée
du principe de non-séparabilité qu’il développe en écologie qui fonde même le contrat entre
l’humain et la nature. Ici le problème qu’il soulève est que, l’humain et la nature ne font
qu’un et doivent entretenir le rapport symbiotique, contemplative et dialogique. Ce principe
est une médiation scientifique qui essaye de combattre contre le dualisme scientifique.
Deuxièmement, nous avons soulevé avec lui la question du rapport entre l’humain et la nature
lequel nous avons dit qu’avec Michel Serres la nature est sujet de droit et dont l’humain a le
devoir de respecter de la nature. L’idée de Michel Serres a influencé la législation mondiale à
statuer sur le droit de l’environnement. Troisièmement, nous avons parlé de la médiation
juridique qui conduit au second principe qu’est le principe de non-appropriation. Ainsi, l’idée

343
Hans JONAS, Pour une éthique du futur, Paris, Éd. Payot et Rivages, 1998, p. 69.
344
Michel SERRES, Op. Cit., p. 126.
345
Ibidem, p. 84.

119
de la médiation scientifique ou juridique fonde une structure qui va au-delà de la logique
binaire, dans la mesure où la fonction médiatrice concilie l’intérêt de chaque partie pour un
bien commun ou un objectif commun. Ce bien ou objectif est une structure trivalente ou
tripolaire. Enfin, nous avons évoqué l’éthique de Michel Serres. Celle-ci ne prend pas
seulement en compte les humains entre eux, mais le mal causé sur la nature. Elle est devenue
alors fondée sur le sujet et sur l’objet. En outre, après que nous avons présentés le mérite de
notre auteur, dans la partie qui suit nous aborderons les limites la théorie écologique de
Michel Serres.

IV.2. ASPECT NEGATIF DE L’ECOLOGIE SERRESIENNE

Dans la partie précédente, nous avons parlé de l’aspect positif sur la pensée
écologique de notre auteur. Dans cette partie, nous avons dit que Michel Serres, dans
l’ensemble de son travail, il a cherché à faire une médiation du point de vue scientifique,
juridique, politique et éthique. Le premier nous a donné le principe de non-séparabilité, le
second, c’est le principe de non-appropriablité, le troisième est la médiation sur la
gouvernance et le dernier, c’est l’articulation entre la morale subjective et morale objective.
De ce qui a été dit, il y a de quoi dire un mot, car il s’agit de la question de l’objectivité
scientifique. Sur ce, nous allons présenter certaines failles qu’on retrouve dans la pensée
serresienne en ce qui concerne la question de l’écologie. La première limite est la thèse du
contrat naturel. Celui-ci se comprend en parallèle avec le contrat social de Jean-Jacques
Rousseau. La thèse de notre auteur est une antithèse du contrat de Jean-Jacques Rousseau,
c’est à partir de ces travaux que l’auteur établit ses théories.

En parlant de la passation du contrat, Michel Serres suppose que la nature est une
personne humaine avec laquelle l’humain va s’entendre, dialoguer avec volonté et liberté.
Cette manière de dire ainsi, à notre égard est une forme anthropomorphique où il confère à la
nature le caractère humain. Limites sont la personnification et personnalisation de la nature.
Michel Serres confère le droit de l’humain à la nature, par le fait qu’il la considère la nature
comme une personne humaine. A cet effet, si nous lisons Luc Ferry à ce sujet, celui-ci
souligne, « qu’il s’agit là d’une fable métaphorique, [parce qu’il] semble bien difficile, en
effet, de conférer un sens propre au contrat346 ». Luc Ferry imagine la scène où l’humain
passera le contrat avec la nature : « bonjour dame nature, j’aimerais m’entendre avec

346
Luc FERRY, Le nouvel ordre écologique. L’arbre, l’animal et l’homme, Paris, Ed. Grasset, 1992, p. 123.

120
vous347 ». Tout ceci veut uniquement montrer la difficulté à laquelle Michel Serres est face.
Cette difficulté est d’ordre de la compréhension et la matérialisation du pacte avec la nature.

De ce qui précède, concrètement, l’idée du contrat naturel ne tient pas debout, si n’est
qu’une représentation conceptuelle et métaphorique que Michel Serres soutient. La limite
selon nous est d’ordre du droit posé, c’est-à-dire l’acte que le sujet pose en acte, être
conscient. Michel Serres part de l’idée que, la nature a une valeur intrinsèque et en tant que
telle, elle est un sujet ayant ses droits à part entière. Par conséquent, il nécessite un respect.
Au fond, si nous analysons le propos du droit positif, la notion du contrat implique la
conscience qu’à l’individu lorsqu’il pose un acte. Et cette dernière vient de l’individu. S’il
n’est pas conscient, c’est difficile qu’il passe un contrat avec un partenaire qu’il ne voit pas.
Ceci veut dire autrement, le contrat n’est possible que si l’humain est conscient du danger, de
la situation qu’il traverse ; dans le cas contraire, il ne sera pas possible. Et donc le contrat
relève de la volonté humaine, autrement dit, c’est de la simple spéculation. Certains
considèrent cela comme de la fiction.

Par analogie à ce qui se vit, les humains ne conçoivent guère l’idée d’une nature en
tant que sujet de droit. Tous les droits liés à la nature sont légiférés par eux. Ces derniers
écrivent les lois partant de leur logique humaine. Il est difficile qu’ils légifèrent les lois
équitables parce qu’ils ont l’esprit selon lequel la nature est une représentation figée. Le
contrat naturel serait dans ce cas une sympathie humaine. La passation du contrat revient à la
pratique de la sympathie et de l’entraide afin de lutter pour la vie. 348 C’est à la bonne foi,
volonté et la liberté humaine que revient le sort de la nature. Dans ce contexte, le contrat est
toujours une affaire humaine malgré qu’il soit fondé sur la peur de la disparition des espèces
vivantes. Ainsi, le droit de la nature est un droit que l’humain dans sa conscience confère à la
nature du moment que cette dernière lui garantit la vie. Ceci veut dire, en d’autres mots, le
contrat naturel est un accord des humains entre eux au sujet de la nature en danger.

Illustrons ce que vient d’être souligné par un exemple. Les différentes COP349
organisées dans le monde au sujet des enjeux environnementaux, climatiques, etc., sont

347
Ibidem, pp. 123-124.
348
François EUVÉ, « Pour un naturalisme modéré » in le naturalisme et ses critiques, Théophilyon (Revue des
facultés catholiques de théologie et de philosophie de Lyon), Paris, Éd. Théophilyon, 2021, Tome XXVI-Vol. 1,
p. 100.
349
Cette abréviation signifie : Conférence des parties à la convention cadre des nations Unies sur le changement.
C’est une convention qui finance des dommages subis par les pays vulnérables durement touchés par les
catastrophes climatiques. [Enligne]

121
organisées par les humains « pour but le respect de la nature, son entretien, le refus de
l’appropriation, de la maîtrise et de la domination de la nature350 ». C’est là la difficulté de la
thèse que Michel Serres propose en écologie. Le contrat naturel ne peut se faire que s’il y a
d’abord un contrat social au sujet de la nature extrahumaine. De ce fait, la faille du contrat
naturel vient de la législation. Ceci veut dire, en d’autres termes, l’interprétation du langage
naturel ne peut venir que de l’humain. Bien sûr que la nature communique à l’humain, mais si
celui-ci n’est pas capable de comprendre le message, rien ne peut être fait en termes de
contrat. Et c’est la réciprocité qui posera un problème dans la passation du contrat. Car
d’après Hans Jonas, « mon obligation est l'image à l'envers du droit d'autrui qui à son tour est
vue à l'image de mon droit propre351 ». Ceci pour dire, la revendication du droit de la nature
est toujours une expression humaine de la réciprocité. C’est l’humain lui-même qui se résigne
devant ses actes destructifs.

Une autre limite vient du rapport entre le contrat naturel et celui dit social. En parlant
du contrat naturel, Michel Serres exclut le contrat social. Il dit : « par contrat naturel d’abord
la reconnaissance, exclusivement métaphysique, par chaque collectivité, qu’elle vit et
travaille dans le même global que toutes les autres, non seulement chaque collectivité
politique associée par un contrat social352 ». Il n’est pas question pour notre auteur de mettre
en rapport équilibré des deux contrats. Le contrat naturel est une exclusivité pour le contrat
social. Selon lui, le contrat social est anthropocentrique. Quant à nous, exclure le contrat
social ne résout pas les problèmes écologiques. Il est essentiel d’inclure le contrat social dans
le contrat naturel. Car si les humains ne sont pas d’abord capables de se gérés entre eux par
un droit, comment peuvent-ils respecter la nature avec laquelle ils n’ont et ne parlent pas la
même langue ? Ici, nous voulons tout simplement dire que, Michel Serres, en écartant le
contrat social du contrat naturel, n’intègre pas les valeurs humaines dans le rapport humain-
nature. Luc Ferry appelle cette attitude de l’antihumanisme totalitaire. Cette attitude véhicule
une certaine haine contre l’humain en le considérant comme le pire ennemi de la nature, alors
qu’il faut voir aussi l’aspect positif humain dans la problématique écologique.

https://fr.wikipedia.org/wiki/Groupe_d%27experts_intergouvernemental_sur_l%27%C3%A9volution_du_clima
t. (Page consultée le 02/09/2023’).
350
Raymond MATAND, Op. Cit., p. 88.
351
Hans JONAS, Principe responsabilité. Une éthique pour la civilisation technologique, Paris, Éd. Cerf, 1990,
p. 64.
352
Michel SERRES, Op. Cit, p. 78.

122
CONCLUSION
Pour clore ce chapitre, nous sommes parties de deux approches. L’une positive et
l’autre négative. Pour l’approche positive, nous avons souligné quatre aspects comme mérite
de l’auteur. Le premier aspect est son combat pour le principe de non-séparabilité. La
séparation a fait que, d’un côté, il y a l’humain et de l’autre la nature ; d’un côté le sujet et
l’autre côté l’objet. Cette séparation est visible dans plusieurs domaines. Le concept contrat a
introduit une valeur sur les deux valeurs diamétralement opposées : humaine et naturelle. Le
contrat a créé une entente. Le deuxième mérite est l’idée de la nouvelle relation entre
l’humain et la nature. Celle-là, grâce au contrat, confère à la nature le statut du sujet de droit.
Ceci étant, l’humain est obligé d’adopter une nouvelle manière de vivre.

Le troisième aspect est la relation droit-politique qui introduit le principe de non-


appropriation. Le nouveau rapport fait que l’humain est interdit de s’approprier les choses de
la nature, puisqu’elles sont devenues les biens communs. En tant que bien commun, personne
ne peut poser un acte allant à l’encontre de la volonté de tous. Par ce principe, la nature n’est
plus une propriété privée de l’humain, mais un bien collectif avec lequel le dialogue, la
réciprocité est au centre. Le quatrième aspect est l’éthique serrésienne. Celle-ci est fondée sur
le principe sujet-sujet, objet-objet. Elle n’est pas seulement du point de vue subjectif, mais
objectif aussi. Elle tient compte du mal que l’humain pose sur les objets de la nature.

Le deuxième aspect de ce chapitre est négatif, celui-ci se fonde sur certaines analyses
comme limites de notre auteur. La première faille vient de la concrétisation du contrat naturel
si nous nous referons à la théorie du droit positif. L’auteur construit le contrat naturel en se
référant aux thèses du contrat social, mais en l’excluant. Pourtant, dans la vie pratique, seul
l’humain est capable de signer un contrat. Et même si celui de Michel Serres est
métaphysique, relavant de la conscience, l’humain ne peut être conscient de cela que s’il
trouve son intérêt. Par conséquent ; c’est du contrat humain que peut naitre le contrat naturel.

123
CONCLUSION GENERALE

Pour conclure notre mémoire. De quoi avons-nous discouru ? Dans ce travail de


mémoire, nous avons discouru de la part de l’humain dans les problèmes écologiques chez
Michel Serres. Ce travail nous a permis grâce à la pensée de Michel Serres de découvrir le
rôle et la place de l’humain dans la nature. Après cette longue littérature et découverte, nous
avons en effet le devoir de donner les conclusions de nos recherches. Nous sommes partis du
postulat selon lequel, les êtres vivants sur la planète terre courent un danger. Ils sont menacés
par les conséquences écologiques liées au réchauffement et changement climatique. Les
conséquences écologiques depuis un temps sont devenues récurrentes et mettent l’ensemble
d’éléments de la nature en danger de disparition. De postulat surgit des questions
fondamentales : d’où sont venus ces conséquences ou problèmes écologiques et qui est à
l’origine de ces conséquences ? Ces deux questions ont fait l’objet même du premier chapitre.

De ce qui précède, le premier chapitre, intitulé, Les causes profondes à l’origine des
problèmes écologiques, a fait l’objet d’une enquête historique pour savoir où, quand,
comment et qui est à l’origine des problèmes écologiques. Nous sommes partis questionner
les événements historiques de la terre pour trouver la cause de ces évènements qui sont en
effets le premier scandale écologique : la première extinction des espèces. De cette enquête, il
résulte que, avant l’action humaine ne soit un problème majeur en écologie, la nature elle-
même dans son fonctionnement et dynamisme est la cause première des conséquences
écologiques. Ainsi, l’humain n’est pas responsable dans cette réorganisation de la nature. Il
s’agit là des phénomènes naturels de la terre. Par ailleurs, comment maintenant expliquer
l’accélération des problèmes écologiques aujourd’hui ? Tout est parti de l’idée que l’on se fait
de la nature. L’héritage scientifique et culturel de la nature comme une chose vide de sens.

A ce propos, du côté de la philosophie, déjà avec Parménide, la nature sera rangée du


côté du non-être et l’humain de l’être. Quand bien-même ce dualisme parait être
métaphysique, Parménide manifeste déjà un mépris sur les choses de la nature. Ainsi va
naitre une certaine hostilité envers la nature. Francis Bacon va venir avec l’empirisme avec
sa méthode de l’induction pour dire ; l’esprit humain doit enquêter sur la nature de deux
façons : premièrement de manière théorique découvrir les lois de la nature et deuxièmement
de manière pratique développer les techniques pour arriver à découvrir ces lois. L’objet de
Bacon est que, l’esprit humain apprend de la nature pour qu’en retour, il triomphe et domine
sur elle. De cette idée, Descartes va venir avec le rationalisme. Celui-ci part des théories

124
baconiennes, il introduit un dualisme : d’une part, il y a sujet pensant et de l’autre part un
objet pensé. D’un côté, il y a un sujet et de l’autre côté l’objet. Tout ça dans l’objectif de
donner à l’humain le pouvoir d’être maitre et possesseur de la nature. De leurs conceptions,
nous avons découvert une pensée hostile à la nature comme chose sans valeur. Et même le
déterminisme et scientisme vont construire leur théorie partant de ces deux penseurs.

Le déterminisme et le scientisme vont être influencés par le rationalisme cartésien.


Celui de vouloir rendre l’humain maître et possesseur de la nature. Pour le déterminisme, il
faut que l’humain arrive à être maître et possesseur de la nature par la raison.
Malheureusement, cette interprétation sera une exaltation de la réalité puisque le monde est
fixe, déterminé par les lois mathématiques. Les lois scientifiques doivent s’appliquer sur les
lois de la nature grâce à la technique. Conséquence, la nature devient une chose soumise à la
nécessité de l’humain selon sa rationalité. De cette conséquence s’inscrit le scientisme
d’après lequel, seule la science est décideuse des choses du monde.

Tout compte fait, les éléments du premier chapitre ont présenté une certaine idéologie
sur la nature et sur l’humain. Une représentation d’une nature inférieure à l’humain et qui n’a
rien de valeureux. Nos recherches ont abouti à la conclusion selon laquelle les problèmes
écologiques sont des problèmes de conceptions, des idées et croyances que nous avons hérités
d’une culture dualiste et méprisant la nature comme une réalité extérieure à l’humain. Voilà
pourquoi, l’anthropocentrisme comme idéologie est une idée exaltant l’humain comme maître
de tout. Cette culture est aujourd’hui au cœur de notre pensée et notre agissement. Michel
Serres n’avait pas tort de dire que la crise écologie provient de la culture héritée de l’histoire.

En outre, de cette culture, la nature se voit aujourd’hui transformer et marchander


comme une chose à valeur extrinsèque. C’est là que nait le problème écologique de notre
époque : la marchandisation de la nature comme bien. Le deuxième chapitre est une analyse
sur la problématique du progrès technique, capitalisme et leurs conséquences dans la nature.
Cette analyse part des deux ordres qui règlent le monde aujourd’hui. Le premier est la
problématique du progrès technique. Celui-ci est cette association entre la science et la
technique. D’un côté, la science fournit à la technique les méthodes et procédures et la
technique les récupère pour matérialiser de l’autre côté. Ce mariage fait de la nature un objet
en vue d’agir sur elle. La technoscience a des conséquences sur les vivants avec les pratiques
de la biotechnologie, l’émission des gaz, etc. Le progrès technique vient de cette culture
cherchant toujours à rendre l’humain maitre, dominant et possesseur de la nature ou du

125
monde dans lequel il vit. Le deuxième ordre vient du développement capitaliste. Cet ordre a
une logique marchande. Cette logique considère les choses de la nature comme des
marchandises avec lesquelles les humains usent selon leur propre gré. De cet ordre
marchande, né le problème de l’intérêt, du profit et de l’accumulation des biens. Le
capitalisme embarque la nature dans un nouveau navire où les valeurs sont mises en
parenthèses. La nature est privatisée par l’humain comme un bien revenant à lui seul.
Cependant, ces deux ordres sont les clés qui interprètent le monde aujourd’hui
puisqu’ils forment une structure. Dans l’écologie, l’ordre technologique et économique
objectivent et marchandent les autres êtres vivants en créant des ruptures dans la relation
humain-nature. Ces ruptures transforment le visage et la beauté du monde à long terme.
Aujourd’hui, le développement technologique et économique crée des problèmes graves dans
les écosystèmes : le réchauffement et développement climatique, les extinctions des espèces,
les inondations, etc. En effet, de ce que nous venons de dire, nous découvrons que les
problèmes écologiques viennent de cette association de la technologie et système
économique. L’humain actuel, héritier de la culture, méprisant la nature est le premier acteur
dévastateur de la nature. Par l’accumulation des biens, la nature devient un bien rendant des
services à l’humain sans que ce dernier puisse la protégér. La question reste à savoir
comment résoudre ces problèmes auxquels l’humanité toute entière est confrontée ?

De ce qui précède, devant une telle question où l’avenir de l’humanité est mis en
danger, Michel Serres propose une solution qu’est l’objet du troisième chapitre. Le troisième
chapitre est nommé : l’écologie du contrat ou du sujet de droit. Celui-ci est une proposition
que Michel Serres nous offre. Face aux conséquences écologiques, à la violence objective où
les humains se battent tous contre les choses du monde, Michel Serres vient introduire la
notion du contrat naturel. L’humain depuis le contrat social considère la nature comme un
objet sans valeur et sans droit. Cette conception est, depuis le moderne, la déclaration des
droits de l’homme. La nature est livrée aux mains des prédateurs. Le contrat naturel est un
contrat qui vise à valoriser la nature en la rendant d’abord sujet, ensuite un sujet ayant ses
droits et enfin partenaire de l’humain. Ce contrat est une exclusivité du contrat social par le
fait qu’il est universel et tient compte de tous les éléments de la nature. Michel Serres défend
en premier lieu l’idée d’un droit de propriété. Il recourt au droit classique qui tient compte du
monde en sa totalité. L’enjeu du contrat naturel comme proposition à la solution des
problèmes écologiques est la reconnaissance de la nature comme un être vivant, un sujet de
valeur, une âme, une mère, une maison accueillante avec laquelle l’humain serait en parfaite

126
harmonie en tant que symbiote. Par contemplation, réciprocité, l’humain et la nature doivent
vivre une relation symétrique, synchronique et transversale. L’humain rentre dans la nature
en tant que fils de la nature et la nature le reçoit, le protège.

Le quatrième chapitre est une analyse critique sur notre recherche effectuée dans la
pensée écologique de Michel Serres. Il s’intitule : approche critique de l’écologie du sujet de
droit. L’analyse part d’un aspect positif où, nous avons relevé que l’originalité des travaux de
notre auteur est le fait de briser le dualisme écologique qui sépare l’humain de la nature.
Séparer l’humain de la nature est l’origine même des problèmes écologiques. Une autre
originalité est l’idée du contrat introduisant une nouvelle relation et un nouveau rapport où la
nature n’est plus un objet sans valeur, mais un sujet de droit et partenaire de l’humain. Un
autre mérite est le fait de biser l’appropriation de la nature par l’humain en introduisant le
principe de non-appropriation. Ce deuxième principe limite en fait la conception de l’humain
sur la nature. Et enfin, la morale objective. Celle-ci tient compte du mal objectif poser sur la
nature. Le deuxième aspect est négatif. Celui-ci se positionne sur la matérialité ou la
concrétisation du contrat naturel. Il est difficile de mettre en pratique un papier signifiant une
signature du contrat entre l’humain et l’arbre, l’animal, etc. Même si Michel Serres évoque de
la conscience, le contrat naturel n’est qu’un contrat social sur la nature. Que dire de la part de
l’humain dans les problèmes écologiques ?

Nos recherches nous ont permis d’aboutir à la conclusion selon laquelle ; les
problèmes écologiques viennent en premier lieu de la conception que l’humain se fait de la
nature. Cette conception conditionne la perception ou la vision que l’humain se fait des autres
êtres de la nature. L’idée qu’il se fait du monde vient de ce qu’il conçoit et croit. A savoir, les
autres êtres sont pour lui des objets sans valeurs et exclu du statut de sujets des droits. En
second lieu, les problèmes écologiques émanent du dualisme entre l’humain et la nature. Ce
dualisme constitue un problème fondamental dans leur rapport. Séparer l’humain de la nature
ou la nature de l’humain crée entre lui une dépréciation et un esprit de supériorité. Ainsi,
l’humain pense être plus important que les autres êtres de la nature. En ce sens, les non-
humains se trouvent conditionnés par la volonté de l’humain.

En outre, la part de l’humain dans les problèmes écologues est la prise de conscience
et la responsabilité. Cette conscience et responsabilité sont une réponse pour limiter la crise
écologique. Car sans elles, ils ne prendront pas fin et l’humain ne peut qu’être victime de ses
propres actes (destructions de l’environnement, pollution, déforestation, etc.). Néanmoins,

127
c’est avec la prise conscience et la responsabilité qu’il peut vivre en harmonie avec la nature
en sa totalité.

128
BIBLIOGRAPHIE

I. DICTIONNAIRES ET ENCYCLOPEDIES
 Auroux Sylvain et André Jacob, Encyclopédie philosophique universelle. L’univers
philosophiques, Paris, Éd. P.U.F, 1989.
 IDEM, Les notions philosophiques. Encyclopédie philosophique Universelle, Tome 1,
Paris, Éd. P.U.F., 1990.
 Comte Sponville André, Dictionnaire philosophique, Paris, Éd. P.U.F., 2001.
 Lalande André, Vocabulaire technique et critique de la philosophie, Paris, Éd P.U.F.,
1926.
 Larousse, Le Larousse illustré, Paris, Éd. Larousse, 2009.

II. LIVRES DE L’AUTEUR

 Serres Michel., Morales espiègles, Paris, Ed. Le Pommier, 2019.


 IDEM, C’était mieux avant ! Paris, Ed. Le Pommier, 2017.
 IDEM, Le gaucher boiteux, Paris, Ed. Le Pommier, 2015.
 IDEM, Petite poucette, Paris, Le Pommier, 2015.
 IDEM, Les temps nouveaux, Paris, Le Pommier, 2013.
 IDEM, Biogée, Paris, Éd. Le Pommier, 2010.
 IDEM, Qu’est-ce que l’humain, Paris, Le Pommier, 2010.
 IDEM, Pantopie : de l’Hermès à petite poucette, entretien avec Martin Legros et Sven
Ortali, Paris, Éd. Le pommier, 2010.
 IDEM, Temps des crises, Paris, Éd. Le Pommier, 2009.
 IDEM, Rameaux, Paris, Éd. Le Pommier, 2007.
 IDEM, Hominescence, Paris, Éd. Le Pommier, 2001.
 IDEM, Le contrat naturel, Paris, Éd. Flammarion, 1992.
 IDEM, Eclaircissements. Cinq entretiens avec Bruno Latour, Paris, Ed. François
Bourin, 1992.
 IDEM, Le tiers-instruit, Paris, Ed. François Bourin, 1991.
 IDEM, Hermès III. La traduction, Paris, Éditions de Minuit, 1974

III. AUTRES LIVRES

 Antiseri Dario, L’actualité de la pensée franciscaine. Réponses aux questions


présentes. Italie-Soveria, Éd. Rubbettino, 2008.

129
 Atias Christian, Philosophie du droit, Paris, Éd. P.U.F., 1999.
 Bacon Francis, Novum organum, Paris, Éd. Hachette, 1857.
 Barbault Robert, Ecologie générale. Structure et fonctionnement de la biosphère,
Paris, Éd. Dunod, 2008.
 Beaud Michel, Histoire du capitalisme. De 1500 à nos jours, Paris, Éd. Seuil, 1981.
 Delbove Raoul, L’humanisme énergétique de Teilhard, Bruxelles, Éd. Bloud et Gay,
1966.
 Descartes René, Discours de la méthode, Paris, Éd. Aubier-Montaigne, 1951.
 Feltz Bernard, La science et le vivant. Philosophie des sciences et modernité critique,
Paris, Éd. De Boeck, 2014.
 Fragniere Augustin et Bourg Dominique, La pensée écologique. Une anthologie.
Paris, Éd. P.U.F, 2014.
 Gadamer Hans-Georg, Vérité et méthode. Les grandes lignes d’une herméneutique
philosophique, Ed. Seuil, 1996.
 Giolito Christoph, Comprendre l’histoire de la philosophie, Paris, Éd. Armand Colin,
2008.
 Greisch Jean, Entendre d’une autre oreille. Les enjeux philosophiques de
l’herméneutique biblique, Éd. Bayard, 2006.
 Hans Jonas, Pour une éthique du futur, Paris, Éd. Payot, 1998.
 IDEM, Principe responsabilité. Une éthique pour la civilisation technologique, Paris,
Éd. Cerf, 1990.
 Latour Bruno, Nous n’avons jamais été modernes. Essai d’anthropologie symétrique,
Paris, Éd. La Découverte, 1991.
 Leclercq Jacques, Leçons de droit naturel I. Fondement du droit et de la société,
Louvain, Éd. Namur, 1947.
 London Frédéric, Capitalisme, désir et servitude. Marx et Spinoza, Paris, Éd. La
fabrique, 2010.
 Marx Karl, Le capital, Paris, Éd. Garnier-Flammarion, 1969.
 Matand Makashing Raymond, l’homme et la nature. Perspectives africaines de
l’écologie profonde. Paris, Éd. L’Harmattan, 2019.
 IDEM, Michel Serres, Hans Jonas, Edgar Morin et l’écologie profonde, Paris, Éd.
L’Harmattan, 2020.
 Morin Edgar, La méthode 2. La vie de la vie, Paris, Éd. Seuil, 1980.

130
 Onaotsho Kawende Jean, Démocratie, technoscience et écologie. Champs
pragmatiques de la rationalité pluraliste, Louvain, Éd. Academia-Harmattan, 2017.
 Pape François, Laudato si’. Sur la sauvegarde de la maison commune. Vatican, Éd.
Liberia Vaticana, 2015.
 Pave Alain, La nécessité du hasard. Vers une théorie synthétique de la biodiversité,
Paris, Éd. EDP-Sciences, 2007.
 Platon, Protagoras, Paris, Éd. Garnier, 1958.
 Reeves Hubert et Lenoir Frédéric, Mal de terre, Paris, Éd. Seuil, 2003.
 Rousseau Jean-Jacques, Du contrat social. Ecrits politiques, œuvres complètes, Paris,
Éd. Gallimard, 1964.
 Schumpeter Joseph, Capitalisme, Socialisme et Démocratie, La doctrine marxiste. Le
capitalisme peut-il survivre ? Socialisme et démocratie, Paris, Éd. Payot, 1963.
 Worster Donald, Les pionniers de l’écologie, Paris, Éd. Le sang de la terre, 2009.
 Xuan Thuan Trinh, Le chaos et l’harmonie. La fabrication du réel. Paris, Éd. Fayard,
1998.

IV. ARTICLES ET REVUES


IV.1. ARTICLES DE L’AUTEUR
 Serres Michel, « Le droit peut sauver la nature », in Pouvoirs, Paris, Éd. Seuil, N°
127, 2008/4, pp. 5-12.
 IDEM, « préface qui invite le lecteur à ne pas négliger de la lire pour entrer dans
l’intention des auteurs et comprendre l’agencement de ce livre », in Éléments
d’histoire des sciences, Paris, Ed. Bordas, 1989, p. 890.
IV.2. AUTRES ARTICLES

 Batebua Jean-Claude, « Protection de l’environnement dans le cadre de la mise en


œuvre de la reforme minière », in Revue Congo-Afrique, Kinshasa, Éd. C.E.P.A.S, N°
549, Novembre, 2020, pp. 1035-1045.
 Bensaude Bernadette, « Michel Serres (1930-2019) », in Revue philosophique de la
France et de l'étranger, Tome 145, Paris, Éd. P.U.F, 2020/1, pp. 127-129.
 Blesson Mathieu, « Pour une démocratie écologique », in Topique, Paris, Éd. A2IP,
N° 122, 2013/1, pp. 71-82.
 Cezilly Franck, « histoire de l’écologie comportementale », in écologie
comportementale. Cours et question, Paris, Éd. Dunod, 2005, pp. 3-26.

131
 Euvé François, « Pour un naturalisme modéré », in le naturalisme et ses critiques.
Théophilyon (Revue des facultés catholiques de théologie et de philosophie de Lyon),
Paris, Éd. Théophilyon, Tome XXVI-Vol. 1, 2021, pp. 93-110.
 Giraud Gael, « le capitalisme financiarisé et transition écologique. De la "société de
propriétaire" vers une "société des communs" ? », in Gregorianum, Roma, Éd. P.U.G,
N° 94/1, 2013, pp. 695-706.
 Grandjean Alain, « les enjeux écologiques et leurs représentations », in Revue Lumen,
Vol. LXXIII, N°4, Bruxelles, Éd. UCL, 2018, pp. 367-381.
 Gutwirth Serge, « Autour du contrat naturel », in images et usages de la nature,
Bruxelles, Éd. Presses de l’université des Saint-Louis, N°36, 1993, pp. 75-131.
 Lentiampa Adrien, « De l’ère de l’individu à l’ère de la personne. Pour une économie
à visage humain », in Gregorianum, Roma, Éd. P.U.G, N° 94/4, 2013, pp. 833-847.
 Lentiampa Adrien., « écologie et vie. Une lecture de Laudato si’ dans le perspective
africaine », in revue Congo-Afrique, Kinshasa, Éd. C.E.P.A.S, N° 569, Novembre,
2022, pp 1114-1135.
 MARSH, George Perkins, « l’homme et la nature, ou la géographie physique telle
modifiée par l’action de l’homme 1864 », in La pensée écologique. Une anthologie,
Paris, Éd. P.U.F, 2014, pp. 65-77.
 Matagne Patrick, « aux origines de l’écologie », in Innovation, Paris, De Boeck,
N°18, 2003, pp. 27-42.
 Maweja Roger, « L’herméneutique théologique à l’ère du défi écologique », in
Science et esprit, Montréal, Collège universitaire dominicain, Vol. 73/3, N° 6, 2021,
pp. 395-412.
 Noël Léon, « Le principe du déterminisme », in Revue néo-scolastique, 12ᵉ année,
N°45, Paris, Éd Persée, 1905, pp. 5-26.
 Pottier Antonin, « Le capitalisme est-il compatible avec les limites écologiques ? », in
Centre d’économie de la Sorbonne Université Paris 1, Paris, Éd. CNRS, 2O17, pp. 1-
15.
 Ruboneka Gilbert, « Michel Serres et la philosophie de communication : une
épistémologie de mise en relation », in Ngbowu, Revue des langues, lettres et sciences
de l’homme et de la société, Facultés des lettres et sciences humaines Université de
Kara, Kara, Togo, Vol. 1, N° 12, Décembre 2012, pp. 455-465.

132
 IDEM, « La thèse serrésienne d’histoires des sciences », in Endoxon, Revue africaine
de philosophie des sciences, Sciences, Techniques, Société, UOB/IRSH-CENAREST,
Paris, Ed. L’Harmattan, N°2, 2020, pp. 17-29.
 Thoreau, Henry David, « Le Paradis à (re)conquérir », in La pensée écologique. Une
anthologie, Paris, Éd. P.U.F, 2014, pp. 27-40.

V. WEBOGRAPHIE

 [Enligne] https://fr.m.kikipédia.org/biographie-Michel-Serres (page consultée le


10/03/2023 à 14h07’).
 [Enligne]https://fr.wikipedia.org/wiki/Groupe_d%27experts_intergouvernemental_sur
_l%27C3%A9volution_du_climat. (Page consultée le 02/09/2023’).
 [enligne] : https://news.un.org/fr/story/2022/02/1115262 (page consultée le 30/04/
2023 à 07h50’).
 [Enligne]https://www.larousse.fr/encyclopédie/images/Rosa_Luxemburg_en_1912/13
10796 (Page consulté le 10/06/2023 à 12h 21).

133
TABLE DES MATIERES
EPIGRAPHES ........................................................................................................................................ 2
DEDICACE ............................................................................................................................................ 3
IN MEMORIAM .................................................................................................................................... 4
REMERCIEMENTS ............................................................................................................................... 5
0. INTRODUCTION GÉNÉRALE ........................................................................................................ 7
0.1. OBJET D’ETUDE ........................................................................................................................... 7
0.2. CHOIX ET INTERET DU SUJET .................................................................................................. 8
0.3. ETAT DE LA QUESTION .............................................................................................................. 9
0.4. PROBLEMATIQUE ...................................................................................................................... 11
0.5. HYPOTHESE DU TRAVAIL ....................................................................................................... 13
0.6. DELIMITATION DU SUJET ....................................................................................................... 14
0.7. METHODES DE RECHERCHE ................................................................................................... 14
0.8. DIVISION DU TRAVAIL ............................................................................................................ 15
0.9. NOTICE BIOGRAPHIQUE .......................................................................................................... 15
0.10. DIFFICULTES RENCONTREES ............................................................................................... 16
CHAPITRE PREMIER : LES CAUSES PROFONDES DES PROBLEMES ÉCOLOGIQUES ........ 17
II.0. INTRODUCTION ......................................................................................................................... 17
I.1. LES PHENOMENES NATURELS DE LA TERRE ..................................................................... 20
I.2. LES IDEOLOGIES PHILOSOPHICO-SCIENTIFIQUES DE LA NATURE .............................. 24
I.2.1.1. Les idéologies philosophiques : l’empirisme et le rationalisme ........................................... 25
I.2.1.1.1. L’empirisme baconien ................................................................................................... 26
I.2.1.1.2. Le rationalisme cartésien ............................................................................................... 30
I.2.1.2. L’idéologie scientifique : déterminisme et scientisme ......................................................... 33
I.3. L’ANTHROPOCENTRISME ........................................................................................................ 38
I.3. CONCLUSION .............................................................................................................................. 44
CHAPITRE DEUXIEME : LA PROBLEMATIQUE DU PROGRÈS TECHNIQUE ......................... 46
II.O. INTRODUCTION ........................................................................................................................ 46
II.1. ANALYSE DES DEUX ORDRES : PROGRES TECHNIQUES ET DEVELOPPEMENT
ECONOMIQUE .................................................................................................................................... 47
II.1.1. LES PROGRÈS TECHNIQUES ................................................................................................ 47
II.1.1.1. Culture et technique ............................................................................................................ 48
II.1.1.2. Techniques et technologies ................................................................................................. 56
II.1.2. LE DEVELOPPEMENT ECONOMIQUE : LE CAPITALISME ............................................. 59
II.2. LA NATURE VIOLENTÉE ......................................................................................................... 66
II.3. LES CRISES ET CONSÉQUENCES ÉCOLOGIQUES .............................................................. 68
II. 3.1. LE RÉCHAUFFEMENT ET CHANGEMENT CLIMATIQUE .......................................... 70

134
II.3.1.1. Réchauffement climatique ............................................................................................... 70
II.3.1.2. Changement climatique ................................................................................................... 78
II.3.2. EXTINCTION DES ESPECES.............................................................................................. 79
II.4. LES SIX ÉVÉNEMENTS EN CRISE .......................................................................................... 80
II.5. CONCLUSION ............................................................................................................................. 82
CHAPITRE TROISIEME : L’ECOLOGIE DU CONTRAT ET DU SUJET DE DROIT ................... 84
III.O. INTRODUCTION ...................................................................................................................... 84
III.1. DROIT DE L’ETRE HUMAIN ET NON DE LA NATURE ...................................................... 85
III.1.1. L’IDEE DU DROIT NATUREL ET SUJET DE DROIT .................................................... 87
III.1.2. DE LA VIOLENCE SUR LA NATURE AU CONTRAT ................................................... 91
III.2. LE CONTRAT NATUREL ......................................................................................................... 93
III.2.1. LA NOUVELLE POLITIQUE ISSUE DU CONTRAT .................................................... 100
III.3. NOUVEAU RAPPORT ENTRE L’HUMAIN ET LA NATURE ............................................ 101
III.4. CONCLUSION .......................................................................................................................... 106
CHAPITRE QUATRIEME : APPROCHE CRITIQUE DE L’ECOLOGIE DU SUJET DE DROIT 109
IV. 0. INTRODUCTION .................................................................................................................... 109
IV.1. ASPECT POSITIF DE L’ECOLOGIE SERRESIENNE .......................................................... 109
IV.2. ASPECT NEGATIF DE L’ECOLOGIE SERRESIENNE ........................................................ 120
CONCLUSION ................................................................................................................................... 123
CONCLUSION GENERALE ............................................................................................................. 124
BIBLIOGRAPHIE .............................................................................................................................. 129
TABLE DES MATIERES .................................................................................................................. 134

135

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