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DICTIONNAIRE DECALE _ DES MATHEMATIQUES Elisabeth Busser Bertrand Hauchecorne Préface de Cédric Villani DICTIONNAIRE DECALE _ DES MATHEMATIQUES Elisabeth Busser Bertrand Hauchecorne Préface de Cédric Villani Préface Bertrand Hauchecorne : un nom bien connu des « taupins » des trente dernigres années, pour son célébre ouvrage décalé, recueil de contre-exemples, Je me souviens encore du colleur qui le premier m’en a parlé comme d’une perle rare ! Et Elisabeth Busser : un nom bien connu des amateurs d’énigmes mathéma- tiques, auteure de plusieurs ouvrages sur le sujet, et en particulier d'une adapta- tion pour lycéens des célébres énigmes de Lewis Carroll. Louvrage créé par ce duo devait forcément étre singulier, cultivé, Iudique et rigoureux. Et cest le cas, 6 combien ! La sélection de 250 mots et concepts, abstraits et concrets, jeunes et vieux, thématiquement mélangés par lordre alphabétique, constitue une merveilleuse petite encyclopédie, loin d’étre exhaustive, mais pour autant rendant fidéle- ment hommage & la diversité et 4 la profondeur des sciences mathématiques. On y retrouvera les héros de ’histoire mathématique, du mystérieux Pythagore a Y’intrépide Sophie Germain, de la brillante dynastie Bernoulli a Pintransigeant Godel. Quelques dizaines d'explorateurs particuligrement audacieux dont les aventures entrelacées illustrent la grande aventure collective des centaines de miilliers de mathématiciennes et mathématiciens qui se sont passé le témoin, au cours des derniers millénaires, pour approfondir une conguéte précieuse de Phumanité On y retrouvera les concepts, simples et compliqués a la fois, familiers et pourtant si profonds, qui ont fait le succés du formalisme mathématique et de ses applications, depuis les courbes aux structures algébriques, en passant par Je mystérieux signe = et sans oublier les bugs chers aux informaticiens ! Dire quia fallu des millénaires pour maitriser certains concepts que on apprend aujourd'hui a Pécole. On y retrouvera les problémes, puzzles, énigmes, conjectures, qui depuis des millénaires émaillent le progrés mathématique et fascinent les chercheurs. Avec ce va-et-vient permanent entre les problémes concrets, parfois formulés comme de la plomberie on ne peut plus terre & terre, et les grands problémes théoriques, comme I’hypothése du continu, la conjecture de Fermat ou celle de Poincaré. Finalement 'ouvrage de Busser et Hauchecorne entreméle les idées. les personnes et les problémes mathématiques, exactement comme j’ai moi-méme cherché a le faire dans ma carriére de vulgarisateur mathématique. Et sans oublier les lieux ! Car depuis la Gréce antique jusqu’a l'’école de Gottingen, les compétences mathématiques se développent selon des cultures, dans des communautes et des contextes. Aujourd’hui, en cette poque d'informatique triomphante et de terrible complexité des problémes qui s‘abattent sur la planéte et 'humanité, la mathématique s invite dans toutes les nuances du jeu intellectuel et de action publique, Depuis la prédic- tion des réparations de tuyaux avec les derniers algorithmes d’intelligence artifi- cielle, jusqu’aux grandes questions sur lémergence des structures d’apprentissage, en passant par la modélisation des épidémies. C’est une époque merveilleuse pour apprécier la richesse de la mathématique, boite & concepts et boite & outils Mais ce n'est pas une boite fermée, et le dictionnaire décalé use de tous les ressorts de la culture pour la replacer dans histoire humaine. Les images de rosace ou de rubans de Meebius, les citations de Victor Hugo ou Supervielle, les chansons de Barbara, les tortueux extraits de Kant ou les fluides vers de Verlaine. C’est bien la sympathie intellectuelle, la sympathie, la curiosité qui poussent les mathématiciens 4 apprendre et chercher, bien plus que 'utiité des applications ; il en sera de méme pour le lecteur ! Chemin faisant, on tombera dans les puits sans fond que sont I’infini et les probabilités. Mais on retrouvera aussi des souvenirs de collége, les géométries, les débats pédagogiques. On trouvera aussi des liens entre des pans différents des sciences mathématiques, comme cette jolie visualisation géométrique des trois moyennes dans un triangle rectangle. Ces ponts et passerelles sont 'un des éléments les plus importants dans le paysage mathématique, et 'on peut méme & niveau élémentaire s’y familiariser. Ce dictionnaire décalé n'est pas un cours, mais tout le monde pourra y apprendre, et moi-méme j’y ai appris ! Par moments il m’a rappelé des souvenirs de recherche, par moments aussi il m’a replongé & adolescence, & l’poque ott je passais des heures en compagnie des formules d’Al-Kashi, des limites et des identités remarquables, ou encore & traquer Ia logique derriére ces belles figures géométriques ott les droites et les cercles se rencontrent comme par magie. Chemin faisant, je me suis retrouvé moi aussi transformé en entrée dans le dictionnaire ! Je ne pouvais espérer meilleur hommage pour mes efforts & explorer de nouvelles voies de communication et médiation mathématique. Une magnifique citation d’André Weil, modéle d’humilité, clot ce superbe panorama impressionniste avec tous les ingrédients qui ont fait le suecés, depuis des millénaires, de notre discipline aussi utile que belle. Avec ses belles struc~ tures, ses belles figures, ses belles correspondances, ses belles surprises. Dans le jeu des idées qui fusionnent, bourgeonnent et se croisent. Avec ses régula- rités et ses singularités, ses beaux esprits, et ses belles histoires. Cédric Villani Mathématicien, député, Médaillé Fields 2010, Professeur de l'Université de Lyon, Membre de I’Académie des sciences Avant-propos Complet mais pas comme les autres Nous avons tous deux enseigné avec passion et rigueur les mathématiques avec le plaisir de transmettre des notions parfois difficiles et ardues : nous parta- geons aussi tous deux un vif intérét pour la culture mathématique que nous pensons intimement lige aux autres disciplines Fort de connaissances que nous avons acquises dans l’écriture d’ouvrages mais aussi de nombreux articles, en particulier ceux publiés dans la revue Tangente, nous avons concu un dictionnaire dans lequel les définitions sont religes & des aspects culturels. Nous avons en particulier eu le souci que chaque entrée soit un texte agréable a lire, Nous souhaitons ainsi faire partager 4 un large public intéressé par les mathématiques, sans forcément en étre spécialiste, une approche différente des notions mathématiques. Un dictionnaire différent Les mathématiques ont besoin de définitions précises, trés souvent liges entre elles : on ne peut, par exemple. pas définir la dérivée sans savoir ce quest une fonction. Aussi, pouvoir accéder aux différentes définitions doit répondre & une logique interne que les ouvrages plus généraux comme le Larousse ou le Robert, ne peuvent fournir. Depuis le premier Dictionnaire mathématique ou idée générale des mathématiques de Jacques Ozanam publié en 1691, de nombreux ouvrages ont suivi devenant au cours des années, malgré leur sériewx, de plus en plus arides. En quoi celui-ci est différent des autres? Les mathématiques sont trop souvent détachées du reste de la connaissance alors quielles en font partie intégrante. Trop souvent elles sont vécues comme nécessaires mais ennuyeuses et difficiles. C'est aussi une synthése entre la précision des définitions et des aspects culturels allant de histoire & la pogsie en passant par l’étymologie que nous vous proposons. C'est dans ce double but que nous avons congu le Dictionnaire décalé des mathématiques que vous avez entre les mains : en deux mots, joindre Putile & agréable mais aussi, rendre les mathématiques plus attractives, Un emu ule Le corps principal contient environ 250 entrées religes les unes aux autres par des renvois. La majorité d’entre elles correspondent aux notions fondamen- tales des mathématiques, du collége jusqu’au niveau du baccalauréat et méme un peu plus. Les définitions sont précises, souvent agrémentées de schémas afin d’aider & la compréhension. Nous y avons ajouté des entrées différentes, des universités célébres comme celle de Gottingen, quelques mathématiciens mythiques comme Galois ou Gauss et quelques notions amusantes comme la baderne ¢’Apollonius, le bretzel ou la gamme de Pythagore. Ces entrées complé- mentaires ne sont pas exhaustives, bien stir mais sont des coups de coeur qui montrent que les maths se nichent la of on ne les attend pas. Nous avons souhaité que chaque entrée puisse se lire comme un texte & part entigre. Aussi avons-nous eu le souci de regrouper parfois plusieurs défini- tions au sein d’une méme entrée référencée au concept le plus naturel. Ainsi, cosinus est défini & Ventrée sinus. écart-type Vest au mot variance. Pour permettre au lecteur de retrouver ces termes, un index les regroupe avec le renvoi correspondant. Sérieux, mais totalement décalé Nous avons agrémenté louvrage d'allusions littéraires, de citations, d’apergus historiques, d’étymologies amusantes qui vous permettront d’avoir une lecture facile, agréable et satisfaisante culturellement. Le lecteur pourra butiner article enarticle avec le cheminement de son choix, allant par exemple d'une citation de Victor Hugo, un article sur le boulier puis ’apprendre & construire la bissectrice d'un angle avec des allumettes. Mais, s'il est sérieux, il retrouvera aussi les propriétés bifocales de l’ellipse. A qui sadresse cet ouvrage? Un large public pourra tirer profit de cet ouvrage. «= Il servira aux parents pour suivre et comprendre la progression de leurs adolescents dans V'apprentissage des maths au collége et au lycée sans avoir Vimpression de retourner en classe. « Ilplaira également & toutes celles et tous ceux qui souhaitent reprendre des notions de mathématiques oubliées et mieux comprendre en quoi elles inter- ferent dans de nombreux domaines de la vie courante « Iaidera enfin les étudiants scientifiques 4 retrouver les notions enfouies dans eur mémoire et dont ils ont besoin pour leur poursuite d'études. Surtout, si vous étes nombreux A prendre plaisir A le feuilleter, a le parcourir, 4 vous en inspirer tout en vous instruisant et en vous distrayant, nous aurons atteint notre objectif. Abscisse et ordonnée Le repérage des points dans un plan se fait a l'aide de deux nombres, 'abs- cisse et 'ordonnée. C’est ce que Yon nomme des coordonnées cartésiennes, du nom de René Descartes (¢ Descartes) qui les introduisit. On place deux axes D, et D,, faisant en général un angle droit entre eux, l'un horizon- tal et l'autre vertical. On place sur chacun des axes un vecteur servant d'unité, ce qui permet de les graduer; notons-les 1, et Lintersection de ces deux axes se nomme /'ori- gine et se note en général O. Pour chaque point M du plan on trace les deux paralléles aux axes qui les coupent en des points M, et M,. Les vecteurs OM, =x1, et OM, = yu, sont colinéaires respectivement 41, eta i, : x et y S‘appellent respectivement l'abscisse et Vordonnée de Mdans le repére (Q,,.14) (¢ Repére) Madans lerepére (0.7.75) Addition « Gargon, Faddition s'il vous plat ! » C’est bien la somme des coiits des consom- mations que l'on réclame alors. Mathématiquement, Paddition est lopération la plus simple, celle qui consiste & ajouter un nombre & un autre. Lintroduction des signes + pour addition et ~ pour la soustraction est due au mathémati- cien allemand Johannes Widman, @abord pour indiquer un bénéfice ou un débit puis ensuite pour les opérations arithmétiques. Laddition est commutative, c’est-i-dire que, a + b = b +a et plus générale- ment, pour additionner un grand nombre de termes, on peut le faire dans ordre quon veut. Elle est également associative ce qu’on exprime par a+b+ +40), De ces deux propriétés découle le fait que pour ajouter plus de trois termes, on peut les grouper de n'importe quelle facon et dans n’importe quel ordre et efffectuer les additions partielles dans Pordre que l'on veut. Par exemple pour calculer 2 + 5+ 3 +9 on peut calculer (2+ 5) +(3 +9) = 7+ 12= 19 oubien 2 +6 +3) +9=2+8)+9=10+9= 19, etc. Voici lalgorithme de l'addition que Pon apprend & P’cole primaire. On place les deux ou plusieurs nombres 4 additionner l'un au-dessus de autre, en alignant les unités, les dizaines. etc. On additionne alors les unités entre elles et on place le chiffre des unités en bas de la colonne. On ajoute alors le chifre des dizaines de ce résultat, que l'on nomme retenue, & tous les chiffres des dizaines des nombres a additionner. On opére alors comme pour les unités et Yon s'intéresse alors aux chiffres des centaines puis aux milliers s'il y ena jusqu’a épuisement des colonnes. Additionnons par exemple 274 et 585 ala | 4 s|3|s 8 9 Agnesi (Maria Gaetana) (1718-1799) Maria Gaetana Agnesi, la fois linguiste, humaniste et mathématicienne, issue dune riche famille milanaise, a démontré ds son plus jeune Age des facili- tés pour les langues, au point d’avoir écrit en latin, & Page de neuf ans, un discours pour le droit & Péducation des filles. Quelques années plus tard, elle parlait couramment italien, bien stir, mais aussi le latin, le grec, Phébreu, le francais, espagnol et Pallemand, et se montrait également trés intéressée par la philosophie de Newton. Poussée par son pére, professeur de mathématiques a Tuniversité de Bologne, elle se plonge dans l'étude des mathématiques et public en 1748 un ouvrage de géométrie analytique, Institutions analytiques, quelle a écrit comme un manuel scolaire pour ses fréres et qui sera traduit en frangais et en anglais. Elle remplace das lors & l'université son pére malade et obtient en 1749 une chaire 4 Bologne. Au décés de son pére en 1752, elle se consacre & des études religieuses et des ceuvres charitables. La sorciére d’Agnesi Cest dans son ouvrage de 1748 que cette femme éclectique a décrit la courbe représentée ici. Cette courbe, déji étudiée par Fermat en 1630, Ya été également par Guido Grandi en 1703, qui lui a donné le nom le nom de « versoria » ou « corde a virer de bord », (du latin versare, tourner). Agnesi, elle, change ce nom en. versiera », que le traducteur anglais confondra avec « avversiera » (sorciére, en ancien italien) et traduira en witch, nom qui reste désormais attaché a cette courbe, la « sorciére » d’Agnesi. On note N Tintersection de la droite OMet de la tangente en 4 au cercle et P intersection de la paralléle a (04) passant par Net de sa perpendiculaire passant par M, La sorciére d’Agnesi est le lieu des points P lorsque M décrit le cercle. La «sorcidre » d’Agnesi. Aire Dans le langage courant, le mot surface désigne aussi bien Vétendue que sa mesure. En mathématique. il ya lieu de distinguer les deux. Laire correspond a la deuxiéme acception. Des formules permettent de calculer Taire A de figures géométriques simples : ainsi celle d'un rectangle de cotés a et vaut A= a b, celle d'un cercle de rayon R est égale 4 A=7R° et celle d’un triangle de hauteur h et de base b vaut ae Lathéorie de lintégration a permis de calcu- ler Vaire de domaine englobés par des courbes simples (¢ Intégrale). Algébre Pour moi, c'est de Valgébre ! Ici algébre pourrait étre remplacé par hébreu ou chinois : le mot fait référence & une chose considérée comme incomprehensible, « Arithmétique ! Algébre ! Géométrie ! Trinité grandiose ! Triangle lumineux ! Celui qui ne vous a pas connues est un insensé ! » C’est en ces termes qu'Tsi- dore Ducasse, comte de Lautréamont, vantait importance des mathématiques dans les Champs de Maldoror. Lentrée de Palgébre dans le corpus mathématique fut l'objet d’un long chemi- nement. Le terme algébre provient du titre de louvrage Kitab al-jabr wal mugabalah du mathématicien arabe Al-Khwarizmi (788-850). Il signifiait la remise en place qui consistait dans une équation 4 changer de c@te les éléments négatifi afin de les rendre posit’ Lutilisation des chiffres arabes, ceux que nous employons toujours, devient courante & la Renaissance et les nombres négatifs, longtemps tabous car consi- dérés comme vide de sens, sont désormais d’usage courant. Parallélement Frangois Viéte (1540-1603) se met 4 résoudre des problémes avec des expres- sions littérales, c’est-A-dire qu’il remplace certaines données par des lettres et, selon ses dires, aboutit 4 « un art nouveau » qui lui permet de « résoudre les problémes par vingtaine ld ont les mathématiciens anciens ou contempo- rains ne les traitaient qu'un d un. » On nomme alors algébre la branche des mathématiques que fait naitre cette révolution dans les méthodes de résolu- tions de problémes numériques. Algorithme « Ces algorithmes qui nous gouvernent », «le pouvoir des algorithmes » = ce mot savant, longtemps inconnu du grand public, est mis depuis peu & toutes les sauces ! Les algorithmes paraissent pour certains tout puissants, vecteurs de progrés mais aussi inquiétants et d’un grand danger pour notre liberté. Que se cache-til derriére ce vocable ? Ce mot est l'un des rares dans le vocabulaire mathématique dont le nom provient d'un savant. En effet Mohammed Al-Khwarizmi, @origine perse, vivait & Bagdad & l'invitation d’Al-Mamoun, Ce calife éclairé avait transformé la bibliothéque de son pére Haroun al-Rachid en une Maison de la sagesse dans laquelle il conviait les plus grands lettrés de l’époque pour traduire les textes grecs mais aussi indiens donnant un essor scientifique spectaculaire en ce début de IX* siécle. Venu du Kharezm ou Chorasmie, en Asie centrale, Al-Khwarizmi rédigea des ouvrages qui eurent une importance fondamentale, tant par leur contenu que leur diffusion. Kitab al-Jabr wal mugabala donne une méthode explicite de la résolution des équations du second degré. Algoritmi de numero indorum (des chiffres indiens), n’est sans doute pas comme on le dit souvent seulement une traduction latine d’un ouvrage écrit en arabe aujourd'hui disparu. Il est, semble-til, une compilation médiévale ayant repris de nombreux éléments de Veeuvre d’Al-Khwarizmi. Cet ouvrage eut une grande importance dans l' Occi- dent médiéval et y favorisa introduction des chifires arabes et de la numéra- tion de position dorigine indienne. 10 Le premier mot du titre est une latinisation du patronyme du savant avec une connotation hellénisante au point que de nos jours, algorithme est une anagramme du terme logarithme. Aprés avoir simplement désigné les méthodes de calcul avec ses nouveaux symboles, algorithme désigne de nos jours une suite de régles explicites amenant & un résultat, Des exemples simples en sont les méthodes apprises & Técole pour effectuer une opération, par exemple une multiplication ou une division. A chaque étape, lalgorithme nous dit ce qui faut faire en fonction de la précédente. Dés PAntiquité, Euclide avait élaboré un algorithme pour déterminer le plus grand diviseur commun a deux nombres et Eratosthéne avait établi une méthode pour donner la liste des nombres premiers. En fit, faire la moyenne des devoirs de Pannée et classer les éléves en fonction de la note est un algorithme utilisé de longue date dans Penseignement Un programme informatique est une succession d’instructions donnant la marche a suivre & la machine en fonction des données et des résultats précé- dents. Ce sont done d’énormes algorithmes qui sont mis en place pour gérer pratiquement toutes les activités des entreprises et des administrations. Ce qui est nouveau est la face cachée traitée par ordinateur. Le concepteur fait en choix politique ; les algorithmes ne sont que des créations humaines, efficaces s'ils sont bien congus mais ni bons ni mauvais au sens moral du terme. Notons que certains théorémes, comme celui des quatre couleurs, ont éé démontrés grice un programme informatique et done sans l'intervention humaine directe sur une partie du raisonnement ; ceci pose une question sur Ja notion de démonstration. Angle Angle, terme bien mathématique dans notre imaginaire. Pourtant on le retrouve dans quelques expressions du langage courant comme « vu sous cet angle », «Tangle mort » ou celle plus vieillie « 4 Vangle de la rue ». Le mot angulus dont il provient signifiait coin et ce sens s'est retrouvé en frangais médiéval. La notion d’angle parait naturelle & chacun ; pourtant toute définition rigou- reuse est difficile 4 exprimer. Pour uw Furetiére, dans son célébre dictionnaire publié en 1690, « c'est l’inclinaison de deux lignes l'une vers Vautre, qui enfin se coupent & font langle au point deI’intersection. » Comme son nom Pindique, le triangle posséde trois angles l'un & chacun de ses sommets. Plus généralement un angle est la donnée de deux demi-droites issues d'un méme point du plan (ou de espace). Si les deux demi-droites sont perpendiculaires, on parle d’angle droit ; angle aigu s‘oppose & angle obtus, le premier étant inférieur 4 un angle droit, le second supérieur. Si les deux demi-droites sont dans le prolongement l'une de Pautre. elles définissent done d'une droite, on dit qu’elles définissent un angle plat. Les angles se mesurent en degrés et, par convention, langle plat mesure 180 degrés : 'angle droit étant sa moitié, il mesure 90 degrés. La mesure d'un angle peut varier de 0 4 180 degrés. La somme des angles d'un triangle faisant 180 degrés, les trois angles d'un triangle équilatéral mesurent chacun 60 degrés et la somme des deux angles opposés & Vangle droit d’un triangle rectangle mesure 90 degrés. Le systéme sexagésimal, c’est-i-dire en base 60, est toujours utilisé pour définir les divisions du degré : une minute d’angle correspond a la soixantigme partie de degré et une seconde dangle correspond a la soixanti¢me partie de la minute. C’est un héritage des systémes numérations des Sumériens et des Babyloniens ; on le retrouve pour la mesure du temps. En mathématiques, on préfére choisir comme unité la mesure de Pangle définis- sant sur un cercle un arc égal au rayon de ce cercle, d’ou le nom de radian (du latin radius signifiant rayon) de cette unité. Comme la circonférence d’un . . 3 cercle vaut 27, ceci correspond 4 360 degrés. Un radian vaut done = i 295779... degrés. Etant le quotient de deux longueurs, cette notion n'a pas 'unité au sens physique du terme. Dans un plan, on peut définir une orientation : en général, on choisit comme sens positif le sens opposé au mouvement des aiguilles d’une montre. La mesure d’un angle orienté varie donc de -180 degrés (ou ~n) a 180 degrés (ou 7), le signe dépendant du sens de rotation pour passer de la premiere demi-droite définissant Pangle & la seconde. Anneau, corps est surprenant de voir apparaitre des termes issus de la langue courante pour désigner des notions trés précises, trés abstraites et dont le lien avec le mot quiles désigne est totalement invisible. Sous le nom d'anneau et de corps. on désigne des structures algébriques qui généralisent les ensembles de nombres, les entiers pour le premier, les rationnels ou les réels pour le second. On doit cette nomenclature 4 des mathématiciens allemands & la fin du XIX sigcle lorsque les notions de structure ont pris une importance grandissante. Galois, avant eux, avait utilisé le mot de groupe pour nommer certains ensembles de permutations. En 1877, Richard Dedekind introduit la notion de corps et lui donne ce nom. C’est le niveau trés organisé de la structure qui 'améne & ce choix, par analogie & corps d’armée, Restant dans le méme esprit, David Hilbert propose le mot Ring; outre son sens @anneau, en allemand, ce mot peut désigner un cartel ou un groupe d’entreprises. Mais au juste, qu'est-ce qu'un anneau, qu’est-ce qu'un corps ? Lanneau est un ensemble 4 muni de deux opérations internes : une addition notée + et une multiplication notée soit x, soit plus simplement par un point ou par juxtaposition des deux éléments, comme dans cet article, Muni de addition, 4 posséde une structure de groupe. La multiplication est associa- tive, distributive par rapport & addition c’est-A-dire que pour tous a, b, c de cet ensemble (a + b) c= ac + be et a (b+ ¢) = ab +ac. De plus en plus, on impose existence d’un élément unité noté 1, ow | s'il n'y a pas Pambiguité, lément neutre pour la multiplication. On dit alors que Panneau est nnitaire. Lexemple le plus simple est 'ensemble Z des entiers positifS ou négatifS. La notion d’anneau joue désormais un grand réle en algébre, bien stir mais aussi en analyse, oit les anneaux de fonctions sont nombreux, et en géométrie algébrique. Un élément non nul d’un anneau unitaire ne posséde pas nécessairement inverse cest-a-dire d’élément qui multiplié par lui-méme donne 1,. Si tous les éléments non nuls en possédent un, on obtient un corps. De nos jours on impose souvent la commutativité de la multiplication ce qui exclut ensemble des quaternions d’Hamilton. Les corps sont trés utiles, en particulier dans la théorie de Galois qui permet des constructions de corps emboités pour permettre la résolution d’équations. Arithmétique Quel joli mot, un tantinet désuet, et dont la racine grecque nous rappelle ses debuts dans 'Antiquité, Les Grees se posaient déja de nombreux problémes de son ressort. Plus prés de nous, les logiciens Pont remis a Fhonneur comme TAutrichien Kurt Gédel qui s'est penché sur sa « consistance » dans un systeme axiomatique. De nos jours, on préfére parler de théorie des nombres. Alors que cette disci- pline semblait étre le socle de toute mathématique, les raisonnements font appel désormais & des théories trés élaborées tant du domaine de V'algébre abstraite B comme, par exemple les anneaux et leurs idéaux, que de Panalyse, en particu- lier la théorie des séries (sommes infinies). C’est en sommant de telles séries, souvent de variables complexes, qu’on peut trouver le nombre de parenthé- sages d'un produit ou la maniére de payer une somme donnée avec des pigces de deux euros et des billets de cing euros. Dans le sens commun, Varithmétique concerne les opérations sur les nombres entiers positif’ et leurs propriétés. De nombreux problémes concernant les nombres premiers, les équations & coefficients entiers, le comportement de suites récurrentes ont enrichi cette discipline. Certains énoncés trés simples niont toujours pas été démontrés comme la conjecture de Goldbach ou ont mis des sidcles 4 Pétre tel le théoréme de Fermat-Wiles (¢ Conjecture). Associatif, commutatif De méme qu’a deux entiers, V'addition fait correspondre un entier appelé somme, on nomme loi de composition interne, toute opération sur un ensemble qui associe A tout couple d’éléments, un troisiéme. Munissons un ensemble E d'une loi de composition interne notée ¢, on dit que la loi est associative si Pégalité ax(bec) =(aeb)ec est verifige quels que soient les éléments a, b et c considérés. Rares sont les lois non associatives utilisées couramment en mathématiques. On peut citer cependant la fonction puissance en remarquant que (2) 42”) : te premier vaut 64 et le second 256. On dit que la loi commutative si 'égalité aeb = bea est vérifiée quels que soient les éléments a, b et c considérés. De nombreuses lois courantes comme l'addi- tion ou la multiplication dans les ensembles de nombres sont commutatives, Enrevanche, la multiplication ne lest pas dans celui des matrices ou pour les quaternions d’Hamilton. Asymptote « Lascience est l'asymptote de la vérité. Elle approche sans cesse et ne touche jamais. » Cette phrase se retrouve dans le Shakespeare de Victor Hugo publié en 1864. Ce terme a clairement une consonance hellénique. Il provient effec~ tivement d’un mot grec asymptétos qui qualifie ce qui ne s‘affaisse pas. On y trouve lea privatif, syn qui signifie « avec » et la racine du verbe piptein, tomber. “ Méthode pratique Lorsqu’on se place dans un plan muni d’axes orthogonaux Ox et Oy, la recherche de lasymptote a une courbe paramétrée 1» M(r) =(x(r),y(r)) au voisinage y(t d'une branche infinie se fait en calculant la limite 2) lorsque f tend vers le (1) paramétre fy relatif 8 cette branche : « sicette limite vaut a, ily a « présomption d’asymptote » et il faut alors caleu- Jer Ja limite de_y(t)—ax(r) pour savoir s'il y a vraiment asymptote. + sion obtient 6, c'est que la droite d’équation y= ax +b est une asymptote : * sinon, on dit qu'il existe une branche parabolique ; « sicette limite est infinie alors que x tend vers ¢ quand f tend vers f,, alors la droite d’équation x = c est asymptote. Dans le cas particulier d'une courbe définie par une fonction y=_f(x) au voisinage du réel x, ily a une asymptote verticale d’équation si f(x) tend vers +0 quand.x tend vers x. C’est comme si on prenait x pour paramétre dans la méthode précédente. ta * >) pour x20. Alors LC) avi x tend vers 1 et f(x) —x vers -1 quand x tend vers +. Ily a donc asymptote, déquation y=x=1, Prenons en exemple la courbe d’équation x —> La droite d’équation y= x1 est asymptote a la courbe. Axe lu lettre Ha deus axeslde symétrie le point Mldans le repore (0, th ta droite d est Yaze de fa rotation qui améne Mour M' Différents axes Sinspirant du rdle fondamental de Vessieu, axis en latin, pour faire rouler un véhicule, les mathématiciens ont utilisé le terme axe pour désigner une droite jouant un role essentiel dans une figure géométrique. Celle-ci peut étre un axe de symétrie (# Symétrie), de rotation (¢ Rotation) ou tout simplement désigner les droites de références dans un repére (¢ Repére). Axiome, postulat En grec déja le mot axiéma désignait ce qui parait juste, convenable, Au troisiéme siécle avant notre ére, Euclide, complétement visionnaire, avait ainsi basé la géométrie sur des principes de bases partagés en deux catégo- ries. II considérait d’une part des notions spécifiques 4 la géométrie appelés « demandes » ou « postulats » comme « par deux points il passe une droite et une seule » et d’autre part ce qu’il nommait des « notions communes », valable 16 de maniére générale, comme « les choses égales & une méme troisiéme sont aussi égales entre elles » que le philosophe grec Proclus nommera « axiome », sept sigcles plus tard Dans son célébre dictionnaire Furetiére donne pour définition d’axiome « Principe qu’on a établi dans un art, ou science, qui est indubitable, ou tenu pour tel. C'est un axiome de la Géométrie, que des choses qui sont égales une troisiéme, sont égales entr'elles : que le tout est plus grand que la partie. » Au début du XIX¢ sigcle s‘établit peu & peu une distinction entre les mathé- matiques et la physique. Aussi, la premiére de ces deux disciplines ne pouvait plus se baser sur des évidences mais sur un systéme logique. On eut dés lors besoin de principes de bases sur lesquels on construit une théorie. Au tournant du XX¢ sigcle, des mathématiciens s'attachent & édifier les mathématiques sur des bases logiques et non pas en appui A lexpérience réelle. Ils définissent alors une théorie mathématique sur des assertions qu’on appelle axiomes et qui ne se démontrent pas. Lexemple le plus accessible nous est fourni par le mathématicien italien Giuseppe Peano qui a défini ainsi les entiers naturels. Il suppose existence du nombre 1 et de l'opération successeur (désignant le nombre qui suit) et énonce les cing axiomes suivants. (2) 1 est un nombre naturel. (2) L n'est le successeur d’aucun nombre naturel (3) Tout nombre entier naturel admet un successeur. (4) Des nombres naturels ayant le méme suecesseur sont égaux. (5) Siun ensemble de nombres naturels contient 1, et si chaque fois qu’il contient un nombre naturel, il contient son successeur, cet ensemble contient tous les nombres naturels. Ce dernier axiome est la base du raisonnement par récurrence "7 Babylone (Mathématiques babyloniennes) Trop forts, ces Babyloniens | Plusieurs milliers d’années avant J-C. ils faisaient dgja des mathématiques avancées. En Mésopotamie, région organisée autour de Babylone, des fouilles archéologiques ont permis de retrouver des tablettes en écriture cunéiforme témoignant des connaissances mathématiques des peuples mésopotamiens, Une grande partie de ces textes, retrouvés & Nippur, au sud de I'TIrak actuel, comporte de trés nombreux exercices plutét scolaires, ceux des éléves-scribes du début du second millénaire avant J.-C. Que savaient faire les Babyloniens ? « Ils savaient compter, dans un systéme de numération bien & eux, avéré depuis Ja fin du TIF millénaire avant JC. La tablette Plimpton 322 Leur systéme était on ne peut plus simple : deux chiffres, le « clou » ] verti- cal pour le 1 et le chevron € pour dix. Pour les nombres jusqu’ 59, on répétait ces signes autant de fois quril le fallait. Le systéme était, comme nous comptons les heures aujourd'hui, « de base soixante » : on comptait en soixantaines au lieu de compter en dizaines. Ainsi, treize s'écrivait-il, comme dans la colonne de droite de la tablette (qui indique les numéros des lignes), deuxiéme ligne avant a fin t iat 76) __- Me Ainsi, K est-il barycentre de { 4(1), B(2)} et L barycentre de {C(1), D(2)}. chacun affecté de la somme des masses, 3. Le barycentre final est M, milieu de [KL], mais on peut encore obtenir le méme point Men associant les points autrement : on groupe A(1) et C(1) pour obtenir le milieu E de [4C], de masse 2, puis BQ) et DQ) pour le milieu F de [BD], de masse 4 et le barycentre final, M toujours, est aussi barycentre de{E(2), F(4)} : les points E, M, F sont done alignés et, cerise sur le giteau, Mest aux deux tiers de [EF] & partir de E. Un probleme d'alignement. Bernoulli (Famille) Lenom de Bernoulli est attaché a de nombreux résultats et théorémes, en mathé- matiques comme en physique. II ne s‘agit pas toujours de la méme personne : la famille Bernoulli compte en effet huit mathématiciens renommeés (en gras sur le schéma) sur trois générations, du XVII au XVIII siécle. La famile Bemoul trois generations de mathématiciens Nicolas Ancien (1623-1708) Jacques | Nicolas Jean! (1654-1705) (1882-1716) (1667-1748) (1087-1759) (1695-1726) (1700-1782) _ (1740-1790) Jean Daniell Jacques i (1744-1807) (1751-1834) (1750-1789) Lirbre généalogique dela famille Bernoulli A Porigine, pas vraiment de tradition scientifique chez les Bernoulli, une famille de négociants en épices, de religion protestante, qui a fui Anvers pour échap- per aux persécutions religieuses des Espagnols vers 1567. Ils s‘établissent & Balle en 1622, of ils vont figurer parmi les notables. Les fiéres Jacques et Jean, quion a fini par appeler Jacques Let Jean I, fils de Nicolas dit « Ancien », vont pas ~ contre Pavis de leur pére ~ résisté & Vattrait des sciences mathématiques « Invito patre sidera verso » (Je suis dans les astres malgré mon pére) r’est- elle pas la devise de Jacques T? A Ini d’avoir lancé le nom de Bernoulli dans les énoncés mathématiques qui comptent = Equation différentielle de Bernoulli: de la forme y'= p(x)y+q(x). qu'il résout en 1696 et qui porte désormais son nom. = Inégalité de Bernoulli: si a>1 et x>-1 sont réels, alors ils véerifient (+x) >1+ax. = Lemniscate de Bernoulli (¢ Lemniscate) + Nombres de Bernoulli: ils apparaissent dans son livre Ars Conjectandi (publié en 1713, aprés sa mort, par son neveu Nicolas I) comme coefficients dans lexpression d'une somme de puissances. Voici, en gras, les premiers de ces nombres dans le calcul d'une somme de puissances d’exposant m O" #1" 42" 4..4(n-1)" = if ro -2(m*) o ,2(m41) wet _1(m+l) (msl) m+) 21 6 2) 30\ 4 } 42\ 6 } : oit les termes écrits entre parenthéses sont les coefficients binomiaux. Ainsi, les premiers nombres de Bernoulli, notés B, sont Aa-4.. 30°" 42 Cela donne par exemple, avec une somme de carrés (m= 2), By =1B, fall xm ten + Spirale de Bernoulli : Jacques Bernoulli a beaucoup étudié cette spirale logarithmique (¢ Spirale), admirant les propriétés de cette spira mirabilis au point d’en faire graver une sur sa tombe en la cathédrale de Bale, portant l'ins- cription « eadem muitata resurgo » (méme en changeant, je reste le méme).Ironie de ’histoire, le graveur a dessiné une spirale d’Archiméde ! spirae sur ta tombe de facques * Variable aléatoire de Bernoulli: c’est une Bell variable aléatoire qui ne prend que deux valeurs. O et 1. Alors les probabilités p que cette variable prenne la valeur 0 et q celle queelle prenne la valeur | sont telles que p +g = 1. P+243?+..4(n-1 Q La quadrisection du triangle vue par Jacques | Lune des premiéres contributions de Jacques I a été une étude de la quadrisection dutriangle, ou le partage d'un triangle par deux droites perpendiculaires en quatre figures de méme aire. II donne en 1687, a une époque oi la géomeétrie cartésienne n’était pas encore trés répandue, une k version algébrique de la solution, exploitant les aires et Yorthogona- lité. La valeur quil trouve pour CD exige la résolution d’une equation de degré 8, pas facile !y= AF est donné par tne équation du second degré. Tl choisit 'exemple d’un triangle de cétés AB = 495, BC = 490 et AC = 484, trouve une valeur appro- chée dex égale a 386, et termine par une construction géométrique, sans toutefois dire s'il y a plusieurs Lexemple donné par Jacques I aarti, Jean I, frére de Jacques, était parti vers la médecine, oii il a soutenu une thése au theme proche des mathématiques du mouvement musculaire, mais a bifurqué vers les mathématiques. Jamais & court d’idées, il traite avec succés certaines Equations différentielles et découvre les formules d’addition des fonctions trigonométriques et hyperboliques. II résout le probleme de la chainette posé en 1691 par son frére Jacques. utilisant ailleurs les idées de celui-ci. Leur proximité mathématique va vite se transformer en rivalité puis en franche hostilitg. Elu aux académies de Paris, Berlin, Londres, Saint-Pétersbourg et Bologne, il a été considéré comme « l’Archiméde de son époque », inscrip- tion qui figure @ailleurs sur sa tombe. Si Jacques n’a pas eu d’enfant mathématicien ou physicien, les trois fils de Jean sont allés dans cette voie. Laing, Nicolas II. le favori de son pére, entré 4 Yuni- versité de Bale a 13 ans, pour y étudier les mathématiques et le droit, fut P'assis- tant de celui-ci et rédigea & ce poste toute une correspondance lors de la querelle entre Newton et Leibniz (savoir lequel des deux est le véritable inventeur duu calcul intégral). Tout en élaborant des arguments & ce sujet, il apporta dans sa courte vie (il décéde & trente-et-un ans) d’importantes contributions au probléme des trajectoires dans les études de mouvement, de projectiles ou de plandtes, et travailla sur les courbes, les équations différentielles et dans le domaine des probabilités. Le second, Daniel I, tout en étudiant la philosophie, a appris, par son pére et son frére ainé les méthodes de calcul. Le pére ne lentendit pas de cette oreille, trouvant sans doute que les mathématiques ne rapportaient pas assez, il envoya Daniel étudier la médecine 4 Bile, Heidelberg puis Strasbourg, pour soutenir sa these 4 Bale & nouveau, tout en le laissant étudier ses propres théories sur énergie cinétique. Ceci permit au fils de faire sa thése de médecine sur la mécanique de la respiration. Les échanges avec son ainé étaient souvent fructueux, comme celui qui a donné naissance au célébre paradoxe de Saint-Pétersbourg (¢ Paradoxes), que Daniel I publia en 1738 dans les Commentaires de I'Académie des Sciences de cette ville. Hormis ses remarquables travaux sur 'hydrodynamique, Daniel I avait ses propres théories sur le lien entre probabilités et sciences humaines. I] laissa le nom de Bernoulli ‘ une forme particuliére de polynémes : les polynémes de Bernoulli. Notés B,(x). Ils sont définis par les trois conditions : + B,(s) + Larelation de récurrence : pour tout n, BY ,(x) =(n+1)B, (x). . . B,(t)dt=0. On les retrouve dans de nombreux problémes d’interpolation et des approxi- mations de fonctions. Ils sont liés aux nombres de Bernoulli par la relation B, =B, (0). Le frére cadet de Daniel I, Jean II, se distingua lui aussi en remportant pas moins de quatre fois le Prix de l Académie de Paris, sur des sujets touchant cessentiellement A la lumiére et au magnétisme. Quant A leur cousin, Nicolas I, s'il a peu publig, il a établi une riche corres- pondance avec des mathématiciens de son temps comme Montmort (avec qui ila échangé, en 1713 déja, sur le paradoxe de Saint Pétersbourg), Leibniz ou Euler (ot Ton trouve le calcul explicite de Ia somme infinie Les enfants de Jean II ont, comme leurs illustres prédécesseurs, commencé par étudier le droit avant de bifurquer vers les mathématiques. Jean IIT, déja titulaire d'une chaire & Académie de Berlin & 19 ans, a écrit de nombreux ouvrages d’astronomie, et ses contributions aux mathématiques ont porté essen- tellement sur les probabilités et la théorie des équations, mais on retiendra surtout de lui ses récits de voyage en Allemagne, qui ont valeur de documents historiques. Son frére Jacques II, candidat malheureux (@ cause du tirage au sort) a la chaire de physique de l'Université de Bale qu’avait occupé son oncle Daniel I, eut cependant un poste Saint-Pétersbourg, oit il épousa la petite-fille «Euler. Ses recherches les plus importantes ont touché la balistique, lélectri- cité et "hydrostatique. I] décéde malheureusement jeune au cours d'un bain dans la Neva, la riviére qui traverse Saint-Pétersbourg. On comprend maintenant pourquoi le nom de Bernoulli est si présent dans histoire des mathématiques. a” Besace «Le Fabricateur souverain Nous créa besaciers tous de la méme maniére, (...] Iifit pour nos défauts la poche de derriére, Etcelle de devant pour les défauts dautrui» «La Besace », de Jean de Ia Fontaine En mathématiques, la « besace » est une courbe ainsi nommée et imaginée par le mathématicien genevois Gabriel Cramer en 1750. Elle a en effet une forme de sac souple a double poche. Pour la décrire, on construit successivement : + un cercle passant par O, origine des axes et qui coupe celui des abscisses en et celui des ordonnées en B, + une droite passant par O, qui recoupe le cercle en un point C, Labestee + les points Met M' de méme abscisse que C et dont lordonnée a pour valeur absolue la longueur OC (HM= HM' = OC). Lorsque la droite (OC) pivote autour de O, C décrit le cercle, Met M' décrivent la « besace ». Si @,b) sont les coordonnées du centre du cercle, equation cartésienne de la besace s’écrit Bijection Une application f(¢ Fonction) d'un ensemble de départ £ vers un ensemble arrivée F est une bijection (ou une application bijective) si tout élément y de F est Fimage par f d'un unique élément x de E: on écrit y= f(x). On peut alors définir Vapplication réciproque de f. qui a tout y de F fait correspondre son unique antécédent x de E, ce qu’on note x= f(y). Lorsque l'on applique f aun élémentx de E puis f & son image f(x) on obtient x Iui-méme, En autres termes fo f est 'identité de Vensemble E, c’est-i-dire Vapplication qui a tout élément de £ fait correspondre lui-méme. De méme, si l'on applique J7 puis f ce que Fon note fo f~, on obtient Pidentité de Vensemble F. Dire que ensemble E est en bijection avec ensemble F c'est dire qu'il existe une bijection f qui améne tout élément x de E sur un élément y de F. Les ensembles E et F sont alors dits équipotents. Deux ensembles finis équipo- tents ont méme nombre d’éléments, quil soit fini ou infini (leur cardinal), Par exemple, dans un jardin public oft un certain nombre de promeneurs (ensemble E) vont et viennent et s'asseyent parfois sur les banes (ensemble F), on dit que E est en bijection avec F si sur chaque banc il y a exactement un promeneur. Cela signifie en particulier qu’il n'y a pas deux promeneurs assis sur le méme banc et que tous les banes sont occupés. Il y a exactement autant de bancs que de promeneurs. Etpour les ensembles infinis ? [ly a ceux qu'on dit dénombrables (¢ Dénombrable) qu’on peut mettre en bijection avec Yensemble NN des entiers naturels, et il y a les autres, non dénombrables, qu’on ne peut pas mettre en bijection avec NV. Tiens, tiens... ‘Le mathématicien allemand Georg Cantor (1845-1918) va, par un argument inattendu, construire une bijection entre le carré [0,1] et le segment [0.1]. Il associe pour cela au couple (x3) ducarré (x =0, 2,444... €t y= 0, ybyb, by...) Punique réel z de Vintervalle [0,1], = =0, a,baba,b;...0,6,- Ainsi done, ily a autant de points dans Pintervalle [0,1] que dans le carré de cdté 1, noté [0,1]. Binéme Le bindme de Newton est le titre d’un traité écrit par le professeur Moriarty, personage de fiction — éminent mathématicien, mais cependant surnommé par Sherlock Holmes « Le Napoléon du crime » — que Conan Doyle met en scéne dans deux de ses romans, « Le dernier probléme » (1893) et « La Vallée de la Peur » (1915). Quel est done, associé au nom de Newton, éminent savant, ce fameux « binéme », dont on trouve trace jusque dans la littérature policiére ? ‘Comme son origine latine (bis-nomen) le laisse entrevoir, un bindme est, en mathématiques, une somme de deux « monémes ». Un mondme est Iui-méme un terme de la forme ax", c’est-a-dire le produit d’un nombre réel a par une puissance du nombre x. Ainsi, avec a = 5,3 et n = 0, peut-on dire que 5,3 est un monéme. II en sera de méme de 3x° ou de —4x°. Un binéme s’écrira done généralement ax” +bx?. Ainsi, 2x° +1* ou 3x‘ —2° sont-ils des bindmes et, + b aussi (dans ce cas, n et p sont nuls). 29 Crest ce bindme-Li et ses puissances successives qui ont intéressé de nombreux mathématiciens. La premiére trace qu’on en trouve est chez Euclide (III siécle avant notre ére) : « Si on coupe un segment au hasard, le carré formé sur le segment entier est égal a ceux formés sur les deux segments du partage ajoutés 4d deux fois le rectangle construit sur les segments. » Le dessin parle de lui-méme a > : = ca are au grand care aso (ator > ob » arb Le carré de (a+). Euclide voulait dire que (a+b) =a? +b? +2ab Il faut dire qu’en mathématiques, pour simplifier Pécriture, on omet la plupart du temps le signe x : ainsi, 2ab signifie 2 x a x b. C’est ici la somme des aires des deux rectangles jaunes. La formule d’Euclide indique une fagon simple de calculer le carré d’une somme. D/autres mathématiciens ont par la suite tenté de développer des puissances d'une somme ou d'une difference d’exposant plus élevés : le cube chez Diophante (IV sigcle de notre ére), par exemple. Les mathématiciens arabes du Moyen- Age ont eux aussi essayé de simplifier les opérations algébriques, tant par des méthodes héritées des mathématiciens indiens que par eux-mémes. Au XIV* siécle de notre ére, le persan Al Kashi, dans son ouvrage La Clé de I'drithmétique, décrit une régle pour élever un binéme 4 rimporte quelle puissance entiére, ce que les calculateurs chinois de a méme époque savaient également faire, ayant méme publié des tables de calcul. Au XVésiécle, le moine allemand Michael Stifel donne, un siécle avant le mathématicien et philosophe frangais 30 Blaise Pascal les coefficients du développement de (a+5)" jusqu’a la A puissance 7, mais c’est Isaac Newton qui laissera son nom 4 la formule. iB | Redécouvrant en quelque sorte le calcul en cherchant celui d'une aire située sous une courbe, il va, en 1664, faire passer & la postérité le bindme de Newton Le secret de cette célébre formule ? Aprés (a +5)’, vient (a +5)’. Caleulons D (a+b) =(a+b)(a+b) =(a+b)(a° +2ab+6°) Finalement, (a +b)? =a? +2ab+0? et (a+b) =a° +3a°+3ab? +5, Cela peut paraitre compliqué, mais tout se simplifie si on s'intéresse aux H coefficients (a+b) =1, (a+b) =1a+1b. (a+b) (a+b) =1a° +3a°b+3ab* +15°, ja? +2ab +1 on peut facilement les disposer en triangle, le triangle de Pascal (+ Pascal) Tout se passe comme si on empilait des cubes « en triangle » en écrivant | sur N le premier, puis sur chaque cube la somme 7 des deux nombres au-dessus de lui = Cette fagon de présenter ces coefficients en triangle est un hommage 4 Blaise Pascal [i (1623-1662), qui en a fait un owvrage, Traité 1y2]t di triangle arithmétique. Il faut dire que cette Ppp méme disposition avait été étudiée plusieurs sigcles auparavant par d'autres mathémati- ciens, indiens, persans, arabes ou chinois, 1]s]"]"]s]a Elle permet d’étendre la formule aux puissances dexposants de plus en plus grands (a+b) =a + 4a®b+ 6a°b? +4ab? +b*, (a+b) =a° +Sa‘b+10a°b* +10a°b* + Sab‘ +5*. Cubes empiles. Voila la formule du bindme de Newton, dont les coefficients sont donnés X dans le triangle de Pascal. Elle permet non seulement de développer rapide- ‘ment une puissance de Ja somme (a + 5) mais aussi de la différence (a — 6) 3 Les puissances de cette dernigre s‘obtiennent en changeant b en son opposé, —b, done chaque terme oii 6 intervient avec un exposant impair sera précédé d'un signe « moins » 3a°b +3ab? —b3, (a—b)* Vous 'aurez compris. dans les deux cas, les coefficients du développement de (a +6)" sont ceux de la 7 ligne du triangle de Pascal, la somme des exposants des termes successif’ est toujours 7 et si, dans le cas de (a + 8), les signes des termes sont toujours des « + », ils alternent dans le cas de (a — 6), Ces conclusions figuraient stirement en bonne place dans le traité du Professeur Moriarty... Bissectrice On parle généralement de la bissectrice d’un couple de demi-droites ({Ox), [0))) : Cest Paxe de la symétrie qui transforme [Ox) en [Oy). C’est dire qu’on obtient une bissectrice par pliage : il suflit de plier la feuille en un pli passant par O et d’amener [Ox) sur [0}). On parle aussi de bissectrice d'un secteur angulaire ou d’un angle xOy : c'est celle du couple de demi-droites ([0x), [Oy)). Bissectrce de Vangle 30} S'il sagit des angles formés par deux droites (4B) et (CD) sécantes en O, il existe deux axes de symétrie (o°x) et (y’y) qui transforment l'une en l'autre. Ce sont les deux bissectrices de l'angle de ces droites, et comme — _ AOC +COB _ 180° 2 =90°, elles sont perpendiculaires Les deux bissectrices d'un couple de droites sécantes sont perpendiculaires. Au fait, comment construire une bissectrice, sans Vaide d'un rapporteur, comme faisaient les anciens géométres grecs, qui n’utilisaient que la régle et le compas ? Construire une bissectrice a la régle et au compas. Construire la bissectrice de langle xOy se fait en trois temps 1. On construit are de cercle bleu de centre O, coupant les deux cdtés de angle en 4 et B. 2. Ded comme centre, on trace 'are vert, de B comme centre, avec le méme rayon, tracer l'are rouge 3. Lintersection P de ces deux derniers ares donne un point P de la bissee- trice cherchée, quil suffira de tracer en le joignant & O. 3 M Ww < N On peut méme, si l'on est facétieux, construire une bissectrice avec des allumettes. Six allumettes suffisent, comme I'atteste cette disposition La bissectrice en allumettes, Deux ou trois choses qu'on sait des bissectrices ? = Tout point P de la bissectrice de l'angle xOy est a égale distance des deux cétés de cet angle. En effet, si P se projette orthogonalement en Q sur (04) et en R sur (OC), la symétrie d’axe (Ox) transforme Q en R, si bien que les distances PQ et PR sont égales. Inversement, si un point P est équidistant des droites (04) et (OC), il appartient a la bissectrice de langle AOC. «= Ainsi, Pensemble des points équidistants de deux droites concourantes est-il constitué par les deux bissectrices des quatre angles formés par ces deux droites + Iexiste dans un triangle trois bissectrices, correspondant & chacun des sommets. Elles passent toutes les trois par un méme point. En effet, deux entre elles, par exemple (4M) et (BN) se coupent en un point /4'intérieur du triangle, qui se projette orthogonalement en J. K, L sur les cétés [BC], [CA], [4B] dans cet ordre. D’aprés la propriété d’équidistante précédente, IK= IL et IJ= IL, done IJ= IK et Jest sur la bissectrice de angle BCA. De plus, le point J, équidistant de ses projetés J. K, L sur les cdtés du triangle, est le centre d'un cercle passant par ces trois points et tangent aux trois cdtés du triangle : on dit que c'est le cercle inscrit au triangle ABC. Ainsi, le point de concours des trois bissectrices des angles d’un triangle est-il le centre du cercle inscrit dans ce triangle. Py Les trois bissectrices dans un triangle concourent au centre du cerele inserit. Dans un triangle ABC, la bissectrice posséde une propriété trés particuliére pour chaque angle, elle partage le c6té opposé dans un rapport égal a celui des deux autres catés. Un résultatintéressant sur la bissectrice PB AB Cela se traduit, avec les notations du de L. > 7 ela se traduit, avec les notations du dessin, par: 5 =e En effet, sion méne par C la paralléle a la bissectrice (4P), qui coupe la droite (4B) en D, d’aprés le théoréme de Thales, 72-43. o, 4CD=CaP a PC AD a (alternes-internes) et ADC = BAP (correspondants), et comme BAP = CAP (bissectrice), ona ACD = ADC, ce qui rend le triangle ACD isocéle en A, si bien que AC = 4D, Ainsi, 2. 43 PC AC 3s Q Booléen Cet adjectif, employé également comme substantif, vient du nom de George Boole (1815-1864), mathématicien, logicien et philosophe anglais, concep- teur d'une nouvelle approche de la logique. Dans son ouvrage remarqué de 1854, paru en frangais sous le titre Les lois de la pensée, il envisage de traiter les propositions comme des entités algébriques, avec opérations et régles de calcul, faisant de la logique une branche des mathématiques. «= Algébre de Boole (ou algabre booléenne) + Lensemble P(E) des parties d’un ensemble muni des deux opérations «addition » (réunion des ensembles) et « multiplication » (intersection), est une telle algébre + La plus simple des algébres de Boole est binaire : elle ne contient que deux éléments, 0et 1. C'est Palgébre des valeurs de vérité (I pour « vrai », 0 pour « faux ») des propositions en logique, c’est aussi celle des circuits Alectriques (1 : le courant passe, 0 il ne passe pas), celle done qui commande 4 nos ordinateurs. C’est pourquoi les théories de George Boole trouvent aujourd hui de nombreuses applications en informatique. = Anneau de Boole (ou anneau booléen) : Vensemble P(E) muni des lois « diffé- rence symétrique », cest-i-dire la réunion privée de intersection, et 'inter- section des ensembles, est un anneau (¢ Anneau, ¢ Corps) pour ces lois. = Booléen : variable qui ne peut prendre que deux valeurs, 0 et 1. Tous sauf deux « Combien ai-je animaux domestiques si tous sauf deux sont des chiens, tous sauf deux sont des chats et tous sauf deux sont des perroquets ? » demande le professeur. ‘Sauriez-vous lui répondre ? yanborrod tm yo yey umn “tayo tm e massagord 97] = astiodgy Diaprés Martin Gardner Haha, ou I'éclair de la compréhension mathématique. Boulier Lun des plus anciens auxiliaires de calcul de l'histoire de hhumanité, le boulier, trouve sa place aujourd'hui encore, soit dans les petites classes pour l'apprentis- sage « visuel » du calcul, soit chez de nombreux commergants, en Asie surtout, oi il est méme parfois couplé, en un méme instrument, avec une calculatrice ! caaiaiaieianasiainnietente Prosessse rites SSSSSSSS: S3333 33 233SSFSE SSS SS Sst see Boutlier combine avec calculatrce. Les calculs courants se sont d’abord faits avec des cailloux (calculi en latin), J quion a ensuite ordonnés en colonnes : ce sont les abaques d jetons du monde gréco-romain de PAntiquité. Dans le monde asiatique, on utilise des abaques 4 boules oli des perles coulissent sur des tiges paralléles fixées 4 un cadre, qui prendront leur forme définitive de boulier entre le X¢ et le XIV* sigcle de notre ére. Faire une addition avec un soroban En noir, les perles déplacées. ees : +123 ae wd 5. ee ee ee se Fite Le boulier a revétu une telle importance en Asie dans les pratiques de calcul que Ie Ziusuan chinois, ensemble de techniques de caleul sur boulier, a ét& inscrit en 2013 — un bel honneur— sur la Liste représentative du patrimoine culturel immatériel de I'Unesco. Il existe plusieurs sortes de bouliers : le boulier chinois (suanpan), japonais (coroban) et russe (stchoty). Le boulier russe compte dix boules sur chaque tige, rangées de droite & gauche selon unités, dizaines, centaines, etc. comme sur les bouliers des écoles frangaises d’hier et parfois remis & ’honneur aujourd'hui, Pour les deux bouliers asiatiques. les tiges sont séparées en deux par une barre transversale : 5 boules en bas, qu'on manceuvre en les montant, 2 en haut qu’on manceuvre en les descendant pour le suanpan, 4 en bas, une en haut pour Ie soroban, Toutes ont le méme usage: de droite 4 gauche, unités, dizaines, centaines, ete., les perles du bas valant chacune une unité, celles du haut cing. On peut, au boulier, faire toutes les opérations arithmétiques. De nombreux concours ont lieu, opposant utilisateurs de calculatrices et de bouliers, et ce sont souvent les adroits manipulateurs de bouliers qui gagnent ! Bourbaki (Nicolas) Si le général frangais Charles-Denis Bourbaki ne faisait pas partie, comme le dit Guy de Maupassant dans sa nouvelle « Le lit 29 » « de ceux qui semblent mieux aimer les équations que les belles filles », son éponyme Nicolas Bourbaki, lui, aimait les équations. Derriére le nom de ce mathématicien imaginaire se cache un groupe de mathé- maticiens francophones constitué en 1934 sous limpulsion de Henri Cartan et André Weil. Leur ambition ? Ecrire un nouveau livre d’analyse pour dépous- siérer et remplacer Papproche classique. un livre qui définisse « pour vingt- cing ans le syllabus du calcul différentiel et intégral [...] en un traité aussi moderne que possible. » Sous des dehors de canular potache, le groupe prend Jenom de Bourbaki peut-étre & cause d’un théoréme de fantaisie qui portait le méme nom, et s’adjoint de nouveaux membres. Nombreux sont les mathéma- ticiens célébres, Claude Chevalley, Jean Delsarte, Jean Dieudonné, René de Possel, Szolem Mandelbrojt, Jean Leray, Paul Dubreil, Jean Coulomb (physi- cien) qui, en plus des deux initiateurs, ont fait partie des fondateurs du groupe. Tous ceuvrent avec sérieux et inventivité au renouveau des mathématiques. Le «style » Bourbaki s'impose en effet, fait de rigueur et de formalisme certes, mais sans fioritures et allant droit au but. Les retombées sur l'enseignement ne manquent pas : théorie des ensembles et sa symbolique, termes nouveaux, accent mis sur les structures et regards sur histoire des mathématiques. Le groupe se modéle et s'étofie au fil des années, le nom des membres d’aujourd’hui tant tenu secret. Le congrés se suecédent, et le célebre « Séminaire Bourbaki » se réunit toujours. Les nombreux fascicules des Eléments de Mathématiques parus entre 1935 et aujourd'hui ont littéralement « secoué » les mathématiques, image de cette « étincelle » figurant dans ce sonnet, composé par André Weil pour résumer les discussions du congrés de Changay en septembre 1937. 38 Sonnet de Chansay « Soit une multiplicité vectorielle, Un corps opére seul, abstrait, commutatif. Le dual reste loin, solitaire et plaintif, Cherchant l’isomorphie et la trouvant rebelle* Soudain bilinéaire a jailliI'étincelle** Doii nait Vopérateur deux fois distributif. Dans les réts du produit tous les vecteurs captifs Vont célébrer sans fin la structure plus belle. » * C'est de Isomorphie entre um espace vectoriel et son dual (¢ Dual) qu'il s'agit. Elle est «rebelle » car non naturelle (les mathématiciens disent « non canonique »). ** Létincelle en langage bourbakiste, désigne le produit vectoriel(¢ Vecteur/vectoriel ») distributif par rapport & Vaddition et & la multiplication par un scalaire, Ils ont su, dit le mathématicien Samuel Eilenberg, « arranger si bien le matériel que la plupart des preuves peuvent étre aisément complétées » et, qu’on aime ou non les Elements de Boubaki, ils ne laissent pas indifférents Bretzel Les mathématiques empruntent parfois le vocabulaire du quotidien, et, pourquoi pas celui de la patisserie ? Si la forme du tore (¢ Tore) est celle du « donut », il n’existe peut-étre pas de donuts a deux trous, mais des tores, si! On imagine facilement la forme du tore a deux trous, que les mathématiciens appellent « bretzel » (« pretzel » aux Etats-Unis). Tore a deux trous. Effectivement, quoi de mieux pour figurer ce tore spécial que cette spécialité alsacienne aux formes torsadées ? Le bretzel et le donut se sont ailleurs invités, le 4 octobre 2016, & la remise du prix Nobel de physique. Les lauréats David Thouless, Duncan Haldane et Michael Kosterlitz, ayant travaillé sur les « transitions de phases topologiques de la matiére », c'est avec ces deux viennoiseries que Thor Hans Hansson, membre du comité Nobel. a présenté la topologie, science des transforma- tions et des déformations de lespace. Bretze Le nombre de trous, a-t-il dit en substance, est un « invariant topologique » et est toujours un entier. Vous ne pouvez pas avoir la moitié ou les deux tiers un trou. La sphére est dailleurs le seul espace fermé en 3D dépourvu de trous. Ce résultat, s'il semble évident, a été démontré en 2002-2003 par le mathémati- cien russe Grigori Perelman, alors qu'il avait é8 conjecturé par Poincaré dés 1904. Ila fallu des années de recherche & de nombreux mathématiciens pour arriver A prouver cette fameuse conjecture de Poincaré. «Y aun bug » (prononcer beug), « Ga a buggé », « Pai buggé » : Vinformatique a empreint de son vocabulaire notre quotidien. « Bug » a, pour les informati- ciens, le sens d'une erreur dans un programme ou dans un cablage, générant des effets systéme inattendus Le mot signifie « insecte » en anglais et on attribue son premier usage & Grace Murray Hopper, une pionniére de ’informatique, en 1946, Suite & une erreur dans son ordinateur Mark Il, elle aurait incriminé un papillon de nuit coincé dans un circuit, Elle a @’ailleurs collé la bestiole sur son cahier de comptes-ren- dus, en mentionnant « C’est le premier cas réel de bug & avoir été rencontré ». En réalité, le mot « bug » pourrait dater des débuts du télégraphe, oft le « Vibroplex bug », avec un coléoptére gravé sur la machine, du fabricant Horace G. Martin, utilisé partir de 1905, éaitune version a clef du télégraphe électrique. Il figurait méme déja dans le Hawkin’s New Catechism of Electric de 1896 (« le terme bug est utilisé pour désigner tout probleme ou erreur dans Ie fonctionnement d'un appareil électrique. ») et en plus, l'inventeur Thomas Edison l'utilisait déja dans ses notes en 1870. 40 Calcul Le besoin de calculer est sans doute apparu au Néolithique, lorsque se sont créées des communautés villageoises. Pour échanger des denrées, il est devenu nécessaire de compter. Les premiers témoignages de calculs qui nous sont parvenus datent des Sumériens et des Babyloniens qui possédaient déja des connaissances surpre~ nantes, Dans l’Antiquité classique, la notation des nombres n'a pas permis algorithmes efficients pour effectuer les opérations élémentaires que sont addition et la multiplication. On effectuait couramment les calculs avec des abaques (ou bouliers) mais sans exactitude. Lintroduction de la numération de position et des chiffres arabes a permis de d’effectuer aisément des calculs simples, Le développement de lastronomie & la Renaissance, a rendu nécessaire des calculs sur des trés grands nombres. John Napier a introduit les logarithmes en 1614 avec une approche lige A la cinématique (¢ Logarithme). Henry Briggs en a vraiment compris Pintérét pour calculer plus rapidement puisqu’ils permettent de transformer les multiplications en additions et il a proposé au savant écossais introduction des logarithmes décimaux Parallélement, des savants ont cherché 4 construire des machines permet- tant de calculer mécaniquement. Ainsi Blaise Pascal construit la Pascaline et Leibniz sa machine arithmétique. Plus prés de nous Charles Babbage invente suecessivement plusieurs machines & calculer. La dernigre, congue en 1830. possédait des cartes perforées préfigurant ainsi l'ordinateur. C’est pour cette machine qu’Ada Lovelace, fille de Pécrivain anglais George Byron, a écrit le premier programme, c’est-a-dire un algorithme composé d'une suite d’ins- tructions destinées 4 étre exécutées par une machine. Les premiers ordinateurs, congus dans les années 1940 avaient pour premiére mission d'effectuer des calculs d’oit leur nom anglais de computer, terme construit sur le mot latin computare signifiant compter. Liarrivée des calcula- trices de poches a totalement modifié notre rapport au calcul de méme que celle des tableurs qui permettent d’innombrables calculs trés rapides. II ne faudrait pas cependant que ceci engendre une perte de dextérité en calcul mental car sinon, la moindre erreur de manipulation aurait des conséquences déplorables et conforterait lopinion de Victor Hugo « le calcul, c'est l'abime ». ¢ Addition, ¢ Calcul mental, ¢ Division, ¢ Multiplication 4 Calcul mental A Lépoque des calculatrices et des puissants outils informatiques, le calcul mental est plus que jamais important dans un monde oi ’information s'appuie de plus en plus sur des données chiffrées. Méme lors d'utilisation d’outils électroniques, savoir calculer vite permet d’éviter des erreurs, en particulier en ayant une idée approximative du résultat, Bien manier le calcul mental se base avant tout sur de 'entrainement mais aussi sur la connaissance d'un certain nombre d’astuces & savoir utiliser 4 bon escient et au bon moment. En voici quelques-unes. = Multiplier par 11 un nombre de deux chiffes en intercalant leur somme entre les deux (avec une retenue éventuelle) par exemple, 4311 =473. «= Calculer le carré d'un nombre se terminant par 5 : on multiplie les dizaines par le chiffre supérieur et on ajoute 25 & la fin: 45° = 2025 car 4x5=20. » Calculer le carré d'un autre nombre en utilisant 'égalité a? =(a+6)(a—b) +5 en cherchant un } petit tel que a+b soit facile & multiplier : 93? = 100x86+7? = 8649. Des méthodes plus complexes existent pour certains calculs plus compliqués mais ne sont utilisables que par des personnes ayant déja acquis une agilité esprit dans le domaine. Cantor (Georg) « Lessence méme des mathématiques, c'est leur liberté » disait Georg Cantor (1845-1918), mathématicien allemand né & Saint Pétersbourg connu pour avoir &té le pére de la théorie des ensembles, mais dont lempreinte mathématique a eu surtout une grande influence en théorie des nombres. Ta fallu au jeune Cantor, que son pére destinait 4 une carriére d’ingénieur, déja beaucoup le sens de la liberté pour s‘engager dans des études de mathé- matiques et finalement soutenir une thése en théorie des nombres. Il lui a fallu aussi une grande liberté d’esprit pour inventer, au détour d'une démonstra- tion d’analyse concernant la décomposition des fonctions en sommes infinies de fonctions trigonométriques (on dit des séries trigonométriques), ce qu’est exactement un nombre réel : la limite d'une suite de rationnels. Nous sommes en 1872 et personne jusqu’alors n’avait vu les réels ainsi ; Charles Méray avait développé une théorie analogue en 1869 et celle de Cantor s‘inspirait de celle de son professeur Weierstrass de 1863, mais qui avait jamais été publige. II fallait aussi se sentir libre pour faire émerger les réves les plus fous : imagi- ner qu'il existe plusieurs sortes ¢'infinis, celui, dit dénombrable des entiers naturels (on peut les énumérer, il y a un premier, un deuxiéme, etc.) et celui, dit non dénombrable, comme celui des nombres réels, dont Cantor démontre en 1873 lanon-dénombrabilité. Mieux que cela : Georg Cantor, mathématicien visionnaire, s'est donné la liberté de calculer avec cette multiplicité d'infinis. Crest a lui aussi qu'on doit /’hypothése du continu : entre le nombre d’éléments (on dit le cardinal) de ensemble des entiers naturels, noté traditionnellement N, et celui des nombres réels, noté R , il n'y aurait RIEN. C'est dire que tout ensemble la fois contenant N et contenu dans R , a, ou méme cardinal que N ‘ou méme cardinal que R. . La démonstration de cette hypothése figure d’ailleurs en premier dans la liste des vingt-trois problames qu’un autre mathématicien allemand, David Hilbert, proposa en 1900 4 la résolution des mathématiciens ‘du monde entier lors du Congrés international de Paris. Il s'est avéré par la suite quelle était indécidable : on ne peut la déduire, ni elle ni sa négation, du seul systéme des axiomes de la théorie des ensembles tels que définis par Cantor lui-méme. La liberté d'esprit de Georg Cantor lui permet de casser les codes et obtenir dés 1874 des résultats qui surprennent bien de ses collégues mathé- maticiens, dont certains, qui ne supportaient pas cette « hiérarchisation » des infinis, s’opposent farouchement a lui. Pensez ! Ila par exemple prouvé qu'il y avait autant de points dans un carré de cété 1 que sur le segment (0, 1] ! On dit ailleurs que les difficiles relations avec ses pairs ont amplifié chez Cantor les périodes de dépression dont il souffrait depuis 1884, et dont il ne s’est jamais remis, II reste de lui une ceuvre dont la portée mathématique et méme philo- sophique est considérable, ce qui fera dire a David Hilbert « Du paradis que Cantor a eréé pour nous, nul ne doit pouvoir nous chasser. » Le label Cantor Georg Cantor a laissé sa trace dans les mathématiques d’aujourd’hui et on en retiendra certaines de ses méthodes de démonstration et autres spectaculaires inventions, = Largument diagonal : un procédé frappant pour prouver que les réels ne sont pas dénombrables. Voici comment Cantor s'y est pris pour démontrer par exemple qu'une suite (dénombrable) de nombres x,, ne peut pas a elle seule contenir tous les nombres téels de l'intervalle [0, 1]. Imaginons ume telle suite dont les nombres seraient x= 0, 498356. x) = 0, 394251. y= 0, 128432, xy = 0, 231843... 5 = 0, 3457962, X= 0, 1254671... 0, 3518945... a On formera, dit Cantor, un nombre réel x dont on est str qu'il nest pas élément de la suite selon la régle suivante : la n#* décimale de x est 5 si la décimale correspondante de x, nest pas 5, et la w'*™* décimale de x est | si la décimale de méme rang de x, est 5. Le nombre ainsi defini est dans notre cas x = 0,5515551. qui, par sa construction, n'est égal a aucun des x, «= Les nombres transfinis : Cantor avait appelé a Vaide de la lettre hébraique N, Jenombre ’éléments (cardinal) de Fensemble N des entiers naturels et cest... tout naturellement... quil a noté \, le cardinal de ensemble B des réels puisque, selon Phypothése du continu, c’est le premier cardinal strictement plus grand que N. Ilaméme défini de véritables opérations arithmétiques sur ces nombres dits rransfinis, = Lensemble riadique : est un bel exemple d’ensemble non dénombrable construit par Cantor lui-méme. Du segment [0,1], on retire le tiers central ouvert, on réitére indéfiniment cette opération en retirant le tiers central de chacun des segments restants et on démontre que Pensemble obtenu, méme s'il nous semble n’étre que poussiére, n'est pas dénombrable. Cantor n’a pas fini de nous étonner ! ensemble triadique de Cantor. Cardinal Le cardinal d'un ensemble fini est le nombre de ses éléments. On note généra- Jement card(4) le cardinal de ensemble 4. = Panorama des propriétés du cardinal de deux ensembles finis 4 et B + Sid est inclus dans B(A cB), card(A) 0 et de centre O est l'ensemble des points M du plan situés & une distance R de O. Cette figure représentait pour les Anciens la perfection par sa régularité, tous les points sont équidistants du centre, il est symétrique par rapport a tout axe passant par le centre. Ce nombre utile au sage Les mesures du cercle ont amené @ introduire un nombre mythique, le nombre = (pi), rapport de la circonférence au diamétre, puisqu’en notant R le rayon (soit la moitié du diamétre) la circonférence mesure 278 et la surface xR’. Archiméde donne déja l'aire du cercle comme étant égale a celle d'un triangle rectangle ayant des cétés de rangle droit de longueurs respectives celle de la circonférence et celle du rayon. Il fournit une premiére approximation par l'encadrement 34 Be ae 4 Beibine aprrocimnation ain iznse tres Le calcul des décimales a fasciné un grand nombre de mathématiciens. Ceci nécessitait des méthodes trés élaborées avec d'immenses calculs. De nos jours on le connait avec plus d'un million de décimales. Un moyen mnémotechnique permet de retrouver les 30 premiéres décimales en comptant le nombre de lettres de chaque mot dans la phrase suivante : « Que jaime & faire connaitre ce nombre utile aux sages ! Inmortel Archiméde, artiste, ingénieur, qui de ton jugement peut priser la valeur? Pour moi ton probleme eut de sériex avantages ! » 46 Ce procédé existe évidemment dans d'autres langues comme langlais. « How I want a drink, alcoholic of course, after the heavy lectures involving quantum mechanics, and if the lectures were boring or tiring, then any odd thinking was on quartic equations again. » Les sangakus, tablettes votives trouvées dans les temples japonais du XVIIF au XIX* siécle, sont des énigmes géométriques, parfois diffi- ciles, mais a résoudre avec des connaissances dlémentaires, Beaucoup dentre elles sont faites de cercles, comme celle-ci, oit il s’agit de trouver le rapport entre le rayon R commun des quatre cercles intérieurs centrés au sommet d'un carré et le rayon r du petit cercle central On montre ici, grace au seul théoréme de Pythagore, que =147. Sangaku. Chaos La pensée scientifique qui prit corps & la Renaissance avec Galilée et Descartes s'est employée a rechercher la régularité dans les phénomenes physiques et, en paralléle, dans leur modélisation mathématique. A Ia fin du XIX? siéele, un autre regard se développe ; on s'intéresse aux fonctions discontinues 4 celles conti- nues mais dérivables nulle part. Vers 1900, Henri Poincaré met en évidence le fait que deux trés petites variations d'un systéme peuvent s’amplifier et rendre son évolution imprévisible. Ce phénoméne est étudié par le météoro- logue Edward Lorenz qui pose la question « un battement d’ailes d’un papil- Jon au Brésil peut-il déclencher une tornade au Texas? » d’ot le nom deffer papillon sous lequel on connait le phénoméne suivant lequel une petite cause peut engendrer de grands effets. Donnons Vexemple mathématique du doublement de Pangle. On considére un angle 6 connu a un dixiéme de degré prés, si on le double la précision n'est plus que de deux dixiémes de degré. Si on réitére lopération elle se monte quatre dixiémes de degré. Imaginons qu’on ait doublé 8 fois cet angle, l'erreur est de 0,128 soit environ 25 degrés, ce qui devient énorme. Doublons-le encore quatre fois et Perreur se monte a 400 degrés : on ne sait plus du tout ce qu'il vaut ! Depuis, des théories mathématiques ont vu le jour, étayées par des algorithmes informatiques puissants, qui ont montré le caractére imprévisible de certains phénoménes : deux siécles plus tt, Pierre-Simon Laplace (¢ Laplace) avait dgja pressenti lorsqu’il avait défini la notion de déterminisme. Chiffre, numération La distinction entre chiffre et nombre est analogue & celle qui différencie lettre et mot. De méme que les lettres sont les symboles pour noter les mots, les chiffres sont, dans notre systéme décimal de numération, ceux qui permettent décrire les nombres. Autant les nombres sont préexistants 4 Pécriture, autant les chiffres lui sont totalement liés. Les chiffres que nous utilisons sont apparus en Inde au VIF sigcle de notre ére mais ont été déformés au cours de l'histoire. Ce quiles distingue des symboles utilisés jusqu’alors, en particulier par les Romains, est qu’outre leur valeur, leur position dans la notation a un sens. Ainsi dans 637, le 7 désigne les unités, le 3 les dizaines et le 6 les centaines ce qui fait que 637 désigne le nombre dont la valeur est sept plus trois fois dix plus six fois cent soit celui qui se nomme en frangais six cent trente-sept. Cette numération dite de position permet ainsi d’avoir des algorithmes simples pour effectuer les opérations courantes : addition, multiplication et division, ce qui est trés loin d’étre le cas pour les numérations utilisées par les Grees ou les Romains dans ’Antiquité. La numération de position a été adoptée dans la plupart des pays, en général avec la notation occidentale. Au Proche Orient comme en Asie du Sud-est, la notation des chiffres peut varier tout en gardant le principe de numération de position. Occidental o 1 2 3 4 5 6 7 8 9 Anbecceont | - | 1[¥v[tr]zlo|[1|[vlala Persan/Ourdou * y ¥ 7 ¥ oO # v A s Hindi ° 2 3 ¥ ¥ & 6 ¢ 8 That ° o » o e « > o a ow * Zéxo Cinématique A la frontiére des maths et de la physique la cinématique est létude des mouve- ments sans se préoccuper de leurs causes. Concernant la cinématique du point, Je mobile est assimilé & un point : un mouvement se formalise par une fonction, souvent notée M, continue et méme dérivable, voire deux fois dérivable, ayant pour ensemble de départ un intervalle Jreprésentant le temps et 4 valeurs dans Ie plan ou espace euclidien. La trajectoire est l'ensemble des points M(?) lorsque r décrit intervalle J. c’est done ensemble des positions atteintes par 48 le mobile. La vitesse est la dérivée de la fonction M, en général notée comme IM “as . a le font les physiciens, a Vaccélération quant & elle est la dérivée seconde aM ar On parle de mouvement rectiligne lorsque la trajectoire est incluse dans une droite : il peut donc se décrire avec une seule coordonnée. On dit qu'un mouvement est uniforme, si sa vitesse scalaire est constante, c’est-a-dire que la distance parcourue & chaque instant est proportionnelle au temps écoulé. Comme Pavait remarqué le premier Galilée, et confirmé par les lois de Newton, un mobile soumis & aucune force effectue un mouvement rectiligne uniforme. Lorsque 'accélération est constante, comme pour la chute d’un corps dans le vide, on parle de mouvement uniformément accéléré Coefficient La multiplication est commutative c'est-A-dire que axb =bxa. Les nombres sont privés ici de toute référence a une expérience réelle ; pour chaque appli- cation pratique on remplace a et 6 par les valeurs que Pon veut représenter. Cette conception n'est apparue qu’avec une vision idéaliste des ensembles de nombres, transcendant toute application pratique. A la Renaissance, et bien aprés, on considérait un nombre représentant par exemple un prix, et on le multipliait par la quantité d’unités achetées. Le premier était le multiplicande, Cest-i-dire « devant étre multiplié » et le second le multiplicateur soit « celui qui multiplie ». Les réles des deux termes n’étaient pas considérés comme symétriques. Albert Girard appelait le multiplicande Pefficient et le multipli- cateur était le coefficient, « celui qui agit avec ». De nos jours, le terme de coefficients s‘utilise en statistiques oft la vision ancienne est encore prégnante. On se donne par exemple des notes a, b et ¢ quon affecte de coefficients suivant limportance que l'on veut donner & chacune par exemple a,, ,, a,. On obtient alors la moyenne coefficientée ated Fa a, +4, +4, par exemple connaitre le taux de redoublement moyen des éléves de seconde des lycées d’une académie. connaissant celui de chaque lycée : il faut faire la moyenne des taux de chaque établissement en les coefficientant par l'effectif de seconde de chaque lycée. . Ce type de moyenne est couramment utilisée. Veut-on, Ces moyennes ne sont qu'un cas particulier en dimension un des coefficients utilisés pour les barycentre (¢ Barycentre) : les coefficients sont alors des nombres qu’on applique & des vecteurs. 49 Combinatoire (Analyse) De combien de fagons peut-on ranger 10 livres sur une étagére, de combien de maniéres peut-on placer 8 personnes autour d'une table, choisir 3 éléves une classe en comportant 20, placer 8 enfants pour faire une ronde. Ce sont des sujets que traite la combinatoire. Depuis ’Antiquité, on se pose ce type de problémes ; on trouve des références chez Hipparque, au Moyen Age en Inde chez Bhaskara et chez Michael Stiefel 4 la Renaissance. Ce n'est cepen- dant qu’avec Pascal et Fermat, dans le cadre des balbutiements du calcul des probabilités, que l'on met en lumiére des résultats fondés, Le nombre de fagons dassoir p personnes lorsqu’on dispose de 1 chaises, en supposant nz p, est n(n-1)(n—2)...(n— p +1).Pours‘en convainere il suffit de voir que Fon a n choix pour placer la premigre, ilen reste n—1 d’assoir la seconde, ete. jusqu’a la p*** a qui il ne reste que 1 p +1 places vides. Cette nt quantité s‘appelle le nombre d’arrangements de p objets parmiin 4? =: : p)! (n x 2x1. ‘Supposons que l'on ne s‘intéresse qu’au choix des chaises occupées sans se préoccuper de savoir qui on y assoit. Pour chaque choix de p chaises, ily ap ! Lorsque n= p, on trouve n!=n(n—I fagons de placer les gens : ily a done C? {?)-4 — de choisir p) pt p\(n—p)! les p chaises occupées. C’est ce que l'on appelle le nombre de combinaisons dep éléments parmi n n Ces coefficients C? (notation frangaise traditionnelle) ou ( ) (notation inter- P. nationale) se retrouvent dans de nombreux calculs, en particulier dans le développement du binéme (a +b)". On retrouve rapidement ces nombres, —1 -1 appelées coefficients binomiaux, grace a la formule ( 7 ) -( 7 }( 7 } P) \p-l) Vp (EEE ees 1 a 641 ws 1 Bm & 6 1 a 35 38 M7 1 28 56 7 56 28 8 1 36 84 126 126 8 36 9 1 120 210 252 210 120 45 10 1 wer laneene 3S 5 50 Apres avoir aligné des 1 dans la premigre colonne et sur la diagonale, on obtient les autres termes par ligne successives en additionnant chaque fois, le terme immédiatement au-dessus & celui qui est immédiatement & la gauche de ce dernier. Par exemple, en gras sur le tableau, 15 = 10 + 5. Ce tableau est connu sous le nom de triangle de Pascal, du nom du célébre philosophe et savant, qui a rédigé le premier ouvrage sur ce theme. On le retrouve pourtant bien avant lui chez des mathématiciens chinois, indiens puis arabes. Compas «La régle, l’équerre, le compas, on en usera pour batir le monde, ou pour triompher des ennemis. » in Pilote de guerre, Antoine de Sai -Exupéry 1942, Accompagné de la régle, le compas est un instrument indispensable pour représenter & la main des figures géométriques. On est loin de l’étymologie qui le fait venir du verbe compasser signifiant mesurer avec ses pas. On P'utilise également pour reporter une longueur. pas @ point séches servant a reporter C'est tout un art de faire une belle représentation —_“*s stances. géométrique. Aussi, construire une figure a la régle et au compas a fasciné de nombreux géométres au point que certaines de ces constructions sont devenues légendaires (¢ Quadrature du cercle) Plus simplement, la régle et le compas permettent de tracer la bissectrice d'un angle, la parallele & une droite, le symétrique d'un point par rapport & un point ou une droite, le milieu d’un segment ou méme un angle droit. centre C, rayon a centre B rayon a Construction d'un triangle équilatéral de coté a. Pour tracer la bissectrice d'un angle, on plante la pointe du compas sur le sommet O, on détermine avec le compas deux segments égaux Od et OB sur chacune des demi-droites définissant langle étudié. En fixant le compas en puis B, on trace deux ares de cercles de méme rayon qui se coupent en C. La droite (AC) est alors la bissectrice de Pangle (04.08) : est aussi la média- trice et la médiane issues de 4 du triangle isocéle ABC. Complexes (nombres) En 1545 Jéréme Cardan publie un ouvrage dans lequel on trouve pour la premiére fois une formule donnant les solutions des équations du troisiéme degré. Pour certaines d’enttre elles, V'application de la formule faisait apparaitre expression JI qui se simplifiait par miracle, fournissant le bon résultat. Le mathématicien italien Rafaele Bombelli (1526-1573) propose alors de créer de nouveaux nombres, que l'on ne nomme pas encore nombres complexes, puis il définit dessus des régles pour les opérations d’addition et multiplica- tion : il nomme V1 « piu di meno » et son opposé « meno di meno » et définit, par exemple que « piu uia piu di meno fa piu di meno » (+1 multiplié par ¥=1. fait 1). Un nouvel ensemble de nombres était né ! Leur intérét croit tout au long du XVIII siécle en particulier lorsque D’Allembert, Vencyclopédiste mathématicien, énonce que toute équation polynémiale posséde des racines complexes : ce résultat connu sous le nom de Théoréme de D'Alembert-Gauss entraine que tout polynéme & coefficients réels (ou complexes) de degré n, se factorise en produit de n monémes de degré un. ‘Au début du XIX*sigcle, Jean-Robert Argand puis Carl Friedrich Gauss ont congu une représentation des nombres complexes par un plan, Le mathémati- cien allemand a défini les nombres complexes comme un couple de réels, d’oit Je nom de complexe, muni d'une addition et d’une multiplication. Les opérations En notant j=J/—T, un nombre complexe z s’écrit de maniére unique sous la forme 2=x+iy ott s‘appelle la partie réelle et y la partie imaginaire : les nombres réels sont Jes nombres complexes de partie imaginaire mulle. Laddition de deux complexes se fait terme 4 terme (xtiy)+(x +9" (x+2')+i(y+y') et la multiplication (x +iy)x(a! +i") =(ax' — yy") +i(ay'+ yx’). On verifie que ces opérations prolongent celles des réels en prenant ) Muni de ces deux opérations Fensemble © des nombres complexes forme un corps commutatif, en particulier, ces opérations sont associatives, commuta- tives et possédent pour élément neutre respectifs 0 et 1. Linverse d’un élément x-y non nul 2 =x-+iy est Lenombre Z =(x~iy) s‘appelle le conjugué de z et Ie réel positif |2|=y +) son module. Il représente la distance euclidienne & Vorigine. On remarque que La forme trigonométrique ‘Munissons le plan d’un repére orthonormé (0. ij). On associe au point M de coordonnées (x.y) le complex correspond a la longueur OMet, en notant @ la mesure de l’angle (i .OM). rt » appelé son affixe. Le module de z les coordonnées de OM sont x=|:|cos@ et y=|2|sin@. Ainsi 2 |(cos0 +i sin). Le nombre 0 s’appelle l'argument de z, La notation exponentielle est pratique car Pargument du produit de deux complexes est la somme de leurs arguments. Considérons deux nombres complexes 2 on obtient une expression simple de la puissance nigme d’un nombre complexe apa er Soit 2" =r" cos(n@)+ isin(n@). Pour r= 1 on obtient : (cos@ + isin®)" = cos(n®) + isin(n@). Cette formule connue sous le nom de formule de Moivre permet de donner des relations intéressantes ; ainsi, pour n= 2, 0n obtient cos(26) = cos’ @—sin’@ et sin(20) = 2sin® cos®. Le phan complexe ‘On munit le plan euclidien d'un repére orthonormé (0,i7.v) ; les coordonnées d'un point /du plan sont les nombres x,y tels que OM = xii +7. On associe au point Mle nombre complexe 2 =xr+ iy que 'on appelle I'affixe de M. On transforme ainsi la somme de vecteurs en addition de nombres complexes et plus généralement de nombreuses transformations géométriques reviennent des opérations sur des nombres. Ainsi, l'image du point M d'affixe z par la rotation de centre O et d’angle @ est le point N d'affixe ez. 3 Congruences Lorsqu’un événement se produit réguligrement tous les trois jours, on peut distinguer trois categories de jours : ceux oit se produit cet événement, leur veille et leur lendemain. Pour savoir si deux jours donnés correspondent & la méme catégorie, il suffit de voir s‘ils sont espacés d'un nombre de jours multi- ple de 3. De maniére plus générale, étant donné un entier strictement positif p, deux entiers (éventuellement négatifS) a et b sont congru modulo p si leur difference est un multiple de p, ou, si l'on préfére, si les restes de la division par p de ces deux nombres sont les mémes. Ainsi 6 et 27 sont congrus modulo 7, on écrit alors 6 = 27 (mod 7), On doit 4 Carl Friedrich Gauss (1777-1855) l'introduction du concept de congruence dans son célébre ouvrage Disquisitiones arithmeticae publié en 1801 alors qu’il n'est gé que de vingt-quatre ans, La nomenclature nous vient du savant allemand qui avait rédigé son ouvrage en latin, langue dans laquelle congrus signifie « conforme & » et modulus « mesure ». Ainsi, dire que «ast congru 4 b modulo p » signifie « a est conforme a b & la mesure dep. » On peut remarquer que si a=(p) et a’=5'(p) alors a+a'=b+b'(p) et axa’=bx6'(p). Identifions tous les entiers ayant le méme reste dans la division par p ; on obtient p ensembles puisque seuls p restes sont possibles. On peut alors définir sur ces ensembles une addition et une multiplication. Le petit théoréme de Fermat affirme que si p est un nombre premier et a un entier strictement positif, a” = a(p). Ainsi nul besoin de calcul pour prouver que 3‘ —3 est un multiple de 17. Conique © Ellipse, ¢ Hyperbole, ¢ Parabole Menechme puis Apollonius, savants grees de I’Anti- quité ont étudié les courbes obtemues en intersectant un c6ne circulaire avec un plan, Selon Pinclinai- son de ce plan, on obtient des courbes de trois ypes. Les unes sont fermées et ressemblent & des cercles aplatis, d'autres se composent de deux arcs et possédent deux asymptotes : position limite entre les deux, on trouve les paraboles. Apollonius, proba- Sections dw cdue par wu pan blement, les a ainsi nommées, sur des termes signi- fiant respectivement manque, excés et comparaison en regard avec une proprigté géométrique les différenciant les unes des autres. Ces noms, repris en Occident par Kepler et Huygens, font partie aussi du vocabulaire de la rhetorique. 34

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